LA DEUXIÈME ÉPÎTRE AUX CORINTHIENS (12)
LE SERVITEUR DE CHRIST, SON MINISTÈRE ET SES ÉPREUVES
CHAPITRE 12
La grâce et la discipline de Dieu envers Paul
Paul au troisième ciel
L’écharde de Paul
Le dernier message de Paul aux Corinthiens
Amour et vérité
LE SERVITEUR DE CHRIST, SON MINISTÈRE ET SES ÉPREUVES
La grâce et la discipline de Dieu envers Paul
La première partie du chapitre 12 (v. 1-10) révèle :
1. Quels sont les sommets de bénédictions où un serviteur peut être admis pour trouver la force et le réconfort dont il a besoin pour servir.
2. D’un autre côté, combien, en étroite liaison avec cette bénédiction, la discipline est nécessaire. Et si elle fut nécessaire pour Paul, qui pensera pouvoir en être dispensé ?
L’apôtre fut abaissé par les épreuves de son corps décrites au chapitre 11. La puissance du Seigneur l’a délivré et conservé (2 Tim. 4 : 18). Et si pour un moment il est exalté dans la gloire, il ne faut pas qu’il perde le sentiment de sa fragilité et de son néant, sinon la puissance de Dieu ne pourrait pas s’exercer. Se glorifier seulement dans les faiblesses, voilà la condition absolue pour que Dieu soit glorifié dans l’accomplissement de sa puissance.
- Un secret de longue date (v. 1)
L’apôtre, pour la première fois, va parler d’un secret qu’il était seul à connaître. Il s’agit d’une vision et d’une révélation d’un caractère unique.
En effet, il eut d’autres visions et d’autres révélations divines destinées à être connues. Par exemple, il évoque, devant ses frères, non seulement sa conversion sur le chemin de Damas, mais aussi une vision dans le temple à Jérusalem (Act. 22 : 6-17).
Mais l’expérience dont il parle maintenant le concernait lui seul. Cela était tellement vrai que la communication totale des faits était impossible. Lui seul avait reçu, pour un moment, la capacité de les apprécier et d’en jouir. Et s’il en parle toutefois, c’est parce qu’il était utile pour les Corinthiens d’en connaître quelque chose.
Paul avait gardé ce secret depuis quatorze ans. Il n’en aurait peut-être jamais parlé si l’état de ses frères ne l’avait nécessité, pour montrer l’immense grâce de Dieu à son égard et pour donner du poids à son enseignement.
Il est bon de garder pour soi les moments particuliers d’intimité secrète que nous avons pu avoir avec le Seigneur. Souvenons-nous du cas de David. Aurait-il révélé à Saül le secret de ses victoires contre le lion et l’ours s’il n’y avait pas eu la nécessité de se faire reconnaître comme un combattant valable (1 Sam. 17 : 34-36) ?
Le livre des Actes ne fait aucune allusion à cet événement. Contrairement à la vision sur le chemin de Damas, il n’y eut aucun témoin, car ce dernier aurait pu préciser si ce ravissement avait été dans le corps ou hors du corps.
Depuis quatorze ans, on connaissait son écharde ; elle était visible, mais on en ignorait l’origine et la raison. Tout va s’expliquer maintenant.
- Un « homme en Christ » (v. 2a)
Paul parle de lui-même à la troisième personne (v. 2-3), comme s’il s’agissait de quelqu’un d’autre. Il ne parle pas en tant qu’apôtre, ni en tant qu’esclave du Seigneur. Les révélations qu’il avait reçues comme tel (apôtre ou esclave) étaient destinées à être retransmises. Mais ici, il parle simplement comme « un homme en Christ ».
Il distingue dans sa propre personne, mais sans les séparer : d’un côté, l’homme en Christ, et de l’autre côté, le moi avec ses faiblesses. Être en Christ, c’est la position inaltérable devant Dieu de tout vrai chrétien. Un tel homme n’est plus condamné (Rom. 8 : 1), il est une nouvelle création (5 : 17), il est assis dans les lieux célestes, rendu agréable dans le Bien-aimé (Eph. 1 : 6 ; 2 : 6).
Souvent, hélas, une telle position n’est ni réalisée, ni goûtée dans notre vie pratique.
- Le « troisième ciel » (v. 2b)
Paul pouvait préciser l’époque (il y avait quatorze ans) et le lieu (le troisième ciel), mais non son état (avec ou sans son corps). Mais, était-ce important ? Notre corps actuel a-t-il une part à ces choses célestes ? L’apôtre a déjà fourni la réponse dans sa première épître : « La chair et le sang ne peuvent pas hériter du royaume de Dieu » (1 Cor. 15 : 50).
Que signifie le « troisième ciel » ? Cette expression, unique dans les Ecritures, n’a pas manqué d’interroger les commentateurs.
En considérant le parvis du tabernacle, son lieu saint et son lieu très saint, les Juifs parlaient en figure des trois ciels. D’après l’épître aux Hébreux, il est dit qu’ils étaient « la figure et l’ombre des réalités célestes » (8 : 5).
1. Divers passages montrent qu’il y a d’abord le ciel créé : « Les cieux sont l’ouvrage de tes mains », dit le psalmiste (Ps. 102 : 25). Ils passeront et seront remplacés par de nouveaux cieux (Apoc. 20 : 11 ; 21 : 1).
2. Il y a ensuite les cieux du monde invisible où sont les esprits célestes, c’est-à-dire les anges, même ceux qui sont déchus (Eph. 6 : 12). Satan s’y trouve encore (Eph. 6 : 11-12), avant le combat qui l’en chassera à jamais (Apoc. 12 : 7).
3. Le troisième ciel, lui, n’appartient ni au temps, ni à aucune création. Il est sans commencement ni fin comme Dieu lui-même. C’est le lieu de la présence divine, « la lumière inaccessible » (1 Tim. 6 : 16). Ce ciel-là ne passera pas. Lui seul peut contenir Dieu. David a écrit : « Tu as mis ta majesté au-dessus des cieux » (Ps. 8 : 1). Le Seigneur ressuscité est monté au-dessus de tous les cieux (Eph. 4 : 10). C’est ce troisième ciel qui s’est ouvert au regard du martyr Etienne quelques instants avant qu’il y soit introduit (Act. 7 : 55-56). Dès maintenant, nous pouvons y entrer par la foi ; mais Paul y entra en réalité pour y connaître un avant-goût de la part future de tous les saints.
- Le paradis (v. 3-4)
Avec une certaine emphase, l’apôtre renouvelle son doute quant à son corps. Le mot original utilisé pour « hors » du corps est différent dans les versets 2 et 3 :
- au verset 2 : c’est « ektos » : dehors, avec la notion d’être libéré du corps.
- au verset 3, c’est : « xônis » : séparément, à part, avec l’idée d’indépendance.
Mais Paul a été ravi « dans le paradis ». Le paradis, appelé aussi le paradis de Dieu (Apoc. 2 : 7), désigne le même lieu que le troisième ciel, impliquant l’idée de choses élevées au plus haut degré.
Le paradis rend compte plutôt du caractère du lieu : c’est un jardin de délices. Là, une bénédiction inestimable attendait le brigand crucifié et converti : « Tu seras avec moi dans le paradis » (Luc 23 : 43).
- La gloire de l’apôtre Paul (v. 5-6)
« Un homme en Christ » (v. 2) ou « un tel homme » (v. 5), ne désigne pas l’apôtre Paul, mais le simple croyant Paul, comme tout autre croyant. Sa gloire est précisément d’être en Christ : quelle position glorieuse ! Il ne s’agit surtout pas de « gloire personnelle ». Paul, séparé peut-être de son corps, ayant en tout cas perdu la notion de ce corps, pouvait se glorifier car c’était entièrement « dans le Seigneur » (1 Cor. 1 : 31). Se glorifier ainsi n’était pas de l’orgueil. Dans le troisième ciel, la conscience du moi est perdue.
Mais de retour ici-bas, le moi revient avec ses limites et ses tendances. Les paroles deviennent inexprimables. Il ne peut pas en dire plus que ce qui est écrit ici. Il retrouve les penchants de tout homme (Act. 14 : 15).
Si Paul n’a pas d’orgueil, il n’a pas non plus de complexe d’infériorité. Il pourrait sans peine, sans forcer les événements, faire état d’innombrables choses à son actif : signes, prodiges, miracles incontestés. Et en faisant cela, il ne serait pas insensé.
Il y a donc quatre domaines dans lesquels Paul est susceptible de se glorifier, mais il n’accepte de le faire que dans les deux premiers :
1. Comme homme en Christ. Cette gloire-là brille dans le ciel. Elle dépend uniquement de la gloire de Christ. Or Christ est glorifié et Paul est en Christ ; par conséquent, il est glorifié en Lui.
2. Il se glorifie dans ses faiblesses. Cette gloire peut se voir ici-bas. Le vase est faible, il est en terre. Le Seigneur peut compatir à nos faiblesses (Héb. 4 : 15).
3. Sans mettre en cause son autorité apostolique, il refuse d’être glorifié en tant qu’apôtre.
4. Enfin, il y a une gloire qui n’est d’aucun profit (v. 1), c’est celle de la chair. Il sait qu’en elle il n’habite point de bien (Rom. 7 : 18). Se glorifier en elle, c’est de l’orgueil, « la faute du diable » (1 Tim. 3 : 6). Pour en être préservé, il aura l’écharde dans son corps.
Ainsi, comme pour Paul, que notre seule gloire ici-bas soit de faire briller et d’exalter celle de Christ.
- L’écharde, sa raison d’être (v. 7)
Dans un même verset, Paul fait mention de son extraordinaire révélation et de son écharde. L’une est la conséquence de l’autre.
L’écharde a un rôle :
– préventif : éviter la glorification de la chair,
– positif : produire la gloire dans les faiblesses.
Il est souffleté par un ange de Satan. On ne peut manquer de rapprocher cela de l’intervention du diable dont Dieu s’est servi pour éprouver Job. Mais c’est Dieu qui contrôle et amène tout à bonne fin (voir Ps. 57 : 2). On pourrait s’étonner que Satan intervienne pour prévenir l’orgueil. Mais son propos était de faire chuter l’apôtre. Alors que celui de Dieu était, au contraire, de prévenir la chute.
Pendant la vision, dans le ciel, il n’y avait aucun danger d’orgueil pour l’apôtre. Christ est tout. Mais au retour à la condition humaine, la chair incorrigible est prête à s’enorgueillir. Oui, même Paul avait en lui cette racine d’orgueil susceptible de resurgir. Nous avons une image de cet ennemi intérieur dans Amalek avec lequel Israël ne finissait jamais d’être en guerre (Ex. 17 : 16).
Ce verset commence et finit par les mêmes mots : « afin que je ne m’enorgueillisse pas ». Par la grâce divine, il a été ravi au troisième ciel et par cette même grâce il a reçu l’écharde.
En quoi consistait-elle ? Il ne s’agissait pas d’une épreuve spirituelle ou mentale, mais bien physique : une écharde « dans la chair », c’est-à-dire dans le corps. C’était une affection, peut-être oculaire, qui provoquait le mépris (10 : 10) et même le dégoût (Gal. 4 : 14-15). On comprend aussi que, contrairement aux épreuves dues aux circonstances, rappelées au chapitre 11, il s’agissait d’une souffrance permanente, harcelante, liée sans répit à son corps. Quel exercice de patience !
Si l’apôtre a eu son écharde, attendons-nous à avoir aussi la nôtre sous une forme ou une autre. Qui pourrait dire qu’il n’en a pas besoin ? Une écharde n’a pas pour but de corriger la chair. Rien, ni personne, ne peut corriger la chair (Rom. 8 : 7) : ni le déluge, ni la Loi, ni la grâce en Jésus Christ, ni le Saint Esprit, ni même l’accès au troisième ciel, ni, plus tard, le règne millénaire. La raison d’être de l’écharde est de rendre la chair impuissante. C’est la condition pour que la grâce du Seigneur et sa puissance s’exercent. La puissance du Seigneur ne s’accomplit pas dans la puissance de la chair.
Il n’y a qu’un seul homme pour lequel l’écharde n’a jamais été nécessaire : le Fils de Dieu, Lui, la gloire du ciel. Descendant de la montagne de la transfiguration, Il ne permet pas à ses disciples de parler de sa gloire qu’ils avaient contemplée. Et si l’homme divin est, sans transition, mis en présence de Satan, du péché et de ses conséquences, c’est dans une humilité parfaite qu’Il reprendra son travail en faveur de sa créature souffrante. Non, il n’y a point de péché en lui (1 Jean 3 : 5), et le chef de ce monde n’avait rien en lui (Jean 14 : 30). L’écharde est absolument inutile. Il est parfaitement digne de la gloire qui Lui est rendue.
- « Ma grâce te suffit » (v. 8-9)
Notre chair, que nous avons tendance à épargner et même à soigner, est impropre à la présence de Dieu et à son service. Mieux vaut qu’elle soit humiliée par une écharde pour empêcher qu’elle se manifeste, plutôt que d’avoir à subir l’humiliation, comme fruit de son activité.
Non seulement le travail de l’apôtre ne sera pas entravé par l’écharde mais, à cause d’elle, il jouira d’une plus grande grâce et d’une puissance accrue. L’écharde l’humiliera, mais la grâce le consolera. Voilà pourquoi, malgré sa sincérité, sa droiture et son apparente logique, la prière de Paul n’a pas été exaucée. D’autres, avant lui, avaient fait la même expérience. Car une prière n’est pas un ordre, ni même une suggestion présentée à Dieu.
Abraham n’a pas eu la réponse souhaitée quand il dit à Dieu : « Oh, qu’Ismaël vive devant toi ! » (Gen. 17 : 18). Elie le Thishbite avait demandé la mort pour son âme (1 Rois 19 : 4), mais Dieu lui conserva la vie.
Combien, dans ces deux cas, la pensée de Dieu était grâce et bénédiction, bien au-dessus de la prière formulée !
Paul s’adresse au Seigneur, dont il a déjà reçu de nombreuses fois l’exaucement de ses prières. Maintenant, à trois reprises, il appelle au secours, mais l’écharde restera. Une grâce surabondante lui sera accordée, pleinement suffisante pour supporter son écharde. Elle augmentera plus vite que l’épreuve et au fur et à mesure que la faiblesse sera ressentie. La grâce est le terme de tout. C’est elle qui couronnera tout l’édifice, l’Eglise qui, elle-même, est un monument de la grâce (Zach. 4 : 7).
Qu’elle soit notre seul secours, notre seul recours, la source de toute force pour endurer l’épreuve avec patience, pour servir et remporter la victoire !
- « Ma puissance s’accomplit dans la faiblesse » (v. 9-10)
La leçon était dure, mais elle sera bien apprise par Paul. Le point de départ, c’est la perte totale de la confiance en la chair. Ensuite la confiance dans le Seigneur et sa puissance apporte la réponse. Cette puissance est libre de se manifester dans la faiblesse qui n’est pas le péché, répétons-le.
Jean le Baptiseur n’était rien en lui-même, il n’était qu’une simple voix dans le désert (Jean 1 : 23). Gédéon était le plus petit dans la maison de son père (Jug. 6 : 15). De même, Paul n’est rien (12 : 11). Et, en fait, Jean le Baptiseur a été le plus grand des prophètes, Gédéon un grand vainqueur, et Paul le plus excellent des apôtres.
Le Seigneur lui parle : « Ma grâce te suffit ». Cette parole a tout son effet : les eaux amères sont devenues douces, la détresse disparaît. Il reçoit grâce, richesse, puissance et gloire. Non, il ne demandera pas une quatrième fois que l’écharde se retire. Paul se soumet sans regimber, sans amertume, sans se croire lésé en rien. Il a au contraire un grand gain. La puissance du Seigneur va s’accomplir en lui, et demeurer sur lui (v. 9), pour le rendre fort (v. 10).
Nous pouvons nous émerveiller de voir ce travail de l’Esprit en Paul. Car, qui aimerait perdre sa force personnelle, sa belle apparence, son éloquence, ou toute qualité humaine ?
Il en arrive à affirmer prendre « plaisir » dans ses « faiblesses ». Voilà deux mots pourtant bien contradictoires. Et toutes ses autres épreuves, résumées ici en cinq expressions, sont autant de motifs de plaisir : faiblesses, outrages, nécessités, persécutions, détresses. Ne voyons pas là une incitation au masochisme (comportement d’une personne qui trouve du plaisir à souffrir, qui recherche la douleur et l’humiliation). Ce ne sont évidemment pas la maladie ou la souffrance qui amènent la puissance.
Paul recevait tout du Seigneur : épreuves et puissance. Ceux qui s’infligent volontairement des peines ou des macérations le font pour leur propre gloire (Col. 2 : 22-23). Donc, pour ce qui nous concerne, abstenons-nous de témérité, de risques inutiles ou d’exploits ; mais manifestons une humble soumission à Celui qui conduit nos circonstances. Nos temps sont en la main du Seigneur (Ps. 31 : 15). Si l’épreuve nous atteint, gardons-nous de nous débattre, de nous révolter, ou de nous laisser accabler. Soumettons-nous sous la puissante main de Dieu et recherchons la raison profonde des choses. Son propos est toujours de nous faire du bien à la fin.
Portons une fois de plus les yeux sur l’homme Christ Jésus dont la dépendance fut parfaite. Sa seule force a été en son Dieu : « Je serai glorifié aux yeux de l’Eternel, et mon Dieu sera ma force » (Es. 49 : 5). Sa seule puissance, en tant qu’homme, a été celle du Saint Esprit : « Jésus revint en Galilée dans la puissance de l’Esprit » (Luc 4 : 14).
« Ma grâce te suffit ». Dans la faiblesse extrême,
Nous éprouvons, Seigneur, ton tout-puissant secours ;
Tu soutiens notre foi dans la souffrance même,
Nous entourant toujours des soins de ton amour.
Récapitulons, en terminant, les enseignements de ces versets :
1. Dans le ciel l’« homme en Christ » peut se glorifier parce que l’homme naturel est entièrement mis de côté. Christ est tout.
2. Sur la terre, l’apôtre ne se glorifie que dans ses faiblesses qui permettront l’accomplissement de la puissance du Seigneur.
3. Dans le ciel (dès maintenant pour la foi), le croyant est en Christ, devant Dieu.
4. Sur la terre, Christ est dans le croyant, devant les hommes.
5. Pour servir le Seigneur, il faut que le serviteur ait des communications secrètes avec Celui qui est la source de toutes les richesses.
6. Mais il faut de plus que le serviteur soit réduit à néant.
7. La place sera ainsi laissée à la puissance du Seigneur qui, loin de venir au secours de la chair, la remplacera.
Alors, le témoignage du croyant sera fidèle et son travail ne sera pas vain dans le Seigneur (voir. 1 Cor. 15 : 58).
Le dernier message de Paul aux Corinthiens
- Paul, apôtre à part entière (v. 11-12)
Il est triste que l’apôtre Paul ait été contraint de se recommander lui-même en faisant l’insensé, c’est-à-dire en parlant beaucoup trop de lui, à son gré. Ce n’était pas à lui de proclamer l’excellence de son ministère, mais bien aux Corinthiens. N’avaient-ils pas eu sous les yeux les preuves les plus incontestables de son apostolat ? Cela coulait de source. Qu’est-ce qui les empêchait donc d’apprécier le travail de Paul à sa vraie valeur ?
Dieu avait rendu témoignage par l’apôtre, non seulement avec toute patience (v. 12), mais aussi par « des signes et des prodiges, par divers miracles » (Héb. 2 : 4 ; Act. 2 : 43). Les Corinthiens avaient-ils toujours un « méchant cœur d’incrédulité » (Héb. 3 : 12) ? Etaient-ils semblables aux disciples auxquels le Seigneur est obligé de dire : « Croyez-moi… sinon, croyez-moi à cause des œuvres elles-mêmes » (Jean 14 : 11).
Au lieu de prendre la défense de l’apôtre en son absence contre les faux ouvriers, les Corinthiens les écoutaient et les respectaient plus que lui. En présence de ces imposteurs, ils manquaient de discernement. Leur état charnel faisait d’eux une proie facile.
Ne voyons pas de contradiction dans ce verset 11. Se glorifier soi-même devant Dieu est insensé. Mais se glorifier devant les Corinthiens n’est pas insensé (v. 6). Il suffit à Paul de dire la vérité sur sa vie. L’homme en Christ peut se glorifier devant Dieu (v. 5), mais la présence de Christ en lui en fait le plus excellent des apôtres. Il y a une parfaite harmonie dans sa personne :
– conscience totale de son néant par nature,
– conscience totale de la puissance de Christ accomplie en lui devant ses frères et devant ses opposants.
- Un amour pur, désintéressé (v. 13-15)
Parmi tous les privilèges qu’ont eus les assemblées visitées par Paul, il y en a néanmoins un qui a manqué aux Corinthiens et qui leur manquera : c’est celui de le prendre en charge matériellement. En cela, ils seront inférieurs aux autres assemblées qui avaient suppléé à ses besoins. C’est un reproche qu’il leur fait, et plus ou moins ironiquement il leur en demande pardon. Mais il gardera cette attitude d’indépendance matérielle au risque de refroidir leurs affections pour lui, car ils pouvaient se sentir frustrés.
Il s’était déjà expliqué sur ce sujet. Leur état charnel, la malveillance de certains le conduisaient à la prudence pour éviter de donner occasion à la médisance. Leurs dons éventuels auraient-ils le caractère d’un « parfum de bonne odeur, un sacrifice agréé, qui plaît à Dieu » (Phil. 4 : 18) ?
« Me voici prêt pour la troisième fois à aller auprès de vous » (v. 14). Pourquoi parle-t-il de troisième fois alors que ce ne sera que la deuxième ? On a pensé qu’en fait c’était bien la troisième fois qu’il se préparait à y aller. Mais nous avons vu (1 : 15) que le deuxième projet n’avait pas pu se réaliser. Cependant, il n’avait jamais renoncé définitivement, et il ne veut pas les surprendre. Il est prêt à revenir. Mais seront-ils prêts à le recevoir ?
Paul ne sera jamais leur débiteur quant aux choses matérielles. Il avait lui-même répondu à leurs besoins spirituels. Il les avait enrichis de trésors célestes. Il était leur père spirituel, et son attitude ne démentait pas son amour pour eux. Selon la règle de la nature (v. 14), il avait bien amassé pour ses enfants spirituels (et non l’inverse), en vue de leur seul bien.
Le cœur de l’apôtre s’ouvre alors (v. 15) pour nous montrer au plus haut degré le désintéressement complet de son amour. Rien, même pas l’ingratitude des Corinthiens, aussi douloureuse soit-elle, ne l’empêchera de rechercher leur bien spirituel. L’amour « ne cherche pas son propre intérêt » (1 Cor. 13 : 5). C’est l’amour dans toute sa pureté. C’est l’amour selon Dieu. D’autres passages montrent aussi cette abnégation de l’apôtre Paul : Phil. 2 : 17 ; 1 Thes. 2 : 7 ; 2 Tim. 4 : 6.
- La conscience des Corinthiens interpellée (v. 16-18)
Parmi les calomniateurs, certains n’hésitaient pas à insinuer que Paul extorquait de l’argent aux Corinthiens indirectement ou par l’intermédiaire de Tite et de ses collaborateurs. Triste et sordide pensée !
Mais il prend une fois de plus un ton ironique en se qualifiant lui-même de rusé. En fait, il se moque de ces ennemis. Ce mot « rusé » est, paraît-il, un terme de chasse et fait allusion au piège de l’oiseleur, par exemple. Ce sont les accusateurs qui tomberont dans le piège qu’ils lui avaient tendu.
Il réfute donc cette ultime calomnie en posant quatre questions à ses frères, en leur laissant le soin d’y répondre.
1. Tite s’est-il enrichi à leurs dépens ?
2. Paul a-t-il partagé un butin quelconque ?
3. Paul et Tite n’ont-ils pas eu le même esprit ?
4. Paul et Tite ont-ils suivi des traces différentes ?
Tous ceux qui étaient droits de cœur à Corinthe ont certainement eu une grande honte que de telles questions leur soient ainsi posées.
- Paul devant Dieu (v. 19)
En tout cas, si Paul a tenu ces longs discours (ch. 11 et 12), ce n’est pas qu’il ait eu mauvaise conscience, loin de là. Il ne se sent pas tenu de se justifier devant eux, mais il veut justifier son ministère.
En tant que serviteur, c’est devant Dieu qu’il se tient et non devant eux. « Je n’ai rien sur la conscience ; mais, pour autant, je ne suis pas justifié : celui qui me juge, c’est le Seigneur », avait-il déjà écrit dans la première épître (1 Cor. 4 : 4). C’est l’attitude du prophète Elie qui pouvait dire : « L’Eternel, le Dieu d’Israël, devant qui je me tiens... » (1 Rois 17 : 1). Paul était devant Dieu et parlait en Christ (v. 19 ; 2 : 17 ; Eph. 3 : 14).
Une fois encore, et ce n’est pas la dernière, il garantit que son premier désir est leur édification. Et même si son ton est sévère, il les appelle pour la deuxième fois « bien-aimés » (7 : 1).
- Avertissements pressants (v. 20-21)
Combien il est solennel de constater ce contraste absolu entre :
– les chrétiens spirituels, hommes en Christ, dont Paul donne l’exemple, et
– les chrétiens charnels qui subsistaient encore dans l’assemblée à Corinthe !
Paul s’était réjoui d’avoir confiance à leur égard, en toutes choses (7 : 16). Il s’était glorifié à leur sujet (1 : 14 ; 9 : 2). Mais il craint maintenant d’éprouver déception, humiliation et affliction en constatant l’absence de vraie repentance chez quelques-uns. Au début de l’épître, il leur avait dit que c’était pour les épargner qu’il avait retardé sa venue (1 : 23 ; 2 : 1). Maintenant le temps de la patience arrivait à son terme et l’avertissement se fait plus pressant.
Que se passait-il donc encore à Corinthe ? Beaucoup de problèmes moraux subsistaient, conséquence de l’esprit de parti dénoncé dans la première épître ; essentiellement des difficultés de relations entre frères (v. 20) : rivalités, méfiance, disputes, médisance. L’orgueil est à la base de tout : « Ce n’est que de l’orgueil que vient la querelle » (Prov. 13 : 10). Ces manifestations de la chair caractériseront les temps fâcheux de la fin (1 Tim. 6 : 4).
Une repentance superficielle laissera le mal réapparaître comme une mauvaise herbe. La truie lavée retournera se vautrer dans le bourbier (2 Pier. 2 : 20-22). La chair, répétons-le, ne peut être améliorée.
Hélas, à ces divisions intestines et à ces impuretés de l’esprit, s’ajoutaient des égarements moraux et des vices grossiers (v. 21). Ceux-là non plus, semble-t-il, n’avaient pas été complètement jugés et abandonnés.
En plus de l’humiliation de Paul et des Corinthiens, il fallait celle des pécheurs eux-mêmes. Elle devait être vraie, profonde et s’accompagner des fruits de la repentance. A défaut, l’apôtre leur apparaîtrait « tel qu’ils ne voudraient pas » (v. 20) c’est-à-dire avec « le bâton » (voir 1 Cor. 4 : 21). Il ne précise pas de quelle manière ce châtiment s’exercerait, mais le temps de la patience étant révolu, il n’épargnerait pas.
Aujourd’hui cet enseignement des apôtres invite encore chaque assemblée à ne pas supporter le mal en elle. Chacune doit juger et ôter un mal qui n’a pu être soigné et guéri ; elle a l’autorité pour le faire. Si elle ne le fait pas, elle sera elle-même jugée par le Seigneur (1 Cor. 11 : 31-32 ; Apoc. 2 : 1).
D'après « Sondez les Ecritures » (vol. 6)
A suivre