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MEDITATIONS SUR LE LIVRE DES JUGES (13)

 

Samson : derniers jours (Jug. 16)
Samson descend à Gaza
Un piège pour Samson dans la vallée de Sorek
L'abandon du nazaréat
Samson vaincu par les Philistins
Le relèvement de Samson
 

Samson : derniers jours (Jug. 16)

            Nous avons vu passer devant nous la période la plus brillante de la vie de Samson, bien qu’elle ait été empreinte de faiblesse. Etaient apparus déjà des signes annonciateurs de nouveaux manquements aux injonctions divines s'il ne se tournait pas résolument vers Dieu. Pourtant, malgré la délivrance partielle accordée quand son cri de détresse était monté au ciel, nous ne voyons que l’esquisse d’un mouvement collectif de retour à un chemin de dépendance parmi le peuple de Dieu.
            Auparavant, Samson avait toujours agi individuellement, de son propre chef, bien que de façon désintéressée semble-t-il, car on ne le voit pas tirer parti de ses tours de force et de ses victoires sur les Philistins. Après cette période de mouvement national il agit encore seul. Ainsi, Samson avait grandement failli en tant que conducteur. Il ne s’est pas mis en tête du peuple pour les conduire à la victoire, mais il l’a remportée pour eux. Il manifeste une personnalité forte et individualiste. Partout où celle-ci exclut le peuple de Dieu, apparaît de l’égoïsme qui entraîne faiblesse et finalement faillite du témoignage.
            Jamais il n’a associé le peuple avec lui, comme l’ont fait Gédéon et Jephté. Il a toujours agi seul, bien en vue, pour qu’on le voie faire. C’est en relation avec cette période qu’il est parlé de sa fonction de juge. Il n’était pas apte à juger quand il frayait avec les Philistins.
            De tels hommes ne sont pas inconnus dans l’histoire de l’Eglise - des hommes brillants qui ne semblent jamais avoir trouvé leur place comme membres du corps du Christ. Ils ont peut-être ébloui par leur éloquence et ont attiré l’attention sur eux, mais leur ouvrage n’a pas duré. Chaque période de l’histoire de l’Eglise a connu de tels hommes ; et encore aujourd’hui, ils ne manquent pas. Penons garde de ne pas être l'un d'eux !
            Trop souvent le nazaréat n’est pas respecté, les principes des Philistins sont acceptés, et une séparation spirituelle stricte de tout ce qui altère la communion n’est pas maintenue. Par exemple, quelqu’un doué d’une grande éloquence, risquera d’être grisé par le succès et de ne pas « s’abstenir du vin » qu’offre le plaisir de l’autosatisfaction. Cet homme aura des difficultés à s’effacer soi-même, et à rester humble dans le service. Ce principe aux vastes applications est très exerçant. Toute œuvre, même scripturaire, si elle reste individuelle et ne s’identifie pas collectivement avec le peuple de Dieu, selon les directives de sa Parole, est incomplète.

 

Samson descend à Gaza

            Laissant la brillante période de la vie de Samson, considérons le reste de son histoire, hélas bien triste. Dieu Lui-même nous a dépeint ce tableau, afin que nous comprenions comment Il voit les choses. Cette leçon humiliante est nécessaire ; elle agira comme un stimulant spirituel pour nos âmes, comme le font les expériences les plus amères. De même que les médicaments, la médecine de Dieu doit être parfois amère pour agir sur l’âme, pour nous inciter à entrer dans les vrais combats, et montrer si nous sommes pour Dieu ou non.
            La ressemblance est frappante entre la première partie de ce chapitre 16, et le début de la vie publique de Samson. Le déclin moral est manifesté par le fait qu’il satisfait ses propres désirs, malgré la souillure morale qu’il contracte. Samson descend à Gaza pour satisfaire sa volonté, sans se soucier du déshonneur porté sur le nom de Dieu et de son peuple. Il descend là, victime de la chair, et si l’on est intérieurement dans cette disposition, cela se manifestera tôt ou tard extérieurement.
            En descendant à Gaza, Samson montre un état d’âme qui exigerait un vigoureux et impitoyable jugement de soi-même, mais on ne voit rien de tel. Il peut sembler étrange qu’un homme qui a tant étouffé sa conscience ait une telle puissance. Mais c’est un fait, que la force reste un temps après la disparition de la conscience. Il semble que la miséricorde de Dieu persiste, là où la conscience est endormie ou étouffée ; Dieu désirerait encore parler à l’âme par le moyen de la force encore présente.
            Ainsi, en dépit de son misérable état d’âme qui l’a amené là, Samson se lève au cours de sa nuit de plaisir et arrache les portes de Gaza qui le tenaient captif. Il les transporte jusque sur la colline en face d’Hébron, défiant ceux qui pensaient le retenir sûrement avec les portes et leurs barres.
            Samson pensait peut-être avoir fait une grande chose en arrachant les portes, et en se délivrant de la puissance qui le tenait ; mais il ne s’est pas vraiment libéré. La miséricorde de Dieu lui parlait et lui montrait qu’il pouvait encore se sortir de là, s’il le voulait, mais il ne l’a pas fait. L’avertissement de Dieu a été vain, car Samson n’a fait qu’exhiber sa force ; dès lors, rien ne pouvait plus empêcher une nouvelle chute.
            En fait, cet homme puissant battait en retraite, il fuyait devant les Philistins. Même s’il portait leurs portes sur ses épaules, il fuyait. Il n’avait pas la puissance de leur faire face. Comment en aurait-il eu alors que sa conscience n’était pas droite devant Dieu ?

            Il est dit qu’il a porté les portes sur le sommet d’une colline qui est en face d’Hébron, ou qui regarde vers Hébron. C’est comme s’il allait en direction d’Hébron qui était bien plus loin, car Gaza est au bord de la mer, alors qu’Hébron est à plusieurs kilomètres, dans les montagnes de Judée. Il devait y avoir une colline en direction d’Hébron, et Samson semblait s’y rendre. Hébron signifie « communion », mais pour que l’âme retrouve la communion avec Dieu, se débarrasser momentanément d’un pouvoir qui l’asservit ne suffit pas.
            Quelqu’un peut être prisonnier d’une chose contraire à la pensée de Dieu, tout en ayant encore assez de puissance pour s’en débarrasser. Il peut tourner le dos à cette chose, et aller vers Hébron, vers la communion. Mais s’il s’arrête, laissant tomber les portes sur la colline, il n’atteindra pas Hébron. Cette victoire partielle lui sera très probablement en piège, car s’il avait vraiment réalisé sa faiblesse, il se serait jeté sur sa face devant Dieu, et une humiliation ultérieure aurait pu être évitée. L’âme partiellement restaurée se dirige vers la communion avec Dieu sans l’atteindre, car elle s’arrête avant. Et si elle est à nouveau prise au piège, ce sera pire, car Dieu ne permet pas de jouer avec la conscience, ou avec sa Parole.
            C’était mauvais d’être à Gaza, et si la grâce de Dieu l’en délivrait, c’était pour le ramener à Hébron, à la communion avec Dieu. Mais, n’allant pas jusque-là, il aura à apprendre quel est son vrai besoin dans une chute ultérieure. Quelle leçon pour nous ! Parfois, des restaurations semblent avoir lieu, en ce que l’on voit des renoncements à tels ou tels principes ou associations, mais souvent le renoncement n’est que partiel, car le fruit extérieur est coupé, mais non la racine, et surtout, il n’y a pas de franc retour vers Dieu. Dieu dit : « Si tu reviens... reviens à moi » (Jér. 4 : 1). Il y a danger dans une restauration partielle de la communion ; seule alors une partie du chemin qui va à Hébron est parcourue. Pour une vraie restauration, il faut plus que déposer les portes de Gaza sur la colline qui est en face d'Hébron, il faut un retour à Dieu. Et revenir à Dieu implique de juger le principe qui m’a pris au piège et la racine qui m’a égaré, et quand la racine est jugée, les branches le sont aussi.

            C’est l’enseignement que nous pouvons tirer de l’action de Samson qui ne peut que nous faire pleurer. S’il s’en était vanté, nous aurions pu lui demander : Que faisais-tu à Gaza, et de combien t’en es-tu éloigné quand tu l’as quitté ? Ainsi, si quelqu’un parle de la force qu’il a eue pour abandonner telle habitude ou telle association, demandons-lui premièrement pourquoi il se trouvait dans une telle situation, et dans quelle mesure il s’en est éloigné maintenant. A-t-il parcouru toute la distance pour retrouver la communion avec Dieu ?

            Concernant l’Evangile, aujourd’hui, beaucoup de prédications sont pour ainsi dire prononcées pour tirer un pécheur de Gaza jusqu’à la colline en direction d’Hébron, mais sans l’amener jusqu’à Hébron. On exhorte à abandonner ceci ou cela, couper telle ou telle association, juger tel ou tel mauvais état d’âme, sans aller au fond des choses, c’est-à-dire juger le moi. Il ne faut pas amener une âme à se croire capable de se libérer des chaînes de ses péchés, mais à se sentir impuissante et coupable devant Dieu. Il faut la conduire au sentiment de sa ruine, de ses péchés et de son indignité, n’ayant que la solution de se jeter aux pieds de la grâce infinie, et trouver dans la croix de Christ le pardon et la délivrance… non pas de Gaza, de telle ou telle mauvaise habitude, mais du moi.
            C’est ce qui m’amène dans la présence de Dieu, à Hébron, dans la communion avec Dieu. C’est ce que fait l’Evangile de la grâce de Dieu, en opposition aux appels à améliorer le vieil homme, qui ne conduisent qu’à être comme une truie lavée prête à retourner se vautrer dans la boue (2 Pier. 2 : 22). L’Evangile, en grâce, délivre complètement une âme de quelque situation de laquelle elle était captive, pour jouir de la communion avec Dieu.
            Quel réconfort de pouvoir prêcher un tel Evangile, de ne pas laisser des âmes sur une colline peu éloignée de Gaza, livrées à elles-mêmes, sans les mener à Hébron, pour être en communion avec Dieu. Nous avons le grand privilège de déclarer que, par la mort et la résurrection de Christ notre Seigneur, l’âme entièrement libérée est dans la présence de Dieu, chez elle. L’accès dans la présence de Dieu est rendu parfaitement libre par le sang de Christ versé à la croix, de sorte que nous nous approchons de Lui en pleine assurance de foi, pour jouir d’une sainte et heureuse association avec Lui. Le chemin ne s’arrête pas à mi-course, il va jusqu’au bout, jusqu’à Dieu. « Vous qui étiez autrefois loin, vous avez été approchés par le sang du Christ » (Eph. 2 : 13).
            Comme chrétiens, nous n’avons pas besoin d’être sauvés à nouveau, mais nous aimons parler de la façon dont on peut être sauvé. Sauvés une fois pour toute, nous pouvons jouir de ces précieuses vérités, et recommander ce chemin avec amour et ferveur à toute âme étrangère à l’amour de Dieu. La grâce divine tire l’âme de son lieu d’esclavage et de la servitude à ses convoitises, la place dans la maison de Dieu, par l’œuvre de Christ et lui donne la paix avec Lui à jamais. Quel précieux Evangile ! C’est le ministère de la réconciliation qui ramène dans la paix de la sainte présence de Dieu, en toute confiance, une âme éloignée et séparée de Lui.
            Ce n’est pas ce que Samson a fait, aussi ne devrait-on pas lier le saint nom de notre Seigneur avec une histoire aussi honteuse. On ne devrait même pas y faire référence, comme certains l’ont fait, pour illustrer l’Evangile, à savoir que notre Seigneur aurait enlevé les portes de Gaza, et nous aurait ouvert le chemin pour en sortir. Non, ce que Christ a fait, contraste avec cela. Samson n’a été délivré qu’incomplètement, par la miséricorde de Dieu, d’une convoitise qui était encore son maître, et qui allait encore l’enlacer. Ne lions pas le saint nom de notre Seigneur avec un tel récit honteux.

            Un jour, un homme – l’apôtre Paul – est sorti d’une ville d’une manière très différente. C’est par fidélité à Christ qu’il était dans la ville. Les Juifs gardaient les portes de Damas jour et nuit de peur qu’il ne s’échappe. Bien que toute la puissance de Dieu fût de son côté, il n’a pas exhibé follement sa force, aucun miracle n’a eu lieu envers ses ennemis qui gardaient les portes. Paul a été dévalé par une fenêtre dans une corbeille, et s’est enfui, manifestant ainsi sa faiblesse. C’était le caractère d'un vrai nazaréen dont la faiblesse témoignait constamment qu’une autre puissance opérait, et qui ne faisait pas de lui quelqu’un d’exceptionnel, mais un homme humble.
            Il est frappant de constater que l’allusion à cette fuite peu glorieuse en 2 Corinthiens 11, soit suivie du chapitre 12 dans lequel est décrite son entrée dans la gloire où il a entendu des choses qu’il n’est pas possible à l’homme d’exprimer. Si Paul n’était que faiblesse, quand il était dévalé dans un panier pour sortir de la ville, c’est dans la gloire qu'il a été ravi, pour voir ce qui était vraiment sien - et vraiment nôtre. Puis, une fois descendu de cette hauteur, le Seigneur lui montre qu’il ne doit pas user de sa force propre, afin que celle de Christ, qui est rendue parfaite dans la faiblesse, soit pour lui.
            Vaut-il mieux ressembler à Samson avec sa puissance extraordinaire, ou à Paul, ce faible serviteur, semblable à une biche chassée dans la forêt par des ennemis implacables, descendu dans un panier hors de la ville, fuyant en manifestant sa faiblesse pour prouver que la force éternelle de Christ est pour lui ? Ressembler à Paul veut dire apprendre la leçon de Paul, ressembler à Samson signifie ne pas avoir appris cette leçon-là.

 

Un piège pour Samson dans la vallée de Sorek

            La suite du chapitre est encore plus sombre, et parle sûrement à nos consciences. Samson s’égare à nouveau, comme il était prévisible. Pour celui qui n’est pas vraiment restauré, ce n’est qu’une question de temps pour qu’il aille dans un chemin pire que celui qu’il avait suivi auparavant. Le Seigneur nous donne l’exemple de l’esprit impur qui sort d’un homme, laissant son cœur vide (Luc 11 : 24-25). Il est délivré partiellement. Mais quelle est l’utilité d’être délivré d’un mauvais esprit, si le cœur vide est prêt à ouvrir ses portes, et à inviter sept esprits plus méchants que le premier ?
            Samson n’a pas tenu compte de l’avertissement que Dieu a donné en grâce. Quant à nous, collectivement, Dieu permet de brèves périodes de relèvement. Il nous accorde d’être guéris des résultats de nos erreurs, en nous faisant lever des bastions des Philistins où nous étions descendus, et nous faisant sortir d’une manière étonnante de ces Gazas : nous pouvons arracher les battants des portes qui ne sont nullement des barrières. Mais pour une assemblée de Dieu, comme pour un chrétien, cette délivrance partielle peut être le signal d’un nouvel égarement, à moins qu’il n’y ait un vrai jugement de la racine du mal. Si Dieu nous donne des avertissements avec tendresse, nous devons les prendre comme Il le désire – en allant à la racine des choses, que ce soit en assemblée ou individuellement – et non pas comme si tout était maintenant en ordre, et qu’il n’y ait plus besoin de vigilance et de jugement de soi plus profond.
            Maintenant Samson retourne à ce dont il avait été délivré, tout comme une assemblée ou un individu en serait capable. Il revient exactement au même endroit, à Gaza. Il est pris au piège dans la vallée de Sorek, la vallée du « piège », par une femme dont le nom était Delila. Il l’aime. Contrairement à une vallée dans le pays, une vallée chez les Philistins ne parle pas d’humilité, mais d’une descente morale et spirituelle. Samson descend dans la vallée, droit au piège. Il va s’y empêtrer, comme nous allons le voir.
            Ce n’est pas une puissance extérieure qui l’a attiré là. Ce qui nous amène sous la puissance du mal n’est pas une contrainte extérieure puissante et tenace, mais une chose séduisante, qui plaît au goût et au désir des cœurs. Nous pouvons être certains que Dieu ne laissera jamais les hordes du mal prévaloir contre une âme qui Lui est fidèle de cœur. Les plus faibles et les plus démunis naturellement, possèdent la force de Christ Lui-même, si leurs cœurs sont vrais et Lui sont fidèles. Tous les pièges que l’Ennemi peut placer, toutes les vallées de Sorek, ne peuvent avoir aucun pouvoir sur un saint dont le cœur n’est pas pris au piège par des séductions.
            Delila, encore une femme philistine, nous montre que Samson s’égarait toujours en suivant les principes de l’homme naturel qui ne peuvent jamais répondre à la volonté de Dieu, car, en figure, cette femme nous parle de principes de conduite et de témoignage qui ne sont pas selon Dieu, ou qui n’atteignent pas la vérité de Dieu. Samson est attiré dans cette voie par quelque principe du mal auquel il veut se lier, et cet homme fort est pris au piège. Delila qui signifie faiblesse ou impuissance - l’attire et le retient par une puissance qu’il a laissé dominer son cœur, et rien ne peut l’en délivrer.
            Samson descend là et s’associe à elle. Les Philistins vont se servir de cette situation. S’étant mis sous la puissance d’un principe qui n’est pas selon Dieu, il va bientôt devoir être soumis à une autre puissance, extérieure. Les Philistins, sans scrupule, offrent de payer cette femme. La première fois, ils ont menacé de brûler la femme et son père par le feu ; maintenant ils proposent 1 100 pièces d’argent, si elle le persuade de révéler le secret de sa force qu’il n’a encore jamais dévoilé.
            La citadelle de son cœur était encore inviolée. Il est presque impensable qu’une personne qui avait tant failli comme Samson, ait encore un cœur préservé, qui n’était pas dans les mains de l’ennemi, malgré ses infidélités. La forteresse, le for intérieur de son âme, était encore pour Dieu, qui dans sa miséricorde était providentiellement intervenu en sa faveur. C’est cette citadelle de son cœur que Delila va maintenant assiéger, pour lui en prendre la clé, afin que l’ennemi s’y précipite et en prenne possession.
            Quel enseignement spirituel pouvons-nous tirer du fait de révéler le secret de notre force aux ennemis de Dieu ? Le problème n’est pas tant que le secret soit su, mais c’est le fait que le cœur soit prêt à dire un secret au monde. Prenons un exemple du domaine professionnel : nous sommes polis avec les gens que nous rencontrons, mais les relations s’arrêtent là ; nous pouvons avoir des relations temporaires ou permanentes, dans le cadre du travail, mais avec certaines distances ; il n’y a pas de compromission en cela. Mais si l’amitié se resserre, et que des éléments de la vie s’introduisent dans les relations, les choses deviennent encore plus intimes et les secrets du cœur peuvent être mis à nu ; il ne reste plus que ce que les âmes ont en commun. Ce serait ça « dire les secrets » – révéler tout ce qui marque la séparation d’avec un autre.
            Tant que je garde mes opinions, je reste moralement séparé de la personne, et suis tout à fait distinct d’elle. Mais si je lui ouvre mes pensées et lui dis les propos secrets de mon esprit, alors nous sommes unis, amis, et il n’y a plus de séparation. Je suis sous l’emprise de cette personne, pour la simple raison que mon cœur lui a été donné. Ce serait le cas d’une femme chrétienne donnant l’affection de son cœur à un incrédule. Mais il existe d’innombrables applications, individuelles et collectives.

            Il en fut ainsi avec Samson. La révélation du secret de sa force brisait le mur qui le séparait des Philistins. C’était abandonner la citadelle de son âme, qui avait été gardée intacte jusqu’à ce jour. Nous pensons à des applications pratiques, et nous allons voir comment ce danger existe individuellement, pour les serviteurs du Seigneur en particulier, et pour l’assemblée dans son témoignage collectif devant Dieu, et devant le monde.
            Le chrétien est en danger constant de briser le mur de séparation entre son âme et le monde. Souvent, de jeunes chrétiens, le cœur rempli d’amour pour Christ, se réjouissant dans le Seigneur, sont assaillis par de subtiles tentations pour briser cette étroitesse d’esprit qui les sépare du monde. Ces tentations ne se présentent pas de façon mauvaise. Satan présente au chrétien le monde sous son côté inoffensif et attractif, non pas sous son mauvais côté. Alors, s’il a envie de céder, d’avoir des choses en commun, de dire les secrets du cœur, l’âme a capitulé, pas nécessairement en paroles, mais pratiquement dans ce qui la distingue du monde. Si la séparation de l’esprit du monde est brisée dans l’âme, le secret est livré, il est donné aux mains de l’Ennemi, et la force et la puissance spirituelle sont ainsi perdues.
            Combien de fois des Samson ont été dépouillés de leur force de cette manière. Ils flirtent avec une petite chose qui semble inoffensive, une bagatelle. Puis d’autres choses se rajoutent – car Satan propose des choses toujours plus séduisantes qui prennent possession de l’esprit – jusqu’à ce qu’enfin, comme le dit Delila, ils disent tout ce qui est dans leur cœur.
            C’est comme une écluse sur un canal. Les portes qui retiennent les eaux en amont, les séparent des eaux en aval ; il y a une grande différence de hauteur entre elles. En ouvrant les portes cachées au fond du canal, l’eau passe à travers ces portes, jusqu’à ce que les niveaux soient égaux, alors les portes oscillent librement.
            Des relations avec ce monde, ou l’adoption de mauvais principes et des pensées du monde ne sont-elles pas comme ces portes de communication cachées ? Sans parler d’immoralité, n’avons-nous pas de portes ouvertes avec le monde, qui atténuent toute différence avec celui-ci et ne permet plus de distinguer entre le saint et le profane ? Une fois sur le même plan, qu’est-ce qui empêche d’ouvrir grand les vanne, et de laisser entrer tout ce qui est du monde ? Le nazaréat individuel est alors perdu.
            Quant au serviteur de Christ, si quelqu’un doit être séparé de l’esprit du monde, de l’esprit du Philistin, c’est bien lui. Le secret de sa force réside dans le jugement de soi, c’est la faiblesse qui s’appuie sur la force du Tout-puissant. S’il n’a pas pris cette place, il n’est pas un vrai serviteur de Christ et n’a pas appris la leçon qu’il n’y a pas de puissance plus à craindre que ces alliances cachées qui ne sont pas selon Dieu. Ces portes cachées, qui l’amèneraient à révéler les secrets de son cœur, et à s’entendre avec le monde, saperont sa force ; aucune capacité, aucune éloquence ne peut jamais remplacer la longue chevelure qui parle d’une vie séparée pour Dieu.
            Quant à l’Eglise, sa chevelure qui était sa gloire est hélas rasée. Aujourd’hui, elle est au même niveau que le monde ; dans son ensemble, c’est une Eglise mondaine qui ne peut que nous faire pleurer. Quant au témoignage collectif, nous courons les mêmes dangers : le monde nous attire en permanence, insidieusement, et nous sommes en danger de révéler les choses précieuses de Dieu – non pas l’Evangile, mais le secret de nos cœurs – et d’être ainsi sur un même terrain avec le monde qui nous entoure et que nous imitons si facilement.
            Cet état de chose s’infiltre même dans les rassemblements les plus soigneux, s’il n’y a pas une attention constante. Nous pouvons hélas constater que l’Ennemi possède tout ce que nous avons, qu’il n’y a pas de secret entre lui et nous, qu’il n’y a pas de mur entre nos âmes et ce qui nous entoure. Certains disent parfois : Pourquoi faire tant de cas de la séparation, alors qu’il n’y a aucune différence entre nous ? Ah, se poser une telle question, montre qu’il n’y a déjà plus de distinction. Le secret est révélé, il ne reste rien.

 

L'abandon du nazaréat

            Penchons-nous maintenant très brièvement sur les étapes qui amènent à révéler des secrets. Samson dit d’abord à Delila une contre-vérité, quand elle demande à connaître le secret de sa force et comment il pourrait être lié. Son premier aveu semble insignifiant, il n’a apparemment pas l’intention de lui faire savoir son vrai secret. Il dit : « Si on me liait avec sept cordelettes fraîches, qui ne fussent pas desséchées, alors je deviendrais faible, et je serais comme un autre homme » (Jug. 16 : 7). Samson devait avoir à l’esprit la façon dont les hommes de Juda l’avaient lié de cordes quand ils l’avaient remis aux Philistins, et comment il les avait rompues comme de l’étoupe. Il refait la même chose, quand Delila dit : « Les Philistins sont sur toi, Samson ! » (v. 9), il rompt les cordes, comme de l’étoupe soumise au feu.
            Se vanter d’une victoire passée est le point de départ d’un nouveau piège. Ici, Samson pense à sa victoire sur les Philistins, et se rappelle comment il a brisé les cordes. Il pense rompre les cordes comme la dernière fois  et montrer le merveilleux pouvoir qu'il a ! Et il fait ainsi. Il rompt les cordes, certes, mais il a une « corde fraîche » autour de son âme. C’était se vanter d’une victoire passée en présence de quelqu’un avec qui il n’avait rien à faire et qui ne devait pas le savoir. Il ne lui a pas dit la vérité, ni donné le vrai secret de sa force, mais il l’a trompée, aussi en saurait-elle bientôt plus.

            Ainsi, si l’on joue avec le mal, y étant lié, essayant de garder une certaine séparation par divers mensonges, le pas est fait et l’âme est vraiment aux mains de l'Ennemi.
            Nos consciences doivent être au clair : avoir des relations avec ce qui n’est pas selon Dieu, avec ce qui entrave ma communion avec Lui, jouer avec les choses du monde et les lier aux choses de Dieu, finira, tout comme Samson, par un naufrage et la ruine.

            La fois suivante, Samson se sent un peu plus fort : qu’ils me lient avec des cordes neuves, dit-il (v. 11). Ah, si seulement il avait conscience qu’il ajoutait une autre corde à celles qui devaient le lier. Il descendait toujours plus ; la grâce lui accordait encore du temps pour être restauré, mais il refusait d’écouter, et nous le voyons aller plus avant dans le mal.
            Il est donc lié avec ces cordes, mais même s’il se délivre, il reste plus étroitement lié que jamais. Cette nouvelle tromperie, quand la conscience a été réveillée par la grâce, montre qu’il est plus en danger que jamais.
             C’est un sujet sérieux et très solennel. Dieu n’a-t-il jamais réveillé notre conscience pour nous délivrer d’un piège, et n’y sommes-nous jamais retournés ? Si tel est le cas, c’est que comme Samson, notre conscience est devenue moins sensible. Il en est de même de l’église.

            Puis vient sa troisième réponse. Il joue avec le feu, mais le papillon s’approche de la bougie ! Il arrive maintenant au secret de sa force, en disant : « Si tu tissais sept tresses de ma tête avec le fil à tisser » (v. 13b). Il parle de ses cheveux comme la source de sa force, sans toutefois évoquer qu’il ne fallait pas les raser. Il est, maintenant, près de divulguer le secret de sa force spirituelle, et dire comment elle peut lui être ôtée. Même s’il le dit faussement, il parle de la chose même. C’est comme si un homme parlait au monde de sa foi. Il peut ne pas donner le secret, et ne pas être pleinement identifié avec le monde, mais il parle de la seule chose qui le sépare du monde. De quel droit Samson parlait-il à une Philistine de son nazaréat ? Aucun. Cela nous rappelle Eve parlant avec le serpent.
            Alors, il fait le dernier pas. Delila obtiendra tout de lui. Il est certain que quiconque joue avec le mal, ira jusqu’au bout, tout comme ce pauvre Samson, à moins que Dieu n’intervienne, dans sa miséricorde. Prends mes cheveux, dit-il ; voilà le secret, il y est arrivé. Si ses cheveux sont ôtés, son nazaréat est perdu, et il sera aussi faible qu’un autre homme.

            Il est significatif qu’il ne parle pas d’abstinence de vin, ou de séparation de la mort ; sa vie passée montre qu’il n’avait pas été prudent quant à ces aspects de son nazaréat. La longue chevelure suggère un esprit de dépendance à l’égard de Dieu, et la conscience de la faiblesse. N’est-il pas possible que ceci reste, bien qu’une sainte séparation de cœur soit perdue ?
            La dépendance trouve son expression naturelle et normale dans la prière. Seul le Seigneur, le Nazaréen parfait, a été un homme de prière. Il n’y a pas de plus grand danger que de perdre le sens de la nécessité de la prière ; cela signifie la perte de l’esprit de dépendance, symbolisé par la longue chevelure. Il n’est pas nécessaire d’en dire plus, laissons plutôt la conscience nous parler. La prière est-elle une nécessité absolue ? Est-elle dans nos habitudes ? Parfois, la connaissance de la grâce est utilisée par l’Ennemi afin de diminuer le sentiment de dépendance et ainsi réduire la fréquence des prières. Négliger la prière, risque de faire perdre le nazaréat.
            La même chose est vraie d’un témoignage collectif. Si la connaissance de la vérité ne nous garde plus dans l’humilité et nous rend négligents quant à la prière en commun, il est certain que « les Philistins sont sur nous ». Quand la réunion de prière est négligée par le grand nombre, ou qu’il y a peu de participation dans la prière, c’est que le témoignage s’écarte de sa vraie position, même s’il a été utilisé par Dieu auparavant. A moins d’une restauration, il tombera dans le formalisme des Philistins. Puissions-nous y prêter une sérieuse attention.

 

Samson vaincu par les Philistins

            Samson avait dit tant de mensonges que les Philistins ne le croyaient plus, mais, Delila le croyait. Cette pauvre prostituée savait que le secret était révélé ; le monde sait bien quand le chrétien capitule et que le mur de séparation est tombé. Après quoi, Samson s’endort ; la paresse qu’il connaît depuis longtemps se manifeste simplement un peu plus. Il pose sa tête sur les genoux de ce monde misérable ; c’en est fait de lui, il ne se réveille que pour se rendre compte que sa force est à jamais partie par sa propre faute, sans pouvoir être vraiment restaurée.
            Combien c’est solennel ! Dieu nous avertit par cet exemple pour éviter une chute semblable. Nous devons le prendre à cœur. Elle dit : « Les Philistins sont sur toi », et ce pauvre Samson, pense faire comme d’habitude. « Je m’en irai comme les autres fois, et je me dégagerai » (v. 20), mais il ne savait pas que sa puissance l’avait quitté. Combien d’âmes se sont mêlées au monde et continuent ainsi, ignorant que leur force spirituelle est partie. Samson, ne sachant pas que l’Eternel s’était retiré de lui, sort. Il a beau se secouer, ayant perdu le secret de sa force – sa dépendance de Dieu, il est devenu comme le plus faible des hommes.
            Beaucoup continueront leurs activités, longtemps après avoir perdu leur puissance. Ils peuvent se démener dans un service religieux – le prédicateur dans sa chaire, celui qui visite dans son ministère, le moniteur d’école du dimanche dans sa classe – mais la puissance n’est plus, quelle tristesse et quelle honte !
            Si un témoignage nazaréen - autrefois reconnu de Dieu, pose sa tête sur les genoux des Philistins et perd sa chevelure, il peut se vanter de ses prouesses passées, de ses connaissances, de ses réussites, il peut se démener, mais hélas, il doit être dit : I-Cabod (1 Sam. 4 : 21). Que le Seigneur nous garde humbles, pieux et dépendants. Le danger est aussi pour nous, soyons vigilants et sur nos gardes, pour ne pas nous réveiller de nos rêves en nous trouvant irrémédiablement aux mains des Philistins.
            Le monde appellera cela devenir fort : mettre de côté son étroitesse indigne d’un homme, son exclusivisme rigide, son obéissance à la lettre, et prendre maintenant place parmi les hommes, et être de quelque utilité ! C’est ce que disent le monde et l’église mondaine, mais la foi pleure le Nazaréen perdu, et ne sera pas consolée. « Ses nazaréens étaient plus purs que la neige ... Leur figure est plus sombre que le noir » (Lam. 4 : 7-8).

            Les Philistins prennent Samson, le lient, l’amènent à Gaza même où il s’était rendu de sa propre volonté et s’était amusé follement. Le lieu de son esclavage volontaire devient la scène de son esclavage involontaire. Maintenant, la force même qui lui restait n’est utilisée que pour moudre le grain des Philistins, au lieu de l’être pour juger son peuple, en tant qu’homme de Dieu libre. Quel terrible avertissement pour nous !
            Samson perd d’abord sa force par sa propre folie. Ensuite, les Philistins lui crèvent les yeux, car le formalisme ne peut supporter les yeux ouverts. Il perd un discernement qu’il ne retrouvera jamais. Quelle perte irréparable et quelle humiliation ! On a décrit cette triple dégradation ainsi : « lié, aveuglé, broyé » par l’esclavage du péché.
            Cette douloureuse leçon peut être appliquée à toute forme de flirt avec le mal. Mais, en nous souvenant que les Philistins représentent la religion mondaine et charnelle dans l’Eglise, la leçon est bien plus solennelle.
            N’oublions pas que les fautes telles que celles de Samson, traduites en langage spirituel, ne signifient pas du mal moral flagrant, mais quelque chose de beaucoup plus insidieux et éminemment respectable, aux yeux du monde. Il existe des systèmes religieux, des doctrines, des pratiques qui sont clairement charnels, tout comme l’était le judaïsme, après l’introduction du christianisme. Tout retour vers ces choses, c’est flirter avec les Philistins. L’Eglise en est vraiment là aujourd’hui.
            Quand Dieu suscite un témoignage nazaréen comme Philadelphie au milieu d’une Thyatire philistine corrompue et d’une Sardes formelle, morte, n’est-il pas significatif qu’après Philadelphie vienne Laodicée, comme si Dieu nous avertissait du danger de retomber dans quelque chose d’aussi mauvais, voire pire que ce dont nous avons été sauvés ? Méfions-nous, veillons et soyons sobres.
            A l’instar d’un juge, un témoignage peut « juger Israël ». Tout témoignage selon Dieu agit sur toute l'Eglise. Qui peut aujourd’hui mesurer l’influence de ce témoignage qui, tandis qu’il est séparé et souvent méprisé, a répandu la lumière de la vérité divine sur de nombreux saints encore asservis aux Philistins ? Ne perdons, en aucune mesure, cette position de dignité, en nous associant avec des principes qui nous priveraient de force et de discernement, et changeraient les hommes de Dieu libres en ‘broyeurs de grain’ pour l’église mondaine.

 

Le relèvement de Samson

            Juste quelques mots sur la mesure de restauration que Dieu accorde. Deux choses sont à noter, l’une quant à Samson, et l’autre quant à Dieu. Les cheveux de Samson ont commencé à repousser. Il avait déjà appris, et apprenait à nouveau qu’il n’y avait pas de force en lui. Le signe de la dépendance, de la séparation et du nazaréat réapparaissait, mais il avait perdu quelque chose qui ne reviendra jamais : il ne recouvrera jamais la vue ! Par ailleurs, Dieu ne restaure jamais pleinement ce qui a été perdu de façon délibérée et réitérée, mais Il peut restaurer partiellement. L’Eglise aujourd’hui devrait avoir le caractère de Nazaréen pour Dieu. Au cours de son histoire, elle a connu des périodes de restauration, mais reviendrons-nous aux jours apostoliques de la Pentecôte ? Non, l’Eglise a perdu ses yeux, même si elle retrouve un peu de sa dépendance extérieure. Comme Samson, la force qu’elle a n’est rien, en comparaison avec ce que Dieu lui aurait accordé, si elle ne s’était pas écartée.
            Nous pouvons parler de la grâce de Dieu qui restaure, mais ne passons pas rapidement sur le péché qui nous éloigne. Nous pouvons parler de la façon dont Il nous a ramenés, mais cela n’a-t-il pas été avec une perte de discernement ? Avons-nous été ramenés aussi pleinement que si nous ne nous étions jamais écartés ? Que de temps et de talents perdus qui auraient pu bien rapporter pour Lui ! Ils sont perdus définitivement, et si même la force est retrouvée, elle n’est pas accompagnée du discernement qui est perdu. Nous ne pouvons plus en tant qu’église regarder le monde en face. Nous ne pouvons plus nous tenir de cette façon. Nous ne sommes qu’un pauvre résidu restauré par la grâce de Dieu, n’ayant qu’une vision limitée.
            Quant à Samson, sa dépendance s’accroît. Il sent sa faiblesse, et retrouve donc sa force. Mais voyons le côté de Dieu. Les Philistins font toujours des erreurs ; Satan fait toujours une œuvre qui le trompe (Prov. 11 : 18). Les Philistins vont maintenant rendre hommage à Dagon, leur dieu. La question n’est maintenant plus entre ce pauvre Samson et les Philistins, mais entre Dagon et Dieu.
            Quand l’arche de Dieu a été prise du milieu du camp d’Israël, tant que la question était entre Israël et les Philistins (1 Sam. 5 : 1-2), Dieu l’a laissé partir, car le peuple apostat et pécheur n’avait pas droit à l’arche. Mais quand l’arche a été mise dans la maison de Dagon, et placée devant Dagon, comme reconnaissant sa suprématie, alors Dieu a parlé pour Lui-même et Dagon est tombé ; il en sera toujours ainsi. Ici, en voulant faire une grande fête pour Dagon et lui attribuer la victoire sur Samson, les Philistins ont tout simplement défié Dieu qui, par conséquent, a dû parler, et avec quelle force !
            Ils se rassemblent en grandes multitudes pour célébrer une fête à Dagon, et veulent que Samson les amuse. Amuser les Philistins ! Qu’il est tombé bas ! Nous pouvons y voir un homme dont l’éloquence et la connaissance de l’Ecriture sont utilisées pour moudre le grain des Philistins et les amuser, ou flatter l’esprit du monde dans l’église professante. Ah, plus d’un homme qui semble être un véritable Samson n’est que l’esclave aveugle des Philistins.

            Dans sa grande miséricorde, Dieu nous a fait recouvrer, dans ces derniers jours, beaucoup de précieuses vérités. Des choses anciennes et nouvelles ont été tirées de sa maison du trésor, pour l’édification et la joie des saints. L’Eglise tout entière a, directement et indirectement profité, de ce ministère de la vérité.
            Au début, la position pour laquelle Dieu a suscité la vérité a connu l’opprobre. Mais les choses ont changé. Les vérités de la venue du Seigneur, de la perfection de la position du croyant en Christ, des divers jugements, des deux natures, sont devenues « populaires ». De la littérature a été diffusée au loin, et des multitudes qui ne connaissent pas la source ecclésiastique d’où est venue cette littérature, en ont profité. Nous ne pouvons qu’en bénir Dieu.
            Au début, la vérité séparait du monde et de l’église mondaine ceux qui la recevaient. Elle conduisait les gens à voir qu’ils étaient en dehors du système qui, en tant que système, était Philistin – une religion charnelle. La vérité nous sépare-t-elle maintenant ? Si elle ne nous sépare pas, la force accordée par Dieu n’est-elle pas utilisée pour moudre le grain pour les Philistins ?
            Nous ne parlons pas des saints, mais des systèmes qui, trop souvent, les tiennent dans la servitude. N’avons-nous pas une responsabilité ? Nous ne devons ni imposer la vérité ecclésiastique, ni refuser de la propager partout où il y a une oreille pour entendre, mais, n’oublions pas que la vérité, si elle est reçue, fera se soustraire à l’erreur philistine. Souvenons-nous en, et prions pour que Dieu délivre les siens. Que le fait de rendre la vérité populaire, ne conduise pas à mettre en place un système mondain !

            Mais Dieu va intervenir, et Il le fait par cet homme dont la faiblesse est maintenant si évidente. Il a été broyé, mené au bout de lui-même, et là, comme il montrait ses prouesses devant les Philistins, il réalise qu’il doit se libérer de cet esclavage et que la seule façon d’y arriver, c’est d’être délivré de lui-même. Samson atteint la fin de son esclavage quand il arrive à la fin de lui-même. Il saisit les deux colonnes de la maison des Philistins – car leur temple n’a pas, comme le temple de Dieu, de Jakin ("Il établira"), ou de Boaz ("en Lui est la force"), pour le soutenir (2 Chr. 3 : 17). Puis, se courbant, comme s’il reconnaissait sa folie, il écroule la misérable bâtisse dont les ruines l’écrasent ainsi que ses ennemis.
            Qu’il est solennel que toute la vie d’un homme doive être sacrifiée. Il a fait naufrage. Il est sauvé comme à travers le feu. Tout est fini. Il n’a vraiment vaincu les Philistins que dans sa propre mort. Ce qui les a achevés, l’a aussi complètement achevé.

            Tout à la fin, il est à nouveau insisté sur une leçon déjà vue maintes fois : pour être de vrais vainqueurs, nous devons être vainqueurs sur nous-même. C’est quand Samson en a fini avec lui-même – hélas, à la fin de sa vie – qu’il en a aussi fini avec la puissance de l’ennemi. Pourquoi est-il plutôt rare qu’un lit de mort soit heureux pour un chrétien ? On parle d’un lit de mort heureux comme une chose remarquable, alors que ce devrait être ordinaire pour un croyant qui va à la maison céleste. N’est-ce pas parce que souvent le chrétien ne vient au bout de lui-même que sur son lit de mort ? En fait, sa vie a été passée plus ou moins dans un compromis avec le monde, jusqu’à ce qu’il soit face aux questions éternelles, et la fin de soi arrive avec la fin de vie. Son âme libérée se montre brièvement comme elle monte vers Dieu.
            Nous devrions atteindre notre lit de mort du moi bien avant ce terme, assurément. La fin du moi devrait être atteinte à la croix, et nous devrions demeurer là, nous tenant toujours pour morts au péché, mais pour vivants à Dieu dans le Christ Jésus. Atteignons la fin, non par la providence de Dieu, ou sous sa main en châtiment, ou comme Samson l’a fait, en se supprimant la vie, mais calmement et délibérément, appliquant la croix par la foi à tout ce qui est du vieil homme, de sorte que ce n’est plus moi qui vis, mais Christ qui vit en moi (Gal. 2 : 20). Alors, si tel était le cas, ce serait l’inverse, nous commencerions où Samson a fini, avec la mort de soi, et nous finirions, par conséquent, par un vrai nazaréat selon les desseins de Dieu.

            Nous avons suivi l’histoire de ce pauvre homme, depuis les conseils de Dieu quant à ce qu’il devait être, et nous voyons qu’il n’a pas accompli la volonté de Dieu dans la séparation du monde ; maintenant, à la fin, nous voyons la raison même de tout cela, il n’avait pas atteint la fin de lui-même. N’attendons pas que ce soit un tremblement de terre qui nous amène à la fin de nous-même. Allons dans notre chambre, allons à la chambre de notre propre cœur, et là, saisissons la vérité de la croix de Christ, et demandons à Dieu par le Saint Esprit d’en faire une réalité pratique dans nos âmes, afin de ne pas l’apprendre par une amère expérience. Puissions-nous apprendre par la vérité la réalité de : « Je suis crucifié avec Christ ; et je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi. »

 

D'après S. Ridout