La requête orgueilleuse des fils de Joseph
« Et les fils de Joseph parlèrent à Josué disant : Pourquoi m'as-tu donné en héritage un seul lot et une seule part, à moi qui suis un peuple nombreux, selon que l'Eternel m'a béni jusqu'à présent ? Et Josué leur dit : Si tu es un peuple nombreux, monte à la forêt, et coupe-la pour t'y faire de la place dans le pays des Phéréziens et des Rephaïm, si la montagne d'Ephraïm est trop étroite pour toi. Et les fils de Joseph dirent : nous ne pouvons pas acquérir la montagne, et il y a des chars de fer chez tous les Cananéens qui habitent le pays de la vallée, chez ceux de Beth-shean et des villages de son ressort, et chez ceux de la vallée de Jizrëel.
Et Josué parla à la maison de Joseph, à Ephraïm et à Manassé, disant : Tu es un peuple nombreux, et tu as une grande puissance ; tu n'auras pas un seul lot, mais la montagne sera à toi ; comme c'est une forêt, tu la couperas et elle sera à toi jusqu'à ses extrémités ; car tu déposséderas le Cananéen, quoiqu'il ait des chars de fer et qu'il soit fort » (Jos. 17 : 14-18).
Le manque de courage pour prendre possession du Pays
Le partage de l'héritage entre les tribus d'Israël
La plainte et la demande égoïste des fils de Joseph
Le livre de Josué présente le peuple d'Israël prenant possession du pays que Dieu avait promis de lui donner. Pour nous chrétiens, il évoque en figure l'effort nécessaire pour entrer pratiquement dans la jouissance de nos bénédictions célestes en Christ dans le ciel. Où en sommes-nous à cet égard ? C'est une question capitale.
Dans ce livre, il est d'abord question de l'entrée dans le pays : il fallait traverser le Jourdain (chap. 1 à 5). Ensuite la conquête du pays se déroule, sous la conduite de Josué (chap. 6 à 12). Enfin, il est question de la répartition du pays entre les tribus, appelées à le posséder vraiment (chap. 13 à 24). Les fils d'Israël pouvaient s'appuyer sur la promesse de l'Eternel : « Tout lieu que foulera la plante de votre pied, je vous l'ai donné, comme j'ai dit à Moïse » (Jos. 1 : 3). Ils étaient exhortés à posséder entièrement le Pays que Dieu plaçait devant eux (Deut. 1 : 8).
Les limites du pays étaient fixées avec précision. Il y avait au Sud, le désert ; au Nord, le Liban ; à l'est, le grand fleuve Euphrate ; à l'ouest, la mer Méditerranée. Or jamais, hormis durant une courte période au début du règne de Salomon, le peuple n'a occupé, en raison de son indolence, cet immense territoire.
Les croyants peuvent considérer avec reconnaissance un héritage d'une tout autre dimension : le ciel même ! Ils peuvent goûter déjà toutes les bénédictions de cet héritage « conservé dans les cieux » pour eux (1 Pier. 1 : 4) et largement ouvert devant la foi.
Les versets cités en tête de ces lignes concernent la période où le Pays a été réparti entre les tribus, du moins entre celles qui ont traversé le Jourdain. Ruben et Gad, entraînant avec elles la moitié de Manassé, sont en effet restées volontairement de l'autre côté du Jourdain, estimant que c'était un lieu « propre pour des troupeaux » (Nom. 32 : 4) ! Leur décision de rester en dehors du pays de la promesse, au lieu de rester groupées autour de l'Arche, ne pouvait avoir que des conséquences fâcheuses !
Hélas, lors de cette répartition, on entrevoit déjà les premiers signes avant-coureurs de la triste description du livre des Juges. L'infidélité du peuple s'accroît au moment où devrait s'achever la conquête du pays, où ils auraient dû honorer Dieu. Au chapitre 13, l'Eternel dit à Josué : « Tu avances en âge et il reste un très grand pays à posséder » (v. 1-2). Dieu rappelle la liste des ennemis à subjuguer et promet : « Moi je les déposséderai devant les fils d'Israël » (v. 6). Mais s'Il tient l'épée qui décide des combats, les siens doivent toujours saisir ses dons par la foi.
Or, parvenus à ce stade de l'histoire du peuple, on ne respire plus la même atmosphère d'énergie spirituelle face aux ennemis. La lassitude, le manque de courage se sont emparés des armées d'Israël. Devant toute l'assemblée des fils d'Israël, au moment de dresser la tente d'assignation à Silo, Josué déclare : « Jusques à quand vous porterez-vous lâchement à aller prendre possession du pays que l'Eternel vous a donné ? » (Jos. 18 : 1-3 ; Rom. 12 : 11). Ici, il restait encore sept tribus qui n'avaient pas pris possession de leur héritage !
C'est un danger qui menace constamment ceux auxquels le Seigneur veut bien confier une activité dans Sa vigne. Nous comprenons un peu l'importance de la tâche, nous n'avons pas l'intention ouverte d'abandonner le travail, mais la fatigue s'empare de nous ; il n'y a plus le même enthousiasme qu'au début. Soyons constamment sur nos gardes !
Le même enseignement se retrouve continuellement dans l'histoire de l'Assemblée sur la terre. Avant même la fin du ministère des apôtres, le mal est entré, provoquant la faiblesse. Où est donc la ferveur décrite au début de l'église et cette fraîcheur des affections pour Christ, précieuse pour son coeur ? Presque partout, l'inaction et le relâchement spirituel ont prévalu. Paul, qui approchait de la fin de sa course, le constate avec douleur : « Tous cherchent leurs propres intérêts et non pas ceux de Jésus Christ » (Phil. 1 : 21). Plus tard, il ajoutera : « Tous ceux qui sont en Asie… se sont détournés de moi… Dans ma première défense, personne n'a été avec moi, mais tous m'ont abandonné » (2 Tim. 1 : 21 ; 4 : 16).
Lors de ce partage, le premier lot échoit à Juda : c'est une expression du choix souverain de Dieu (Jos. 15 : 1-12, 20-63). Cette tribu reçoit la plus noble et la plus grande portion de l'héritage. Jérusalem, la ville royale s'y trouve, en fait partagée avec Benjamin (Gen. 49 : 8-10). Mais leur incapacité se montre : ils sont dans l'impossibilité de déposséder les Jébusiens (Jos. 15 : 63). Leur forteresse, telle une verrue, y subsistera jusqu'au temps de David. Pourtant, c'est au milieu de Juda que l'on trouve Caleb, ce magnifique exemple de la persévérance de la foi. Il s'est appuyé sur les promesses de l'Eternel. Il l'a pleinement suivi durant toute la traversée du désert. Maintenant il dit à Josué : d'une« Donne-moi cette montagne dont l'Eternel a parlé » (14 : 12). Malgré son âge avancé, il en dépossédera les trois fils d'Anak, des géants (16 : 13-14). Il n'est pas seul ! Sa fille et son gendre (Acsa et Othniel) appartiennent à la même lignée de la foi : leur conduite le confirme !
Le lot suivant échoit aux deux fils de Joseph, Ephraïm (fertilité) et la demi-tribu de Manassé (oubli). Joseph, est sans doute le plus beau type de Christ dans l'Ecriture. Dieu lui donne en Egypte deux fils, d'Asnath, une étrangère, fille de la famille sacerdotale d'On. Mais ils seront « adoptés » par Jacob. Ne sont-ils pas « sa semence » ? Dès lors, les grandes bénédictions que Jacob adresse à Joseph, concernent aussi ces deux fils qui seront à l'origine de deux tribus : Joseph reçoit la double portion réservée à l'aîné (Gen. 48 : 8-22 ; 49 : 22-26 ; 1 Chr. 5 : 1-2).
C'était une portion bénie liée à une grande responsabilité de faire partie des « fils de Joseph » ! On s'attache aisément aux bénédictions d'en Haut et l'on oublie facilement le côté de la responsabilité. Seront-ils dignes d'une si riche part ? Le sommes-nous ?
Le lot d'Ephraïm commençait à Jéricho (lieu de la mort et de la malédiction) et comprenait Béthel (la maison de Dieu). Hélas, Comme Juda, il manque de courage face à la puissance des ennemis et il accepte de cohabiter avec eux. Ce compromis est à la source de l'idolâtrie qui, plus tard rongera, comme une gangrène, tout le peuple de Dieu. L'ennemi sera désormais une épine et un piège permanents à leurs côtés. Ce péché, sous prétexte de tolérance, de support mutuel, est fréquent aussi chez les chrétiens.
Chez Manassé, l'énergie de Makir est soulignée et aussi - à nouveau - l'attachement des cinq filles de Tselophkhad à l'héritage. Elles avaient « osé » se présenter devant le Tabernacle, au désert, en présence de Moïse, des princes et même de toute l'assemblée pour solliciter une part d'héritage. L'Eternel avait déclaré à Moïse qui apportait leur cause devant Lui : « Les filles de Tselophkhad ont bien parlé » ! Maintenant le moment est venu de faire suite à leur requête, selon la promesse divine (Nom. 27 : 1-11 ; Jos. 17 : 3-6). L'héritage de nos pères a-t-il le même attrait et le même prix pour notre coeur ? (Ps. 16 : 5-6).
Hélas, par ailleurs, le Livre de Dieu relève que Manassé se montre incapable de déposséder les habitants du pays. Les Cananéens veulent y habiter et ils restent dans leurs villes (Jos. 17 : 12-13). Or, pour obéir à Dieu, ils auraient dû être mis à mort : l'iniquité de tous les peuples du pays était venue « à son comble » (Gen. 15 : 16).
Demandons au Seigneur d'opérer en nous ces deux fruits de Sa grâce : « le vouloir et le faire, selon son bon plaisir » (Phil. 2 : 13) !
Les fils de Joseph viennent ensemble réclamer à Josué un territoire plus grand. Un héritage supplémentaire « selon que l'Eternel m'a béni jusqu'à maintenant » (Jos. 17 : 14). La démarche peut paraître louable, mais en fait, elle diffère complètement de celle de Caleb ou des filles de Tselophkhad, qui avaient attendu avec patience et foi un héritage qui leur a été volontiers accordé.
Au fond, la plainte égoïste des fils de Joseph est arrogante et injustifiable. « Moi qui suis un peuple nombreux » (v. 14) : c'est une exagération, car Ephraïm, à la sortie du désert n'a plus que 32.500 guerriers (au lieu de 40.500 au commencement) et Manassé en comptait bien 52.700, mais la moitié d'entre eux avaient élu domicile au-delà du Jourdain. De sorte que Dan, Issacar et Juda étaient de fait les tribus les plus nombreuses ! Les fils de Joseph auraient dû être les derniers à se plaindre : n'avaient-ils pas leur lot dans des régions très fertiles ? C'était le courage qui leur faisait défaut. Apprenons à joindre à notre foi, la vertu (2 Pier. 1 : 5).
L'Eternel avait porté son peuple au désert « comme un homme porte son fils » (Deut. 1 : 31). Il n'avait manqué de rien, ni de la manne journalière ni de l'eau du Rocher « qui les suivait » (1 Cor. 10 : 4) ; mais Dieu avait dû aussi les châtier, « comme un homme châtie son fils » afin de les humilier et de leur « faire du bien à la fin » (Deut. 8 : 5, 16). En effet il y avait eu au milieu d'eux beaucoup de convoitises, d'idolâtrie, de fornication, d'incrédulité, de murmures ; de sorte que si certaines tribus avaient prospéré, d'autres avaient sensiblement décru : Ephraïm faisait partie de ces dernières. Malgré ses origines illustres, il avait, du fait de sa conduite, perdu du terrain. « Souvenez-vous de vos conducteurs qui vous ont annoncé la parole de Dieu et considérant l'issue de leur conduite, imitez leur foi » ((Héb. 13 : 7).
Josué - qui pourtant appartenait à cette tribu – ignore le favoritisme familial si fréquent et s'étonne. Il leur parle avec une certaine ironie, se basant sur leur propre prétention : « Si tu es un peuple nombreux… ». La montagne d'Ephraïm (il l'appelle ainsi par anticipation) est couverte par une forêt. Qu'importe ! Comptant sur les promesses de Dieu (Jos. 1 : 3), monte et coupe-la ! Tu auras ainsi toute la place désirée dans ce pays des Phéréziens (Gen. 13 : 7) et des Rephaïm (Gen. 14 : 5) – ces derniers étaient redoutés, semble-t-il, à cause de leur haute taille ! L'ennemi s'emploie à nous faire peur, à nous faire reculer ! C'était en réalité par manque de foi, et par indolence aussi, qu'ils n'avaient pas achevé la conquête de leur héritage et cherchaient à l'augmenter - sans combattre (v. 16) - aux dépens des autres !
Les fils de Joseph reviennent à la charge. Ils affirment que de toute manière la montagne ne leur suffirait pas. Ils n'ont pas honte d'ajouter qu'ils ne pouvaient pas s'emparer des plaines, à cause des chariots de fer de leurs adversaires (voir Jos. 11 : 6-9). Que de pertes spirituelles nous faisons, comme cette tribu, par manque de courage moral !
Les paroles de Josué se font maintenant graves et pressantes. Il leur rappelle « le secret », oublié dirait-on, de la victoire. Il engage ses frères à marcher sans crainte à la rencontre de l'ennemi. Celui-ci est vaincu d'avance, malgré ses chars et sa vaillance, si notre confiance est en Dieu seul !
C'est une leçon très importante pour nous au moment où la fraîcheur des affections à Philadelphie est souvent remplacée par la tiédeur et l'indifférence de Laodicée. Nous ne pouvons pas posséder notre héritage spirituel sans combattre, et l'armure de Dieu est à notre disposition dans ce but ! (Eph. 6 : 12)
Ni la foi de nos parents ou de ceux qui nous ont précédés dans le chemin de la foi, ni le souvenir des victoires passées ne peuvent nous donner pour aujourd'hui la force et le succès. Il y a aussi sans doute dans notre vie bien des choses à couper à la racine ! Souvent peut-être, une véritable « forêt » a remplacé la vraie piété et la communion avec Christ, ce qui a rendu notre vue « courte » (2 Pier. 1 : 9). Si nous sommes défaillants pour occuper le petit lot que Dieu nous confie, comment pourrions-nous espérer qu'Il nous en confie un plus grand ?
Lecteurs croyants, jouissons-nous aujourd'hui de notre héritage ? Si ce n'est pas le cas, recherchons-en les motifs dans nos propres coeurs. Qu'attendons-nous, semblables en cela aux sept tribus qui restaient l'arme au pied (Jos. 18 : 2) ? De quelle joie nous nous privons en laissant s'écouler un tel délai ! L'apôtre exhortait Timothée à jouir en plénitude de son salut. Nous devrions chercher à nous approprier tout le bénéfice, tous les privilèges et toutes les responsabilités liés à la Vie éternelle qui est la part assurée du croyant.
Ph. L le 09.09.08
Le Seigneur est ma part, mon salut, mon breuvage
Il a fixé mon lot dans un bel héritage ;
Ma langue éveille-toi ! Réjouis-toi mon coeur !
Entonne un chant d'amour ; Jésus est ton Sauveur !