En chemin, montant à Jérusalem, Jésus allait devant eux (Marc 10 : 32)
« Pouvez-vous boire la coupe que moi je bois (ou être baptisés du baptême dont moi je serai baptisé) ? » (Matt. 20 : 22), demande le Seigneur à ses disciples. « Nous le pouvons », répondent-ils aussitôt. Pourtant l'Ecriture déclare qu'ils « étaient stupéfiés et craignaient en le suivant » (Marc 10 : 32).
Jésus monte à Jérusalem et annonce à nouveau aux siens : « le Fils de l'homme sera livré aux principaux sacrificateurs et aux scribes ; et ils le condamneront à mort, et le livreront aux nations ; et ils se moqueront de lui, et le fouetteront, et cracheront contre lui, et le feront mourir ; et il ressuscitera le troisième jour » (Marc 10 : 33-34). Il était seul à frayer le chemin, il allait souffrir et accomplir cette oeuvre qui rétablit, par le sang précieux versé, notre relation avec Dieu.
Chemin faisant, le Seigneur répondait en perfection aux besoins de sa créature. Il désirait « guérir tous ceux que le diable avait asservis à sa puissance » (Act. 10 : 38).
Ici, c'est un des chefs du peuple qui accourt sur la route et se jette à genoux devant lui (Marc 10 : 17). Il estime que le Seigneur est un homme sage et espère recevoir de lui un conseil avisé : « Bon maître, que ferai-je afin que j'hérite de la vie éternelle ? ». Heureux désir, certes, mais ses paroles montrent qu'il compte encore sur ses efforts personnels pour y parvenir. Aussi le Seigneur lui répond : Tu veux faire le bien, tu voudrais être parfait ? Eh bien, voici les commandements !
La réponse immédiate de ce jeune homme : « Maître, j'ai gardé toutes ces choses dès ma jeunesse », prouve qu'il ne connaissait pas son véritable état devant Dieu. Observer la loi, même de façon scrupuleuse, mais forcément imparfaite, ne suffira jamais pour acquérir le salut ; ce serait l'obtenir sur le principe de la propre justice (ce que l'homme tente pourtant si souvent de faire) et refuser d'écouter le verdict divin : « Tous ont péché et n'atteignent pas à la gloire de Dieu » (Rom. 3 : 23). La loi divine est sainte, et « le commandement est saint, et juste, et bon » (Rom. 7 : 12). Mais notre incapacité à accomplir la loi met en évidence notre péché, celui-ci devient « excessivement pécheur » devant le Dieu saint (Rom. 7 : 13). Seul le sacrifice de la victime parfaite, que Dieu pouvait agréer, apporte à l'homme, mort dans ses fautes et dans ses péchés, la paix avec Dieu.
« Jésus, l'ayant regardé, l'aima » : cet évangile est le seul à souligner ce regard du Seigneur, pénétrant et plein de douceur. Il voudrait maintenant amener son interlocuteur à comprendre qu'une terrible idole, l'amour de l'argent, a tout envahi dans son coeur. Il enfreint ainsi le premier commandement de cette loi qu'il prétendait avoir gardée (Ex. 20 : 3). D'où ce conseil de la part de Celui « aux yeux duquel toutes choses sont nues et découvertes » (Héb. 4 : 13) : « Une chose te manque : va, vends tout ce que tu as et donne aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel, et viens, suis-moi, ayant chargé la croix » (Marc 10 : 21). Est-il prêt, le sommes-nous, à vivre dans le renoncement et à tout sacrifier si Dieu le demande ? Hélas, il ne répond pas à cette invitation, à l'occasion peut-être unique de suivre avec joie le Seigneur et de le servir. Sa personne avait peu d'attrait pour son coeur. Il n'était pas prêt à faire ce choix capital. Il voulait continuer à jouir des biens de ce monde, s'exposant à entendre Dieu lui dire soudainement : « Insensé, cette nuit même ton âme te sera redemandée, et ces choses que tu as préparées, à qui seront-elles ? » (Luc 12 : 20-21).
La tristesse de cet homme, son éloignement volontaire de la source du seul vrai bonheur ne sont-ils pas pour nous un avertissement ? Aux yeux de son entourage, il paraissait certainement posséder tout ce que le coeur naturel recherche pour en jouir : jeunesse, situation en vue, grands biens... Mais sa triste histoire est celle de tous ceux qui, même parmi les croyants, cherchent à tout prix à obtenir de tels avantages dans un monde éphémère (1 Tim. 6 : 9-10). Si notre coeur s'est attaché à de telles convoitises, ce sera une entrave positive à tout progrès spirituel ! Comment pourrait-on suivre alors véritablement le Seigneur dans son chemin d'abaissement volontaire et d'humiliation ?
« Jésus, ayant regardé tout à l'entour, dit à ses disciples : combien difficilement ceux qui ont des biens entreront-ils dans le royaume de Dieu » (Marc 10 : 23). Les disciples sont très surpris. Sous la loi, les richesses faisaient partie des bénédictions accordées aux fidèles. Alors Jésus leur montre que c'est la confiance dans les richesses qui constitue un obstacle. Pourtant, si l'homme reconnaît et accepte son incapacité pour obtenir la vie éternelle, alors Dieu entre en scène et fait connaître ses ressources à la foi. Tout vient de lui pour notre salut et nous diriger ensuite dans son chemin.
Sur le chemin qui monte à Jérusalem, Jésus, dans sa grâce, traverse une dernière fois Jéricho. Bartimée est assis sur le bord du chemin, dans un état vraiment très misérable : il est aveugle et réduit à la mendicité. Mais soudain, entendant dire que c'est Jésus de Nazareth qui passe, il se met à crier, malgré la foule : « Fils de David, Jésus, aie pitié de moi ! » (Marc 10 : 47). Plusieurs le reprennent, importunés par ses appels, comme les disciples l'étaient par la Cananéenne (Matt. 15 : 23). Que de fois nous sommes loin de sympathiser vraiment avec notre prochain, de chercher à comprendre sa misère (Luc 10 : 36-38) !
Conscient de son immense besoin, sans se laisser décourager, Bartimée crie d'autant plus fort : « Fils de David ! aie pitié de moi ! » (Marc 10 : 48). Il reconnaît à Jésus l'un de ses titres de gloire, que plusieurs lui déniaient de fait, comme le jeune homme riche qui l'appelait seulement « bon maître » (Marc 10 : 17).
Bartimée a adressé un pressant appel à sa grâce, il est impossible qu'il reste sans réponse. Jésus s'arrête, ému de compassion. Lui qui faisait dire à Hérode : « Il faut que je marche aujourd'hui et demain, car il ne se peut qu'un prophète périsse loin de Jérusalem » (Luc 13 : 33), s'arrête un instant en faveur de Bartimée. Il dit qu'on lui amène l'aveugle. Et plusieurs voix s'élèvent dans la foule, cette foule toujours versatile, pour dire à Bartimée : « Aie bon courage, lève-toi, il t'appelle » (Marc 10 : 49).
Alors cet aveugle se lève en hâte et jette loin son vêtement. Pas de calcul chez cet homme ! C'est bien peu de chose, peut-on penser, que d'abandonner ce vêtement, comparé aux « grands biens » du jeune homme du récit précédent. Mais c'est tout ce qu'il possède. Il juge cet habit désormais inutile, et même gênant pour courir vers Jésus.
L'apôtre écrit : « les choses qui pour moi étaient un gain, je les ai regardées, à cause du Christ, comme une perte ». Et il déclare : « Je fais une chose : oubliant les choses qui sont derrière et tendant avec effort vers celles qui sont devant, je cours droit au but, pour le prix de l'appel céleste de Dieu, dans le Christ Jésus » (Phil. 3 : 7, 14).
« Il vint à Jésus ». Cette attitude de foi et d'obéissance va recevoir une merveilleuse réponse. Jésus lui dit : « Que veux-tu que je fasse ? ». Il déclare devant tous quel est son besoin et manifeste sa foi en Jésus : « Rabboni, que je recouvre la vue ! ». Ce cri qui s'échappe de son coeur montre toute sa confiance (comp. Jean 20 : 16). Alors Jésus lui dit : « Va, ta foi t'a guéri » ; « et aussitôt il recouvra la vue ». Il pourra désormais rendre témoignage, comme l'aveugle-né, après l'intervention du Seigneur : « Je sais une chose, c'est que j'étais aveugle, et que maintenant je vois » (Jean 9 : 25).
Avons-nous, par la grâce du Seigneur, recouvré nous aussi cette vue spirituelle qui a pu nous faire si souvent cruellement défaut ?
Pensons à ce jeune homme, en faveur duquel Elisée demandait instamment à Dieu : « Je te prie, ouvre ses yeux, afin qu'il voie » (2 Rois 6 : 17). « Et l'Eternel ouvrit les yeux du jeune homme, et il vit ». Alors que, l'instant d'avant, il était terrifié par l'armée qui entourait la ville, il découvre soudain, ébloui, la montagne pleine de chevaux et de chars de feu autour d'Elisée. Il n'a rien à craindre de la part de l'ennemi.
Bartimée aurait pu partir, libre désormais de ses mouvements, et comme tant d'autres, s'occuper de ses propres intérêts. Il n'en est rien. Cette foi qui a ouvert son coeur à la puissance divine du Sauveur, devient pour lui la source d'une grâce infiniment plus grande que le recouvrement de la vue naturelle. C'est spontanément qu'il suit le Seigneur, ayant chargé la croix que d'autres ont refusé de prendre (Luc 18 : 4). Chemin faisant, il glorifie Dieu. Et tout le peuple, le voyant, s'associe à ses actions de grâce et donne gloire à Dieu !
Ph. L.
Bartimée, aveugle et sans espérance,
Demandait l'aumône au bord du chemin.
Soudain, il entend, ô bonheur immense !
Que le Christ va passer, ce grand Médecin, ce grand Médecin.
Refrain
Quand le Maître vient, tout va renaître,
Quand le Maître vient, tout s'épanouit !
Quand le Maître vient, il transforme l'être,
C'est un jour nouveau dont l'aurore a lui !
Voilà qu'on l'appelle, au nom du grand Maître.
Jetant son manteau, dans l'acte de foi,
Il court vers Celui dont l'accent fait naître
La réponse au mot : "Que veux-tu de moi ? Que veux-tu de moi ?"
Refrain
"Que veux-tu de moi ? -Seigneur, que je voie !
Qu'enfin je sois libre et non mendiant !
-Ta foi t'a sauvé ; va, pars dans la joie.
-Doux Maître, je pars, mais en te suivant, mais en te servant !"
Refrain