NOTES SUR LE LIVRE DU PROPHETE ESAIE (15)
G – CONCLUSION ET EXHORTATIONS FINALES (fin)
Commençant au verset 7 du chapitre 63, la dernière fraction de la prophétie d'Esaïe, comprend deux parties :
- Jusqu'à la fin du chapitre 64, il s'agit d'une ardente intercession dans la bouche du prophète, qui est en quelque sorte un instrument pour exprimer les sentiments du résidu au temps de la fin. Ce sont des exercices de coeur et de conscience par lesquels passeront les fidèles. Un grand nombre de psaumes les mentionnent aussi, avec plus de précision encore que le prophète lui-même. C'est par ces mêmes exercices que passent tous ceux dans le coeur desquels Dieu travaille par son Esprit, avant qu'ils puissent posséder une paix et un repos parfaits. Dieu est fidèle et Il veut que le coeur soit sondé à fond pour dissiper en nous toutes les ténèbres et nous accorder la jouissance d'une pleine communion avec Lui.
- Les deux derniers chapitres nous donnent la réponse de l'Eternel à cette intercession du prophète ; réponse de grâce, mais aussi de vérité.
1- Intercession du prophète : chapitres 63 : 7-19 et 64
1.1 Bonté de l'Eternel et rébellion du peuple (63 : 7-14)
Le résidu commence par rappeler les bontés de l'Eternel envers son peuple et les grands bienfaits dont Il a comblé la maison d'Israël. Ensuite, il parle de ses compassions envers eux, de son amour et de sa miséricorde. Malgré cela, le peuple s'est rebellé contre Lui et a contristé l'Esprit de sa sainteté.
Ce sujet est développé d'une manière touchante dans le psaume 106. Cette confession amène les fidèles à s'adresser à Celui qu'ils ont si souvent offensé ; et pourtant que de fois Il a eu pitié de son peuple !
1.2 Appel aux compassions de Dieu (63 : 15-19 ; 64 : 1-12)
« Regarde des cieux, et vois, de la demeure de ta sainteté et de ta magnificence ! Où sont ta jalousie et ta puissance, le frémissement de tes entrailles et de tes compassions ? » (63 : 15). Seul l'Esprit de Dieu produit de tels sentiments et met sur les lèvres d'un coupable des paroles aussi poignantes. Quelle sainte hardiesse peut caractériser une âme convaincue de péché, mais qui, par la foi, s'empare de tout de qu'est le coeur de Dieu, infini comme Lui-même. Abraham même renierait sa postérité que l'Eternel, malgré tout, ne le ferait pas. Le résidu reconnaît l'endurcissement judiciaire envoyé sur la nation (endurcissement dont le prophète a parlé au chapitre 6) et confesse aussi qu'elle a erré loin de l'Eternel fort longtemps, privée de son héritage dont elle n'a joui que peu de temps, puisque ses ennemis s'en sont emparés à cause de ses infidélités. Malgré tout, il s'attend encore à l'Eternel.
« Oh ! si tu fendais les cieux ! » (64 : 1). Il ne s'agit plus du « Regarde des cieux » du chapitre précédent (v. 15). Au sein de leur détresse, la foi des fidèles se fortifie et devient plus hardie. « Si tu voulais descendre, et que devant toi les montagnes se fondent, - descendre comme le feu brûle les broussailles, comme le feu fait bouillonner l'eau, pour faire connaître ton nom à tes ennemis, en sorte que les nations tremblent devant toi ! » (64 : 1b-2). A ce moment, ils sont encore comme le peuple lorsque le grand sacrificateur est caché derrière le voile dans le saint lieu. Tant qu'il n'est pas sorti, ils ne peuvent pas avoir l'assurance d'être agréés et bénis par Dieu. C'est un instant d'anxieuse attente qui se termine par une joie inexprimable. Quand le Messie sortira du sanctuaire où Il est encore caché maintenant, ils connaîtront vraiment les choses préparées par Dieu pour ceux qui s'attendent à Lui, choses que l'oeil n'a pas vues et l'oreille, jamais entendues. Nous les connaissons actuellement par l'Esprit Saint qui habite en nous ; mais quant à eux, ils en jouiront seulement lorsqu'ils verront Celui qui est caché dans les cieux. Malgré leur pauvre état dont ils font une pleine confession, ils reconnaissent être dans la main de l'Eternel comme l'argile est dans celle du potier (64 : 8). Il peut, d'un vase gâté, en façonner un comme il plaît à ses yeux ; d'un vase de colère, Il peut faire un vase de miséricorde. C'est, du reste, ce qu'Il s'est proposé. Cette Jérusalem désolée deviendra le siège de son trône glorieux. Cette nation coupable, dispersée et désolée, y sera rassemblée. Il le fera ; il y va de sa gloire, car Il est mort pour la nation et pour « rassembler en un les enfants de Dieu dispersés » (Jean 11 : 51-52).
2- Réponse de l'Eternel à l'intercession des fidèles : chapitres 65 et 66
2.1 Révélation de Dieu aux nations (65 : 1-16))
Comme un fleuve dont rien ne peut obstruer la source, la grâce divine s'est détournée vers les nations pendant le temps où le Seigneur était rejeté par son peuple. Dieu est allé chercher ceux qui ne s'enquéraient pas de Lui et s'est fait connaître à eux. Ce temps dure encore et nous en sommes les heureux bénéficiaires.
L'Eternel a étendu ses mains vers un peuple « rebelle » (v. 2), « désobéissant et contredisant » (Rom. 10 : 21). Ce peuple maintient encore actuellement une séparation extérieure d'avec les autres nations. Il affecte une apparente sainteté tout en marchant dans une mauvaise voie et provoque l'Eternel par ses méchantes actions. Dieu était donc juste en faisant connaître sa grâce aux nations pendant que son peuple était mis de côté. Malgré tout, cette grâce se manifestera à nouveau envers lui, à la fin. L'Eternel le fera à cause de ses serviteurs et en raison de ses promesses à Juda et à Jacob.
Mais ceux qui servent les idoles seront réservés pour l'épée et se courberont dans le carnage, parce qu'ils n'ont pas voulu écouter et ont fait des choses mauvaises aux yeux de l'Eternel (v. 12).
Alors les serviteurs de l'Eternel seront rassasiés et dans la joie (v. 13). Ce titre de « serviteur » est digne de remarque dans le livre du prophète. Il est premièrement appliqué à Israël qui, comme tel, aurait dû faire connaître la gloire de l'Eternel, mais a été infidèle en cela ; alors le Messie est appelé « serviteur » ; lui a été le serviteur fidèle. A la fin, le résidu pourra de nouveau être appelé « serviteur ».
2.2 La nouvelle création et le millénium (65 : 17-25)
« Voici, je crée de nouveaux cieux et une nouvelle terre, et on ne se souviendra plus de ceux qui ont précédé, et ils ne monteront pas au coeur » (v. 17). Ceci s'accomplira plus tard lorsque le règne sera terminé, au moment de l'établissement de l'état éternel. Au préalable il y aura un changement moral, un ordre de choses entièrement nouveau dans les cieux et sur la terre. Satan sera précipité du ciel avec ses anges et, plus tard, enfermé dans l'abîme (Apoc. 12 : 9 ; 20 : 2) : le règne de la justice sera sur la terre. Mais « les nouveaux cieux et la nouvelle terre » n'apparaîtront que lorsque les cieux et la terre de maintenant auront été détruits par le feu.
Ensuite, à la fin du chapitre, nous avons une description de ce qui caractérisera le règne du Messie d'Israël.
Premièrement, une invitation à se réjouir et à s'égayer, non d'une joie passagère comme dans les temps actuels, mais d'une joie éternelle. Jérusalem, centre même de la prophétie, sera dans la jubilation mais aussi l'Eternel lui-même se réjouira en son peuple.
Le temps où le Seigneur pleurait sur cette ville sera passé ; les maux annoncés comme devant venir sur elle auront pris fin. Il n'y aura plus de pleurs ni de cris (v. 19) ; la mort n'exercera plus sa puissance que d'une façon exceptionnelle. Elle sera le châtiment spécial qui n'atteindra que les pécheurs. Un homme, à cent ans, sera dans sa pleine jeunesse et ceux qui auront été introduits dans ce beau règne, après mille ans, vivront encore sur la terre.
Toutefois, ce ne sera pas encore l'état éternel où la mort n'existera plus (Apoc. 21 : 4). Demeurant aussi longtemps sur la terre, les hommes pourront jouir de ce qu'ils auront bâti et recueillir les fruits de ce qu'ils auront planté : leurs fils ne seront plus destinés à la guerre, comme c'est le cas aujourd'hui. En contact continuel avec l'Eternel, les hommes recevront sa réponse pendant qu'ils feront monter leurs prières vers Lui (v. 24). Le loup habitera avec l'agneau ; le lion, par son rugissement, ne fera plus trembler les hommes et les animaux. Toute la création bénéficiera de la présence de Celui qui est le Créateur et le Rédempteur. Les hommes, les animaux et les plantes mêmes, tous participeront à sa puissance. Seul, le serpent sera encore le témoin de ce qui s'est passé dans le jardin d'Eden et mangera la poussière. Il n'y aura ni injustice ni violence dans toute la montagne de l'Eternel (v. 25).
2.3 Joie et consolation pour le résidu fidèle ; jugement des apostats (66 : 1-17)
Les Juifs rentrés dans le pays que l'Eternel a donné à leurs pères rebâtiront bientôt un temple à Jérusalem pour y offrir des sacrifices. Dans ce temple s'établira la pire des abominations : l'idole qui cause la désolation et qui sera une image de la Bête romaine. C'est donc contre cette maison que l'Eternel, dans ce chapitre, fait entendre sa voix.
Comment Dieu, qui a les cieux pour son trône et la terre pour marchepied de ses pieds, pourrait-Il trouver son repos dans une telle maison et de la satisfaction dans le service qui s'y accomplira ? Pour Lui, ce seront des choses exécrables. Aussi, comme ils auront choisi leur propre chemin et que leur âme aura pris plaisir à ces choses sans se soucier de la voix de l'Eternel, Il choisira leurs calamités et les fera venir sur eux. « Une voix de tumulte vient de la ville, une voix, du temple, une voix de l'Eternel qui rend la récompense à ses ennemis » (v. 6). Mais, haï et tourné en dérision par la nation, le résidu fidèle sera délivré par l'Eternel. Ses ennemis verront sa joie, mais ils auront pour eux la confusion.
Dans ce jour-là Sion sera comme dans l'enfantement, mais un enfantement sans douleurs, et la multitude de ses enfants sera rassemblée dans ses murs (v. 7-9). La nation naîtra comme en un seul jour. Le Dieu vivant manifestera ainsi sa puissance lorsque le moment arrivera. Un peuple nombreux viendra à la vie et sera rassemblé pour jouir de la bénédiction du royaume. Tous ceux qui ont aimé Jérusalem et ceux qui auront mené deuil pendant le temps de sa désolation se réjouiront avec elle et à cause d'elle (v. 10). Ils seront nourris et rassasiés comme des enfants nouveau-nés et se délecteront de sa gloire (v. 11). La paix et la consolation seront leur part, leurs coeurs se réjouiront et ils connaîtront en délivrance la puissance de l'Eternel (v. 12-13). Mais Lui versera sa colère sur ses ennemis. Elle viendra comme un feu, et le char de son gouvernement, comme un tourbillon, toute chair aura affaire à lui. La nation incrédule, qui prétendra servir Dieu en pratiquant des coutumes païennes et idolâtres, périra (v. 15-17).
2.4 Dieu glorifié par son peuple et par les nations (66 : 18 -24)
Le temps sera venu de rassembler toutes les nations, afin qu'elles voient la gloire de l'Eternel (v. 18). Connaissant leurs actes et leurs pensées, Il enverra les réchappés de Juda vers elles, même aux îles lointaines, pour leur raconter sa gloire (v. 19). Leurs habitants dont l'Eternel aura incliné le coeur ramèneront à la montagne sainte leurs frères d'entre toutes les nations. Ils emploieront pour ce service tous les moyens de locomotion dont ils disposeront (v. 20).
Alors tout Israël sera rassemblé, ainsi que nous l'avons vu au chapitre 18, comme un présent apporté à l'Eternel. Cette expression « offrande » est aussi employée par l'apôtre Paul : « l'offrande des nations » (Rom. 15 : 16). Dieu reçoit ainsi une première offrande de la part des nations qui lui sont amenées pendant la période actuelle, puis une seconde, celle de son résidu fidèle. Il trouvera son plaisir dans l'une et dans l'autre.
Ces bienheureux rachetés d'Israël subsisteront devant l'Eternel comme les nouveaux cieux et la nouvelle terre qu'Il fera (v. 22), c'est-à-dire éternellement. De nouvelle lune à nouvelle lune et de sabbat en sabbat, toute chair viendra se prosterner devant l'Eternel (v. 23). Il sera glorifié et par son peuple et par les nations, quoique Israël ait une bénédiction spéciale pendant ces temps heureux. Ceux qui se rebelleront contre Dieu seront un objet d'horreur éternelle à toute chair. Leur feu ne s'éteindra pas et leur ver ne mourra pas (v. 24).
Ainsi se termine le livre du prophète Esaïe. Ainsi se terminent aussi les voies de Dieu envers son peuple terrestre et envers tous les hommes.
D'après une étude d'Alfred Guignard, publiée pour la première fois en 1937