LES DISPENSATIONS (3)
2. Esquisse des diverses dispensations (suite)
Le ministère de Jésus
Les années du ministère de Jésus sur la terre constituent une période de transition entre la dispensation de la loi et celle de l'Eglise. Elles appartiennent déjà au temps de la grâce, mais pas encore à celui de l'Eglise, qui ne commence que le jour de la Pentecôte.
Il est bien naturel que les chrétiens cherchent dans les Evangiles, dans les enseignements du Christ lui-même, l'essence du christianisme. Dans un sens, c'est juste : les paroles et les actes de Jésus ont une valeur insurpassable pour le coeur de tout vrai croyant. Cependant, le Seigneur lui-même a dit : « J'ai encore beaucoup de choses à vous dire ; mais vous ne pouvez les supporter maintenant. Mais quand... l'Esprit de vérité sera venu, il vous conduira dans toute la vérité» (Jean 16 : 12-13). Le christianisme ne pouvait pas être révélé dans sa plénitude avant l'achèvement de l'oeuvre de Christ à la croix et son élévation dans la gloire.
Le Seigneur est venu sur la terre pour accomplir ce qui était annoncé de Lui dans l'Ancien Testament. Toutes les espérances des fidèles en Israël étaient concentrées sur Celui qui devait venir et sur le règne glorieux qu'Il devait instaurer (cf. Matt. 11 : 3). Le rejet du Messie était, bien sûr, parfaitement connu de Dieu, et les prophètes en avaient parlé, mais le Seigneur ne s'est pas présenté à Israël comme le Roi rejeté. Il s'est présenté comme celui qui devait être accueilli.
Cela donne un caractère particulier au message qu'Il a apporté, du moins au début de son ministère. Il s'est adressé d'abord à un peuple qui avait des espérances terrestres, qui attendait le royaume de Dieu sur la terre. Ce n'est que petit à petit, tandis que son rejet devenait plus évident, qu'il a fait comprendre aux siens qu'ils n'avaient rien à attendre sur la terre. Le royaume de Dieu est devenu le royaume des cieux, expression caractéristique de Matthieu. Le royaume est bien pour la terre, mais le Roi sera pour un temps caché dans les cieux. Le royaume prendra une forme mystérieuse, non annoncée dans l'Ancien Testament. Dans Matthieu, la progression du rejet de Jésus est particulièrement bien marquée. Dans Jean, par contre, le Seigneur nous est déjà présenté dès le premier chapitre comme rejeté (v. 5, 10, 11).
Le témoignage du Seigneur Jésus parmi les Juifs était pour eux une nouvelle mise à l'épreuve, après celle de la loi. Dans la parabole du figuier, le maître dit au vigneron : « Voici trois ans que je viens chercher du fruit sur ce figuier, et je n'en trouve point : coupe-le, pourquoi aussi occupe-t-il inutilement la terre ? » (Luc 13 : 7). Le figuier est l'image d'Israël. Ce peuple devait être mis de côté lorsqu'il aurait donné la preuve qu'en dépit des meilleurs soins qui pouvaient lui être prodigués, il était incapable de porter du fruit pour Dieu. En fait c'était un test de l'homme dans la chair. Et tant que ce test n'était pas achevé, tout ce qui découlait de ses résultats ne pouvait pas encore être enseigné.
Beaucoup des enseignements du Seigneur à ses disciples ont un caractère juif très clair. Il en est particulièrement ainsi des discours prophétiques (Matt. 24 et 25 ; Marc 13 ; Luc 21). Lorsque le Seigneur parle de son retour, il est presque toujours question de sa venue en gloire sur la terre, et non de sa venue pour prendre les siens auprès de lui dans le ciel. Cet événement-là se trouve bien annoncé en Jean 14 : 3, et même très clairement, mais le plus souvent le Seigneur envisage son retour dans la perspective des promesses faites à Israël, qui sont toutes en rapport avec la terre. La période de l'Eglise s'insère, comme une merveilleuse parenthèse, dans l'histoire d'Israël. De sorte que, dans le développement de cette histoire, la « génération » qui précède immédiatement l'ouverture de la parenthèse et celle qui la suit immédiatement sont identifiées : « Cette génération ne passera point que tout ne soit arrivé » (Luc 21 : 32).
C'est à cette « génération »-là que le Seigneur enseigne la prière connue sous le nom de l'oraison dominicale (Matt. 6 : 9-13). Cette prière est sans doute pleine d'instruction pour nous, comme d'ailleurs celles que nous trouvons dans l'Ancien Testament, mais elle n'est guère adaptée à la dispensation chrétienne. Dans celle-ci, le principe même d'une prière apprise et récitée n'est pas en accord avec la grande ressource du Saint Esprit par lequel nous pouvons prier, et qui nous conduit à exprimer nos besoins spécifiques (Eph. 6 : 18 ; Jude 20).
Le désarroi des disciples au moment de la crucifixion montre bien qu'ils n'avaient pas encore saisi le plan de Dieu. « Nous espérions qu'il était celui qui doit délivrer Israël » (Luc 24 : 21). Et même, après la résurrection, ils demandent : « Seigneur, est-ce en ce temps-ci que tu rétablis le royaume pour Israël ? » (Act. 1 : 6). Les choses ne deviendront claires pour eux qu'après la descente du Saint-Esprit sur la terre.
On peut dire, un peu paradoxalement, que les évangiles ne constituent pas tout l'évangile! Dans ceux-ci, nous voyons le Seigneur Jésus, le Fils de Dieu devenu homme sur la terre, apportant la grâce et la vérité. D'une part, Il est ému de compassion envers ses créatures perdues, révélant le coeur de Dieu, agissant en grâce et en bonté. D'autre part, il est la lumière divine qui manifeste le vrai état de tout homme - aussi bien celui du pharisien fier de sa propre justice que celui du plus grand pécheur. Il montre que tous sont perdus, ont besoin d'un Sauveur, et qu'il est, Lui, celui qui sauve. Il fait appel à la foi de ceux auxquels il s'adresse, et Il donne la vie éternelle à celui qui croit en Lui. Sa venue dans le monde, sa vie, sa mort, sa résurrection et son élévation dans la gloire sont des faits qui constituent le fondement de l'évangile. La prédication de l'évangile est d'abord la proclamation de ces grands faits, attestés par de nombreux témoins (cf. Act. 2 : 32 ; 4 : 20 ; 5 : 32 ; 13: 31 ; 1 Cor. 15 : 1-8). Et l'Esprit de Dieu développe plus tard, par le moyen des apôtres, tout ce qui découle de la venue et de l'oeuvre de Christ. C'est donc dans les épîtres que l'on trouve l'enseignement complet concernant la ruine de l'homme, la certitude du salut, les deux natures, notre mort avec Christ, l'affranchissement, l'action du Saint-Esprit, l'appel céleste...
L'Eglise et la période chrétienne
Le Seigneur avait parlé de l'Eglise (ou assemblée) comme d'une chose future : « Je bâtirai mon assemblée » (Matt. 16 : 18). Celle-ci a commencé d'exister le jour de la Pentecôte, lors de la venue du Saint Esprit sur la terre. La présence du Fils de l'homme glorifié dans le ciel, et celle du Saint Esprit sur la terre, liant les croyants à Christ dans le ciel, donnent au christianisme son caractère particulier.
Nous reviendrons plus loin sur le sujet de l'Eglise, et des différences caractéristiques entre cette dispensation et celles qui l'entourent. Disons ici quelques mots sur les révélations divines qui prennent place dans cette période.
Le Seigneur Jésus, nous venons de le rappeler, avait encore beaucoup de choses à dire à ses disciples, mais ils ne pouvaient pas les supporter alors. Avant sa mort, sa résurrection et son élévation dans la gloire, ces choses ne pouvaient être révélées. Elles ne pouvaient être comprises que par l'action du Saint Esprit en ceux qui allaient le recevoir (Jean 16 : 12-13). Pour les croyants, posséder l'Esprit est un privilège inestimable. « L'Esprit sonde toutes choses, même les choses profondes de Dieu... Nous avons reçu, non l'esprit du monde, mais l'Esprit qui est de Dieu, afin que nous connaissions les choses qui nous ont été librement données par Dieu » (1 Cor. 2 : 10-12).
Il a été accordé à celui « qui auparavant était un blasphémateur, et un persécuteur, et un outrageux » (1 Tim. 1 : 13), un service spécial quant à « l'administration de la grâce de Dieu » (Eph. 3 : 2). Un mystère, qui en d'autres générations n'avait pas été donné à connaître, a été révélé par l'Esprit aux apôtres et prophètes du Nouveau Testament (3 : 5). Et très particulièrement à l'apôtre Paul. « A moi, qui suis moins que le moindre de tous les saints, cette grâce a été donnée d'annoncer parmi les nations les richesses insondables du Christ » (3 : 8).
Les épîtres de Paul développent ces richesses. Il n'est guère possible de les exposer ici, mais soulignons deux faits importants à cet égard.
- Avec ce qui a été communiqué aux apôtres, notamment à Paul, s'achève le cycle des révélations de Dieu aux hommes. Paul parle de l'administration qui lui a été donnée, « pour compléter la parole de Dieu » (Col. 1 : 25). Toute prétention à de nouvelles révélations n'est donc qu'une imposture!
- Si le Seigneur Jésus ne pouvait pas encore exposer tous les éléments de la vérité chrétienne, Il a pourtant mis son sceau par avance sur la plupart d'entre eux, par une brève mention. C'est une constatation très encourageante! Citons quelques exemples :
*La venue du Seigneur pour enlever à Lui les siens est développée dans les épîtres de Paul (en particulier: 1 Cor. 15 : 51-58 ; 1 Thes. 4 : 13-18), mais le Seigneur Jésus en a dit l'essentiel en Jean 14 : 3 : « Si je m'en vais et que je vous prépare une place, je reviendrai, et je vous prendrai auprès de moi ; afin que là où moi je suis, vous, vous soyez aussi ».
*La doctrine de l'assemblée est présentée dans les épîtres, mais le Seigneur y a fait des allusions claires en Matthieu 16 et 18.
*L'introduction des nations dans les privilèges qui découlaient des promesses faites à Israël n'a eu lieu qu'après la révélation faite à Pierre en Actes 10. Et la position particulière de ce peuple durant l'époque de l'Eglise est exposée dans les épîtres. Mais le Seigneur, qui pourtant n'était « envoyé qu'aux brebis perdues de la maison d'Israël », y avait déjà fait allusion. Il avait dit : « Plusieurs viendront d'orient et d'occident, et s'assiéront avec Abraham et Isaac et Jacob dans le royaume des cieux ; mais les fils du royaume seront jeté dans les ténèbres de dehors » (Matt. 8 : 11-12).
*L'union du croyant avec Christ, largement développée dans les épîtres, avait déjà été décrite en quelques mots par le Seigneur : « En ce jour-là, vous connaîtrez que moi je suis en mon Père, et vous en moi et moi en vous » (Jean 14 : 20).
Les jugements futurs
Les croyants de l'époque actuelle - auxquels seront joints les croyants de tous les temps passés, ressuscités par la puissance du Seigneur Jésus - seront enlevés au ciel à son retour. Dès ce moment, il n'y aura plus de chrétiens sur la terre, ni d'Eglise, si ce n'est ce qui restera de ses formes extérieures : une profession sans vie - la grande Babylone - sur laquelle le jugement le plus sévère va tomber (Apoc. 17 et 18). Dans l'Apocalypse, l'histoire de l'Eglise est esquissée prophétiquement dans les chapitres 2 et 3, au moyen des lettres aux sept assemblées d'Asie. Ce sont « les choses qui sont » (1 : 19). A partir du chapitre 4, nous avons « les choses qui doivent arriver après celles-ci » (1 : 19 ; 4 : 1), c'est-à-dire les jugements terribles qui tombent sur toute la terre. Ceux dont la responsabilité est particulièrement grande, parce qu'ils ont été mis en contact avec la vérité, sont l'objet d'un jugement extrêmement sévère : « Et à cause de cela, Dieu leur envoie une énergie d'erreur pour qu'ils croient au mensonge, afin que tous ceux-là soient jugés qui n'ont pas cru la vérité, mais qui ont pris plaisir à l'injustice » (2 Thes. 2 : 11-12). Tel sera le sort des nations dites christianisées.
Mais au sein des douleurs inimaginables de cette période, l'Apocalypse nous montre la présence d'un résidu juif fidèle, persécuté et soupirant après la délivrance. Leurs souffrances culmineront durant la période de trois ans et demi appelée la grande tribulation (Matt. 24 : 21), dans laquelle l'épreuve atteindra une intensité jamais égalée sur la terre. Par ces tribulations, Dieu produira un travail de conscience dans beaucoup de coeurs et les amènera à se repentir (Ezé. 36 : 24-32 ; Osée 2 : 14-23 ; Zach. 12 : 8-14). Lorsque ce travail sera complet, l'Éternel renouera ses relations avec Israël, qu'Il appellera de nouveau « mon peuple » (Osée 2 : 23).
De nombreuses prophéties de l'Ancien et du Nouveau Testament concernent cette période. C'est le cas des Psaumes, dont beaucoup présentent les sentiments, les angoisses et les supplications des fidèles, ou même leurs appels à la vengeance. C'est aussi le cas (du moins en bonne partie) des discours prophétiques du Seigneur dans les trois premiers Evangiles. Il est clair que tout ceci est en dehors du terrain chrétien, bien que nous puissions toujours y trouver de l'instruction.
L'évangile du royaume, que le Seigneur avait annoncé en Israël au début de son ministère, sera de nouveau proclamé, mais cette fois-ci à toutes les nations, pour annoncer l'avènement du règne millénaire (Marc 13 : 10). Cet évangile est appelé l'évangile éternel en Apocalypse 14 : 6. Beaucoup le recevront dans leur coeur (Es. 2 : 3-4 ; Zach. 8 : 22-23). Mais, de gré ou de force, tout homme devra s'incliner devant le Dieu tout puissant, Créateur et Juge, et lui donner gloire.
Le Millénium
Lorsque la terre aura été purifiée par les jugements, lorsque tout ce qui est opposé à Dieu aura été balayé, viendront « les temps de rafraîchissement », « les temps du rétablissement de toutes choses dont Dieu a parlé par la bouche de ses saints prophètes de tout temps » (Act. 3 : 19, 21).
C'est effectivement dans l'Ancien Testament que l'on trouve le plus de renseignements concernant ce règne de justice et de paix. L'Apocalypse, qui fixe sa durée à mille ans, nous dit que pendant ce temps Satan sera lié, en prison, hors d'état de séduire (20 : 1-3, 7).
Mais n'oublions pas que ce règne millénaire est le règne de Christ sur la terre ! C'est ce grand fait qui est surtout mis en évidence dans les passages des épîtres qui en parlent. A cette dernière dispensation, l'épître aux Ephésiens donne le nom de la plénitude des temps. C'est la période de l'accomplissement de tous les des desseins et toutes les voies de Dieu, pour la gloire de son Fils. Dieu nous a « fait connaître le mystère de sa volonté selon son bon plaisir, qu'il s'est proposé en lui-même pour l'administration de la plénitude des temps, savoir de réunir en un toutes choses dans le Christ, les choses qui sont dans les cieux et les choses qui sont sur la terre, en lui » (1 : 9-10). Actuellement, nous ne voyons pas encore que toutes choses soient assujetties à Christ (Héb. 2 : 8), bien que, dans un sens, il en soit ainsi (Eph. 1 : 22). Glorifié et exalté, il est « Chef sur toutes choses » et a été donné comme tel à l'assemblée qui est son corps. L'existence du mal sur la terre (et dans le ciel, puisque Satan s'y trouve encore), l'existence de volontés humaines opposées à celle de Dieu, sont des éléments de désordre qui empêchent la réalisation de l'unité parfaite sous la main de Christ. Mais Dieu veut réunir en un toutes choses, dans les cieux et sur la terre, dans une harmonie et un ordre parfaits. Et cela se réalisera par assujettissement de toutes choses à Christ.
Or, en lui « nous avons aussi été faits héritiers », ajoute l'apôtre (v. 11). C'est le privilège inestimable de l'Eglise. Ceux qui sont unis à Christ comme étant les membres de son corps sont introduits dans sa relation avec son Dieu et Père, et ils lui seront associés dans sa position glorieuse de chef sur toutes choses. Ils régneront avec lui (Apoc. 5 : 10). Ainsi, Celui qui a été un objet de mépris sur cette terre de péché y sera honoré comme il en est digne.
A la fin de cette dernière et glorieuse dispensation, Christ remettra le royaume à Dieu le Père (1 Cor. 15 : 24). Un passage de l'Apocalypse nous dépeint brièvement les derniers événements qui se passeront sur la terre : « Quand les mille ans seront accomplis, Satan sera délié de sa prison ; et il sortira pour égarer les nations ... » (voir Apoc. 20 : 7-10). Le règne de justice et de paix n'aura pas changé le coeur de l'homme, et tous ceux qui s'étaient soumis « en dissimulant » (Ps. 18 : 44) se laisseront entraîner par Satan à la révolte contre Christ et « les saints ». Mais le jugement de Dieu ne tardera pas à les consumer. « Le premier ciel et la première terre » disparaîtront et feront place à « de nouveaux cieux et une nouvelle terre, dans lesquels la justice habite » (2 Pier. 3 : 7, 10, 13 ; Apoc. 21 : 1).
L'état éternel qui suivra ne peut guère être considéré comme une dispensation. Dans cet état de gloire et de perfection, l'homme ne sera plus dans une condition de responsabilité devant Dieu, comme étant dépositaire d'une révélation particulière de sa part.
J.-A. M – article paru dans le « Messager Evangélique » (1998 p. 267-276)
(A suivre)