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Le Père aime le Fils

 

            La descente du Saint Esprit comme une colombe sur Jésus au Jourdain est mentionnée au commencement de chacun des quatre évangiles. Les trois premiers répètent la parole qui se fit alors entendre du ciel : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai trouvé mon plaisir » (Matt. 3 : 17) ; « Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi j’ai trouvé mon plaisir » (Marc 1 : 11 ; Luc 3 : 22). Mais l'évangéliste Jean n'en fait pas mention et nous en comprenons la raison. « Le Fils unique, qui est dans le sein du Père » a déjà été présenté à notre attention dès les premiers versets de l'évangile (Jean 1 : 18). Nous savons déjà qui est Celui dont la marche et l'activité sont présentées dans ce quatrième évangile ; nous n'avons donc pas besoin d'une nouvelle déclaration à son sujet. Nous n’y trouvons pas davantage la scène de la transfiguration où la même parole fut entendue par les trois disciples privilégiés : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai trouvé mon plaisir ». En effet dans cet évangile nous sommes, pour ainsi dire, tout au long « sur la sainte montagne ». Ce n'est pas durant un moment fugitif mais du premier au dernier chapitre que nous apparaît la gloire personnelle du Fils. « Nous avons contemplé sa gloire, une gloire comme d'un Fils unique de la part du Père » (Jean 1 : 14), s'écrie l'évangéliste. Pas non plus d'invitation : « écoutez-le » ; elle serait insuffisante. Jésus n'est-il pas la Parole faite chair habitant au milieu de nous, dont Jean dit dans sa première épître qu'il l'a non seulement entendue, mais vue de ses yeux, contemplée, touchée de ses mains ? Et c'est ainsi que le Saint Esprit nous invite à recevoir et à nous approprier par la foi cette Personne qui est « la Parole de la vie » (1 Jean 1 : 1).

            Pourtant nous comprenons que l'Esprit, dont le ministère présent consiste à prendre ce qui est à Christ pour nous le communiquer (Jean 16 : 14), ne puisse passer sous silence l'amour du Fils pour le Père, motif de son obéissance, et ce qui y correspond : l'amour du Père pour le Fils, motif de sa glorification. Mais tandis qu'un seul passage nous présente le premier côté : le Fils aimant le Père (Jean 14 : 31), nous trouvons dans cet évangile sept mentions de l'amour du Père pour son Fils bien-aimé. Comme pour nous inviter, nous aussi, à être occupés de l'amour dont nous sommes les objets plutôt que de nos propres sentiments pour le Seigneur et pour le Père. En se désignant comme « le disciple que Jésus aimait » (13 : 23 ; 19 : 26 ; 20 : 2 ; 21 : 7 ; 21 : 20), Jean avait appris cette leçon-là.  

 

« Le Père aime le Fils et a tout mis entre ses mains » (Jean 3 : 35).

            Remarquons d'abord la place de cette déclaration : elle suit de peu une autre mention de l'amour de Dieu, celle qui concerne le monde : « Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique… » (Jean 3 : 16) - précisément ce Fils dont notre verset vient nous révéler que le Père l'aime. Celui qu'Il a donné pour un monde ennemi, celui-là est l'objet de tout son amour. Fallait-il que fût grand aussi son amour pour le monde !

            D'autre part cette affirmation précède l'incomparable tableau du chapitre 4. Ce Fils du Père, entre les mains duquel toutes choses ont été placées, se fait tributaire pour étancher sa soif d'une pauvre femme pécheresse. C'est pleinement conscient de sa dignité qu'Il remplit son ministère d'amour. De même, au moment où Il va laver les pieds de ses disciples, cette précision est donnée : « Jésus, sachant que le Père lui a tout remis entre les mains… se lève du souper… et commence à laver les pieds des disciples » (Jean 13 : 3-5). Et remarquons le temps du verbe : le Père « a tout mis entre ses mains ». Le Seigneur considère toutes choses comme déjà placées entre ses mains par l'amour du Père. N'est-ce pas la foi qui s'approprie présentement tout ce que Dieu lui a promis ? Certes « nous ne voyons pas encore que tout lui soit assujetti » (Héb. 2 : 8b). L'homme de Sichar n'était pas assis alors sur le trône du Père, mais sur la fontaine de Jacob. Cependant sa foi lui permet de dire avec le Psaume 16 : « un bel héritage m'est échu » !

            Peu de portions de l'Ecriture mettent à ce point en évidence l'abaissement du Seigneur Jésus. Toutes les gloires souveraines reçues de l'amour du Père, Il s'en dépouille pour s'en aller, à la chaleur de midi, par les chemins poussiéreux de ce monde, à la rencontre d'une pauvre âme souillée qui nous représente, vous et moi. Tout ce qu'Il avait, Il l'a vendu pour ce « trésor caché dans un champ » (Matt. 13 : 44) - un champ duquel Il voyait déjà, par la foi, lever une immense moisson d'âmes (Jean 4 : 35). Car de tous les dons de son Dieu, aucun n'a plus de prix pour Lui que ces faibles disciples ; ils sont « ceux que tu m'as donnés du monde » (Jean 17 : 6, 9, 12, 24). Il en a été ainsi de Joseph au jour de son élévation. Le Pharaon l'établit sur tout le pays, mais de tout ce qu'il lui confère et lui donne, rien n'a pour lui le prix d'Asnath, l'épouse d'entre les Gentils qui vient satisfaire les besoins de son cœur. Lorsque sa famille sera constituée, celui qui s'occupe de faire fructifier l'Egypte pourra dire en appelant son second fils Ephraïm : « Dieu m'a fait fructifier dans le pays de mon affliction » (Gen. 41 : 52). Et Joseph, le fils précieux d'Israël, type de Christ, hérite de ce qu'il y a de « plus précieux » ; cette expression est répétée cinq fois dans le chapitre 33 du Deutéronome (v. 13-16).

            C'est le côté de Christ, reconnaissant dans les dons du Père la grandeur de son amour. Mais considérons aussi le côté de Dieu. Il a retiré à l'homme défaillant ce qu'Il lui avait jadis confié, afin de placer ce dépôt en des mains sûres: celles du Fils dont la parfaite obéissance a été démontrée. Il lui a donc tout remis et « en lui assujettissant tout, il n'a rien laissé qui ne lui soit assujetti » (Héb. 2 : 8a). Remarquons toutefois que si Dieu a remis toutes choses à Christ, ce n'est pas seulement parce qu'Il est fidèle, parce qu'Il est sage, parce qu'Il est parfaitement capable de tout administrer. C'est parce que Lui, le Père, l'aime. Ecoutons le serviteur d'Abraham parler d'Isaac, le fils unique et bien-aimé. Son Seigneur « lui a donné tout ce qu'il a » (Gen. 24 : 36). Ecoutons aussi Juda expliquer à Joseph, en peu de mots, ce qu'est pour Jacob Benjamin, ce « fils de ma peine », devenu « fils de ma droite » : « Son père l'aime » (Gen. 44 : 20).

 

« Le Père aime le Fils et lui montre tout ce qu'il fait lui-même » (Jean 5 : 20)

            Ici, c'est le Seigneur - mieux placé pour cela que personne - qui reprend cette expression : « Le Père aime le Fils ». Mais Il la complète d'une autre preuve. Ce ne sont pas l'autorité conférée ni tout ce qui Lui a été donné qui proclament cette fois l'amour du Père ; c'est le partage de ses pensées. En montrant au Fils « tout ce qu'il fait lui-même », le Père Lui témoigne la confiance la plus entière. D'une matière générale, faire connaître ses pensées à quelqu'un est une marque d'intimité et d'affection. Au sujet d'Abraham qu'il appelle son ami, l'Eternel s'exprime ainsi : « Cacherai-je à Abraham ce que je vais faire ? » (Gen. 18 : 17). Le Seigneur Jésus dira à ses disciples : « Je vous ai appelés amis, parce que je vous ai fait connaître tout ce que j'ai entendu de mon Père » (Jean 15 : 15). A plus forte raison, Dieu n'a rien à cacher à son Bien-aimé ; il sait qu'il trouvera chez lui des sentiments identiques aux siens au sujet de son travail. Même horreur du mal, même souffrance au sujet du péché, même patience, même grâce inlassablement déployée, même joie au sujet du pécheur converti - en Luc 15, la joie du Berger fait pendant à celle du Père. Le Fils du Très-Haut, l'Admirable, est un avec le Père dans sa puissance, un avec Lui dans son amour… un avec Lui dans l'œuvre de la création, un avec Lui encore dans l'œuvre de la rédemption. « Ils allaient les deux ensemble » (Gen. 22 : 8). Un travail commun lie souvent les cœurs l'un à l'autre ; et nous connaissons tous par expérience le plaisir éprouvé à montrer ce que nous avons fait à quelqu'un qui sait l'apprécier. Pensons à la joie du cœur de Dieu montrant au Fils ce que seul le Fils était capable de comprendre et de goûter.

            C'est aussi dans la mesure où nous nous y intéressons que Dieu nous montrera quelque peu de son travail. Et pourquoi souvent ne voyons-nous pas clair ? Parce que nous avons notre propre pensée, nos propres idées sur la manière de travailler. La lumière ne nous est donnée que dans la mesure où nous sommes dépendants. C'est ce que Jésus réalisait parfaitement quand Il dit dans le verset précédent : « Le Fils ne peut rien faire de lui-même, sinon ce qu'il voit faire au Père… » (Jean 5 : 19a). Il faisait toutes les choses que le Père lui présentait. Enfin Il les faisait de la manière dont Dieu voulait qu'elles soient faites : « quoi que le Père fasse, le Fils lui aussi le fait pareillement » (v. 19b). Modèle pour nous, cette attitude de dépendance était infiniment agréable au cœur de Dieu.

 

« A cause de ceci le Père m'aime, c'est que moi je laisse ma vie afin que je la reprenne » (Jean 10 : 17)

            Ce troisième passage ne nous présente pas comme les deux premiers une conséquence des affections du Père pour le Fils, mais une cause, un motif particulier. Nous n'avons pas ici les délices éternelles de Dieu dans son Bien-aimé selon Proverbes 8 : 30, mais les délices du Fils à faire la volonté du Père selon le Psaume 40, son entier dévouement d'homme parfait à cette volonté de Dieu : « Voici je viens pour faire ta volonté » (Héb. 10 : 9). C'est la raison nouvelle que Christ, comme homme, a donnée à Dieu pour trouver son plaisir en Lui. Nous trouvons là le parfum de l'holocauste, image d'un dévouement total, d'un sacrifice tout entier pour Dieu. Hébreux 10 : 8 cite ce Psaume 40 : « Tu n'as pas voulu de sacrifices, ni d'offrandes, ni d'holocaustes, ni de sacrifices pour le péché, et tu n'y as pas pris plaisir ».

            Dieu n'a pris de plaisir que dans un seul sacrifice - mais alors un plaisir infini -, dans « l'offrande du corps de Jésus Christ, faite une fois pour toutes » (Héb. 10 : 10), et mettant de côté tous les autres sacrifices. « Le Père du juste aura beaucoup de joie », annonce le livre des Proverbes (23 : 24). L'œuvre proprement dite, la manière dont elle a été faite, le motif pour lequel Christ l'a accomplie - « c'est mes délices, ô mon Dieu, de faire ce qui est ton bon plaisir » (Ps. 40 : 8) -, tout cela ne pouvait que réjouir infiniment le cœur du Père.

            Ce qu'aucun homme ne voulait faire, ce qu'aucun ange ne pouvait réaliser, Lui le Fils a voulu et a pu l'accomplir. « Il s'est livré lui-même comme offrande et sacrifice à Dieu, en parfum de bonne odeur » (Eph. 5 : 2). Pour Jésus, l'œuvre qui est devant Lui devient une occasion de goûter (hormis les trois heures d'abandon) quelque chose de plus de l'amour du Père, d'en connaître un aspect nouveau, à savoir l'amour d'approbation répondant à son dévouement total. C'est une expérience nouvelle au-devant de laquelle Il va, pleinement conscient de la satisfaction du cœur de Dieu à son égard. Les trois heures terribles qu'Il va traverser, la mort dans laquelle Il va pénétrer, n'affaibliront en aucune mesure l'infinie tendresse du Père pour lui ; jamais ce Fils, au contraire, ne lui aura été aussi précieux. Inscrutable mystère : Il sera au même moment celui que le Dieu Saint frappe de toute sa colère et celui que le Père chérit de tout son amour - sans le lui témoigner ! C'est de la main du Père que Jésus prend la coupe à Gethsémané. Là seulement, Il emploie cette expression : « Abba, Père », traduisant la plus intime communion dans un tel moment (Marc 14 : 36). La croix, cette nécessité terrible, Le prive de la jouissance de l'amour dont Il est l'objet, mais elle ne remettra aucunement en question celui-ci ; au contraire, Il en connaîtra de nouvelles manifestations quand la coupe aura été bue. « A cause de ceci le Père l'aime… », à cause de ceci les rachetés aussi l'aiment, Lui qui, les aimant « le premier » (1 Jean 4 : 19), a traversé tout cela pour eux.

 

« Comme le Père m'a aimé, moi aussi je vous ai aimés ; demeurez dans mon amour. Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme moi j'ai gardé les commandements de mon Père et je demeure dans son amour » (Jean 15 : 9-10)

            Les chapitres 14 à 16 de cet évangile contiennent les promesses et les consolations que le Seigneur laisse à ses chers disciples pour le temps de son absence - une provision qui suffira jusqu'à son retour. C'est encore celle à laquelle nous puisons aujourd'hui ; sa paix, sa joie, son amour en font partie. Jésus savait que les siens en auraient bien besoin dans un monde qui donne exactement le contraire de ce que Lui donne (Jean 14 : 27) : inquiétude, tristesse, inimitié… La haine du monde serait la part des disciples comme elle avait été celle du Maître. Il les en avertit : « S'ils m'ont persécuté, ils vous persécuteront aussi » (Jean 15: 20).

            Pour nous qui avons besoin d'être aimés et compris, le fait de vivre continuellement dans un climat de haine et de méchanceté serait une situation intenable et désespérante, si nous n'avions pas, ailleurs, une source d'amour toujours nouvelle où désaltérer nos cœurs. Et le Seigneur nous indique où est cette source, nous y conduit, nous invite à y boire comme il y a bu lui-même : elle est dans le cœur de Dieu, elle est donc intarissable. Elle lui a suffi à Lui, Jésus, pour endurer la « contradiction de la part des pécheurs contre lui-même » (Héb. 12 : 3) et aller jusqu'à la croix. Tout était contre lui, mais Dieu était pour lui. Qu'est-ce qui pouvait le soutenir lorsqu'on envoyait des huissiers pour Le prendre, lorsqu'on L'accusait d'avoir un démon, ou qu'on ramassait des pierres pour Le lapider ? L'infinie douceur de l'amour paternel et cela seulement. Tribulation, détresse, persécution… ne pouvaient le séparer de cet amour immuable de son Dieu ni l'en faire douter. Ni mort, ni vie, ni hauteur, ni profondeur, ne pouvaient l'interrompre. Nul ange, nul pouvoir, ni aucune autre créature n'avaient le droit de s'interposer - seule la croix, et c'est ce qu'elle a d'unique, a marqué durant trois heures la seule rupture solennelle de cette ineffable communion. Au contraire dans toutes ces choses, l'amour divin en Christ était plus que vainqueur (voir Rom. 8 : 38-39). S'Il est l'holocauste au chapitre 10, Il est ici la parfaite offrande de gâteau. Le four, la plaque, la poêle, ces formes multiples d'épreuve ardente n'ont fait que manifester toujours davantage « une odeur agréable à l'Eternel » (Lév. 2 : 9).

            Mais cette jouissance de l'amour du Père était - ce verset nous l'apprend - étroitement liée à l'obéissance à sa volonté : « J'ai gardé les commandements de mon Père, et je demeure dans son amour ». N'ayant rien fait d'autre que cette sainte volonté du Père, Il demeurait d'une manière permanente dans son amour. Et comme Lui seul l’avait réalisé, Il ne pouvait donner à ses disciples d'autre exemple que le sien. Leur enjoindre de demeurer dans son amour et de garder ses commandements était une seule et même chose. C'est dans la mesure où nous nous attacherons à faire ce qui Lui est agréable que nous goûterons l'amour du Seigneur, un amour qui nous permettra alors de tout traverser. Associés à Lui dans la haine et le mépris du monde, nous le serons, d'une manière sensible, dans l'amour du Père.

 
 

«Afin…  que le monde connaisse que c’est toi qui m'as envoyé, et que tu les as aimés comme tu m'as aimé » (Jean 17 : 23).

            Après la mort et la vie de Christ, il est ici question de sa gloire. Cette gloire dont Dieu revêtira son Bien-aimé aux yeux de tout l'univers dira publiquement l'amour qu'Il lui témoigne.

            C'est une nécessité morale. Lorsque Jésus était sur la croix, ce défi a été jeté : « Il s'est confié en Dieu, qu'il le délivre maintenant s'il tient à lui, car il a dit : Je suis Fils de Dieu » (Matt. 27 : 43). Le Père juste se devait à lui-même de relever ce défi : Oui, Jésus est son Fils ; oui, Il tient à lui ! Et s'Il ne le délivre pas maintenant, sa gloire n'en sera que plus grande dans la délivrance victorieuse de la mort (Ps. 21 : 5). Parce qu'Il prend son plaisir en lui, il le délivre de la mort (Ps. 18 : 19). Il l'élève au plus haut des cieux. Il lui donne « le nom qui est au-dessus de tout nom » (Phil. 2 : 9), une gloire à la mesure de son amour. Le ciel ouvert dans lequel Christ s'assied, l'œuvre accomplie, proclame plus haut que jamais : « en lui j'ai trouvé mon plaisir ». Celui que la haine du monde a cloué sur la croix, l'amour du Père l'a fait asseoir sur le trône à sa droite.

            Partageant aujourd'hui sa position d'Homme souffrant sur la terre, ses chers rachetés partageront demain sa position d'Homme glorifié dans le ciel. Le jour vient où le monde découvrira avec stupeur qui étaient ces gens qu'il a tant méprisés. Il les a haïs, mais Dieu les a aimés. Philadelphie a peu de force et beaucoup de détracteurs, mais parmi les promesses du Seigneur qui répondent à sa fidélité, celle-ci est particulièrement propre à la consoler: « ils connaîtront que moi je t'ai aimé » (Apoc. 3 : 9). Dieu permet aujourd'hui l'épreuve pour un grand nombre des siens afin de produire le fruit précieux dont parle 1 Pierre 1 : 6-7, et le monde peut se méprendre alors : supposer comme les amis de Job, que le chrétien éprouvé est châtié et condamné pour avoir déplu à Dieu. La vérité doit un jour être rétablie. Dieu justifiera publiquement chacun de ses saints comme Il l’a fait pour Job.

            « Afin que le monde connaisse… ». Le monde n'a pas cru mais il faudra qu'il sache, et pour cela qu'il voie. Il verra l'amour du Père pour le Fils comme il a pu voir l'amour du Fils pour le Père. En effet la même expression, le même motif, se lit au chapitre 14 : « Afin que le monde connaisse que j'aime le Père, et comme le Père m'a commandé, ainsi je fais » (v. 31). Ce qui a montré au monde l'amour du Fils pour le Père, c'est son obéissance, et ce qui lui montrera l'amour du Père pour le Fils, c'est la gloire de ce Fils. Et à ce propos, nous pouvons nous poser la question : Puisque demain le monde saura que nous avons été aimés, peut-il constater aujourd'hui que nous, nous aimons le Seigneur en ce que nous gardons ses commandements ?

 

«Père, je veux, quant à ceux que tu m'as donnés, que là où je suis, moi, ils y soient aussi avec moi, afin qu'ils contemplent ma gloire, que tu m'as donnée ; car tu m'as aimé avant la fondation du monde » (Jean 17 : 24).

            L'avenir de gloire sur lequel nous avons ici comme une échappée se lie au plus lointain passé. Ce verset, a remarqué quelqu'un, embrasse deux éternités : il montre que, dans les âges à venir, toute bénédiction pour nous et toute joie pour le cœur de Christ auront eu leur source dans l'amour du Père pour lui pendant l'éternité passée. Le Seigneur parle dans ce verset 24 de sa gloire antérieure à la fondation du monde, conférée par le Père en témoignage d'amour. Il s'agit d'affections intimes, personnelles, indépendantes de l'œuvre accomplie sur la terre. De cet amour-là il n'est pas dit que le monde pourra le connaître, car pour cela il faudrait être là où Lui est, et le Seigneur a prévenu les hommes incrédules que là où Il sera, eux ne peuvent venir (Jean 7 : 34). En revanche, les siens y ont leur place avec Lui ; c'est à la fois une nécessité pour son amour et une nécessité pour sa gloire. Pour son amour d'abord, parce qu'Il ne veut pas être seul dans le bonheur du ciel ; avoir les siens éternellement près de lui est un besoin de son cœur exprimé ici pour la troisième fois (voir Jean12 : 26 ; 14 : 3). Leur compagnie lui est nécessaire, et pour le montrer, Il donne à sa requête filiale une forme inaccoutumée qui traduit cette exigence : « Père, je veux… ».

            C'est aussi une nécessite pour sa gloire ; il faut que le fruit de son œuvre puisse être admiré, en particulier par la multitude des créatures célestes ; il faut que Christ soit vu comme Celui qui sauve, Celui qui rassemble, Celui qui attire les hommes à lui-même ; il faut qu'il puisse se présenter avec « les enfants que Dieu lui a donnés » (Héb. 2 : 13). La présence de rachetés glorifiera le Rédempteur, celle de « beaucoup de frères » glorifiera le « Premier-né » (Rom. 8 : 29), celle de l'Epouse à son côté glorifiera l'Epoux auquel elle doit tout. Pensée qui dépasse nos entendements : l'Eglise contribue à la gloire de Christ. Le choix qu'Il a fait d'elle, son œuvre pour se l'acquérir, son patient travail pour la rendre moralement semblable à Lui-même et digne de Dieu, ses soins pour la nourrir et la chérir, sa puissance enfin pour la transformer en la conformité du corps de sa gloire et l'enlever sur la nuée, autant de faits bénis qui, tous, le magnifieront Lui-même. Il sera « dans ce jour-là, glorifié dans ses saints et admiré dans tous ceux qui auront cru » (2 Thes. 1 : 10).

            Ainsi, comme l’exprime  un cantique, « l'Eglise portera, dans la gloire future, l'éclat immaculé de Ses perfections ». Mais il n’est pas vraiment question ici de gloires visibles du dehors ; il s’agit plutôt de la découverte par l'Epouse elle-même de quelque chose de nouveau concernant Celui qu'elle aime. Jusqu'alors la faiblesse de nos corps rendait impossible une telle révélation, mais, transformés à son image, nous serons capables de la recevoir. Le témoignage de l'amour éternel du Père pour le Fils, la gloire spéciale qui y correspond, seront alors devant nous. Avec cette Epouse qui lui est si chère, le Seigneur partagera ce qui est sa joie la plus intime. Il lui montrera d'une manière visible ce qui relève d'un domaine invisible : les sentiments du cœur de Dieu pour Lui. Comme les disciples sur la sainte montagne, en même temps que nous apparaîtra la gloire du Seigneur nous apprendrons combien Il est aimé par le Père.

 

« Je leur ai fait connaître ton nom et je le leur ferai connaître, afin que l'amour dont tu m'as aimé soit en eux, et moi en eux » (Jean 17 : 26).

            « Révéler le Père » est la grande pensée qui pour ainsi dire résume le ministère de Christ tel que l'évangile de Jean nous le présente. Dieu s'est révélé sous d'autres caractères au cours d'autres économies et par d'autres intermédiaires. Mais Un seul médiateur était qualifié pour Le faire connaître comme Père, et ce ne pouvait être que le Fils unique qui est dans le sein du Père. Qu'ajoute ce nom aux révélations précédentes, si ce n'est l'amour ? Les noms de Dieu Très-haut, de Dieu tout-puissant expriment sa souveraineté, sa grandeur, sa puissance. Le nom d'Eternel dit déjà davantage ; c'est un nom de relation traduisant son profond intérêt pour son peuple terrestre racheté à main forte. Mais qui dit père dit famille, et une famille est plus qu'un peuple, ce qui l'unit ce n'est pas seulement la race, la langue ou l'histoire, c'est le sang, c'est le nom patronymique et c'est l'amour; son chef n'est pas un souverain distant et qui peut changer, mais un père dont chacun de ses membres tient sa vie. Telle est la famille de Dieu, composée de tous ceux qui, par la foi, ont reçu « le droit d'être appelés enfants de Dieu » (Jean 1 : 12) ; ils sont entrés dans cette famille du Père par la nouvelle naissance, en vertu de l'œuvre de la croix. « Je leur ai fait connaître ton nom », c'est le résumé de la vie de Christ, mais « je le leur ferai connaître », c'est le résultat béni de sa mort et de sa résurrection, l'introduction dans la relation elle-même, selon le message capital qu'Il a hâte de faire parvenir aux siens aussitôt après sa résurrection : « Je monte vers mon Père et votre Père » (Jean 20 : 17). Ces quatre mots : « mon Père, votre Père », contiennent un infini de bénédictions ! C’est leur dire : Vous partagez les affections dont je jouis moi-même et dont ma délivrance est la preuve, vous êtes désormais et pour toujours en relation avec ce Dieu qui est un Père, vous entrez dans une sphère toute nouvelle de liberté, de sécurité, d'intimité où mon œuvre vous a placés. Ne doutez jamais du Dieu qui a fait de si grandes choses pour moi. Et vivez, vous aussi, dans la puissance de cet amour.

            L'amour dont Jésus est aimé est ainsi devenu ma part ; il est en moi, sentiment filial et principe victorieux d'une marche sainte, car avoir ce Dieu-là pour Père m'engage à le représenter dignement devant les hommes. Noblesse oblige, et nous ne sommes rien de moins qu'enfants de Dieu.

            « … Et moi en eux », ajoute le Seigneur. Resterait-il étranger à une communion qui lui doit tout ? C'est impossible : Il a promis au disciple obéissant qu'Il ferait sa demeure chez lui (Jean 14 : 23). Là où le Père est respecté, servi et adoré, le Fils reconnaît sa propre image. Il est « chez lui ». Il remplit l'âme de sa présence et du sentiment de son approbation. Quelle joie nous lui donnons alors !

            En ce qui nous concerne, nous sommes souvent jaloux et exclusifs dans nos affections, à l'image de certains enfants qui ne partagent pas volontiers avec d'autres l'attention et la tendresse de leurs parents. Quel contraste avec l'amour de Christ dont tout le désir est d'élargir ce cercle dont Il est le centre, et de faire entrer ceux qu'Il appelle ses frères dans la connaissance du cœur de Dieu tel qu'Il le connaît lui-même ! « Le Père lui-même vous aime », leur rappelle-t-il (Jean 16 : 27) pour les encourager à s'adresser directement à Lui par la prière.

  

            Rien n'a pour Jésus l'importance de ce fait suprême : l'amour du Père pour lui, motif de sa vie, de sa mort, de sa résurrection, de sa gloire. Avec qui partagerait-Il ce secret si ce n'est avec les siens ? Et sans doute, si nous aimons le Seigneur, nous nous en réjouirons d'abord à cause de Lui. Pourrions-nous rester étrangers à ce qui a été ici-bas sa continuelle consolation et reste sa joie pour l'éternité ? Nous nous réjouirons aussi à cause du Père. Quel Fils Jésus est pour Lui ! Déçu par l'homme - si nous pouvons nous exprimer ainsi -, Dieu trouve en Christ, le second homme, celui qui satisfait pleinement son cœur. Mais nous apprenons aussi quelle part nous avons dans ce fait merveilleux ; le Père nous aime parce qu'Il aime Jésus, et comme il aime Jésus (Jean 17 : 23). Et c'est comme si le Seigneur nous disait : Puisque vous êtes à moi qui suis si cher au cœur de Dieu, vous êtes au bénéfice de son amour pour moi. Contemplez-moi par la foi à la place où le Père m'a mis; c'est en constatant à quel point Il m'aime que vous comprendrez combien vous, vous êtes aimés.

 

                                       D'après Jean Koechlin - « Messager Evangélique » 1975 p. 7-16 ; 33-39