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LE LIEU EST TROP ETROIT
 
Lire : 2 Rois 6 : 1-7
 
 
            Les fils des prophètes dirent à Elisée : « Tu vois que le lieu où nous habitons devant toi est trop étroit pour nous » (2 Rois 6 : 1). Les fils des prophètes étaient sans doute des jeunes gens associés à Elisée et sous l'enseignement de ce prophète. Les prophètes eux-mêmes étaient des hommes de Dieu dont l'âme était fermement établie dans la Parole de Dieu : leurs profondes convictions les avaient amenés à prendre nettement position pour Dieu en des jours difficiles. Ils étaient donc préparés, si besoin était, à souffrir et à marcher seuls, incompris des autres : leur seul but était que Dieu soit glorifié. Quant aux fils des prophètes, ils étaient entrés, par leur naissance, dans une certaine position privilégiée, qu'ils avaient reçue de leurs pères. En conséquence, ils partageaient peu les exercices d'âme de ceux-ci ; ainsi, tout en reconnaissant le Dieu de leurs pères, ils n'avaient pas une appréciation suffisante du lieu béni qu'ils occupaient. Ils n'avaient donc pas le même dévouement que les prophètes ! Bien que placés de façon extérieure dans une position identique, ils n'avaient pas pour ce lieu le même attachement que leurs pères. Ne doit-on pas reconnaître que ce qui nous a peu coûté est souvent peu apprécié ?
 
            Dans les « fils des prophètes », n'avons-nous pas le portrait au demeurant sympathique de beaucoup de chrétiens de la période actuelle ?
 
            Nous pensons à ce mouvement remarquable de l'Esprit de Dieu qui a eu lieu au 19ème siècle. Beaucoup de croyants ont été amenés par leurs exercices d'âme à abandonner des organisations humaines et tout ce qui contristait et entravait la libre activité du Saint Esprit. Ils ont mis en pratique ce que Dieu leur avait appris par les Ecritures, souffrant souvent, à cause de leur prise de position fidèle, de la perte de leurs amis et aussi de leurs biens matériels. Mais la joie du Seigneur était leur force et Il honora pleinement leur foi. Les générations qui ont suivi, élevées souvent dans la vérité et préservées de bien des pièges, n'ont pas été obligées de combattre pour leur liberté spirituelle, mais elles ont tout trouvé à leur disposition. Ces chrétiens ont alors estimé cette position comme acquise et ils n'ont pas eu de profonds exercices dans leurs âmes. Ils se sont donc probablement trouvés, tant que leurs pères ont vécu, dans une certaine mesure, en sécurité. Qui les blâmera si la vigueur spirituelle de leurs ancêtres leur a fait défaut ?

            Nous devons tous être mis à l'épreuve : alors que la vérité devrait nous gouverner, nous n'apprécions pas suffisamment notre position bénie dans le rassemblement autour de Christ et nous sommes exposés nécessairement à des dangers que nous n'avions sans doute pas prévus ! De sorte qu'aujourd'hui, ils sont nombreux ceux qui ne saisissent que faiblement le privilège du lieu qu'ils occupent et regardent plutôt avec envie vers un lieu qui semble leur promettre plus de liberté ! Tel était à l'évidence l'état des choses dans les jours du prophète Elisée. Il y avait eu certainement, parmi les fils des prophètes, un peu de mécontentement qui s'exprime enfin ouvertement par ces paroles : « Tu vois que le lieu où nous habitons devant toi est trop étroit pour nous ».
 
            Nous pouvons imaginer l'effet de ces paroles sur le vieux prophète. Ils étaient mécontents du lieu qu'il leur avait donné et ils préféraient un lieu de leur propre choix ! Il se peut que les méthodes d'Elisée aient été considérées comme surannées : aussi, les fils des prophètes s'étaient peut-être enquis ailleurs et avaient préféré la façon de faire d'autres personnes. Pourquoi ne pas s'élargir et rendre les choses plus attrayantes ? Le lieu est « trop étroit »: n'est-ce pas là l'esprit qui envahit parfois beaucoup de nos chers jeunes frères et soeurs ? N'y a-t-il pas parfois, avec ce sentiment que le lieu est resserré et étroit, le désir de nous adapter aux conditions du jour actuel, afin de rendre la vérité plus agréable ?
 
            Le lieu où la grâce nous a placés –notre véritable demeure- est l'assemblée, la maison de Dieu. Ici, en principe, la chair n'a pas de place. Aucun arrangement de l'homme ne peut y être admis : le Saint Esprit est notre Guide, notre Directeur. Si donc nos voies et nos désirs sont charnels, la vérité ne sera pas agréable à entendre, le lieu paraîtra « trop étroit pour nous ». Nous remarquons dans les paroles de ces jeunes gens l'expression : « pour nous ». C'était peut-être le noeud de leur difficulté. Le « moi » constituait le centre de leurs désirs ; le lieu ne leur convenait pas. Le fait que ce soit le lieu fixé où ils pouvaient se trouver en compagnie de l'homme de Dieu et profiter de ses pieux conseils et de ses enseignements, avait peu d'importance. Ils préféraient donc aller au Jourdain pour y bâtir un lieu qui leur conviendrait ! En réalité, rester à l'endroit où se trouvait le prophète et où il donnait son enseignement était devenu une contrainte dont ils voulaient s'affranchir.
 
            Avec beaucoup de sagesse, l'homme de Dieu ne s'est pas opposé à l'intention des fils des prophètes. Il savait sans doute qu'ils devaient apprendre leur leçon et ne devaient pas seulement être retenus dans le chemin de Dieu par des associations. Il semble cependant que l'un d'eux a eu quelque hésitation. Peut-être craignait-il de perdre la pieuse compagnie d'Elisée ? Alors que d'autres étaient peut-être plus disposés à tourner le dos à leur maître, lui-même ne peut s'y résoudre sans faire auparavant une instante demande : « Consens, je te prie, à venir avec tes serviteurs ». Dans une grâce et une sympathie pleine d'amour, le prophète répond : « J'irai ».

            Quel changement nous voyons ici ! Elisée va avec eux en grâce ; chose assurément bien différente que leur présence avec lui dans sa propre demeure. Tel est notre cas lorsque nous prenons le chemin de notre choix : le Seigneur peut encore se manifester à nous, ayant compassion de notre faiblesse et de notre ignorance, mais c'est une chose toute différente de rester avec Lui. A la question des deux disciples de Jean 1 : « Maître, où demeures-tu ? », Il répond : « Venez et voyez ».
 
            En arrivant à l'endroit désiré, débordant d'activité, ils commencèrent immédiatement à se servir de la hache. Sans doute le prophète les suivait-il d'un regard attristé ; il les aimait et eux l'aimaient, car n'avaient-ils pas désiré sa présence ? Il les supportait dans l'amour. Comme l'un d'eux s'affairait à abattre une pièce de bois, sa hache lui échappa, tomba dans le fleuve, et fut évidemment bientôt perdue de vue. Son outil disparu, le jeune homme s'écria : « Hélas ! Mon maître ! Elle était empruntée ! » N'est-ce pas là le secret de la plupart de nos difficultés individuelles et collectives ? Combien souvent nous ne nous sommes  pas réellement approprié la vérité que nous professons ! Nous pouvons saisir la vérité d'une manière intellectuelle, nous servir d'une phraséologie d'emprunt, mais si nous ne nous sommes pas approprié la vérité, nous perdrons probablement ce que nous paraissions posséder. Nous pouvons parler de la vérité de l'assemblée, du Corps de Christ comme tête et de la présence de l'Esprit, mais n'est-ce pas comparable, hélas, à des outils d'emprunt, à des vérités qui n'ont jamais été apprises avec Dieu ? Et de plus, cela peut se manifester en s'accommodant aux voies du monde religieux et en adoptant ses méthodes. Toutes ces choses sont peut-être faites dans le but apparemment louable, le désir d'atteindre le plus grand nombre de personnes possible. Mais tous ces moyens sont de pauvres substituts à la puissance de l'Esprit ; ce ne sont en général que des expédients qui agissent sur le coeur naturel et cachent un manque de puissance spirituelle. Cela ne doit-il pas contrister le Saint Esprit ?
 
            Le jeune homme qui perdit son fer savait de quel côté se tourner dans sa difficulté. Après tout, l'homme de Dieu était un secours facile à trouver. « Où est-il tombé ? », demanda Elisée ; et quand on le lui eut montré, il prit un morceau de bois, le jeta dans l'eau et fit surnager le fer. Nous avons certainement ici un acte symbolique. Ce morceau de bois représente la croix de Christ, et le miracle du fer qui surnage ne montre-t-il pas que les choses de Dieu ne peuvent être connues que par la puissance de la résurrection ? Cela n'enseigne-t-il pas également que nous devons retourner dans nos pensées jusqu'à la croix et apprendre la signification de notre baptême dans lequel nous avons été baptisés pour la mort ? Nous avons été « ensevelis avec Christ par le baptême pour la mort » (Rom. 6 : 4).  Cette vérité est reconnue extérieurement : tout ce que nous étions comme enfants d'Adam, sous la sentence du mort, a pris fin dans la mort de Christ. Mais nous devons maintenant marcher en nouveauté de vie, ayant pris conscience que tous nos liens sont avec un Christ glorifié. C'est ce qui devrait mettre de l'ordre dans nos voies et nous empêcher de penser que le lieu où seul Christ a la première place et où le Saint Esprit dirige, est « trop étroit pour nous » ! Que nous puissions dire véritablement, comme Moïse : « Si ta face ne vient pas, ne nous fais pas monter d'ici » (Ex. 33 :15).
 
                                                                               J. W. H. Nichols