L'EPITRE A TITE (3)
1- Exhortations à donner aux frères et soeurs âgés (2 : 1-4a)
2- Exhortations à donner aux jeunes soeurs et frères (2 : 4b-8)
3- Exhortations à donner aux serviteurs (2 : 9-10)
4- La manifestation de la grâce divine : v. 11
2- Exhortations à donner aux jeunes soeurs et frères (2 : 4b-8)
3- Exhortations à donner aux serviteurs (2 : 9-10)
4- La manifestation de la grâce divine : v. 11
« Mais toi » : dès le début de ce chapitre, un contraste absolu est établi entre ce que les séducteurs enseignaient (1 : 11) et ce que Tite devait annoncer : « les choses qui conviennent au sain enseignement ». L'ordre, dans une assemblée locale, est lié à ce sain enseignement. Que nous sachions le rechercher et l'apprécier !
Le verbe « annoncer » peut aussi être traduit par « parler » ou « dire » ; donc Tite avait parfois à enseigner en public, et d'autres fois à « parler » dans un cadre privé, surtout lorsque l'enseignement était délicat : « L'amour n'agit pas avec inconvenance » (1 Cor. 13 : 5).
Cet enseignement, Tite devait le présenter à différentes catégories de personnes. Il devait commencer par les hommes âgés (traduit aussi ailleurs par « vieillards », « hommes d'âge mûr », « anciens »), dont l'influence est prépondérante. Mais ils sont peut-être cités en premier pour que Tite, plus jeune, ne les néglige pas. La grâce de Dieu est capable de combler le prétendu « fossé des générations » dans l'Eglise.
1.1 Les hommes âgés
- Ceux-ci devaient, avant toutes choses, êtres « sobres ». La sobriété s'acquiert par un esprit soumis à l'Esprit. Elle se démontre par un esprit qui ne se laisse pas enivrer par la passion et trouve de multiples domaines d'application, comme : les paroles (Eph. 5 : 4 ; Prov. 10 : 19), la boisson ou la nourriture. La sobriété nous concerne tous, comme le montre le verset 12 ; elle est également intimement liée au sain enseignement en 2 Timothée 4 : 3, 5.
- « Graves » ne veut pas dire austères et sans gaieté ! Ce mot parle plutôt de la dignité de l'âge mûr, qui produit le respect. La gravité se montre par une vie disciplinée et la maîtrise de soi. Elle dénote une absence de légèreté. Tite aussi devait être grave (v. 8), ainsi que les surveillants, les serviteurs et les femmes (1 Tim. 3 : 4, 8, 11) : en somme, nous tous !
- « Sages » : la sagesse (ou la pondération, la modération, le bon sens) accompagnera tout naturellement le caractère précédent. Ils sont remplis de cette sagesse que procure une vie d'expérience avec Dieu, mais aussi parce qu'ils savent, plus que d'autres, que le temps qu'ils ont encore à passer sur la terre est court.
On remarquera que :
- les jeunes femmes doivent être sages (v. 5)
- les jeunes hommes doivent êtres sobres (v. 6)
- les vieillards (et nous tous) à la fois sages et sobres (v. 2).
Dans l'original, la nuance entre les deux mots est légère. On peut en conclure que les jeunes filles sont plutôt exhortées à la modestie, et les jeunes hommes, à la maîtrise de soi.
- « Saints dans la foi, dans l'amour, dans la patience » : tout est lié. Il s'agit de la « santé » spirituelle et morale (1 : 9, 13). Ceci suppose la réalisation équilibrée des caractères précédents... Comme on l'a dit, cet équilibre se montrera si la foi ne devient pas de la superstition, si l'amour ne devient pas de la passion, si la patience ne devient pas de l'indifférence.
Des vies chrétiennes saines sont le résultat d'une saine doctrine. La patience se réalise dans l'attente du retour du Seigneur (Jac. 5 : 7) ; elle est d'ailleurs souvent liée dans la Parole à l'espérance. Elle sera aussi mise en évidence lorsque la vieillesse apportera ses infirmités, ses désenchantements et sa solitude croissante. Comme l'a dit quelqu'un : « C'est lorsque cette période de la vie est ainsi transformée, que l'Evangile brille de son plus bel éclat aux yeux des hommes ».
1.2 Les femmes âgées
Elles doivent rendre témoignage « dans toute leur manière d'être, comme il convient à de saintes femmes ». Une femme chrétienne d'âge mûr montre dans toute sa façon d'agir qu'elle reconnaît la sainteté de chaque aspect de la vie d'un enfant de Dieu. Les domaines sont donc étendus. Trois exemples sont évoqués ici :
- Eviter la « médisance » ; ce mot, dans l'original, a la même racine que ce qui vient du diable : disperser, désunir. Souvenons-nous toujours qu'elle est immédiatement associée au meurtre en Lévitique 19 : 16. Ainsi, au lieu de détruire par quelque médisance, qu'elles construisent par un bon enseignement
- Elles ne doivent pas faire un usage immodéré de vin ; le mot « asservi » a un sens plus fort que celui d'être « adonné » au vin, ce qui en soi est déjà très grave. Il y a, en effet, l'idée d'être réduit en esclavage de façon permanente. Il s'agit de l'état ultime de dépendance, semblable à celui des drogués.
- Elles ont à enseigner « de bonnes choses ». Le verbe original, traduit ici par « enseigner », est unique dans le Nouveau Testament : il signifie non seulement « expliquer », mais aussi « montrer » et même « démontrer » ces bonnes choses. De cet enseignement, il leur est indiqué :
* la raison : cela « convient à de saintes femmes » (Eph. 5 : 3)
* le but et la manière : « afin qu'elles instruisent » ; ce verbe signifie : donner et imprimer par la volonté, des conseils, des répréhensions, des principes de conduite...
* les bénéficiaires : « les jeunes femmes ». « L'amour n'agit pas avec inconvenance » (1 Cor. 13 : 5) : ce n'était pas un jeune frère comme Tite qui devait enseigner les jeunes femmes ; il pouvait le faire à l'égard des jeunes hommes (v. 6) ; mais c'est aux femmes âgées d'accomplir ce service à l'égard des jeunes femmes, telle Naomi envers Ruth. Inversement, selon 1 Timothée 2 : 12, leur enseignement ne doit pas être public ou officiel, dans l'église, mais dans les maisons.
2.1 Les jeunes femmes
L'enseignement leur était donné pour accomplir sept choses :
- « Aimer leurs maris ». C'est la seule fois que cela leur est demandé dans l'Ecriture, sans doute parce qu'elles ont une disposition plus naturelle que les hommes à montrer leur amour (Eph. 5 : 22-33). Mais les maux de la société moderne montrent combien est vitale aujourd'hui la nécessité d'épouses et de mères affectueuses.
- « Aimer leurs enfants ». Remarquons l'ordre normal des choses : d'abord leur mari, ensuite leurs enfants... Souvenons-nous du contre-exemple de Rebecca. Est-il besoin de rappeler « qu'aimer son enfant », ce n'est pas lui passer ses caprices ? (Prov. 13 : 24 ; 1 Rois 1 : 6).
- « Etre sages » : ce mot, qui est aussi rendu aux versets 6 et 12 par « sobriété », contient l'idée de retenue, d'une sage modération et de maîtrise de soi.
- Etre « pures » : cette pureté morale se manifestera dans le couple (fidélité) et dans la famille ; ce sera une pureté en esprit, de coeur et, par voie de conséquence, dans les paroles et les gestes.
- Etre « occupées des soins de la maison ». Cette expression décrit l'épouse active, dont les efforts contribuent au bonheur de son mari et de ses enfants. Cela nous conduit à faire plusieurs remarques d'ordre pratique :
* « occupées » ne signifie pas qu'elles doivent en être constamment préoccupées, comme Marthe l'était (Luc 10 : 38-42). La tenue d'une maison ne doit pas devenir un esclavage...
* leur maison est leur domaine assigné, elles doivent la « gouverner » (1 Tim. 5 : 14), elles en sont « l'âme » : Proverbes 31 : 15 nous le dit, mais le reste de ce chapitre nous montre aussi que ce n'est pas leur domaine exclusif.
* lorsqu'elles ont des enfants, leur responsabilité est de les élever : c'est leur première « bonne oeuvre » (1 Tim. 5 : 10).
L'occupation aux soins de la maison comporte des aspects divers suivant l'époque, le pays ou la condition du mari : nécessités financières ou professionnelles, possibilités particulières de travail à temps partiel. A ce sujet, le travail qu'une femme chrétienne mariée effectue pourrait s'apprécier d'après les critères suivants :
* A-t-il vraiment pour effet le bien-être affectif et spirituel de sa famille ?
* Est-il le fruit d'une recherche de ses propres aspirations : niveau de vie proche du luxe, souci d'indépendance... ?
- Etre « bonnes ». Elles ne tiennent pas leur maison avec une main de fer, mais pratiquent la « loi de la bonté » (Prov. 31 : 26).
- Etre « soumises à leurs propres maris ». Principe simple mais essentiel aux yeux de Dieu, et souvent répété dans le Nouveau Testament (1 Pier. 3 : 1 ; 1 Cor. 14 : 3 ; Eph. 5 : 22 ; Col. 3 : 18 ; 1 Tim. 2 : 11).
Après cette dernière injonction, la raison est aussitôt donnée : « afin que la parole de Dieu ne soit pas blasphémée. C'est aussi le but « minimum » du témoignage chrétien ! Si le mari est incroyant, il ne faut pas que l'attitude de sa femme l'incite à rejeter le blâme sur l'Evangile.
Le monde juge le christianisme non pas sur ses doctrines, mais par les effets qu'il produit dans notre vie.
2.2 Les jeunes hommes
Tite devait « exhorter » les jeunes hommes, verbe qui n'est pas utilisé pour les frères âgés. Paul confie à Tite une seule exhortation, à transmettre à ces jeunes : être « sobres », modérés, c'est-à-dire ne pas céder à leur impulsivité, si naturelle à leur âge, à être tempérant, à mener une vie équilibrée...
Compte tenu de son âge, Tite se devait d'être leur « modèle ». Quel enseignement que celui-là, combien plus précieux et souvent plus « parlant » que celui qui n'est que parlé ! Etant sobre dans sa conduite et son enseignement – seule exhortation mentionnée ici – il peut alors enseigner cette sobriété qu'il mettait lui-même en pratique.
Les auditeurs pardonneront volontiers à un prédicateur s'il n'est pas éloquent ou grandement cultivé ; ils lui pardonneront aussi le manque d'attrait de sa personnalité, ou encore son manque de sagesse ; mais ils ne lui pardonneront jamais le fossé entre ce qu'il dit et ce qu'il fait ! (Matt. 23 : 3).
Il devait montrer « de bonnes (littéralement « belles ») oeuvres », en particulier un enseignement :
- exempt de doctrines douteuses, c'est-à-dire fondé sur la seule Parole, et donc pur, fidèle
- « grave » (ou digne, honorable) : la Parole n'a pas besoin d'être rendue attrayante, mais elle est présentée avec simplicité. Ne cherchons pas quelque effet spécial, dû à l'imagination, à une curiosité déplacée ou encore à de la légèreté. Dans sa manière et dans son ton, l'enseignement est « digne » de la nature du message sacré. Veillons à cela aussi vis-à-vis des incrédules : prenons exemple sur Paul, parlant sans détour à la conscience d'un Félix, au point que ce dernier en est « effrayé » (Act. 24 : 25).
- « de parole saine qu'on ne peut condamner » : il s'agit d'une parole qui est « inattaquable », irréprochable sur le fond. Quant à celui qui la présente, il est clair qu'il ne cherche pas à se mettre lui-même en relief... en présence d'ennemis du peuple de Dieu, en particulier.
Puis fidèle à son habitude, Paul donne aussitôt la raison de cette exhortation à Tite : « afin que celui qui s'oppose » (l'un des adversaires, si nombreux en Crète) « ait honte » (ou « soit confus »), « n'ayant rien de mauvais » (ou de « mal », de « vil ») « à dire de nous ». Paul s'identifie ici avec Tite, car toute défaillance de Tite compromettrait Paul. Quand un frère qui enseigne manque à son devoir, sa faiblesse jette une ombre sur l'ensemble de ses frères dans la foi...
Contemplons ce qui est dit du Seigneur dans l'évangile : « Les pharisiens apprirent qu'il avait fermé la bouche aux sadducéens, et ils s'assemblèrent... Et personne ne pouvait lui répondre un mot. Depuis ce jour-là, personne n'osa plus l'interroger » (Matt. 22 : 34, 46).
A leur tour, les esclaves devaient être exhortés :
- « à être soumis à leurs propres maîtres » (le mot « maître », en grec « despotès », a donné le mot « despote », c'est-à-dire un homme qui a un droit de propriété absolu sur son esclave). La soumission n'est pas la simple obéissance à des ordres, mais sous-entend ici l'idée d'un respect à une autorité supérieure. La soumission est un état intérieur qui se montre par l'obéissance.
Nous ne sommes pas placés aujourd'hui dans la condition d'esclaves, mais ces exhortations sont valables pour toute personne placée sous l'autorité d'un autre. Dans le monde du travail, soyons soumis à ceux qui nous dirigent... dans la limite de la soumission due, avant tout, à Dieu.
Ne soyons pas non plus soumis à notre propre volonté ! Christ, lui-même, a soumis la sienne à celle du Père : « Toutefois, que ce ne soit pas ma volonté mais la tienne qui soit faite » (Luc 22 : 42).
- « à leur complaire en toutes choses » : c'est là le caractère distinctif que le christianisme introduit dans l'attitude d'un esclave. Cherchons à leur « donner satisfaction », soyons des chrétiens agréables ; le mot grec, traduit par « complaire » est le même que celui qui est rendu par « agréable » en 2 Cor. 5 : 9. Montrons à nos « chefs » terrestres toute prévenance, tout notre intérêt, en particulier au sujet de leur âme... A l'école de Dieu, on apprend à ne pas se complaire à soi-même.
- à ne pas contredire. Application pratique : n'est-ce pas une attitude courante, de « contredire » les autorités ? Esclaves de Christ, montrons, au contraire, que notre « grand gain » n'est pas un accroissement de salaire et d'autres avantages, mais « la piété avec le contentement » (1 Tim. 6 : 6).
- à ne « rien détourner », contrairement à un Onésime avant sa conversion (Phm. 18). Exhortons-nous, dans ce domaine, à « marcher soigneusement » dans les plus petits détails.
- à « montrer toute bonne (ou une parfaite) fidélité ». Ceci se rattache directement à l'exhortation précédente. Le chrétien se doit d'être un homme de toute confiance.
« Mais, dira peut-être quelqu'un, je n'ai pas de chef, de maître, de patron au-dessus de moi : ces versets ne me concernent donc pas ! » Relisons les premiers mots de cette épître : « Paul, esclave de Dieu... » et toutes ces exhortations en pensant à notre divin Maître.
La conséquence d'un tel enseignement (s'il est suivi) est enfin donnée : fondamentalement, leur motivation n'est pas seulement de plaire à leurs maîtres ; mais, avant tout, c'est « afin qu'ils ornent en toutes choses l'enseignement qui est de notre Dieu sauveur ». Ici, c'est l'aspect positif de la pensée exprimée négativement à la fin du verset 5 et en 1 Timothée 6 : 1. Souvenons-nous que cette promesse est faite à des gens qui étaient considérés, dans la majorité des cas, comme les parias de la société.
Quelle perle se cache dans cette expression ! Orner, c'est illustrer, mettre en évidence, faire honneur. Lorsqu'elle vit la tenue des serviteurs de Salomon, la reine de Sheba n'eut « plus d'esprit en elle » (1 Rois 10 : 5). Leur tenue confirmait l'enseignement qu'ils avaient reçu.
Soyons de ceux qui montrent toujours plus, dans leur vie, quel grand « Dieu sauveur » ils servent ! Nous ferons alors l'expérience que nos paroles auront du poids et un impact nouveau sur les incrédules.
Nous voyons là la gloire de l'Evangile. Il peut transformer la vie à tel point que c'est à des esclaves qu'il est demandé d'orner l'enseignement divin ! Quelle pensée encourageante !
Les versets suivants constituent un des points forts de cette lettre. En effet, existe-t-il, pour nous, quelque chose de plus grand que la grâce de Dieu ? Elle commence à « apporter », puis elle « enseigne » ; elle donne, puis elle produit.
- Comment se manifeste-t-elle ? Elle est « apparue ». Quelle apparition que celle-là ! Accompagnée de la bonté et de l'amour divins, eux aussi « apparus » (3 : 4), elle précède « l'apparition de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur Jésus Christ », que nous attendons (1 Pier. 1 : 9). Après le salut en grâce, le salut en gloire...
- Que nous apporte-t-elle ? Le salut, et plus précisément ici, le salut de l'âme, en attendant la délivrance de notre corps (Rom. 8 : 23). Le verbe est au présent continuel : c'est une source perpétuelle, immuable, irrévocable et donc encore actuelle que l'offre de la grâce de Dieu !
- A qui est-elle offerte ? A tous les hommes, universellement ; nul n'en est exclu... quoique tous ne l'acceptent pas. Pourquoi « à tous » ? Parce que tous, nous étions esclaves (v. 9) du péché. Démonstration avait été largement faite jusque-là que nous étions tous des créatures perdues, déchues, « vendues » au péché... et incapables de nous en délivrer par nous-mêmes.
- Quand s'exerce-t-elle ? Dans le passé (v. 11), dans le présent (v. 12), dans le futur (v. 13).
- Que nous enseigne-t-elle ? Une caractéristique du Nouveau Testament par rapport à l'Ancien Testament est d'introduire l'enseignement de la grâce, qui n'a rien à voir avec celui de la loi pour Israël. Après avoir démontré son état irrémédiable de pécheur, Dieu lui fait grâce, précisément parce qu'il est dans un pareil état d'éloignement. Celui qui devient enfant de Dieu doit alors vivre en harmonie avec cette haute position dans laquelle la grâce l'a placé. Il regarde en haut pour réaliser ce que Dieu a fait de lui et pour lui. C'est le seul moyen pour qu'il marche à la gloire de Dieu. Toute autre exhortation – du type : « Fais ceci et tu vivras » - est légaliste et constitue un retour à l'Ancien Testament.
Extrait de « Sondez les Ecritures » (volume 12)