LE CULTE ET LE MINISTERE PAR L'ESPRIT (7)
Cinquième lettre (deuxième partie) : Diverses observations sur la dépendance réciproque des saints dans les réunions d'édification mutuelle, et sur d'autres sujets.
Tout serviteur, pour être fidèle, doit agir d'après les directions de son maître. D'où l'importance de savoir que, si j'agis dans l'assemblée des saints, il ne faut rien moins pour m'y pousser qu'une sérieuse conviction dans mon âme, et devant Dieu, que c'est bien selon sa volonté à ce moment-là.
L'apôtre dit : « Par la grâce qui m'a été donnée, je dis à chacun de ceux qui sont parmi vous de ne pas avoir une haute pensée de lui-même, au-dessus de celle qu'il convient d'avoir, mais de penser de manière à avoir de saines pensées, selon la mesure de foi que Dieu a départie à chacun » (Rom. 12 : 3). La mesure de foi que Dieu m'a donnée doit être la mesure de ce que je fais ; et Dieu, en donnant à chacun de ses serviteurs la mesure de foi nécessaire, aura soin qu'ils sachent ainsi ce qu'Il faut qu'ils fassent. Une conviction ferme et sincère que telle est la volonté de Dieu, est donc la seule qui m'autorise à agir comme son serviteur dans l'assemblée, et même ailleurs.
Cependant, comme on peut abuser de ce principe, Dieu y a pourvu en donnant la direction contenue dans ce passage : « Que les prophètes parlent, deux ou trois, et que les autres jugent » (1 Cor. 14 : 29). C'est un frein dans l'assemblée. Notre âme doit, en premier lieu, juger et savoir si le Seigneur appelle à parler ou à agir d'une autre manière, dans l'assemblée ; mais lorsque j'ai parlé ou agi, c'est à mes frères de « juger », et, dans la très grande majorité des cas, je dois me soumettre à leur jugement. En effet, il arrivera très rarement qu'un serviteur de Christ se sente autorisé à continuer d'agir dans les réunions, alors que son action est désapprouvée par ses frères.
Si Dieu appelle à parler ou à prier dans les réunions, - que ce soit vraiment de Lui que vienne la conviction d'y être appelé, - il est évident qu'Il lui est aussi facile de disposer les coeurs des saints à recevoir mon ministère et à s'unir à mes prières, qu'Il lui est facile de disposer mon propre coeur à un tel service. Si c'est réellement l'Esprit qui me fait agir, le même Esprit demeure dans les saints, et l'Esprit dans les saints répondra au ministère ou à l'adoration présentée par l'Esprit de la part d'un autre frère. C'est pourquoi, si, de façon habituelle, je m'aperçois que mon action dans les réunions, au lieu d'édifier les saints, est un fardeau et une peine pour eux, je dois conclure que je me trompe en agissant ainsi.
Supposez maintenant que la raison qui empêche que le ministère d'un frère ne soit apprécié pendant un temps, soit consécutif à l'état de l'assemblée et non à celui de ce frère ; supposez que ce frère soit tellement plus spirituel que l'assemblée qu'elle ne puisse ni goûter ni apprécier son service : dans ce cas-là, qui n'est pas très fréquent, il se peut que ce serviteur de Christ doive examiner s'il n'a pas à apprendre à être comme son Maître, qui enseignait et « annonçait la parole, selon qu'ils pouvaient l'entendre » (Marc 4 : 33). Il a peut-être besoin d'un peu plus de l'esprit de Paul, qui pouvait dire : « Nous avons été doux au milieu de vous. Comme une nourrice chérit ses propres enfants » (1 Thes. 2 : 7) ; « Je vous ai donné du lait à boire, non pas de la viande, car vous ne pouviez pas encore la supporter, et même maintenant encore vous ne le pouvez pas » (1 Cor. 3 : 2). Si, malgré cette tendresse et ces soins pleins de discernement, le ministère de ce frère continue à ne pas être reçu, ce sera certainement une épreuve pour sa foi ; mais, puisque le but de tout ministère est l'édification, et qu'il est impossible que les saints soient édifiés par un ministère qui ne se recommande pas à leurs consciences, il ne pourrait être d'aucune utilité de le leur imposer, qu'ils soient ou non capables de le recevoir.
L'état général de faiblesse ou de maladie d'un corps peut conduire à la dislocation de quelque jointure ; dans un tel cas, ce ne sera pas en forçant la jointure disloquée à fonctionner qu'on améliorera l'état du corps. C'est sans doute une chose vraiment déplorable que cette jointure ne puisse agir ; mais la seule manière de la remettre en bon état, c'est de lui accorder un repos complet, pendant qu'on cherche, par d'autres moyens à rétablir la santé du corps. Il en est de même dans le cas que nous venons de supposer. Continuer à exercer un ministère là où il n'est pas reçu, même si l'état misérable de l'assemblée est en cause, ne fait qu'ajouter de l'irritation à l'état globalement mauvais et le fait même empirer. Le serviteur du Seigneur trouvera alors que la sagesse est de se taire ; ou bien, peut-être, son Maître veut-il lui faire comprendre de cette manière qu'Il veut qu'il exerce son ministère ailleurs.
D'un autre côté, bien-aimés frères, permettez-moi de vous mettre sérieusement en garde contre le piège que, certainement, Satan cherchera aussi à nous tendre ; je veux parler d'un esprit de critique à l'égard de ce qui se passe dans les réunions.
Les efforts de l'ennemi ont toujours pour but de nous pousser d'un extrême dans l'autre ; en sorte que, si nous avons péché par indifférence, en mettant trop peu d'importance à ce qui se faisait, pourvu que le temps soit rempli, il est plus que probable que nous soyons maintenant exposés au danger contraire. Le Seigneur, dans sa miséricorde, veuille nous en garder !
Rien n'indique un état de coeur plus déplorable, et rien ne peut être un plus grand obstacle à la bénédiction, qu'un esprit de censure et de critique. Nous nous rassemblons pour adorer Dieu et nous édifier les uns les autres, et non pour nous occuper de juger nos frères qui agissent ou de décider qu'un tel exerce son ministère d'une manière charnelle et qu'un autre prie par l'Esprit.
Quand la chair se manifeste, il faut, sans doute, qu'elle soit jugée ; mais c'est une chose triste et humiliante de la discerner et de la juger ainsi, au lieu de jouir ensemble (ce qui est notre heureux privilège !) de la plénitude qui se trouve dans notre divin Sauveur et Seigneur. Gardons-nous donc d'un esprit de jugement. Il y a des dons moindres et des dons plus grands. Nous savons qui est Celui qui a donné plus d'honneur aux membres du corps qui en manquaient.
Les actes d'un frère dans l'assemblée ne sont pas, nécessairement, tous charnels, parce qu'il laisse jusqu'à un certain point agir la chair. A ce propos, il serait bon pour tous de peser les paroles d'un serviteur de Dieu estimé parmi nous : « Il est des plus nécessaires - dit-il - que nous considérions premièrement quelle est la nature de notre don, et, en second lieu, sa mesure. Quant à cette dernière, je ne doute pas, permettez-moi de le dire, que plus d'un don qui n'est pas reconnu, le serait, si, dans l'exercice de ce don, le frère qui l'a reçu n'en dépassait pas la mesure ».
« Soit la prophétie, prophétisons selon la proportion de la foi » (Rom. 12 : 6). Tout ce qui va au-delà de cette limite, vient de la chair. L'homme se met en avant, la chose est ressentie et le don tout entier est rejeté ; tout cela, parce que le frère qui a agi n'a pas su s'en tenir à la mesure de son don. C'est pourquoi sa chair agit, et ce qu'il dit est attribué à la chair ; ce qui n'a rien d'étonnant.
De même, quant à la nature du don, si un homme se met à enseigner au lieu de s'en tenir à l'exhortation (s'il est en mesure d'exhorter), il n'édifiera pas ; il est impossible qu'il édifie. Je désirerais surtout que l'attention de chacun des frères employés dans le ministère de la Parole, soit attirée sur cette remarque, qui - peut-être ne leur parviendra jamais autrement - à cause d'un manque de fidélité de la part de leurs auditeurs !
Ces paroles sont adressées à ceux qui exercent un ministère, mais je les cite, bien-aimés frères, afin que nous apprenions à ne pas condamner tout ce qu'un frère peut dire ou faire, parce que nous avons discerné en lui quelque chose de « charnel ». Reconnaissons, avec actions de grâces, ce qui est de l'Esprit, en le distinguant de tout autre chose, dans le ministère et les actes de la même personne.
Il est encore deux ou trois petits détails sur lesquels je voudrais, dans la simplicité de l'amour fraternel, ajouter quelques mots.
Et d'abord, quant à la distribution du pain et du vin à la Table du Seigneur. D'un côté, il serait fort désirable que cette distribution ne soit pas constamment et exclusivement faite par un ou deux frères, comme s'il s'agissait là d'une distinction cléricale ; mais, d'un autre côté, je ne vois rien dans l'Ecriture qui puisse autoriser quelque frère que ce soit à rompre le pain ou à donner la coupe, sans rendre grâces. Dans Matthieu 26 : 26, 27 ; Marc 14 : 22, 23 ; Luc 22 : 19 et 1 Corinthiens 11 : 24, il est dit que le Seigneur Jésus rendit grâces lorsqu'il rompit le pain et qu'il distribua la coupe. Dans 1 Corinthiens 10 : 16, la coupe est appelée la coupe de bénédiction ou d'action de grâces. Si, donc, l'Ecriture doit être notre guide, n'est-il pas évident que celui qui rompt le pain ou qui distribue la coupe, devrait en même temps rendre grâces, et, si quelqu'un d'entre nous se sentait incapable de le faire, ne serait-ce pas pour lui une raison de se demander s'il est bien appelé à distribuer le pain et le vin ?
Puis, quant à la conduite ou à la surveillance dans l'assemblée, et quant aux qualifications qui doivent se trouver dans ceux qui exercent un service visible au milieu des saints, nous devrions tous étudier avec prières 1 Timothée 3 et Tite 1.
Le premier de ces chapitres, au verset 6, renferme une particularité dont il peut être bon que l'on se souvienne : « Qu'il ne soit pas nouvellement converti, de peur qu'étant enflé d'orgueil, il ne tombe dans la faute du diable ». Il est possible que l'appel de Dieu et un don de Christ se trouvent chez un jeune homme comme c'était le cas pour Timothée (ou, dans l'Ancien Testament, Jérémie). Ces mots : « Que personne ne méprise ta jeunesse » (1 Tim. 4 : 12) s'appliqueront, de nos jours, à un autre jeune homme, comme jadis à Timothée. Mais c'est à Timothée que ces paroles : « Qu'il ne soit pas nouvellement converti » sont adressées. Sa jeunesse relative ne devait pas être un encouragement à agir pour ceux en qui ne se trouvaient ni la même grâce ni le même don qui lui avaient été accordés. Il y a même une convenance naturelle à ce que le jeune homme prenne la place de la soumission plutôt que celle du gouvernement ; c'est là un bel exemple, que, malheureusement, on paraît oublier quelquefois. « Pareillement, vous, jeunes gens, soyez soumis aux anciens ; et tous, les uns à l'égard des autres, soyez revêtus d'humilité ; car Dieu résiste aux orgueilleux, mais il donne la grâce aux humbles » (1 Pier. 5 : 5).
Que le Seigneur, dans sa miséricorde, bien-aimés frères, nous donne de marcher humblement avec Lui, et qu'ainsi rien ne s'oppose à l'oeuvre de son Saint Esprit au milieu de nous.
Votre sincèrement affectionné
W. Trotter
(à suivre)