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Quelques pensées sur l'adoration


Apporter ce que Dieu nous a donné
Faire monter vers Dieu le parfum de Celui qui fait ses délices
La réunion de culte : ni réunion de prière, ni prédication
Des conditions pour rendre culte « en esprit et en vérité »
Qui adorons-nous ?
Quel est le lieu de l'adoration ?

 

            Adorer Dieu, c'est Lui offrir ce qui Lui est dû. Mais l'homme naturel n'a rien à Lui offrir, car ce qui le caractérise, c'est la haine ; la Parole ne nous dit-elle pas, en effet, que nous sommes « détestables, nous haïssant l'un l'autre » (Tite 3 : 3) ? Cela même nous rend inaptes à offrir à Dieu, qui est amour, rien d'acceptable. Les bonnes oeuvres de l'homme en Adam, même les meilleures, ne sont que « les oeuvres infructueuses des ténèbres » (Eph. 5 : 11). Impossible de les apporter à Celui qui est lumière.
            Si l'homme naturel n'a rien à offrir à Dieu, l'homme en Christ, c'est-à-dire possédant la vie de Christ, a par contre quelque chose à Lui présenter ; ce n'est pas ce qu'il a fait mais bien ce qu'il a reçu, ce que Dieu Lui-même lui a donné. « Ce qui vient de ta main, nous te le donnons » (1 Chr. 29 : 14). Ce n'est donc qu'en apportant ce que nous avons reçu, sans y rien ajouter qui vienne de nous, que notre adoration sera acceptable.


Apporter ce que Dieu nous a donné

            La première fois qu'il est question d'adoration dans la Parole, c'est au chapitre 22 de la Genèse : « Moi et l'enfant », dit Abraham, « nous irons jusque-là, et nous adorerons » (v. 5). Et qu'apportait-il à l'Eternel ? Rien de moins que ce que Dieu lui avait donné, son unique fils bien-aimé.
            « Que rendrai-je à l'Eternel pour tous les biens qu'il m'a faits ? » (Ps. 116 : 12), demande le psalmiste. Rendre ? Il ne peut que prendre « la coupe du salut », invoquer « le nom de l'Eternel » et acquitter ses voeux, c'est-à-dire adorer. Nous-mêmes, nous avons reçu plus que la coupe du salut puisque nous avons reçu un Sauveur, don inexprimable qui fait déborder de louange le coeur de Paul, et qui constitue le fondement même de notre adoration. Ce n'est que lorsque la femme samaritaine a connu le don de Dieu et su qui était Celui qui lui demandait à boire, qu'elle a pu saisir quelque chose de ce que doit et peut être la vraie adoration (Jean 4).
            Le premier acte de l'Israélite qui s'approchait de l'Eternel consistait à prendre « les prémices de tous les fruits de la terre que tu tireras de ton pays que l'Eternel, ton Dieu, te donne » (Deut. 26 : 2). Nous aussi, pour être en mesure d'apporter, nous avons d'abord à saisir par la foi Celui qui est « les Prémices » (1 Cor. 15 : 23), Christ, et lorsque notre coeur, comme la « corbeille » de l'Israélite, sera rempli de Lui, jusqu'à en déborder, alors nous aurons, non pas seulement quelque chose, mais quelqu'un à présenter à Dieu comme l'Objet de notre culte et de notre adoration.


Faire monter vers Dieu le parfum de Celui qui fait ses délices

            Ce qui faisait bouillonner le coeur des fils de Coré (Ps. 45) c'était la contemplation de Celui qui est « plus beau que les fils des hommes » (v. 2). Notre adoration consiste à faire monter vers Dieu le parfum de Celui qui fait ses délices, dans tout ce qu'Il a été, de ce qu'Il est, et de ce qu'Il sera pour Lui et pour nous. Nous nous contentons souvent de n'exalter que ce qu'Il est pour nous - et certes nous ne le ferons jamais trop - mais le culte le plus élevé trouve son expression dans le chapitre 5 de l'Apocalypse par le chant du cantique nouveau, dans lequel l'accent est mis sur l'expression « pour Dieu ».
            Le culte que nous rendrons dans le ciel ne sera que la continuation dans la perfection de cette adoration que nous avons le privilège immense de commencer sur la terre et qui est la seule partie éternelle de notre service. Il ne changera ni d'objet ni de caractère.
            L'adoration est toujours basée sur un sacrifice. Il n'y a pas de culte sans le souvenir de l'Agneau offert une fois pour toutes sur l'autel de la croix. C'est pour cela que la célébration de la cène a tout naturellement sa place dans un service d'adoration et l'amène en quelque sorte à son point culminant. L'adoration ne va pas sans le rappel des souffrances de Celui qui a été cloué sur la croix et sans la contemplation des perfections de la Victime. Plus nous Le connaîtrons, «Lui, et la puissance de sa résurrection, et la communion de ses souffrances» (Phil. 3 : 10), plus notre culte sera élevé.
            Les patriarches ont adoré Dieu sur la base de ce même sacrifice que Christ devait accomplir plus tard, mais qui était préfiguré par les sacrifices offerts sur les autels qu'ils ont dressés. Pour nous, qui avons l'immense privilège de connaître l'Agneau qui a été immolé, c'est sur son sacrifice qu'est fondée notre louange actuelle et éternelle.


La réunion de culte : ni réunion de prière, ni prédication

            L'adoration est en quelque sorte l'inverse de la prière, puisque par la prière nous nous adressons à Dieu pour demander, alors que dans l'adoration c'est pour apporter. Il ne faut donc pas confondre le culte avec une réunion de prière ; il est vrai cependant que nous pourrons être conduits par l'Esprit dans le culte à adresser aussi des prières à Dieu, qui y seront à leur place, sans toutefois en faire réellement partie et que, de même, dans une réunion de prière des expressions de louange jailliront tout naturellement de nos coeurs.
            Le culte, ou service d'adoration, ne doit pas non plus être confondu comme c'est bien souvent le cas dans la chrétienté avec l'audition d'un prédicateur qui présente la Parole à ceux qui l'écoutent, croyants et incrédules. Réjouissons-nous que la Parole d'évangélisation et d'édification soit encore apportée au monde. Cependant une telle prédication n'a rien de commun avec le culte, car elle apporte à des hommes la Parole qui vient de Dieu, alors que l'adoration monte vers Lui, sous la conduite de l'Esprit, de l'ensemble des croyants et des croyants seulement. Il n'est pas concevable en effet qu'un incrédule participe à un véritable culte ; que pourrait-il apporter à Dieu s'il a refusé le Sauveur ?
            Un croyant ne devrait jamais assister à un culte sans y participer, même en gardant le silence. L'adoration peut être exprimée soit par des actions de grâces rendues par tous et exprimées par un frère qui parle comme étant en quelque sorte la bouche de toute l'assemblée, soit par le chant de cantiques par lesquels tous ensemble, d'une même voix, expriment la louange. Elle peut aussi être réalisée dans un silence souvent plus éloquent que des paroles. Tout cela est bien différent d'un service religieux conduit par un homme, appelé par des hommes à présider ce qui dans la chrétienté professante est appelé un culte. Il peut arriver ainsi que, durant toute leur vie, dimanche après dimanche, des croyants appelés fidèles, aillent à l'église écouter un sermon sans avoir jamais réalisé ce qu'est le culte en esprit et en vérité.


Des conditions pour rendre culte « en esprit et en vérité »

            Pour accomplir ce service d'adorateurs, des conditions sont nécessaires. « Approchons-nous avec un coeur vrai, en pleine assurance de foi, ayant les coeurs par aspersion purifiés d'une mauvaise conscience et le corps lavé d'eau pure » (Héb. 10 : 22). Lorsque l'Israélite s'approchait de l'Eternel (Deut. 26), il fallait en premier lieu qu'il soit entré dans le pays de Canaan, puis qu'il le possède et y habite. Il ne nous suffit donc pas, pour être à même de rendre culte, de connaître le Seigneur et de le posséder comme Sauveur ; il faut encore habiter le pays, c'est-à-dire réaliser la communion avec Lui tous les jours de la vie et non pas seulement au moment du culte ou quelques heures auparavant. Cette communion ne sera réelle et ininterrompue que si nous pratiquons le jugement continuel de nous-mêmes. Nos corbeilles ne peuvent être remplies à la hâte le samedi seulement.
            La manière dont nous avons à rendre culte est définie par deux mots « en esprit et en vérité » (Jean 4 : 24) :
                    - En esprit, non pas seulement conduits par l'Esprit, mais aussi en dehors de toute forme matérielle, de toute tradition, et de tout ce qui fait apparaître l'homme dans la chair et qui n'a aucune place dans la présence du Seigneur.
                    - En vérité, c'est-à-dire dans une dépendance complète et absolue de la Parole, qui est la Vérité et, par cela même, de Celui qui est « le chemin, la vérité et la vie » (Jean 14 : 6). Impossible d'adorer, si nous avons dans nos coeurs un repli ténébreux que nous fermons à la lumière et si notre conscience est chargée. N'oublions pas non plus que, comme l'Israélite, nous ne pouvons offrir notre don sur l'autel, si notre frère a quelque chose contre nous.


Qui adorons-nous ?

            Ce n'est pas le Dieu de Sinaï devant lequel les Israélites tremblaient en se tenant loin. Ce n'est pas le Dieu de Garizim où les Samaritains ne savaient pas ce qu'ils adoraient. Ce n'est pas non plus l'Eternel qui avait été obligé de quitter sa maison à cause des infamies qui s'y commettaient (Ezé. 10 : 11). C'est, comme le Seigneur l'enseigne à la Samaritaine, le Père - révélé dans son Fils qui est l'expression de tout ce qu'Il est, Lumière et Amour -, cherchant des adorateurs parmi ses enfants. Il veut être connu d'eux dans cette douce relation de Père, et par cette connaissance, Il forme des adorateurs. C'est ainsi que nous sommes rendus capables d'adorer le Père, parce qu'Il nous a aimés, certes, mais tout d'abord parce qu'Il est amour. De même qu'Il ne cherche pas l'adoration mais des adorateurs, notre part n'est pas d'adorer les gloires de Dieu, mais de L'adorer Lui-même, comme Père.
            En même temps qu'elle s'adresse au Père, l'adoration ne peut pas ne pas avoir aussi le Fils pour objet. Il est le centre de la louange et Le sera éternellement, ainsi que nous le voyons dans le chapitre 5 de l'Apocalypse, comme l'Agneau au milieu du trône, et c'est par Lui que notre louange monte jusqu'au Père.


Quel est le lieu de l'adoration ?

            L'Israélite devait aller « au lieu que l'Eternel, son Dieu, avait choisi pour y faire habiter son nom » (Deut. 26 : 2). Ce lieu était caractérisé par la présence du « sacrificateur qu'il y aura en ces jours-là ». Il en est de même maintenant pour nous. La place de la louange est le lieu de la présence du Seigneur, c'est donc, comme Il l'a dit Lui-même, « là où deux ou trois sont assemblés à son nom » (Matt. 18 : 20). Mais, prenons-y garde, il ne suffit pas de dire que nous sommes réunis en son Nom, ce doit être une réalité ; le Seigneur ne peut sanctionner par sa présence une assemblée qui n'ait pas le caractère de la sainteté qui « sied à sa maison » (Ps. 93 : 5) et qui tolère dans son sein un mal moral ou doctrinal. Pour « entrer dans les lieux saints » (Héb. 10 : 19), il faut être « sorti du camp » (Héb. 13 : 13), et c'est sur l'autel d'or des lieux saints que nous pourrons « offrir sans cesse à Dieu un sacrifice de louanges, c'est-à-dire le fruit des lèvres qui confessent son nom » (v. 15).
            Il est dit « sans cesse ». L'adoration n'est pas limitée à l'adoration collective du culte du dimanche, bien que ce soit là qu'elle a son expression la plus élevée et la plus complète. Il y a une adoration individuelle qui devrait être continuelle car l'accès dans les lieux saints nous est toujours ouvert et, si nos coeurs sont vraiment occupés et remplis de la Personne du Seigneur, ils se répandront devant Lui en louange, exprimée ou silencieuse. Comme l'apôtre Paul, considérant la profondeur des richesses et de la sagesse et de la connaissance de Dieu, nous dirons : « A Lui soit la gloire éternellement ! Amen » (Rom. 11 : 36).


M. J Koechlin - « Messager évangélique » (1960 p. 10)