Les conducteurs
Comment faut-il comprendre l’injonction du Seigneur au sujet des « conducteurs » (ou maîtres, guides) (Matt. 23 : 8, 10), tandis que dans Hébreux 13 : 7, 17, nous sommes exhortés à les reconnaître ?
Disons d’abord que les mots traduits par « conducteurs » dans les deux passages, ne sont pas identiques : didaskalos (Matt. 23), hegoumanos (Héb. 13).
En Matthieu la forme employée donne davantage l’idée d’une autorité imposée, et sous le système juif on le comprend facilement. L’emploi qu’en fait le Seigneur en Matthieu 23 concorde bien avec le mot « Rabbi », comme le verset 8 le démontre. Les Juifs étaient habitués à ce terme, et ceux qui se l’attribuaient, voulaient qu’on le leur donne. Mais pour le chrétien le seul guide ou conducteur, dans ce sens est Christ ; et tous les fidèles doivent y penser, non seulement pour eux-mêmes, mais dans tous leurs rapports avec leurs frères, afin qu’ils n’interviennent jamais entre le Seigneur et ceux qui lui appartiennent, mais que tout ministère ait pour but de rapprocher l’auditeur, non pas de celui qui parle, mais du Seigneur lui-même. Cela nous rappelle le passage de Jean 13 : 1-17, surtout le verset 13. La tendance du cœur naturel est toujours d’imiter ce qui produit un effet sur les sens, ou qui devient un objet d’admiration pour les hommes. Du temps du Seigneur, les chefs religieux de la nation qui auraient dû être les premiers à l’accueillir, parce qu’ils possédaient les Ecritures qui parlaient de lui, ont poussé le peuple à le rejeter et à le faire crucifier. On sait combien la même tendance s’est manifestée dans l’Eglise ; et ce qui a amené le jugement sur les Juifs, l’amènera aussi sur l’église professante. Nous devons nous rappeler que, si nous pouvons entrer spirituellement « dans le ciel » où Jésus est entré pour nous, notre place dans le monde est « hors du camp », c’est-à-dire sous l’opprobre qui a été la part du Christ ici-bas, et dont sa croix est l’expression (voir Gal. 6 : 14).
L’esprit de Dieu rappelle cela dans le chapitre 13 de l’épître aux Hébreux. En gardant cette place, nous éprouverons les soins du Seigneur, pour tout ce qui est nécessaire à notre progrès spirituel. Etant monté en haut, Christ a donné les « dons » divers dans ce but (Eph. 4 : 8-13). Par conséquent les croyants sont exhortés à l’obéissance envers ceux qui veillent sur les âmes et dont les fruits manifestent que leur service est réellement de Dieu. Par contre, ceux qui veulent dominer « sur des héritages » comme dit Pierre, retombent dans le système que le Seigneur a jugé au chapitre 23 de Matthieu.
Il ressort qu’en Matthieu il s’agit de « conducteurs » qui se mettaient à la place du Seigneur, tandis que dans l’épître aux Hébreux, il est question de ceux qui ont été envoyés par le Seigneur pour annoncer la Parole et donner la nourriture spirituelle au troupeau. La différence ressort dans ce que dit l’apôtre Paul dans ses adieux aux anciens de l’assemblée d’Ephèse (voir Act. 20 : 28-30 ; 1 Pier. 5 : 2-4).
Servir dans l’humilité, suivant la capacité fournie par le Seigneur est une chose, revendiquer le nom de « conducteur », afin de dominer sur le troupeau en est une autre.
W. J. Lowe – article paru dans un ancien périodique d'évangélisation : « le Salut de Dieu »