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L'APÔTRE JEAN (1)
 
 
INTRODUCTION
 
 
            L'amour de Jésus a transformé Jean : d'abord surnommé Boanergès, fils de tonnerre, il se désigne ensuite dans son évangile comme « le disciple que Jésus aimait ».
            A la fin de sa vie, l'apôtre écrit avec émotion : « Ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé et que nos mains ont touché... nous vous l'annonçons » : la Parole éternelle, devenue chair, (dont, avec les autres apôtres, Jean avait « vu la gloire, une gloire comme d'un Fils unique de la part du Père) pleine de grâce et de vérité » (Jean 1 : 14).
             Dans son évangile et dans ses épîtres, il rend le témoignage : Jésus est le Fils de Dieu ; de plus il est « venu en chair », véritablement Dieu et véritablement homme en une même Personne. Après en avoir donné ce tableau incomparable, il conclut : « Ces choses sont écrites afin que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et qu'en croyant vous ayez la vie par son Nom ». Dans son épître, il ajoute : « ...afin que vous aussi vous ayez communion avec nous... et que votre joie soit complète » (1 Jean 1 : 1-4).
 
            Nous désirons présenter Jean dans ses premiers contacts avec Jésus ; puis, dans les trois expériences extraordinaires vécues avec Pierre et Jacques ; enfin, dans le témoignage rendu après la résurrection. Durant toute cette période s'est opérée la transformation de Boanergès en l'apôtre de l'amour.
            Puis, nous considérerons divers points importants de son évangile et de ses épîtres et nous soulignerons encore une fois comment Jean est devenu ce « disciple que Jésus aimait ».
            Dans les divers chapitres, certaines scènes et épisodes se recouvrent, considérés toutefois sous un angle un peu différent ; ces répétitions, presque inévitables, rendent plus vivant l'apôtre lui-même, et plus précieux le Seigneur qui l'aimait.
 
 
 
AVEC JESUS
 
            « Esaïe… a vu sa gloire et il a parlé de lui » (Jean 12 : 41). Sur le trône « haut et élevé », le jeune prophète - avait-il entre 18 et 20 ans ? - a vu la gloire du Seigneur (Es. 6 : 1-8). Les séraphins proclamaient sa sainteté ; la maison était remplie de fumée ; les fondements des seuils étaient ébranlés. Le jeune homme s'écrie : « Malheur à moi ! car je suis perdu ; car moi, je suis un homme aux lèvres impures ». Un des séraphins vole vers lui avec un charbon ardent pris sur l'autel ; il en touche sa bouche et lui dit : « Voici, ceci a touché tes lèvres ; et ton iniquité est ôtée ». Esaïe entend alors la voix du Seigneur : « Qui enverrai-je, et qui ira pour nous ? ». Il répond : « Me voici, envoie-moi ».
           Mais plus que la gloire de l'Eternel dans le temple, le prophète n'a-t-il pas discerné la gloire morale plus excellente encore de « l'homme de douleurs », du parfait Serviteur dont il a parlé tant de fois ? (Es. 50 : 4-7 ; 53…).
 
           Jean, l'apôtre, a vu bien plus encore (Jean 1 : 1-14). La Parole qui « était au commencement » (éternelle dans son existence) ; qui « était auprès de Dieu » (distincte dans sa personne) ; qui « était Dieu » (divine dans son essence), - cette Parole « devint chair et habita au milieu de nous ».
           Jean déclare : « Nous avons contemplé sa gloire, une gloire comme d'un fils unique de la part du Père » (v. 14). Sans doute, sur la montagne de la transfiguration, a-t-il vu la gloire du Messie et du Fils bien-aimé du Père. Mais tout au long du ministère du Seigneur Jésus sur la terre, il a été spectateur de sa gloire morale.
           Avec quelle émotion le vieil apôtre dira à la fin de sa vie : « Ce que nous avons entendu ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé et que nos mains ont touché, concernant la parole de la vie... nous vous l'annonçons, afin que vous aussi vous ayez communion avec nous... afin que votre joie soit complète » (1 Jean 1 : 1-4). La « vie » avait été manifestée ; elle était auprès du Père et elle nous a été manifestée, dit l'apôtre. Vie tout entière dans une Personne, le Fils, ayant la vie en lui-même, capable aussi de « vivifier ceux qu'il veut ». Cette vie éternelle, il la donne à quiconque se repent et le reçoit par la foi : « Celui qui entend ma parole, et qui croit celui qui m'a envoyé, a la vie éternelle et ne vient pas en jugement ; mais il est passé de la mort à la vie » (Jean 5 : 24).
           Tout en recherchant dans les Évangiles les passages qui nous parlent de l'apôtre lui-même, nous pourrons aussi et avant tout contempler quelques aspects de cette gloire morale du Seigneur Jésus qui brille à toutes leurs pages.
 
 
 
1. Les premiers contacts (Jean 1 : 35-40)
 
              L'apôtre Jean ne se nomme jamais dans son Évangile. C'est tantôt « l'autre disciple » ou tout à la fin « le disciple que Jésus aimait ». La plupart sont d'accord pour voir Jean lui-même dans l'un des deux disciples qui suivaient Jésus. André et lui étaient venus de loin parce que les besoins de leur coeur n'étaient pas satisfaits. Sans doute, avec ceux qui répondaient à l'appel de Jean-Baptiste, avaient-ils confessé leurs péchés et reçu le baptême de repentance.
           Jean le Baptiseur se tenait là « et regardant Jésus qui marchait, il dit : Voilà l'agneau de Dieu ! » (v. 35-36). Regarder (d'un regard pénétrant qui suit tous les détails) Jésus marcher, quel tableau ! A travers les évangiles, enseignés par l'Esprit de Dieu, nous pouvons tous faire de même. Que provoquera un tel regard ? Pierre l'a dit dans son épître : « Jésus Christ, lui que, sans l'avoir vu, vous aimez ; et croyant en lui, bien que maintenant vous ne le voyiez pas, vous vous réjouissez d'une joie ineffable et glorieuse » (1 Pierre 1 : 8).
           Jean-Baptiste lui-même ne voulait pas être « regardé » ; il n'était qu'une « voix » (v. 23). Mais de son coeur qui déborde jaillit cette expression : « Voilà l'agneau de Dieu ! ». Il avait proclamé Son oeuvre : Il ôte le péché du monde ; maintenant il souligne ce qu'Il est. Les deux disciples suivent Jésus. Celui-ci se retourne : il ne va pas manquer à s'occuper d'eux : « Que cherchez-vous ? » Ici, l'Agneau est l'objet de leur contemplation. Au chapitre 10 : 40, au même endroit où Jean avait baptisé, le Berger est le centre de rassemblement : « Il y aura un seul troupeau, un seul berger » (v. 16).
           La question de Jésus est bien propre à retenir notre attention. Que cherchons-nous dans la vie ? Quel est le désir de notre coeur, le but de notre activité ? Interpellés, ils répondent : « Où demeures-tu ? » (v. 38). Il leur dit : « Venez et voyez » (v. 39a). Premier contact avec le Seigneur : ils vont et voient où il demeure : « Ils demeurèrent auprès de lui ce jour-là ; c'était environ la dixième heure » (v. 39b). Pourquoi l'apôtre a-t-il noté cette dixième heure ? Il y a des conversions dont on peut rappeler le jour et l'heure où, pour la première fois, une âme a vraiment rencontré Jésus. D'autres sont progressives, « s'étalent » si l'on peut dire, sur un certain espace de temps ; tel l'aveugle de Bethsaïda sur les yeux duquel Jésus a dû par deux fois poser la main pour qu'il voie clairement. Quel souvenir pour les deux amis d'être demeurés « auprès de lui ce jour-là » !
           Jésus avait dit : « Venez et voyez ». Les yeux s'ouvrent, première vision du Sauveur. Après la résurrection, il dira : « Venez, mangez » (21 : 12). Pour la dernière fois dans cet évangile, ils sont avec le Seigneur. Ils vont être nourris de ce que lui-même a préparé ; alors, sans même y être invité, Jean suivra Celui auquel son coeur s'est tellement attaché, parce qu'il jouissait de Son amour.
           Mais le disciple n'a pas suivi immédiatement. Sans doute est-il présent à Cana (2 : 2), où il est témoin de la puissance de Jésus qui transforme l'eau en vin, et peut aussi changer un coeur : « A Cana de Galilée... il manifesta sa gloire ; et ses disciples crurent en lui » (2 : 11).
           Un peu plus tard, Jean est avec « l'Homme de Sichar » : il le voit, lassé du chemin, assis sur la fontaine. Avec ses compagnons il se rend à la ville pour acheter des vivres. Quand il revient, une femme de mauvaise vie, laissant sa cruche, s'en va justement à cette ville dire aux hommes : « Venez voir un homme qui m'a dit tout ce que j'ai fait » (4 : 29) ! Jean, comme ses compagnons, s'étonne. Comment Jésus a-t-il osé parler avec une telle femme – samaritaine de surcroît ? Ils le pressent de manger. Mais Il leur parle d'une moisson qui blanchit et doit être bientôt récoltée, afin d'assembler du fruit en vie éternelle. Jean lui-même, avec les disciples, sera envoyé moissonner, entrant ainsi dans le travail que d'autres ont préparé avant eux.
           « Levez les yeux » (4 : 35), dit Jésus ; vous serez de ceux qui moissonnent et vous vous réjouirez avec ceux qui ont semé. Mais Jean retourne à ses filets, ainsi que ses compagnons ; il faudra que Jésus aille en Galilée les chercher et les appeler (Marc 1 : 14 et 19). Il sait qu'ils ont besoin de Lui et qu'à son appel ils répondront sans hésiter.
 
 
2. L'appel
   
           « Après que Jean eut été livré, Jésus vint en Galilée » (Marc 1 : 14). Seul Luc 5 nous rapporte la pêche miraculeuse qui a tellement impressionné Simon Pierre. Lui et ses associés avaient travaillé toute la nuit sans rien prendre ; maintenant, « sur la parole de Jésus », Pierre lâche le filet ; ils enferment une grande quantité de poissons. Devant ce miracle qui révèle une présence divine, Simon prend conscience de ses péchés et se jette aux genoux de Jésus, disant : « Retire-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur » (v. 8). La frayeur l'a saisi, ainsi que ses compagnons. Jean est frappé par cette scène ; elle le prépare à l'appel qui va suivre.
           Marchant le long de la mer, Jésus voit Simon et André, puis un peu plus loin Jacques et Jean. Pierre jetait le filet dans la mer. Il sera plus particulièrement « pêcheur d'hommes ». Trois mille répondront à l'appel de l'évangile au premier jour de la descente du Saint Esprit ; un peu plus tard, cinq mille (Act. 2. 41 ; 4 : 4). Jean et son frère raccommodaient les filets. Le don de l'apôtre sera entre autres, de rapprocher les frères, de réparer ce qui a été gâté, d'insister sur l'amour entre eux, de venir lui-même, dans des temps difficiles, visiter un Gaïus ou la dame élue (3 Jean 13 ; 2 Jean 12). A l'appel de Jésus, avec Jacques ils laissent leur père dans la nacelle, et « ils le suivirent » (Marc 1 : 20). De Zébédée, il ne sera plus parlé. Mais l'esprit de famille transparaît chez Salomé, sa mère (comp. Matt. 27 : 56 avec Marc 15 : 40) ; elle souhaite, pour ses fils, la meilleure place (Matt. 20 : 21), que Jacques et Jean eux-mêmes revendiquent (Marc 10 : 37). Il faudra toute l'opération de la grâce pour les transformer.
           Désormais Jean accompagne Jésus pendant les quelque trois années de son ministère et devient spectateur : il voit, il entend, il contemple, il touche. La main de Jésus prend celle de la belle-mère de Simon et la guérit ; la même étreinte saisira Simon lui-même lorsqu'il enfonce dans la mer ou prendra la main de la fille de Jaïrus pour la ressusciter. Combien d'autres miracles cette main n'accomplira-t-elle pas, touchant le lépreux, l'aveugle, le sourd-muet (mais jamais un démoniaque)... jusqu'à ce qu'elle soit percée.
           Un autre tableau s'offre aux yeux du jeune disciple. De grand matin Jésus est sorti de la maison pour aller seul prier dans un lieu désert ; Jean, avec les autres, le trouve dans cette attitude (Marc 1 : 37) ; il assistera plus tard à sa prière solitaire, - exemple pour les disciples qui demandent alors : « Seigneur, enseigne-nous à prier » (Luc 11 : 1).
           Seul sur la montagne, Jésus « passa toute la nuit à prier Dieu » avant de choisir ses disciples (Luc 6 : 12). Le jour venu, « il appelle ceux qu'il voulait ; et ils vinrent à lui ; et il en établit douze pour être avec lui... » (Marc 3 : 14). Jusqu'à leur dernier moment de leur vie, Jean et Pierre se souviendront de l'exemple du Seigneur et insisteront auprès de leurs frères pour qu'ils persévèrent dans la prière avec vigilance.
           Là-haut, à l'écart, Jésus a choisi, « pour être avec lui », ceux qui vont le suivre de plus près, les douze. Plus tard, il les enverra prêcher et guérir (Luc 9 : 2) ; mais il faut d'abord qu'ils soient « avec lui ». A quelques-uns il va donner des surnoms, et chose étrange, Jacques et Jean reçoivent celui de Boanergès : « fils de tonnerre ». Nous en verrons plus loin la portée.
           Remarquons que le Seigneur Jésus a plus d'une fois prié en présence de ses disciples, leur donnant ainsi un modèle inoubliable. Mais jamais il n'a prié avec eux. D'ailleurs la Parole emploie deux verbes différents pour s'adresser à Dieu. Le premier est «  d'égal à égal ». C'est ainsi que Jésus priait son Père. L'autre exprime les demandes d'un inférieur à un supérieur. Ainsi prieront les siens. Dans le message que Marie doit transmettre aux disciples, Jésus dit : « Je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu », - non pas : Je monte vers notre Père et vers notre Dieu. Sans doute nous appelle-t-il ses frères, mais il est « premier- entre plusieurs frères » (Rom. 8 : 29), et jamais dans la Parole les siens ne l'appellent « mon ou notre Frère ».
 
 
3. Sur le chemin
   
             Que d'expériences personnelles Jean a faites depuis le bord du Jourdain, où avec André il a été seul avec le Seigneur : Cana, Sichar, la pêche miraculeuse, et quelques jours plus tard, l'appel personnel « au bord de la mer », confirmé ensuite « sur la montagne ». Combien d'autres en fera-t-il le long de la route où Jésus allait « de lieu en lieu, faisant du bien, et guérissant tous ceux que le diable avait asservis à sa puissance, car Dieu était avec lui » (Act. 10 : 38).
           Nous retiendrons les occasions où le Seigneur a cherché à faire comprendre à ses disciples les souffrances qui devaient être sa part.
           Après la déclaration de Pierre : « Tu es le Christ », Jésus « commença à les enseigner : Il faut que le Fils de l'homme souffre beaucoup, qu'il soit rejeté... qu'il soit mis à mort et qu'il ressuscite après trois jours » (Marc 8 : 31). Pas de réaction, même de Jean lui-même, sinon celle de Pierre qui cherche à détourner son Maître du chemin où il va dresser « sa face résolument pour aller à Jérusalem » (Luc 9 : 51). Mais Jésus se retourne et regarde ses disciples, petit troupeau qui devra lui aussi traverser la souffrance. Si Jésus écoutait Pierre, qu'adviendrait-il de ceux qui l'auront suivi ? Le Seigneur appelle la foule et leur précise : « Si quelqu'un veut venir après moi, qu'il renonce à lui-même, qu'il prenne sa croix et me suive » (Matt. 16 : 24). Il parle même de perdre « sa propre vie à cause de moi et de l'évangile » (Marc 8 : 35). Après six jours, resplendira la scène de la transfiguration : après les souffrances, la gloire.
           Un peu plus loin, traversant la Galilée, ne voulant pas que personne le sache, dans l'intimité Jésus enseigne les siens : « Le Fils de l'homme est livré entre les mains des hommes, et ils le feront mourir ; après avoir été mis à mort, il ressuscitera le troisième jour » (Marc 9 : 31). Les disciples, Jean inclus, ne comprennent pas ce discours. Mais entre eux, sur le chemin, ils se disputent pour savoir qui serait le plus grand !
           Enfin, en chemin, montant à Jérusalem, Jésus prend encore une fois les douze avec lui et leur dit les choses qui devaient lui arriver (Marc 10 : 32-34). A cette occasion, il donne beaucoup de détails et, pour la troisième fois, termine par la résurrection. La seule réaction de Jacques et Jean est de vouloir obtenir la meilleure place dans le royaume !
           Comme ceux d'Emmaüs, n'étaient-ils pas « lents de coeur à croire » ? Le fils de Zébédée en particulier, a encore beaucoup de choses à apprendre.
 
 
 
4. Boanergès (Marc 3 : 17)
   
             Les premiers contacts de Jean avec le Seigneur ont été heureux, mais la Parole ne cache pas que, comme chez tout croyant, la chair était encore en lui. La réalité du coeur est dévoilée ; il faut apprendre à se connaître pour que l'Esprit qu'il recevra avec les autres à la Pentecôte puisse opérer.
             Il a sans doute été bien troublé lorsque Jésus lui a donné son surnom : « fils de tonnerre ». Certes, ce n'était pas la première fois qu'un nom était changé. Dieu avait donné le nouveau nom « Abraham » à Abram, et à Jacob celui d' « Israël ». C'était un acte très positif, une promesse divine. Pour de tels serviteurs, il représentait la traduction d'un choix divin, d'une mission qui leur était confiée. Pour Simon s'appeler Céphas était un présage heureux ; le sens profond devait bientôt en apparaître. Mais « fils de tonnerre » ! Hélas, Jean a bien su montrer à travers l'évangile que ce surnom était justifié. Dans la marche avec le Seigneur, il a dû apprendre une très grande leçon d'humilité.
             Jean ne parlera pas des moments privilégiés avec Jésus, tels que la résurrection de la fille de Jaïrus, celle du fils de la veuve de Naïn, la transfiguration ; il laissera aux autres évangélistes le soin de les présenter. Il devient simplement le disciple que Jésus aime ; de ce qui le concerne, il ne mentionne presque rien.
             Jacob, brebis rétive, reconnaît à la fin de sa vie qu'à travers tous ses errements il y avait un Berger qui prenait soin de lui : « Dieu a été mon berger depuis que je suis jusqu'à ce jour » (Gen. 48 : 15). Jean va plus loin. Il est conscient de l'amour du Sauveur qui, à travers toutes ses faiblesses, fidèlement l'aimait. Et c'est ce qu'il traduit dans son évangile.
 
 
                        a. « Qui serait le plus grand ? »
   
             Comme nous l'avons vu, sur le chemin, traversant la Galilée, Jésus enseignait ses disciples et leur parlait de ses souffrances. Eux ne comprenaient pas ces paroles et craignaient de l'interroger (Marc 9 : 30-37). Jésus allait devant eux. Derrière lui, juste après que le Sauveur a parlé de la mort qui l'attendait, ils disputaient entre eux pour savoir qui serait le plus grand.
             Le Seigneur attend d'être dans la maison (mentionnée pour la dernière fois dans Marc) pour leur demander : « De quoi discutiez-vous en chemin ? » (v. 33). Les disciples gardent le silence, confus d'une dispute si éloignée de la pensée du Maître. Jésus laisse les consciences parler. Puis il s'assied, les appelle et simplement leur dit : « Si quelqu'un veut être le premier, il sera le dernier de tous et le serviteur de tous » (v. 35). Il place un petit enfant au milieu d'eux et, avec tact, leur donne une leçon d'humilité.
             Quelque temps après, Jacques et Jean viennent à lui pour demander la meilleure place dans la gloire à venir (Marc 10 : 35-41). En Matthieu 20 : 20-28, c'est leur mère qui présente la requête « avec ses fils » : « Ordonne que mes deux fils que voici s'asseyent, l'un à ta droite et l'un à ta gauche, dans ton royaume ». L'esprit de famille ressort : avoir la meilleure place sans se préoccuper des autres, alors que la croix se dresse devant l'esprit du Sauveur. Aussi celui-ci de répondre aux deux frères présents : « Vous ne savez pas ce que vous demandez. Pouvez-vous boire la coupe que moi je vais boire, ou être baptisé du baptême dont moi je serai baptisé ? » - Et ils lui disent : nous le pouvons !
             Depuis près de trois ans ils marchent avec le Seigneur. Que de choses il leur a enseigné, et voilà le résultat ! Si les dix sont « indignés » contre Jacques et Jean, n'est-ce pas que secrètement eux aussi convoitaient de bonnes places dans le royaume ? Et ces deux-là les devançaient ! Aussi Jésus ajoute-t-il : « Celui qui voudra devenir grand parmi vous sera votre serviteur ; et celui qui voudra devenir le premier parmi vous, qu'il soit votre esclave ». Il en avait donné l'exemple : devenu le Fils de l'homme, non « pour être servi, mais pour servir et pour donner sa vie en rançon pour un grand nombre » (Marc 10 : 45).
             La leçon n'a pas encore été apprise ! En Luc 22 : 24-27 vient à nouveau une contestation pour savoir lequel d'entre eux serait estimé le plus grand. Jésus institue la Cène, parle de son corps « donné pour vous », de son sang « versé pour vous » ; et à nouveau on se dispute pour savoir qui aura la prééminence. Aussi Jésus leur répond-il : Que le plus grand parmi vous soit comme le plus jeune, et celui qui conduit comme celui qui sert... Or moi, je suis au milieu de vous comme celui qui sert ». Ne peut-on pas rapprocher ce « Je suis » du « C'est moi » (« Moi, je suis » dans le texte original) à Gethsémané (Jean 18 : 5) qui met en relief la grandeur de sa Personne ? Dans sa grâce, Il s'était abaissé à être « au milieu de vous ». En quelle qualité l'était-il ? - « Comme celui qui sert ». Parfait serviteur jusqu'à ce que son oreille soit percée (Ex. 21 : 6), - serviteur à toujours.
 
 
                        b. Intolérant (Marc 9 : 38-40 ; Luc 9 : 49-50)
   
             A peine Jésus a-t-il donné l'exemple de l'humilité après que les disciples se sont disputés pour savoir qui serait le plus grand, que Jean lui répond : « Maître, nous avons vu quelqu'un qui chassait des démons en ton nom et qui ne nous suit pas ; nous le lui avons défendu, parce qu'il ne nous suit pas ». Luc ajoute : « Il ne te suit pas avec nous ». Seule parole de Jean dans l'évangile de Marc ! Autrefois Josué, jaloux pour Moïse, lui demandait d'empêcher Eldad et Médad de prophétiser dans le camp, parce qu'ils n'étaient « pas sortis vers la tente » (Nom. 11 : 26-29). A quoi Moïse répond : « Ah ! que plutôt tout le peuple de l'Eternel fût prophète ; que l'Eternel mît son Esprit sur eux ! ». Jean est animé ici du même esprit que Josué, et veut interdire à celui qui n'était pas « avec eux », de chasser les démons au nom de Jésus. Quelle est la réponse du Seigneur ? « Ne le lui défendez pas... car celui qui n'est pas contre nous est pour nous ». Jésus ne dit pas : Allez avec lui, - mais : Ne l'empêchez pas. Lorsque Paul en prison apprendra que quelques-uns prêchent le Christ par envie et par un esprit de parti, sa réaction sera : « Quoi donc ? - Toutefois, de toute manière, soit comme prétexte, soit en vérité, Christ est annoncé ; et en cela je me réjouis, et aussi je me réjouirai » (Phil. 1 : 15-18).
             La souveraineté de Dieu choisit et forme ses instruments. Dans la confusion actuelle, sa grâce opère malgré tout. On est reconnaissant de connaître le rassemblement au Nom du Seigneur, mais cela ne doit pas amener à ignorer les besoins tout autour de nous, et à regarder quelque peu de haut ceux dont Dieu se sert pour amener des âmes à Lui, en annonçant Christ.
 
 
                         c. Le feu du ciel (Luc 9 : 52-56)
    
             Jésus a dressé sa face résolument pour aller à Jérusalem. Luc nous présente ainsi ce voyage qui va s'étendre, non pas chronologiquement, mais moralement, dans tous les chapitres qui suivent. Il envoie des messagers pour lui préparer un logis dans un village de Samaritains ; ceux-ci ne le reçoivent pas « parce que Sa face est tournée vers Jérusalem » (v. 53). Jacques et Jean s'en indignent : « Seigneur, veux-tu que nous disions que le feu descende du ciel et les consume, comme aussi fit Élie ? » (v. 54). Quel zèle charnel pour le Maître ! A Sichar, ville des Samaritains, ils l'avaient vu user de grâce envers la femme pécheresse et tous les habitants du lieu. Pour la seconde fois, Jean arrive en Samarie ; parce qu'on refuse de loger son Maître, Jean veut, avec son frère, en imitant Élie, faire tomber sur eux le feu du ciel. N'avait-il rien appris de la grâce ? « Vous ne savez de quel esprit vous êtes animés », dit Jésus en les réprimandant sévèrement (v. 55). Le Sauveur est fatigué, mais aucun murmure ne sort de sa bouche ; simplement « ils s'en allèrent à un autre village », accomplissant la prophétie d'Esaïe : « Voici mon serviteur... il ne criera pas, et il n'élèvera pas sa voix... il ne brisera pas le roseau froissé » (Es. 42 : 1-3). Le village qui n'a pas voulu l'héberger a perdu l'occasion unique de recevoir le Sauveur du monde qui pour la dernière fois passait, montant à Jérusalem pour y donner sa vie.
             Boanergès sera transformé en l'apôtre de l'amour, mais avant cela, comme les autres, il s'endormira à Gethsémané puis s'enfuira loin de son Maître ! (Matt. 26 : 43, 56).
 
 
 
                                                  G. André – d'après la brochure : « L'apôtre Jean »
 
 (à suivre)