LES SOUFFRANCES DU SEIGNEUR JÉSUS (5)
Extraits de méditations
Après les trois heures de ténèbres
« Pourquoi m’as-tu abandonné ? »
« J‘ai soif »
« C’est accompli »
CONCLUSION
Après les trois heures de ténèbres
Comprendrons-nous jamais, même dans la gloire, ce qui s’est déroulé entre un Dieu immuable dans tous les attributs de sa gloire et son Bien-aimé, volontairement offert pour le sacrifice suprême, pour l’expiation de nos péchés ? Sujet inépuisable d’adoration pour nos cœurs, et en même temps mystère que nous ne sonderons jamais !
« Pourquoi m’as-tu abandonné ? »
« Vers la neuvième heure, Jésus s’écria d’une voix forte, disant : Éli, Éli, lama sabachthani ? c’est-à-dire : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Matt. 27 : 46). Vers la neuvième heure (qui correspond à 15 heures pour nous) notre Seigneur pousse ce cri déchirant. Il avait, dans toutes les souffrances qui nous ont occupés jusqu’à maintenant, gardé le silence. Les lèvres closes, Il avait été mené « comme un agneau à la boucherie », Il avait été « comme une brebis muette devant ceux qui la tondent » (És. 53 : 7) et pourtant, quelles injures, quelles douleurs Il avait rencontrées ! Il n’a rien dit, Il n’a fait aucun geste pour se protéger. Jésus a reçu les coups, les gifles, sans un mot ; mais maintenant, au terme des trois heures de ténèbres, au moment où sa souffrance atteint ce degré suprême d’intensité, Il ne peut plus retenir son cri. Et il est remarquable de constater que l’Esprit nous le donne dans les termes mêmes dont le Seigneur s’est servi, en langue araméenne, comme s’il voulait que nous l’entendions, nous aussi : « Éli, Éli ! Dieu Fort, mon Dieu Fort, mon Dieu Saint ! ».
Avons-nous jamais entendu Jésus au cours de sa carrière parler à Dieu dans ces termes ? Jamais... ! En Matthieu 11, alors qu’Il constate l’échec de son service à l’égard des villes dans lesquelles Il avait accompli la plupart de ses miracles et qu’Il prononce les malheurs contre Chorazin, Bethsaïda, Capernaüm, que dit-il ? « Je te loue, ô Père, Seigneur du ciel et de la terre » (v. 25), et Il ajoute : « Père, car c’est ce que tu as trouvé bon devant toi » (v. 26). Dans la prière qu’Il adresse pour les siens au Père, Il dit : « Père saint » et un peu plus loin : « Père saint » (Jean.17 :11) et « Père juste » (v. 25). À Gethsémané, Il dit : « Mon Père » (Matt. 26 : 39), et même « Abba, Père » (Marc 14 : 36). En dépit de l’heure tragique qu’Il traversait, Il jouissait intégralement de la communion avec son Dieu, son Père. Mais ici, dans le cri, plus de communion, plus rien de l’amour du Père pour Lui ! « Éli, Éli (mon Dieu Fort), pourquoi m’as-tu abandonné ? ».
À ce « pourquoi » nous pouvons donner la réponse ; en fait, c’est nous qui sommes la réponse, car il est dit dans l’Écriture qu’Il a été « blessé pour nos transgressions », qu’Il a été « meurtri pour nos iniquités », que le châtiment qui nous apporte la paix a été sur Lui et que « par ses meurtrissures nous sommes guéris » (És. 53 : 5). Ainsi nous pouvons bien dire que nous sommes la réponse à ce « pourquoi ». Plus exactement, nous sommes une réponse, parce qu’il y en a d’autres et qui sont peut-être d’un niveau plus élevé, plus glorieux encore que celle-là. Il y a avant tout la gloire de Dieu. Il fallait, pour que Dieu soit glorifié, que tous ses droits soient rétablis vis-à-vis de l’homme et ils ne pouvaient l’être que par la soumission absolue de Christ allant jusqu’à l’abandon de Dieu.
Mais n’y a-t-il pas comme une troisième réponse à ce grand « pourquoi » de la croix : la glorification de Christ. Nos cœurs se réjouissent de savoir que Dieu n’a pas attendu pour (le) Le glorifier. Il l’a fait dès son élévation dans la maison du Père et Il en a donné témoignage en envoyant le Saint Esprit sur la terre. C’est ce que Pierre déclare aux Juifs : « Après avoir été exalté par la droite de Dieu et avoir reçu de la part du Père l’Esprit Saint promis, il a répandu ce que vous voyez et entendez » (Act. 2 : 33). La glorification de notre bien-aimé Seigneur et Sauveur : voilà une réponse précieuse à ce « pourquoi ».
« Pourquoi m’as-tu abandonné ? » Nous pouvons aussi nous arrêter à ce petit mot « tu ». Pour Jésus, la souffrance des souffrances, c’est qu’Il était abandonné de son Dieu, c’est qu’Il subissait les coups de la justice de Celui qu’Il n’avait cessé de glorifier. « Toi, que j’ai glorifié, toi qui as été pour moi tout au long de ma carrière, le Père avec lequel j’ai entretenu une communion si douce et si permanente. Pourquoi toi ? Pourquoi m’as-tu, toi, abandonné ? ». Dans le Psaume 88, plusieurs versets décrivent des peines et des douleurs dans lesquelles Christ est pleinement entré ; nous sommes frappés de retrouver ce « tu » et ce « toi » et de constater qu’ils reviennent comme un leitmotiv. Cela nous aide à comprendre que l’essentiel de la souffrance du Seigneur dans cet abandon, c’est le fait que c’était son Dieu qui le lui infligeait ; la colère qui se déversait sur Lui procédait de son Dieu. « Pourquoi m’as-tu abandonné ? » Le Seigneur, dans ce moment, était réellement abandonné ; totalement seul.
Tu souffris, ô Jésus, Sauveur, Agneau, Victime !
Ton regard infini sonda l’immense abîme,
Et ton cœur infini, sous ce poids d’un moment,
Porta l’éternité de notre châtiment.
Ajoutons encore quelques pensées au sujet de la fin des heures de la croix. Nous lisons en Jean 19 : « Après cela Jésus, sachant que tout était déjà accompli, dit - afin que l’Écriture soit accomplie : J’ai soif. Il y avait là un vase plein de vinaigre : ils remplirent de vinaigre une éponge, et, l’ayant mise sur de l’hysope, ils la lui présentèrent à la bouche. Quand donc Jésus eut pris le vinaigre, il dit : C’est accompli. Puis, ayant baissé la tête, il remit son esprit » (v. 28-30). Certes, le Seigneur ressentait une soif physique intense, mais n’éprouvait-Il pas aussi une soif spirituelle ? Puisque toutes choses étaient déjà accomplies, Il avait, Lui le céleste Étranger, comme une soif ardente de quitter ce monde, de retourner au Père, de rentrer dans sa demeure, de goûter les plaisirs de la droite de Dieu, loin de cette scène de misère, de haine, de péché et de mort dans laquelle Il avait vécu 33 ans et où Il avait éprouvé toutes ces souffrances.
« C’est accompli »
Aussitôt après avoir pris le vinaigre, Jésus a dit : « C’est accompli ». Il est remarquable que, pour cette expression, le texte original utilise une forme verbale qui n’existe pas en français et qui caractérise un acte accompli une fois et qui se perpétue : « c’est accompli et cela reste accompli ». Cela souligne le fait que l’œuvre de la croix a été accomplie parfaitement dans son déroulement, mais aussi que sa valeur est éternelle ; et c’est le Seigneur Jésus lui-même qui le proclame. C’est Lui qui nous dit cela et quelle sécurité cela nous donne ! Si de faux docteurs viennent tordre les Écritures au sujet de la pleine et éternelle valeur de l’œuvre de la croix, écoutons la voix même du Seigneur qui nous dit : « C’est accompli ». Mon Sauveur l’a dit Lui-même ; par conséquent, c’est une œuvre parfaite à laquelle il n’y a rien à ajouter et qu’il n’est pas nécessaire de renouveler.
« C’est accompli » : un cri de triomphe après le cri déchirant de douleur suprême. Le Seigneur n’a pas été épuisé par les heures de la croix, comme certains l’ont prétendu. Il possède encore toute sa force pour crier d’une forte voix : « C’est accompli ». La volonté de Dieu est accomplie, l’œuvre que le Père Lui avait donnée à faire est achevée (Jean 17 : 4), le salut des pécheurs est assuré, la gloire de Dieu est revendiquée : tout est accompli. Tout ce que le Père voulait mener à bien par cette œuvre est maintenant définitivement, éternellement achevé et, bien plus encore qu’au lendemain de la création, Dieu a pu considérer tout ce que son Bien-aimé a fait, « et voici, cela était très bon » (Gen. 1 : 31). Et pour nous il reste la paix et la joie qu’apporte dans nos cœurs ce cri de victoire de notre Sauveur.
Nous avons pu ainsi, chers amis, considérer, au cours de ces méditations, ce que notre Seigneur a souffert. Nous avons conscience de l’avoir fait bien incomplètement. C’est un sujet infini, et nous ne l’épuiserons jamais. Nous y découvrirons toujours de nouvelles merveilles. Mais dans ce que nous avons pu contempler ensemble, nos cœurs, je le souhaite, ont été émus devant de telles souffrances, endurées avec une telle soumission. Quels enseignements pourrons-nous alors tirer de ce que l’Esprit a placé devant nos yeux ? Trois au moins sur lesquels il faut nous arrêter :
« L’amour du Christ nous étreint »
Premièrement, le fait que toutes ces souffrances expriment d’une manière sublime l’immensité de son amour envers nous. L’apôtre pouvait dire : « L’amour du Christ nous étreint » (2 Cor. 5 : 14). Est-ce que nous nous laissons étreindre par l’amour du Christ ? S’il en est ainsi, nous réaliserons la suite du passage : « afin que ceux qui vivent » - qui vivent de la vie de Christ - « ne vivent plus pour eux mêmes, mais pour celui qui pour eux est mort et a été ressuscité ». Il me semble que c’est là une des conclusions majeures que nous pouvons tirer de ces méditations. Qu’aimant mieux le Seigneur, ayant comme touché du doigt la qualité de son amour à Lui, nous ayons à cœur de répondre à cet amour par un dévouement plus grand pour sa Personne et par un service plus fidèle pour Lui ! Cela comprend tout : l’apôtre ne parle pas de ceux qui Le servent, mais de ceux « qui vivent » : cela englobe tous les secteurs de notre vie, toute notre activité : une recherche continuelle de ce qui glorifie le Seigneur.
Ne pas prendre le péché à la légère
Deuxièmement, nous savons que le Seigneur Jésus a souffert pour nos péchés durant les trois heures de ténèbres. Et Il a rencontré toutes les autres formes de souffrance sur le chemin qui conduisait à ces heures de la croix. Est-ce que, après cela, nous allons prendre le péché à la légère ? Sachant ce qu’il en a coûté à Christ pour nous délivrer de la puissance du péché, nous délivrer du pouvoir de Satan, nous délivrer du jugement que nous méritions, n’aurons-nous pas à cœur de suivre un chemin de sainteté, de marcher d’une manière qui soit à sa gloire ? L’apôtre exprime ce désir dans son épître aux Colossiens : « Que vous soyez remplis de la connaissance de sa volonté, en toute sagesse et intelligence spirituelle, pour marcher d’une manière digne du Seigneur afin de lui plaire à tous égards » (1 : 9-10) ! Voilà, semble-t-il, la seconde conclusion qui découle de ce que l’Esprit a placé devant nous.
« Viens, Seigneur Jésus ! »
Nous avons parlé du « travail de son âme » selon l’expression d’Ésaïe 53 et cette expression est liée au fruit que le Seigneur va recueillir : « Il verra du fruit du travail de son âme, et sera satisfait » (v. 11). Le mot travail implique fatigue et souffrance. Sachant combien le Seigneur se réjouit à la pensée de recueillir bientôt son épouse auprès de Lui, celle pour laquelle Il « s’est livré », celle qu’(il) Il « nourrit » et qu’Il « chérit » (Éph. 5 : 25, 29), n’aurons-nous pas à cœur aussi de l’attendre avec plus de réalité ? Que sa venue ne soit pas pour nous une vérité abstraite mais un vrai besoin de nos cœurs ! Unissons nos voix à celle de l’Esprit qui, avec l’Épouse, répète : « Viens, Seigneur Jésus ! »
« Affirmer » c’est « affermir » disait un de nos frères. Si nous affirmons le désir de voir notre Seigneur Jésus, ce désir sera affermi en nous. Que l’Esprit agisse en chacun de nous pour affermir le désir de voir enfin face à face Celui qui nous a tant aimés, Celui qui a tant souffert pour nous, afin de contempler - et nous le ferons durant l’éternité - les marques des souffrances de la croix sur son corps glorieux, preuve sublime et sans égale de son amour pour nous.
C’est Lui, bien-aimés, qui, à la fin du saint Livre, rendant témoignage de ces choses, déclare : « Je viens bientôt ! » Avec tous ses bien-aimés, d’un même cœur, d’une même voix, répondons-lui : « Amen ; viens, Seigneur Jésus ! » (Apoc. 22 : 20).
D'après M. Tapernoux - « Messager évangélique » (1990)