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LA DEUXIÈME ÉPÎTRE AUX CORINTHIENS (11)
 

LE SERVITEUR DE CHRIST, SON MINISTÈRE ET SES ÉPREUVES
            CHAPITRE 11
                      Les épreuves de Paul en face des opposants (suite)
                      Paul, les Corinthiens et les faux prophètes (v. 1-20)
                      Paul au milieu de ses épreuves
 

LE SERVITEUR DE CHRIST, SON MINISTÈRE ET SES ÉPREUVES

                        CHAPITRE 11

                                    Les épreuves de Paul en face des opposants (suite)

            Le sujet du chapitre 10 se poursuit ici ; toutefois, le danger qui menaçait les Corinthiens était plus sérieux qu’on pouvait le penser à priori. Aussi, l’apôtre hausse-t-il le ton, car ses craintes sont vives.
            Paul n’avait jamais d’autre but que le bien des Corinthiens et la gloire de Dieu. Ses armes n’étaient pas charnelles, avait-il écrit (10 : 4). Il va néanmoins en faire usage, c’est-à-dire qu’il va parler de lui, de son comportement envers eux, de ses titres naturels, de sa vie de service.
            S’il se met sur le même terrain que ses adversaires, c’est, non seulement pour les convaincre avec leurs propres arguments, mais surtout pour gagner le cœur des Corinthiens. Quant à la chair et à ses privilèges naturels, en effet, Paul pouvait supporter la comparaison : il ne leur était en rien inférieur. Et quant au dévouement et aux souffrances pour Christ, il leur était grandement supérieur.

            Le chapitre 11 présente trois sujets principaux très imbriqués :
                  – Les Corinthiens en face de l’apôtre Paul : v. 1-2, 5-11, 16-17.
                  – Les Corinthiens en face des faux prophètes : v. 3-4, 12-15, 18-20.
                  – Paul en face de ses adversaires, et les détails de la vie de souffrances de l’apôtre : v. 21-33.

            Pour la clarté du commentaire, les deux premiers thèmes ont été regroupés en un seul paragraphe.
 

                                    Paul, les Corinthiens et les faux prophètes (v. 1-20)

                                                Droits exclusifs de Christ sur leur cœur (v. 1-2)

            Paul va donc se résoudre à parler de lui ; pour conserver la confiance des Corinthiens, que d’autres voudraient ravir. Il leur demande de le « supporter » lui aussi, eux qui étaient si facilement enclins à supporter n’importe qui et n’importe quoi (v. 4, 20).
            Mais, pour Paul, parler de soi est une folie. Il va être volontairement et consciemment insensé. Pourquoi ? Parce qu’il est jaloux d’une jalousie de Dieu. Il est jaloux « pour Dieu », de même qu’il avait supplié « pour Christ » (5 : 20).
            Loin de lui une jalousie pour lui-même ! Son propre intérêt n’a aucune importance. Même les sentiments des Corinthiens à son égard passent après leurs vrais intérêts et ceux du Seigneur. Tel est l’esprit d’un vrai conducteur. Moïse ne souhaitait pas qu’on soit jaloux pour lui (Nom. 11 : 29), mais pour Dieu et pour sa gloire. Au sujet de la jalousie de Dieu, divers passages peuvent être rappelés : Ex. 34 : 14 ; Deut. 5 : 9 ; 6 : 15 ; Jos. 24 : 19 ; 1 Cor. 10 : 22).
            Paul (v. 2) se place dans le rôle de parents qui présenteraient leur fille à un digne prétendant. Leur unique désir est la joie du mari et de leur fille, qu’ils lui donnent comme épouse. Ils ne pensent pas à eux, mais leur joie dépend du bonheur des époux. Ils estiment que le fiancé a droit à la chasteté de sa fiancée ; elle s’était conservée tout entière dans la pureté pour lui.

                                                Ennemis subtils et dangereux (v. 3)

            Paul avait le « discernement d’esprit » (1 Cor. 12 : 10). Sa clairvoyance contrastait avec l’insouciance des Corinthiens qui ne voyaient pas le danger. Attention, leur écrit-il, Satan a réussi au début à faire tomber l’homme ; il a détruit le travail du Créateur. Maintenant, il s’attaque au travail du Rédempteur.
            Ce chapitre fait plusieurs fois référence aux récits du début de la Genèse :
                  – v. 2 : Eve présentée à Adam (Gen. 2 : 22),
                  – v. 3 : Satan séduisant la femme (Gen. 3 : 6, 13).
                  – v. 14 : Satan, ange de lumière, prenant la place de Dieu et prétendant détenir la vérité (Gen. 3 : 4).
            Sa ruse n’a pas changé. Il conteste, il interprète et fausse les paroles de Dieu. Au début, Eve n’avait pas de pensée de contestation, pas de « pourquoi ». Mais Satan insuffle, suggère et, finalement, corrompt et détourne les pensées. De même, dès le début de l’Eglise, le diable s’est servi d’hommes corrompus, pour corrompre les autres (1 Tim. 6 : 5).
            Veillons à ce que nos pensées aient la simplicité et la pureté de la colombe quant à Christ. Les pensées naturelles au cœur de l’homme sont très compliquées et s’accompagnent de « beaucoup de raisonnements » (Ecc. 7 : 29). Au contraire, les croyants sont invités à être toujours « sages quant au bien, et simples quant au mal » (Rom. 16 : 19).
            Les deux seules fois où Eve est mentionnée dans le Nouveau Testament (v. 3 ; 1 Tim. 2 : 14), c’est pour rappeler la victoire de Satan sur elle. Il s’attaque toujours aux faibles. Or les Corinthiens étaient encore bien faibles spirituellement.

                                                Un travail de sape (v. 4)

            Tels que je vous connais, dit Paul, vous êtes capables de tout accepter. Il leur dévoile la nature du mauvais travail de ces ouvriers, qui attaquaient en bloc la base du christianisme. Ils prêchaient un autre Jésus, un esprit différent et un évangile différent.
                  – « Un autre Jésus », le fondement. Or, « personne ne peut poser d’autre fondement que celui qui est posé, lequel est Jésus Christ » (1 Cor. 3 : 11). Un autre Jésus, c’était un Jésus légaliste selon la pensée de ces hommes judaïsants.
                  – « Un esprit différent ». Or, l’Esprit divin est un (Eph. 4 : 4). Sa présence et son action dans un homme se reconnaissent par la confession du nom du Seigneur Jésus (1 Cor. 12 : 13) et de son incarnation (1 Jean 4 : 2-3).
                  – « Un évangile différent » n’est plus un évangile. Les Galates aussi étaient passés promptement à un évangile différent qui n’en est pas un autre (Gal. 1 : 7).
            Mais les Corinthiens n’étaient pas les seules victimes du travail de l’Ennemi. Au commencement, le mal consiste à laisser faire, à « supporter ». Ce mot revient souvent (v. 4, 19-20). Le reproche de supporter le mal en leur sein est aussi adressé aux assemblées à Pergame et à Thyatire. On prête d’abord une oreille complaisante et on finit par se laisser convaincre, exactement comme Eve autrefois. La chair est toujours attirée par les nouveautés. On le voit bien chez les Athéniens (Act. 17 : 19-21).
            Sachons bien que notre vieille nature est toujours tentée de recevoir les fausses doctrines et les faux docteurs. Le Seigneur l’avait nettement déclaré aux Juifs : « Moi je suis venu au nom de mon Père et vous ne me recevez pas ; si un autre vient en son propre nom, celui-là vous le recevrez » (Jean 5 : 43). Et ce mal n’est pas nouveau. Déjà le prophète Jérémie disait : « Une chose étonnante et horrible est arrivée dans le pays : les prophètes prophétisent avec mensonge et les sacrificateurs dominent par leur moyen, et mon peuple l’aime ainsi » (Jér. 5 : 30-31).

                                                Une transparence complète (v. 5-6)

            « Je n’ai été en rien moindre que les plus excellents apôtres ». Ne voyons pas le moindre orgueil dans ce propos, répété plus loin (v. 5 ; 12 : 11). Pour faire contrepoids dans l’esprit des Corinthiens, Paul utilise les méthodes de ses opposants. Il les nomme ironiquement, « les plus excellents apôtres ». Il ne s’agit probablement pas des vrais apôtres, c’est-à-dire des douze, qui n’étaient pas connus des Corinthiens. Par rapport à ces derniers, Paul se nomme, au contraire, « le moindre des apôtres » (1 Cor. 15 : 9), et même « le moindre de tous les saints » (Eph. 3 : 8).
            Mais il ne renie pas ses capacités naturelles et surtout pas celles conférées par la grâce de Dieu, dont il parlera plus loin (v. 6). Si Paul avait obtenu une grande connaissance par son éducation, il en avait reçu une autre divinement, par révélation.
            Il ne conteste pas son absence d’éloquence, comme il n’avait pas nié son apparence réservée (10 : 1). Mais on devait reconnaître la supériorité de sa connaissance. Celle-ci, bien qu’incomprise, était notoire, même pour les grands de ce monde. Le gouverneur romain Festus lui dira plus tard : « Ton grand savoir te fait tourner à la folie » (Act. 26 : 24). Paul restait pourtant humble, car il ajoute : « quoique je ne sois rien » (12 : 11). Nous avons déjà noté qu’il se reconnaissait incapable de penser quoi que ce soit par lui-même, c’est-à-dire par son ancienne nature. Sa seule capacité venait de Dieu (3 : 5). De ce fait, tout ce qu’il pensait pouvait être déclaré. Il était comme une maison de verre. Il n’avait rien à cacher :
                  – quant à lui-même : « manifesté de toute manière »,
                  – quant à son travail : « manifesté en toutes choses ».

                                                Un service désintéressé (v. 7-9)

            Il pose maintenant une question sur sa conduite passée. Etait-ce critiquable ou un signe de fierté que de refuser toute aide matérielle de la part des Corinthiens ? Pendant les dix-huit mois où il avait posé le fondement de l’assemblée à Corinthe (1 Cor. 3 : 10) et avait pris soin d’elle (Act. 18 : 11), il avait tenu à gagner sa vie de ses propres mains en fabriquant des tentes avec Aquilas et Priscilla. Il désirait que l’évangile soit gratuit. La grâce ne se monnaye pas. Il arrivait avec des richesses spirituelles et n’acceptait de leur part que d’autres richesses spirituelles, les fruits de leur conversion.
            D’une manière habituelle, l’apôtre avait cherché à être le moins possible à la charge des saints : en particulier à Thessalonique (1 Thes. 2 : 5-9) et à Ephèse (Act. 20 : 33-34). Mais à Corinthe, sa conduite avait été catégorique ; il avait même préféré être dans le besoin (v. 8 ; 6 : 5). Il avait au contraire accepté plus facilement et après coup un envoi et même deux de l’assemblée à Philippes.
            Alors, pourquoi avait-il conservé cette attitude spéciale vis-à-vis des Corinthiens ? La suite du chapitre le montre.

                                                La gloire de donner gratuitement (v. 10-11)

            Pour montrer sa ferme détermination, il utilise une formule de serment : « comme la vérité de Christ est en moi ». Cela rappelle aussi l’expression : « La vérité est en Jésus » (Eph. 4 : 21). Paul est gardien de la vérité de l’évangile. Pourrait-il alors prêter un faux serment ? Il sera incorruptible et aura devant eux, et même devant les frères de l’Achaïe, cette gloire de ne pas être assisté dans l’avenir comme dans le passé. Avant de donner la vraie raison de son attitude, il tient à prévenir une fausse interprétation, le manque d’amour (v. 11). En fait, était-il encore besoin de se justifier ? Son amour n’avait-il pas été déjà abondamment prouvé ?
            Il prend Dieu à témoin et cela suffit. L’approbation divine est sa grande récompense. L’amour qui était en lui et qui l’étreignait était celui de Christ. Un tel amour ne connaît pas la flatterie (1 Thes. 2 : 5), ni ne cherche son propre intérêt, mais celui des autres (12 : 15).

                                                Une sage attitude (v. 12)

            Les faux apôtres, pour supplanter le vrai, auraient voulu tirer avantage de lui et se glorifier de leur travail bénévole. Ils seraient apparus ainsi supérieurs à Paul. On voit donc la raison profonde de cette réserve de l’apôtre. S’il avait accepté quelque argent de leur part et même de quiconque en Achaïe, les ennemis malveillants n’auraient pas manqué de se parer de leur propre désintéressement, au détriment de Paul.
            Que cela est triste et perfide ! Heureusement que dans sa sagesse et sa droiture, il évitera le piège ; il leur rappelle à plusieurs reprises qu’il n’a pas été et qu’il ne sera jamais à leur charge (7 : 1 ; 11 : 7-12 ; 12 : 14-16).
            Il aura de quoi se glorifier, il sera « tels qu’eux », ces mauvais ouvriers, et prouvera même sans peine qu’il leur est supérieur.
            Cette attitude de l’apôtre vis-à-vis des Corinthiens est confirmée au verset 18.

                                                Des ennemis orgueilleux et trompeurs (v. 13-15)

            Après avoir mis en lumière ce que font ces faux apôtres (appelés plus loin faux frères) il va montrer maintenant ce qu’ils sont. Ils ne sont ni plus ni moins que des ministres de Satan ; et à ce titre, ils reproduisent tous ses caractères : ils sont orgueilleux, usurpateurs, cupides, accusateurs, menteurs et séducteurs.
            Ces hommes, qui se disaient apôtres, étaient tombés dans le piège du diable, l’orgueil (1 Tim. 3 : 7). Ils étaient les accusateurs de Paul à propos de son apparence et de ses paroles, à l’image de Satan, l’accusateur des frères (Apoc. 12 : 10). Ils étaient trompeurs et séducteurs, car leur maître, niant son identité, apparaît comme un ange de lumière, alors qu’il est le « prince des dominateurs de ces ténèbres » (Eph. 6 : 12) .
            Trois fois le mot « transformer » revient ici. Il s’agit en effet d’induire en erreur en mélangeant un peu de vérité avec beaucoup de mensonge. Or, le diable use de ruse et de séduction (v. 3) ; il est le père du mensonge (Jean 8 : 44). Ses ministres se font appeler « ministres de la justice ». Ne soyons pas étonnés si leur fin sera d’être consumés par le feu du jugement, comme leurs œuvres elles-mêmes. Les avertissements sont nombreux pour tous ceux qui n’ont eu que l’apparence de la piété : Rom. 1 : 31 ; Rom. 2 : 6 ; Phil. 3 : 19 ; 2 Tim. 4 : 14. Comment de telles personnes seraient-elles qualifiées pour exercer la justice ? De quelle justice pourrait-il s’agir ? En tout cas, pas de celle par laquelle la grâce règne pour la vie éternelle ; plutôt la justice fondée sur les œuvres, celle qui ne sauve pas mais qui condamne (Rom. 5 : 20-21).
            C’est dans les villes où l’apôtre a le plus longtemps séjourné que Satan s’est le plus déchaîné. Dix-huit mois à Corinthe, trois ans à Ephèse. Et comme à Corinthe, des faux prophètes apparaissent à Ephèse (Apoc. 2 : 1). Heureusement, Paul avait averti les anciens de cette assemblée (Act. 20 : 30).
            Sachons bien tirer les enseignements pratiques de tout cela. Beaucoup de maux peuvent surgir parmi nous, parce que nous n’avons pas su discerner l’action de Satan dans de petits détails de nos circonstances, attribués à d’autres causes d’apparence légitime. Reconnaissons la véritable identité de « l’ange de lumière », en nous référant toujours à « la vivante et permanente parole de Dieu » (1 Pier. 1 : 23). Paul écrira aux Galates : « Si un ange venu du ciel vous évangéliserait contrairement à ce que nous vous avons évangélisé, qu’il soit anathème ! » (Gal. 1 : 8).

                                                Une folie volontaire (v. 16-17)

            Avant de parler de lui-même comme il ne l’avait encore jamais fait (v. 21-33), Paul avertit les Corinthiens. Il ne veut pas être en cela un mauvais exemple pour eux. Il précise bien la différence entre la gloire selon le Seigneur et la gloire selon la chair. Et s’il est obligé de parler de cette dernière, c’est à cause de ses adversaires. Bien que de sens rassis (5. 13), il va être forcé de faire l’insensé. Il va répéter cela à cinq reprises pour qu’ils ne se méprennent pas sur son compte (v. 1, 16-17, 21 ; 12 : 11).
            Quel mal se donne ainsi l’apôtre pour ses enfants spirituels ! Son exemple garde toute son actualité pour nous. Nous voyons ce qu’est en pratique le zèle, la droiture, la crainte, la dignité et l’humilité d’un fidèle serviteur du Seigneur.

                                                Un triste asservissement (v. 18-20)

            La base du christianisme ayant été remise en cause, voilà maintenant les conséquences : l’asservissement, la spoliation, l’humiliation. Les Corinthiens, imbus de leur sagesse et se fiant à elle, se laissaient dominer par ces faux prophètes, qualifiés ici d’insensés. La sagesse du monde est « une folie » (1 Cor. 1 : 20). Les termes employés par Paul montrent que certains de ces mauvais conducteurs s’étaient déjà imposés en maîtres exigeants, avec une verge de fer. Ils avaient « pris leurs biens ». On peut dire que les Corinthiens avaient abandonné la grâce qui était à eux (Jon. 2 : 9).
            Leur indifférence peut s’expliquer soit par la peur de ces tyrans, soit par une estime imméritée envers eux. De tout temps, les mal affermis et les ignorants se sont soumis, et se soumettent encore de nos jours aux oppresseurs légalistes, arrogants et dominateurs, plutôt qu’aux bons conducteurs, doux et humbles.


                                    Paul au milieu de ses épreuves

                                                Remarques générales

            En dépit de leurs nombreux dons, en particulier celui du discernement (1 Cor. 12 : 10), les Corinthiens montraient une absence totale de clairvoyance. Paul va se mettre à leur niveau. Bien que ce soit pour lui une folie, il va se glorifier dans la chair (v. 18). Pour cela, il va déclarer d’abord ce qu’il est (v. 21-22), puis ce qu’il fait (v. 23-33). Mais, plutôt que de se vanter de ses succès, il va révéler ses souffrances et son opprobre.

                                                Paul, un vrai Israélite (v. 21-22)

            Que les Corinthiens comprennent bien que la faiblesse de l’apôtre n’est qu’apparente et n’est en fait que douceur selon Christ.
            L’attitude hautaine et osée des autres n’est que vaine imposture. S’il s’agit de bénévolat, Paul ne leur est en rien inférieur. S’il s’agit des titres de noblesse, il en est de même. Mais s’il s’agit des souffrances pour le nom de Christ, sa supériorité est incontestable.
            Bien que devant Dieu il n’y ait maintenant ni Grec ni Juif (Col. 3 : 11) et que ces questions de race ne soient plus pour lui un gain mais des ordures (Phil. 3 : 7-8), Paul, agissant en insensé, va faire état de ces différences humaines (v. 22). Un apôtre véritable ne pouvait être issu des nations. Or lui-même était un Juif orthodoxe, benjaminite. Il y avait à l’époque un flot constant d’émissaires juifs prenant le titre d’apôtre, qui allaient d’une église à l’autre avec un enseignement qui était un retour au légalisme. C’était une action délétère du diable, une ruse plus subtile que la persécution violente. Ses deux tactiques sont d’ailleurs signalées ici :
                  – la ruse (v. 3, 14-15, 20-21),
                  – la violence (v. 23-26).
            Ces mauvais ouvriers se disaient chrétiens tout en gardant leur orgueil national. Paul, quand il prêchait aux nations, ne tirait aucun avantage de ses origines : « Pour ceux qui étaient sans loi, comme si j’étais sans loi » (1 Cor. 9 : 21). Peut-être avait-on insinué un doute quant à la vraie nationalité de Paul. De descendance juive, il était aussi citoyen romain (Act. 16 : 37). Etait-il un vrai fils de Jacob ou simplement un prosélyte ? Eh bien, moi aussi, dit Paul, je suis fils d’Abraham, un maillon authentique de sa descendance.

                                                Souffrances pour le nom de Christ (v. 23-27)

            Mais, enchaîne-t-il, ce n’est pas cela qui démontre que je suis un vrai ministre de Christ. Je vais donner des preuves que les autres ne peuvent fournir. Ont-ils un passé tel que le mien à leur actif ?
            C’est l’occasion pour nous d’apprendre, sous la plume même de l’apôtre inspiré, quelque chose de ses travaux. Quelle longue liste ! Hostilité des humains, hostilité des circonstances géographiques, souffrances physiques, souffrances morales, en tous lieux. Et quand Paul écrivait ces lignes, il n’était pas encore au bout de ses peines.
            Quel dévouement, quel courage, quelle énergie, quel amour pouvons- nous admirer chez le grand apôtre ! Mais aussi quelle humilité ! Car il n’en tire aucune gloire. Nous n’entendons aucune plainte, aucun murmure, c’est l’entière acceptation. « Je lui montrerai tout ce qu’il doit souffrir pour mon nom », avait dit le Seigneur à son sujet (Act. 9 : 16).
            Nous comprenons bien qu’il ne s’agit pas ici des souffrances qui sont souvent notre part comme conséquences de nos infidélités et dont le but est de nous reprendre et nous ramener dans le bon chemin. Au contraire, pour Paul, elles sont la rançon de sa fidélité (voir 1 Pier. 4 : 13-14, 19). Et c’est dans ce sens qu’il pouvait dire qu’il accomplissait dans sa chair ce qui restait « encore à souffrir des afflictions du Christ pour son corps qui est l’assemblée » (Col. 1 : 24).
            Sans s’y attarder, il évoque ici ses souffrances infligées par les hommes, déjà mentionnées (6 : 5) : les coups, la prison, les bastonnades de la part des Juifs. Ceux-ci, cyniquement respectueux de la Loi, n’atteignaient pas les quarante coups permis (Deut. 25 : 3), se croyant ainsi autorisés à recommencer le supplice.
                    – Des Romains, il endura les flagellations, extrêmement douloureuses, traçant sur le dos ces « longs sillons » dont parle le psalmiste (Ps. 129 : 3). L’une de ces trois flagellations eut lieu à Philippes ; et là, le geôlier converti a ensuite lavé les plaies de Paul et de Silas (Act. 16 : 33).
                    – La lapidation, en Israël, était le châtiment suprême avant d’aboutir à la mort. Mais Dieu seul fait mourir et fait vivre (2 Rois 5 : 7). Sa volonté fut qu’Etienne en meure et que Paul survive (Act. 14 : 19).
                    – Nous apprenons aussi qu’il avait déjà connu trois naufrages. Celui rapporté à la fin du livre des Actes était encore à venir. Au cours de l’un d’eux, semble-t-il, il aurait passé vingt-quatre heures dans l’eau, accroché peut-être à un morceau d’épave ?
                    – Au temps de l’apôtre, tout voyage était dangereux, que ce soit sur mer, sur terre, ou pour traverser les fleuves à gué, au risque de crues soudaines. Etre attaqué sur des chemins déserts était chose courante.
            Il y avait péril de tous côtés : les brigands, les pièges, les Juifs, les gens des nations, les faux frères. Il n’était en sécurité nulle part, pas même en ville et surtout pas à Jérusalem.
            Voilà donc la vie de Paul, harassante au point qu’on a de la peine à se l’imaginer.

                                                Profondes sympathies (v. 28-29)

            Malgré tout cela, Paul gardait encore la force spirituelle pour une vigilante sollicitude à l’égard des assemblées, et il peut dire : toutes les assemblées, tous les jours, et même nuit et jour (Act. 20 : 31). Il était évangéliste, mais aussi pasteur. Il semait, plantait, mais ensuite il lui fallait préserver les jeunes pousses contre ceux qui auraient voulu déraciner ses plantations. Si un de ses frères était faible, il comprenait et partageait cette faiblesse. A un degré de plus, si l’un était scandalisé, c’est-à-dire au bord de la chute en présence d’un danger, c’était pour lui un motif de fervente intercession avec le feu de l’amour.

                                                Tout par grâce (v. 30-31)

            Après avoir fait de sa vie ce tableau pathétique, il ne veut pas être un objet d’admiration pour les Corinthiens. S’il a pu tout surmonter jusqu’à ce jour, il le doit uniquement à la grâce divine et en tout cas pas à sa force personnelle. Sa gloire est dans sa faiblesse (v. 30) et seulement dans ses faiblesses (12 : 5).
            Il tient à ce que les Corinthiens sachent que ce qu’il affirme là est l’expression fidèle de sa pensée. Pour cela il prend Dieu à témoin une fois encore (v. 11).

                                                Un fait peu glorieux (v. 32-33)

            Comme pour convaincre les Corinthiens et avant de leur faire part d’une extraordinaire révélation (12 : 2-4), l’apôtre va rappeler un fait peu glorieux du début de sa carrière. Il s’agit d’un épisode déjà signalé dans le livre des Actes (9 : 25). A Damas, l’ethnarque du roi Arétas IV (celui-ci, nabatéen, beau-père d’Hérode Antipas, régnait sur la région de Pétra, appelée l’Arabie pétrée, où Paul s’était retiré) avait accepté d’aider les Juifs à dresser leur guet-apens contre Paul. C’était pour l’apôtre une humiliation d’être dévalé dans une corbeille.
            Que faut-il penser de ce procédé ? Est-ce un manque de foi ? Non, quand Dieu offre un moyen matériel d’échapper à un danger, nous devons en faire usage. Ne confondons pas le courage de la foi avec la témérité. Evitons une bravade qui ne nous est pas demandée, mais ne refusons pas une issue venant du Seigneur.


D'après « Sondez les Ecritures » (vol. 6)


A suivre