Témoignage et doutes de Jean-Baptiste
« Aux jours d'Hérode, roi de Judée, il y avait un sacrificateur, nommé Zacharie, de la classe d'Abia ; sa femme était de la descendance d'Aaron, et son nom était Elisabeth. Ils étaient tous deux justes devant Dieu, marchant dans tous les commandements et dans toutes les ordonnances du Seigneur, sans reproche. Ils n'avaient pas d'enfant, parce qu'Elisabeth était stérile ; et ils étaient tous deux très âgés » (Luc 1 : 5-7).
Zacharie officiait dans le temple au moment où l'ange Gabriel – qui signifie Dieu est puissant - lui apparaît, à côté de l'autel du parfum, porteur d'un message divin. Un fils va être donné à ce couple de Zacharie et Elisabeth : il s'appellera Jean. Mis à part pour Dieu dès sa naissance, ce sera un grand prophète (Luc 7 : 28), chargé d'appeler Israël à la repentance, dans l'attente de la venue du Messie (v. 17 ; Zach. 4 ; 5-6). Il sera grand devant le Seigneur, rempli de l'Esprit Saint dès le ventre de sa mère.
Malgré l'annonce de ces bonnes nouvelles (v. 19), Zacharie se montre incrédule. Il est alors réduit au silence jusqu'à la naissance de cet enfant (v. 20). Dieu va l'instruire en secret pendant les neuf mois qui vont suivre (Job 43 : 5). Aussi, quand l'enfant est né, Zacharie demande des tablettes et il écrit : « Jean - qui signifie faveur de Dieu - est son nom » (v. 63). L'usage de la parole lui est aussitôt rendu et il bénit Dieu : il célèbre la grande délivrance que l'Eternel va accomplir en faveur de son peuple.
La pensée centrale qui se dégage de toute sa prophétie concerne évidemment Jésus. Il est cette « Corne de délivrance » suscitée dans la maison de David (v. 69). Avec joie, Zacharie déclare : « L'Orient d'en haut nous a visités » (v. 78). Déjà, comme il le fera durant toute sa vie, Jean-Baptiste s'efface devant Christ (Jean 4 : 30).
Cependant son père, dirigé par l'Esprit, précise la part éminente confiée à Jean : il sera le « précurseur » du Seigneur, son fidèle héraut. Dieu l'a choisi en vue de ce service : il annoncera « jusqu'à ce qu'il achève sa course » la venue d'Un plus grand que lui, le Sauveur du monde (Marc 1 : 7 ; Act. 13 : 25).
« Et toi, petit enfant, tu seras appelé prophète du Très-Haut : car tu iras devant la face du Seigneur pour préparer ses voies, pour donner la connaissance du salut à son peuple, dans le pardon des péchés, par la profonde miséricorde de notre Dieu, selon laquelle l'Orient d'en haut nous a visités, afin de luire à ceux qui sont assis dans les ténèbres et dans l'ombre de la mort, pour conduire nos pieds dans le chemin de la paix » (Luc 1 : 76-79).
Il est peu question, comme pour son Seigneur, de la jeunesse de Jean le baptiseur. En entendant Zacharie, ses voisins ont été saisis de crainte. Ils gardent ses paroles dans leur coeur et se demandent : « Que sera donc cet enfant ? Et la main du Seigneur était sur lui » (v. 65-66 ; Ps. 119 : 173). « L'enfant grandissait et se fortifiait en esprit ; et il resta dans les déserts jusqu'au jour de sa manifestation à Israël (v. 80). Toutefois il n'est qu'une faible image de Celui dont bientôt il annoncera la venue (Luc 2 : 40, 52).
Jean avait tous les caractères du nazaréen (Nom. 6 : 1-8). Rien ne l'attirait dans la région environnante, pourtant prospère : elle était pour lui un désert. Quand Dieu l'envoie prophétiser (Luc 3 : 2-5) dans ce monde agité, il en sent le vide. Il sera cette voix qui crie dans le désert, annoncée par Esaïe : « Repentez-vous, car le royaume des cieux s'est approché... Préparez le chemin du Seigneur, faites droits ses sentiers » (Es. 40 : 3 ; Matt. 3 : 1-4). Un appel qui fait suite à la ruine morale irrémédiable d'Israël.
Il ne cherchait pas à se vêtir de vêtements précieux (Luc 7 : 25), il portait un manteau en poil de chameau et une ceinture de cuir autour de ses reins. Sa nourriture ? Des sauterelles et du miel sauvage ! (Matt. 3 : 4). Il dépendait donc uniquement de ce que Dieu lui préparait sur cette terre aride. Tout cela paraît étrange pour ceux qui « habitent « sur la terre (Apoc. 3 : 10 ; 8 : 13) ! Le Seigneur dira : « Jean est venu ne mangeant ni ne buvant, et ils disent : Il a un démon ! » (Matt. 11 : 18).
Quelles sont les personnes qui viennent au baptême de la repentance ? Beaucoup avaient jusqu'ici marché dans la corruption et la violence; mais elles ont reconnu et jugé leur conduite (Matt. 21 : 32). Des pharisiens et des sadducéens viennent aussi, avec la foule, mais sans vraie repentance ni foi. Aussi Jean leur parle-t-il du jugement qui les attend, s'ils restent dans leurs péchés. Il n'hésite pas à les traiter de « race de vipères » et les avertit que « la cognée est déjà mise à la racine des arbres » (Matt. 3 : 7-10).
Or voici que Jésus, contre toute attente, vient aussi au Jourdain avec l'intention de s'associer à ce baptême de la repentance ! Jean lui résiste et lui dit : « C'est moi qui ai besoin d'être baptisé par toi, et c'est toi qui viens à moi ! » (v. 14). En réponse à Jean, le Seigneur va prononcer sa première parole dans cet évangile : « Laisse faire maintenant, car ainsi il nous est convenable d'accomplir toute justice » (v. 15). Alors Jean le laisse faire et Jésus remonte aussitôt de l'eau, car Il n'avait rien à confesser. Le ciel s'ouvre, l'Esprit de Dieu descend sur Lui et y demeure, sous la forme d'une colombe. Une voix vient d'en Haut ; Jésus reçoit de son Père une parole d'amour et d'approbation : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui j'ai trouvé mon plaisir » (Matt. 16 : 17).
« Moi, je suis la voix de celui qui crie dans le désert : faites droit le chemin du Seigneur, comme dit le prophète Esaïe… Moi, je baptise d'eau ; mais au milieu de vous il y en a un que vous ne connaissez pas, celui qui vient après moi, et dont je ne suis pas digne de délier la courroie de sandale » (Jean 1 :23, 26-27)
Jean, par grâce, tout au long de sa carrière ne se départit pas de son humilité. Il est estimé être moins que rien. On lui envoie de Jérusalem des sacrificateurs et des lévites lui demander qui il est. Il confesse : « Je ne suis pas le Christ », et, pressé par leurs questions importunes, il leur dit : « Je suis la voix de celui qui crie dans le désert » (Jean 1 : 20-27). Jean est envoyé pour rendre témoignage à la Lumière - c'est de Christ qu'il s'agit - (v. 7), à la Parole devenue chair - c'est aussi Christ - (v. 14). En revanche, il rend un témoignage négatif en précisant à ses interlocuteurs tout ce qu'il n'est pas (v. 19).
Son plus grand témoignage, il le rend en voyant Jésus venir à lui. Il déclare : « Voilà l'Agneau de Dieu qui ôte le péché du monde ! C'est de Celui-ci que j'ai dit : Après moi vient un homme qui prend place avant moi, car il était avant moi. Et moi, je ne le connaissais pas ; mais c'est afin qu'Il soit manifesté à Israël que je suis venu baptiser d'eau » (Jean 1 : 29-31). Il découvre avec bonheur en Jésus la Victime parfaite et le Sauveur. Il Lui rend un autre témoignage : Il est le Fils de Dieu (v. 34).
Et le lendemain encore, Jean en compagnie de deux de ses disciples, contemplant Sa marche, s'écrie : « Voilà l'Agneau de Dieu ! » (v. 36). Son coeur est à ce moment-là rempli de conviction et de joie. L'entendant parler ainsi, ses deux disciples suivent Jésus et demeurent auprès de Lui ce jour-là (v. 37, 39).
Certains des disciples de Jean étaient sans doute jaloux en voyant leur maître perdre de plus en plus d'importance au profit de Jésus (Jan 4 : 1). On le sent dans leurs paroles : « Celui… à qui tu as toi-même rendu témoignage, voilà Il baptise et tous viennent à Lui » (Jean 3 : 26).
Or Jean est « l'ami de l'époux » ; sa mission – la nôtre aussi d'ailleurs - est justement d'aider les âmes à s'attacher à Christ ! Avons-nous appris à nous effacer devant Lui. Il doit, Lui seul, posséder le coeur de son racheté, acquis à si grand prix.
Jean rappelle alors à ses disciples ce qu'il avait déjà dit : il n'est pas le Christ. « Celui qui a l'épouse, c'est l'époux ; mais l'ami de l'époux, qui se tient là et l'entend, est tout réjoui à cause de la voix de l'époux. Cette joie donc, qui est la mienne, est accomplie. Il faut que Lui croisse et que moi je diminue. Celui qui vient d'en haut est au-dessus de tous » (Jean 3 : 28-31). Cherchons à mesurer un peu la valeur de telles paroles. La joie de Jean est parfaite ; elle est goûtée dans sa relation avec le Seigneur. Il sait qu'elle est inférieure à celle de ceux qui feront partie de l'épouse ! Jean apprécie, à sa juste valeur, la relation des rachetés. La sienne lui suffit, il n'en désire pas d'autre. Telle est la touchante humilité de celui dont Jésus dira qu'il est le plus grand parmi ceux qui sont nés de femme (Matt. 11 : 11). Sa part précieuse est justement de faire ressortir la gloire de Celui qui seul en est digne.
« Jean, qui avait entendu parler dans sa prison des oeuvres du Christ, envoya ses disciples pour lui dire : Es-tu celui qui vient ou devons-nous en attendre un autre ? Jésus leur répondit : Allez, rapportez à Jean ce que vous entendez et voyez : les aveugles retrouvent la vue et les boiteux marchent ; les lépreux sont rendus purs, les sourds entendent, les morts ressuscitent, et l'évangile est annoncé aux pauvres ; et bienheureux quiconque ne sera pas scandalisé à mon sujet » (Matt. 11 : 2-6)
Jusqu'ici, nous avons un brillant aperçu du témoignage rendu par cet homme de foi. Mais il y a eu chez lui un moment de faiblesse et de défaillance. Comme le prophète Elie, il aura un temps de découragement. Il est retenu en prison, à cause de sa fidélité : il avait rendu une fois encore témoignage à la vérité. Il avait repris le tétrarque Hérode qui avait pris Hérodias, la femme de son frère Philippe : « Il ne t'est pas permis de l'avoir » (Matt. 14 : 1-4). Hérode n'osait pas le mettre à mort, à cause du peuple juif. Il avait donc fait lier cet homme juste et le gardait soigneusement. Il le craignait, mais quand il l'avait entendu, il faisait beaucoup de choses (Marc 6 : 20).
Comme les disciples, Jean avait, sans doute, pensé que le règne glorieux de Christ allait s'instaurer rapidement. Or, le peuple ne s'était pas réuni autour de Lui. Malachie n'avait-il pas annoncé que le Seigneur viendrait soudain dans son temple, sur les pas de son messager ? (Mal. 3 : 1). Or le Seigneur était de plus en plus méprisé et rejeté.
Dans le coeur du serviteur, durant les longues heures de solitude, l'Ennemi avait, semble-t-il, réussi à semer le doute. Jean aurait dû se demander d'abord s'il était lui-même vraiment « le messager » désigné pour annoncer la venue du Messie. Hélas, dans nos défaillances, nous sommes plutôt portés à douter de Dieu. Jean, ne doutait pas du Seigneur mais de son caractère messianique. Dans ses angoisses, il se tourne vers Jésus qui poursuivait infatigablement son ministère, pour retrouver des certitudes de foi.
Jésus était allé à Naïn où il avait ressuscité le fils unique d'une veuve. Un mort qui était déjà sur le chemin du cimetière ! Il avait montré, une fois encore, que Celui qui est « la résurrection et la vie » était là et que Dieu « visitait » son peuple ; pourtant, celui-ci ne s'était pas tourné vers le Seigneur pour être sauvé (Luc 7 : 16). Jean a entendu parler dans sa prison de cette résurrection. Il envoie alors deux de ses disciples demander au Seigneur : « Es-tu celui qui vient ou devons-nous en attendre un autre ? » (Matt. 11 : 3 ; Luc 7 : 20). Lui-même avait, quelques mois auparavant, affirmé que Jésus était l'Agneau de Dieu (Jean 1 : 29-30) ; or le jeune prophète est maintenant incertain, déçu, semble-t-il. Il fallait pourtant reconnaître dans toutes ces oeuvres la main de l'Envoyé de Dieu. Mais par ailleurs une partie de l'action du Messie, que Jean avait annoncée, était laissée de côté. Il s'agissait du jugement que le Seigneur doit exercer à l'égard de son peuple et sur le monde (Matt. 3 : 10-12) au commencement de son règne sur la terre.
Jean n'avait pas compris que ce jugement était à venir, et il l'est encore. Le Messie devait être d'abord rejeté - avant de régner. Il établirait, après sa mort sur la croix pour expier nos péchés, et la période actuelle de la grâce, un nouvel ordre de choses. Le « retard » apparent que Jean constatait, avait son explication dans la longue patience divine. Mais le jour du jugement viendra subitement, dès que l'Eglise aura été enlevée.
En attendant Jésus accomplissait seulement des oeuvres de grâce. Il avait même déclaré qu'Il n'était pas venu pour juger mais pour sauver (Jean 3 : 17). Cette façon de se conduire, était perçue par Jean comme contradictoire ; d'où son doute momentané. Ses disciples estimaient probablement inconcevable que leur maître, Jean le Baptiseur, ce précurseur fidèle de Jésus, reste emprisonné. Jean désire que Jésus l'éclaire.
Ses disciples vont recevoir une réponse pleinement satisfaisante. Mais ce n'est pas d'abord des paroles mais des actes de puissance et d'amour qu'ils peuvent contempler ! « A cette heure-là, Jésus guérit beaucoup de personnes de maladies, de douleurs (maux qui tourmentent) et d'esprits malins et il donna la vue à beaucoup d'aveugles. Il répondit ensuite aux messagers : Allez rapporter à Jean ce vous avez vu et entendu : « Les aveugles retrouvent la vue, les boiteux marchent, les lépreux sont rendus purs, les sourds entendent, les morts ressuscitent, l'Evangile est annoncé aux pauvres » (Luc 7 : 21-22 ; Es. 29 : 19). Jésus ne fera pas de déclaration solennelle pour affirmer qu'Il est bien le Messie ; Il agit simplement en grâce devant les disciples de Jean : les faits parlent d'eux-mêmes et les coeurs sont touchés. Plus tard, après la mort violente de Jean, ces même disciples éplorés viendront trouver auprès du Seigneur la consolation dont ils ont tellement besoin ! (Matt. 14 : 12).
Mais ces messagers doivent aussi transmettre à Jean une douce et délicate réprimande, un avertissement qui s'adresse aussi à chacun de nous : « Bienheureux est quiconque n'aura pas été scandalisé en moi » (Luc 7 : 23). Le grand prophète Jean le Baptiseur est, comme tous les autres rachetés, un objet de la grâce ; du côté de l'homme, il y a toujours des imperfections. Le Messie dont Esaïe avait parlé dans son livre (chap. 35 et 61) était à ce moment-là sur la terre.
Et, après le départ des disciples de Jean, le Seigneur rend devant la foule un beau témoignage au sujet de Jean. Il montre avec tristesse quel avait été l'accueil réservé aux avertissements sévères du précurseur et maintenant à Son message rempli de grâce : les coeurs étaient restés fermés, ainsi qu'Esaïe l'avait annoncé (53 : 1).
Quelle leçon faut-il retenir du récit concernant la dernière partie de la vie du « précurseur » ? On voit le danger couru en étant trop occupés des circonstances plus ou moins difficiles que nous rencontrons ; il faut apprendre à tout remettre entre les mains du Seigneur. Ayons plutôt nos yeux continuellement fixés sur Lui, sur son oeuvre. Que nos pensées soient absorbées par la méditation de sa Parole ! C'est notre sécurité contre le doute, un antidote contre les pensées qui peuvent monter dans le coeur et contre la crainte. La sérénité d'esprit, la paix de Dieu sont la part bénie de celui qui est occupé de Christ. Il est bienheureux, quels que soient les problèmes rencontrés. (Matt. 11 : 28-29). Pensons à l'apôtre emprisonné, écrivant : « Réjouissez-vous toujours dans le Seigneur » (Phil. 4 : 1).
Ph. L - le 15. 09. 09