Bref exposé du livre d’Esdras (2)
DEUXIÈME PARTIE - Chapitres 7 à 10
La main de l’Éternel sur Esdras – ch. 7
Généalogies – ch. 8 : 1-14
Près du fleuve Ahava - ch. 8 : 15-20
Jeûne et prière avant le voyage – ch. 8 : 21-30
L’arrivée à Jérusalem, l’offrande pour la maison et l’holocauste continuel – ch. 8 : 31-36
Humiliation et confession – Ch. 9
Séparation – Ch. 10
Conclusion
DEUXIÈME PARTIE - Chapitres 7 à 10
La main de l’Éternel sur Esdras – ch. 7
Comme cela arrive souvent dans l'Écriture, un nouvel aspect du sujet est introduit par ces mots : « Et après cela » (voir Gen.15 : 1 ; 22 : 1 ; Apoc.4 : 1 ; 7 : 1 ; 18 : 1, etc.)
Une période de presque 20 années s'est écoulée entre la proclamation de Cyrus (ch.1), et la venue d'Esdras à Jérusalem, sous le règne d'Artaxerxès, roi de Perse. Ces événements qui touchent le résidu, Jérusalem, l'autel, le temple et le service de Dieu ont bien lieu par sa volonté souveraine, mais par le moyen de décrets émis par les autorités ordonnées de Lui. Israël ne doit plus oublier sa soumission à la puissance des Nations.
Mais tout est dirigé par « la bonne main de Dieu », ainsi que le reconnaît à plusieurs reprises le fidèle Esdras. Au moment de monter à Jérusalem, « le roi lui accorda toute sa requête, selon que la main de l'Éternel, son Dieu, était sur lui » (7 : 6).
Quelle puissance, sinon celle de Dieu, aurait pu conduire le roi Artaxerxès à rédiger la lettre qu'il remit à Esdras, et à lui donner l'argent et l'or qu'avec ses conseillers, il voulait offrir librement au Dieu d'Israël. Esdras se trouve ainsi investi d'une mission de la part du roi non juif et de vastes pouvoirs pour l'accomplir.
Mais la première chose que fait Esdras est de bénir l'Éternel, et de reconnaître que c'est Lui qui a dirigé le cœur du roi afin que soit ornée la maison de Dieu qui est à Jérusalem, et a étendu sa bonté sur lui devant toutes les autorités de Babylone. En vérité, « la bonté de l'Éternel est de tout temps et à toujours sur ceux qui le craignent, et sa justice pour les fils de leurs fils » (Ps.103 : 17).
Le chapitre 8 commence par la généalogie de ceux qui montèrent de Babylone avec Esdras. Cette liste de noms est importante car elle établit un immuable principe divin : « Le Seigneur connaît ceux qui sont à lui » (2 Tim. 2 : 19). Le Seigneur connaît les siens « par leur nom », il les appelle afin qu'ils le suivent (Jean 10 : 3). Nous avons vu précédemment la nécessité, pour ceux qui étaient montés, de « montrer leurs maisons de pères et leur descendance, s'ils étaient d'Israël ou non » (2 : 59).
Ceux qui ne trouvèrent pas leur généalogie furent alors « exclus, comme profanes, du sacerdoce » (2 : 62), car ce n'était pas chose légère que de participer au service sacerdotal dans la maison de Dieu.
À ces deux généalogies est ajoutée celle d'Esdras lui-même (7 : 1-5), établissant qu'il était un descendant d'Aaron, d'Éléazar, de Phinées, de Tsadok dont nous remarquons les noms, car ils rappellent la fidélité de Dieu envers ceux qui, dans des temps d'épreuve, ont gardé sa parole.
Combien plus encore devrions-nous être conscients qu'il en est de même pour nous aujourd'hui ! Nous comprenons ainsi combien il est important que notre « généalogie » spirituelle soit bien établie et revêtue du sceau du Saint Esprit.
Car aujourd'hui, un saint n'est qualifié pour le sacerdoce que si l'Esprit de Dieu demeure en lui. E. Dennett a écrit dans son commentaire sur le livre d’Esdras et du Réveil du 19ème siècle : « Jusqu’alors aucun de ceux qui prétendaient être "chrétiens" ne fut rejeté, alors que beaucoup dont la vie contredisait leur profession, étaient "reçus sans hésitation". Pouvait-on continuer à agir ainsi ? Alors, la réponse fut trouvée, que seuls "ceux qui pouvaient montrer leur maison de Père" ou pouvaient trouver "leur inscription" eurent la "qualification scripturaire" pour prendre place à la table du Seigneur. En d'autres termes, à moins que nous n'ayons la paix avec Dieu, à moins que nous ne sachions que nous sommes enfants de Dieu par la possession de l'Esprit d'adoption et puissions ainsi montrer la "maison" de notre Père, et trouver notre généalogie, nous n’avons pas le titre divin requis. ».
Près du fleuve Ahava - ch. 8 : 15-20
Un autre principe scripturaire est alors présenté au verset 15 : « Et je les rassemblai » vers le fleuve Ahava. Les saints qui se retirent de l'iniquité (dont Babylone est la figure) ne vont pas marcher seuls, mais « avec ceux qui invoquent le Seigneur d'un cœur pur » (2 Tim. 2 : 22).
La halte vers le fleuve Ahava devait marquer le point de départ du voyage vers Jérusalem, vers la maison de Dieu et pour son service, de ceux qui avaient eu à cœur de sortir de Babylone. Il y a là une frontière qui les sépare du royaume de Perse (dont le nom est, moralement, Babylone), le fleuve doit être traversé, et sans doute pouvons-nous y voir une figure de la mort de Christ ; une vie nouvelle s'ouvre devant les Juifs fidèles. Ils sont en petit nombre ; ils n'étaient qu'une petite partie des exilés dans le royaume de Perse, mais ils étaient « disposés à aller à Jérusalem avec [Esdras] » (7 : 13).
Et pourtant de nombreux Juifs s'étaient établis en Perse ; ils n'avaient pas cessé d'être Juifs, mais Jérusalem et la maison de Dieu ne les attiraient pas. Ils sont une image des chrétiens, croyants peut-être, mais « qui ont leurs pensées aux choses terrestres » (Phil. 3 : 19). On dira peut-être qu'une quinzaine d'années auparavant, une grande délivrance avait été opérée en leur faveur par le moyen d'Esther et Mardochée et que cela en avait incité plusieurs à demeurer en Perse. Mais les fidèles s'asseyaient auprès des fleuves de Babylone et ils pleuraient en se souvenant de Sion (Ps. 137). Sur ce sol étranger, ils ne pouvaient chanter des cantiques, ni oublier Jérusalem. Ils réalisaient dans leur exil, ce que nous éprouvons par la foi, confessant, avec la nuée de témoins qui nous entoure, que nous sommes étrangers et de passage sur la terre (Héb. 11 : 13).
Les quelques-uns qui accompagnaient Esdras abandonnaient certainement des maisons, des biens, et sans doute aussi des amis, pour entreprendre la longue et périlleuse traversée d'un désert, mais ils allaient à Jérusalem, où se trouvait la demeure du Dieu d'Israël (7 :15-16).
Pendant trois jours, Esdras et ses compagnons campèrent vers le fleuve qui s’en va vers Ahava. Ils avaient déjà revêtu le caractère de pèlerins, ne possédant plus rien dans le pays étranger, séparés en figure par la mort de Christ dont parlent sans doute les trois jours de cette étape.
Cette halte avant le départ était bien utile, car Esdras l'employa à « considérer le peuple et les sacrificateurs » (8 : 15), et il ne trouva avec eux aucun des fils de Lévi. Leur rôle était pourtant de toute importance, comme nous le voyons en Néhémie 8 : 9, où avec Néhémie et Esdras, « les lévites faisaient comprendre au peuple ce qu'on lisait », c'est-à- dire « le livre de la loi de Dieu ». Cela nous montre l'importance du ministère de la parole auprès des saints.
Conscient de cette lacune, Esdras envoya chercher des chefs, des hommes intelligents, capables de comprendre l'importance de la mission qui leur était confiée, pour communiquer à Iddo, dans la localité appelée Casiphia, ses paroles pour lui et ses frères. Nous comprenons que ces paroles étaient revêtues de l’autorité de l'Éternel, car elles furent entendues et amenèrent des serviteurs pour la maison de Dieu. Ceux-ci, notons-le, durent quitter très promptement leurs habitations pour se mettre au service de l'Éternel ; ils nous rappellent les disciples que le Seigneur appelait à le suivre, qui « laissèrent leurs filets et le suivirent » (Marc 1 : 18).
Jeûne et prière avant le voyage – ch. 8 : 21-30
Tout était donc en ordre ; mais il y avait encore une chose à faire, la plus importante sans doute, comme le pieux Esdras l'avait compris. Au bord du fleuve Ahava, il publia un jeûne pour s'humilier devant Dieu (8 : 21). C'était là comprendre la portée morale et véritable de la circoncision, et en anticipation, Esdras et ses compagnons pouvaient dire : « nous sommes la circoncision, nous qui... n'avons pas confiance en la chair » (Phil. 3 : 3). Car ils ne comptaient pas sur un « bras de chair », pour être conduits et protégés en chemin contre l'ennemi, mais sur « la main de notre Dieu (qui) est en bien sur tous ceux qui le cherchent » (8 : 22).
La prière de ces fidèles s'étendait à eux-mêmes, à leurs enfants et à tout ce qu’ils possédaient (v. 21). Pour eux-mêmes, ils sentaient leur faiblesse et leur incapacité à discerner le « vrai chemin ». Aujourd'hui, plus encore peut-être qu'alors, nous avons besoin de prier et de demander d'être « remplis de la connaissance de la volonté de notre Dieu et Père, en toute sagesse et intelligence spirituelle, pour marcher d'une manière digne du Seigneur afin de lui plaire à tous égards » (Col. 1 : 9-10).
Ensuite, ils priaient « pour leurs enfants », engagés à la suite de leurs parents dans ce long voyage, témoins de leur marche et objets de leurs soins.
La conscience de notre faiblesse et des dangers du chemin peut :
- ou bien nous faire craindre que nos enfants ne soient « une proie » et les faire « retourner en Égypte » (Nom. 14 : 3, 31)
- ou bien nous rejeter sur la puissance et la grâce de notre Dieu qui nous placera « irréprochables devant sa gloire, dans l’allégresse » (Jude 24).
Notre ressource est la même que celle sur laquelle comptaient Esdras et ses compagnons, et leurs enfants « sont entrés », selon la fidélité de Dieu (Nom. 14 : 31).
Quelle leçon pour nous, dans les temps troublés où nous vivons : les efforts, l'intelligence, l'appel aux moyens que le monde religieux utilise pour le culte, le ministère de la parole, l'évangélisation, ne sont autre chose que ce secours que le pieux Esdras avait honte de demander au roi ! Ainsi, Esdras et ses compagnons firent la magnifique expérience des soins et de la fidélité de Dieu, en réponse à la prière simple et sincère de la foi : « Et nous avons jeûné, et nous avons demandé cela à notre Dieu, et il nous exauça » (8 : 23).
Enfin, ils remirent « tout leur avoir » aux soins de l'Éternel En quoi consistait cet avoir ? Il y avait certainement leurs biens personnels, constitués sans doute par les bêtes de somme chargées de leurs vêtements et des tentes à dresser à chaque étape du long voyage de Babylone à Jérusalem. Mais surtout, ces pèlerins emportaient avec eux « l'argent et l'or et les ustensiles, l'offrande pour la maison de leur Dieu, qu'avaient offerte le roi, et ses conseillers, et ses princes, et tout Israël qui se trouvait là » (8 : 25). Ces richesses appartenaient à l'Éternel et étaient confiées à la garde de douze des chefs des sacrificateurs, « saints, consacrés à l'Éternel » (8 : 28). Destinés au service de la maison de Dieu, l'argent et l'or et les ustensiles d'argent et d'or peuvent être considérés comme une figure des dons spirituels confiés par le Seigneur à ses serviteurs en vue de l'édification de l'assemblée (1 Cor. 14 : 12).
De même que Shérébia, Hashabia et dix de leurs frères avaient à veiller sur le dépôt qui leur était confié, les conducteurs veillent sur les âmes des saints comme ayant à « rendre compte » (Héb. 13 : 17) de leur service.
Ces objets étaient « pesés » dans les mains des douze sacrificateurs qui devaient en rendre le compte exact au terme du voyage. C'est là « s’acquitter de la charge » (Ézé. 44 : 14) qui nous est confiée. Dieu donne aux siens ce dont ils ont besoin pour son service, Il en tient le compte exact. Nous voyons comment les objets portés par les Guershonites leur étaient donnés en charge (ou comptés - note f) et même, pour les Mérarites, désignés par nom (Nom. 4 : 27, 32).
Notre attention est ainsi attirée sur le fait que ce que le Seigneur nous donne est indispensable pour le bon ordre de sa maison, et ce qui pourrait nous sembler de moindre valeur est pourtant soigneusement compté selon l'estimation divine.
Notons par parenthèse que le poids de l'argent dont ils avaient la charge peut être estimé à environ 31 000 kg, et le poids de l'or à 4 800 kg, sans parler des ustensiles précieux, d'un poids considérable. Ce détail n'est pas sans importance, car de telles richesses pouvaient bien attirer les pillards du désert, et justifier une escorte d'hommes armés. Cela nous aide à mesurer la foi d'Esdras, qui eut honte de demander au roi des forces et de la cavalerie pour l'aider en chemin contre l'ennemi, et préféra remettre la garde de ses compagnons et « de tout leur avoir » à « la main de notre Dieu (qui) est en bien sur tous ceux qui le cherchent ; et sa force et sa colère sont contre tous ceux qui l'abandonnent » (8 : 22b).
L’arrivée à Jérusalem, l’offrande pour la maison et l’holocauste continuel – ch. 8 : 31-36
« Et nous sommes partis du fleuve Ahava » (v. 31a). Ce point de départ, et ce qui a eu lieu près de ce fleuve, doit marquer les voyageurs de son caractère : dans l'humiliation de leurs cœurs, ils vont être conscients de leur faiblesse, de la puissance de leurs ennemis, mais aussi du prix de ce qui leur a été confié pour la maison du Dieu de leurs pères et de la protection que leur assure la main de leur Dieu.
Dans ces conditions, il ne nous est dit qu'une chose au sujet du voyage : « La main de notre Dieu fut sur nous, et il nous délivra de la main de l'ennemi et de toute embûche sur le chemin » (v. 31b). La contrepartie de ces choses est, pour nous aujourd'hui, en « celui qui a le pouvoir de nous garder sans que nous bronchions et de nous placer irréprochables devant sa gloire, dans l’allégresse » (Jude 24).
Arrivé à Jérusalem, Esdras demeure là trois jours (v. 32). Une attente de trois jours vers le fleuve qui va vers Ahava (v. 15) avait permis à Esdras de se rendre compte, avant le départ, de ce qui manquait à sa troupe ; les trois jours d'attente à Jérusalem sont un temps de recueillement avant que ne soient remis à leurs destinataires les trésors apportés de Babylone.
L'argent et l'or et les ustensiles sont pesés dans la maison de Dieu, en témoignage de la fidélité de ceux qui en avaient la charge, mais d'abord de la fidélité de Dieu qui les avait gardés tout au long du voyage. Puissions-nous, quant à nous-mêmes, dire comme Paul : « J'ai achevé la course, j'ai gardé la foi… » (2 Tim. 4 : 7), et entendre le Seigneur Jésus nous dire : « Bien, bon et fidèle esclave...entre dans la joie de ton maître » (Matt. 25 : 21, 23).
Nous pouvons penser que l'heureuse issue du voyage d'Esdras et des siens était pour eux un grand sujet de joie. Mais là encore, leur reconnaissance s'élève vers l'Éternel et les conduit à lui offrir des sacrifices en holocauste.
En premier lieu, ils offrirent 12 taureaux pour tout Israël. Quel était en apparence l'état du peuple ? Les dix tribus du royaume de Samarie avaient disparu du pays ; et sur les deux tribus restantes, une partie avait choisi de rester à Babylone. C'était certainement un sujet de tristesse et d'humiliation pour Esdras et pour tous les hommes pieux revenus dans le pays. Mais ils les aimaient tous et ils les associèrent à la reconnaissance de leurs cœurs tandis que, par la foi, ils voient le peuple de Dieu tout entier devant Lui. En de nombreuses occasions et en des temps de ruine du peuple de Dieu, des hommes pieux ont vu celui-ci comme Lui-même le voit, et ont ainsi rendu témoignage à son unité dans la certitude que « les dons de grâce et l'appel de Dieu sont irrévocables » (Rom. 11 : 29).
Et aujourd'hui, nous aimons à discerner, dans le seul pain de la Cène du Seigneur, l'unité de son Église, tout en nous affligeant de nos défaillances à cet égard.
Aux taureaux s'ajoutaient les béliers, évoquant à la fois le sacrifice pour le délit (Lév. 5 : 15, 18, 25) et la consécration des sacrificateurs (Ex. 29 : 22, 26, 27, 31) ; des agneaux, rappelant sans doute l'holocauste continuel (Ex. 29 : 38-42) ; enfin les douze boucs en sacrifice pour le péché.
Dans un temps de faiblesse, où l'arche de l'alliance n'était plus dans le sanctuaire, où le peuple se reconnaissait sous la sentence de « Lo-Ammi » (Osée 1 : 9), la foi discerne qu'au-delà des ordonnances légales quant au service de l'Éternel, il reste la ressource de la parfaite grâce de Dieu ; et nous connaissons aujourd'hui ce que ces hommes pieux ne pouvaient comprendre, savoir l'excellence et la pleine suffisance du sacrifice de Christ à la croix. Car tous les sacrifices mentionnés ici sont en quelque sorte réunis en un seul : « le tout en holocauste à l'Éternel » (8 : 35), expression qui rappelle à nos cœurs la pleine et parfaite valeur « du sang du Christ, qui, par l'Esprit éternel, s'est offert lui-même à Dieu sans tache » (Héb. 9 : 14).
Humiliation et confession – Ch. 9
L'arrivée d'Esdras à Jérusalem semble avoir produit dans les consciences et les cœurs du peuple les exercices profonds rapportés aux chapitres 9 et 10. Les chefs confessent que le peuple, les sacrificateurs et les lévites ne se sont pas séparés des peuples des pays quant à leurs abominations ; des alliances infidèles avaient été contractées, ce qui est saint a été mêlé avec ce qui est impur.
Esdras nous donne en cette circonstance le remarquable exemple de ce que devrait être l'attitude de quiconque a à cœur la gloire du Seigneur et le bien du peuple de Dieu. Il est « désolé » d'apprendre l'infidélité de ceux qui étaient remontés de la captivité avec Zorobabel (ch. 2) ; il n'a pour eux aucune parole de reproche - ce qui ne signifie aucunement qu'il approuvait leur conduite ou s'y associait -, mais il prend part au péché du peuple et s'en humilie en le considérant comme son propre péché.
Nous avons déjà vu combien cet homme de Dieu agissait sans précipitation ; avant de s'agenouiller et d'étendre ses mains vers l'Éternel, il reste assis, désolé, jusqu'au temps de l'offrande du soir. Vers lui se rassemblent alors « tous ceux qui tremblent aux paroles du Dieu d'Israël » - ce qui était le cas, premièrement, d'Esdras lui-même, comme son attitude en témoigne. On peut bien penser d'ailleurs que le peuple savait qu'il était « un scribe connaissant bien la loi de Moïse qu'avait donnée l'Éternel, le Dieu d'Israël » (7 : 6). Il représentait ainsi la Parole de Dieu, et c'était là la source de son autorité morale, pour accomplir la tâche qui se présentait devant lui.
Nous pouvons dire aussi certainement qu'Esdras connaissait dans son cœur, et non pas seulement dans son intelligence, la loi de Moïse, c'est-à-dire ce qui constituait la Parole de Dieu : sa douleur quand il apprit combien cette loi avait été méprisée et oubliée en est la preuve, de même que tout ce qu'il fit après s'être levé de son humiliation.
Puissions-nous l'imiter dans l'usage des Écritures que la grâce de Dieu nous a confiées, dans les circonstances désolantes que nous rencontrons aujourd'hui :
- Esdras nous donne donc premièrement l'exemple d'une humiliation personnelle dans laquelle il s'associe au péché de son peuple, et qui touche les cœurs de ceux qui tremblent à la parole de Dieu. C'est à ceux-ci que l'Éternel avait promis de regarder, « à l'affligé, et à celui qui a l'esprit contrit et qui tremble à ma parole » (És. 66 : 2). Il est digne de remarque que ceux qui s'assemblèrent vers Esdras le firent dans la sincérité de leurs cœurs, non pas en réponse à une convocation de sa part.
- Deuxièmement, il se « lève de son humiliation », et alors, menant deuil dans son cœur, il s'agenouille et étend ses mains vers l'Éternel. N'est-ce pas là l'ordre qui doit présider à ce que nous appelons aujourd’hui une « réunion d'humiliation » ? Il ne saurait s'agir d'une réunion convoquée presqu’à l'improviste, dont l'effet ne peut alors être que passager ; mais le résultat d'un exercice profond chez ceux qui ont conscience d'avoir péché contre le Seigneur (Ps. 51 : 4, 6).
- Troisièmement, Esdras confesse sa culpabilité et celle du peuple, « dès les jours de nos pères » et peut reconnaître la « faveur de la part de l'Éternel », sa fidélité, sa miséricorde pour permettre à ses serviteurs d'élever la maison de leur Dieu. Il constate que l'abandon des commandements de Dieu et l'abandon de la position de séparation quant aux peuples des pays et de leurs abominations, sont à l'origine de la ruine du peuple.
- Enfin, cette compagnie repentante reconnaît les compassions de Dieu qui les a moins punis que ne le méritaient ses iniquités. « Car il y a un moment dans sa colère, mais toute une vie dans sa faveur » (Ps. 30 : 6).
Ainsi, Esdras, avec le peuple affligé, ne cache pas ses transgressions, il les « confesse » et, comme nous le voyons ensuite, il Ies « abandonne », et il « obtiendra miséricorde » (Prov. 28 : 13).
Ce chapitre montre la réalité du jugement que le peuple avait porté sur sa conduite. C'est l'enseignement que nous pouvons retenir pour nous aujourd'hui, bien que nous ne soyons pas appelés à en faire une application légale, qui convenait sans doute à un peuple placé sous la loi de Moïse.
Car, alors que « la Loi a été donnée par Moïse », notre conduite est régie par ce qu'ajoute l'évangéliste : « la grâce et la vérité sont venues par Jésus Christ » (Jean 1 : 17).
Selon le langage figuré de l'Écriture, nous comprenons que les « femmes étrangères » représentent « les doctrines diverses et étrangères » qui peuvent nous séduire (Héb. 13 : 9), comme en témoignent parmi d'autres récits au cours de l'Écriture, l'histoire de Salomon qui « aima beaucoup de femmes étrangères... et elles détournèrent son cœur » (1 Rois. 11 : 1 - 8), ou encore l'affaire de Baal-Péor (Nom. 25), ainsi que « la femme Jésabel » (Apoc. 2 : 20).
Esdras se lève et rappelle au peuple son infidélité, le presse de la confesser à l'Éternel et de se séparer des peuples du pays et des femmes étrangères ; et toute la congrégation acquiesce à cette invitation. Le principe de cette conduite est toujours valable aujourd'hui. Mais, déjà alors, il se trouve quelques opposants à cela (10 : 15). La Parole nous rappelle sans cesse que le cœur de l'homme ne change pas, que ce soit « sans loi », sous la loi ou sous la grâce.
Henri Rossier a écrit : « De fait, l'opposition de ces hommes n'influe aucunement sur la décision de l’assemblée ; elle est même un moyen par lequel Dieu met à l’épreuve la résolution du cœur de leurs frères. Elle n'arrête pas la marche de l'ensemble, car une décision d'assemblée n'exige pas l'unanimité absolue des personnes présentes, quoique cette unanimité soit désirable et qu'elle puisse même se réaliser si les cœurs ont, au même degré, affaire avec Dieu. D'autre part, on ne voit pas que ces quelques-uns persistent à imposer leurs vues à leurs frères, mais ils semblent s'être tenus tranquilles, sans invoquer leur conscience pour condamner la conscience des autres. » (Méditations sur le livre d'Esdras).
L'obéissance à la parole d'Esdras s'accompagne de l'offrande d'un sacrifice pour le délit (10 : 19) ; et le livre s'achève par le rappel des noms de ceux qui eurent à cœur de retrouver une position convenant à leur état de serviteurs de l'Éternel.
Car « tout ce qui a été écrit auparavant l’a été pour notre instruction, afin que, par la patience et par la consolation des Écritures, nous ayons espérance » (Rom. 15 : 4).
J.-P. FUZIER - Janvier 2002