Le livre d’Esther - quelques-unes de ses leçons pour nous
Introduction
Le livre d’Esther se situe historiquement entre les chapitres 6 et 7 du livre d’Esdras, au moment où le temple s’achève, après le premier retour des Juifs à Jérusalem. L’action se déroule à Suse, durant le règne de Xerxès, connu comme le fils de Darius, le Perse.
On appelait ce roi Assuérus, de même qu’en Egypte tous les rois portaient le titre de Pharaon. Le livre de Daniel fait allusion à ce puissant monarque et à ses grandes richesses (11 : 2). Notons que dans celui d’Esther les dates abondent. Le récit se déroule entre la troisième et la douzième année du règne d’Assuérus (1 : 3 ; 3 : 7).
Le nom de l’Eternel ne se trouve pas dans le livre d’Esther, mais sa main agit constamment, de façon mystérieuse en faveur des siens (voir Dan. 4 : 35 ; Ps. 121 : 3-4). Aussi, en parcourant ce livre, nous parlerons librement de Lui, cherchant à mettre l’accent sur ses puissantes mais secrètes interventions.
Les Juifs étaient dispersés et répandus parmi les peuples, du fait de leur désobéissance. Ils avaient perdu toute position reconnue de Dieu, mais son amour et sa fidélité à leur égard restaient immuables (Est. 3 : 8 ; 2 Chr. 36 : 16). C’est un fait infiniment touchant.
Chapitre 1
Le premier chapitre décrit le faste dont ce roi aimait à s’entourer. L’orgueil d’Assuérus était à la mesure de son empire. Ne régnait-il pas sur 127 provinces, de l’Inde à l’Ethiopie? (Ps. 73 : 6-8). Sans atteindre un luxe d’une telle ampleur, il ne manque pas, à notre époque, de fêtes ou d’expositions grandioses, par lesquelles une nation ou une personne cherche à éblouir et à éclipser son entourage. C’est l’homme qui cherche toujours à s’exalter.
Mais une question sérieuse se pose, que personne ne peut éluder : « Quel profit y aura-t-il pour un homme s’il gagne le monde entier,mais qu’il fasse la perte de son âme ? » (Matt. 16 : 26).
Au festin qu’Assuérus offre à tous ses princes et à tous ses serviteurs pendant 180 jours (!), succède un autre festin de sept jours, offert à tout le peuple qui habitait à Suse (v. 5). Ce type de réjouissances est fréquent dans ce monde (Ex. 32 : 6). Comme Daniel (Dan. 1 : 8 ; 5 : 1-5), un enfant de Dieu fidèle ne s’associera pas à ces choses. « Il y avait du vin royal en abondance, selon la puissance du roi ». Il était servi dans des vases d’or. Les riches draperies, aux couleurs royales (voir 8: 15) et les lits d’or et d’argent sont aussi décrits en détail (v. 4-8).
« On buvait, selon l’édit : on ne forçait personne; car c’est ainsi que le roi avait ordonné à tous les grands de sa maison, de faire selon le gré de chacun » (v. 8 ; Jér. 18 : 12). L’homme naturel refuse toutes les contraintes ; le désir du cœur naturel est de faire seulement ce que bon lui semble (Os. 5 : 11).
La reine Vasthi, elle aussi, fit de son côté un festin à toutes les femmes de la maison royale. Mais l’ivresse engendre les excès (Prov. 20 : 1 ; 23 : 29-31). Le roi, dont « le cœur était gai par le vin », voulut que de grands dignitaires parmi ses eunuques amènent la reine Vasthi « pour montrer sa beauté aux peuples et aux princes » (v. 11). Or elle refusa absolument de les suivre, et d’être montrée publiquement comme un jouet dont le roi était particulièrement fier.
Devant cette résistance inattendue, Assuérus se mit fort en colère (verset 12). Ce n’était pas chez lui un signe d’autorité, mais plutôt de faiblesse (Prov. 4 : 17 ; 16 : 32). D’ailleurs la désobéissance ouverte de Vasthi mettait en évidence les limites de son despotisme.
Le chrétien sait par expérience combien il est difficile de contrôler ses réactions quand les sujets de contrariété s’accumulent. Seul le Seigneur peut et veut aider les siens à ne pas céder à la colère, ce fruit si évident de la chair toujours prête à se manifester (Gal. 5 : 20).
Ainsi humilié, Xerxès se tourne vers « ses sages qui connaissaient les temps ». Ils affirment que l’attitude de Vasthi ne manquera pas d’être connue dans toutes les provinces et que tous les maris seront rendus méprisables aux yeux de leurs femmes. Il faut donc que le roi maintienne fermement son autorité (v. 16-17). Sur leur conseil, Assuérus décide alors d’ôter la dignité royale à Vasthi et de la donner à une autre qui sera meilleure qu’elle (v. 19).
Il y a ici, sous une forme cachée, une allusion prophétique. Le « temps des nations » doit prendre fin avec l’enlèvement de l’Eglise. Le peuple Juif sera appelé à occuper à nouveau la première place, comme ici cette jeune Juive de la tribu de Benjamin, dont nous allons parler.
Dieu est derrière la scène, accomplissant ses desseins. Il se sert ici de ce monarque païen, faible et vaniteux (Prov. 21 : 1).
Chapitre 2
Esther est donc parmi les jeunes filles choisies pour que l’une d’entre elles devienne la reine. Elle était belle de taille et belle de figure et « trouvait faveur aux yeux de tous ceux qui la voyaient » (v. 15). Elle est conduite à son tour auprès d’Assuérus et aussitôt « le roi aima Esther (c’est la seule mention de l’amour dans ce livre)… et elle trouva grâce et faveur devant lui » (v. 17). Il met sur sa tête la couronne du royaume. Cette jeune fille réservée, modeste et respectueuse de l’autorité, devient donc la reine. Désormais, elle se trouve à la place nécessaire pour jouer le rôle extraordinaire auquel Dieu va l’appeler.
Ne pensez pas, jeunes filles de famille chrétienne, qu’imiter les manières de faire des jeunes filles de ce monde, porter leurs vêtements et adopter leurs attitudes trop libres (Es. 3 : 16-24) puissent assurer votre bonheur. Bien au contraire ! A qui désirez-vous plaire avant tout ? Au Seigneur ? Toute la question est là !
Des dangers plus grands guettent ceux ou celles dont l’aspect physique est particulièrement attrayant. Ainsi Joseph, « beau de taille et beau de visage » attire rapidement l’attention d’une femme à la conduite immorale. Mais, en s’appuyant sur l’Eternel, il sera rendu capable de lui résister (Gen. 39 : 6-7).
Sara, Rebecca, Bath-Shéba et Tamar (fille de David) étaient chacune d’une grande beauté. Elles se sont trouvées dans des situations dangereuses.
Que ceux donc qui pensent avoir du charme ou une belle apparence soient plus particulièrement sur leurs gardes ! Ce que chacun doit désirer, c’est de posséder cette beauté spirituelle qui est « d’un grand prix devant Dieu » (1 Pier. 3 : 3-4 ; Prov. 31 : 30).
La beauté d’Esther et surtout sa modestie étaient réelles. Elle ne cherchait pas à se parer de ces atours que d’autres candidates réclamaient avant d’être présentées au roi. Et pourtant elle conquit immédiatement les affections d’Assuérus.
Dans ce même chapitre il est question à plusieurs reprises, de Mardochée. La généalogie de cet homme est soigneusement établie. Il est fils de Jaïr, fils de Shimhi, fils de Kis, Benjaminite. Il avait été transporté de Jérusalem avec les captifs et faisait partie à Suse de ce peuple abaissé et humilié dont la misère contrastait si fort avec les fastes de la cour impériale.
Ces captifs n’avaient pas su saisir l’occasion de remonter au pays de leurs pères. Dieu leur avait pourtant ouvert le chemin en réveillant l’esprit de Cyrus, roi de Perse (Esd. 1 : 3). Peut-être avaient-ils appréhendé les dangers de ce long voyage et les destructions massives dont la ville de Jérusalem avait été l’objet. La foi, l’énergie et l’affection pour la maison de Dieu avaient sans doute manqué.
Dans cette condition misérable, Dieu va-t-il les délaisser ? Non, fidèle à ses promesses, il continue à veiller sur eux, mais de façon cachée (Ps. 13 : 1-2 ; Es. 49 : 16).
On voit la place que ce peuple occupe toujours dans ses pensées.
Mardochée avait adopté et élevé avec dévouement Esther, une jeune parente qui était orpheline. Son nom hébreu Hadassa, signifiait : myrte, mais on l’appelait Esther, c'est-à-dire : étoile (v. 7). Mardochée lui avait sagement commandé de ne pas faire connaître son peuple et sa naissance (v. 10, 20). Or Esther se montrait toujours obéissante et faisait tout ce qu’il lui disait (v. 20).
Chacun pouvait voir Mardochée se promener chaque jour devant la cour de la maison des femmes. Il était soucieux du bien-être d’Esther et désirait savoir ce que l’on faisait à son égard (v. 10-11). Le comportement de Mardochée, tel que nous le présente ce livre, est toujours spirituel. La manière dont il prend soin d’Esther et la dirige est remarquable.
Quand les jeunes filles sont rassemblées pour la seconde fois, Mardochée s’assied à la porte du roi (v. 19). C’est là qu’il apprend que deux eunuques parmi les gardiens du seuil, Bigthan et Théresh, conspirent contre le roi et cherchent à le tuer.
Esther en parle à Assuérus au nom de Mardochée. Celui-ci cherche la paix de la ville où il a été transporté (Jér. 29 : 7). Le roi fait une enquête et la chose se révèle exacte. Les deux eunuques sont pendus et tout est écrit dans le livre des chroniques du royaume, en présence d’Assuérus (v. 21-23).
Le couronnement d’Esther est un événement public, l’occasion d’ailleurs d’un de ces grands festins, si fréquents dans ce royaume ! Le service rendu par Mardochée au roi est, au contraire, d’ordre plutôt privé. Mais l’Eternel se servira bientôt de l’un et de l’autre de ces faits pour accomplir ses desseins et sauver son peuple de la destruction. Dieu n’intervient pas seulement dans ce que nous estimons être des événements importants de la vie. « Toutes choses le servent » (Ps. 119 : 91), si petites qu’elles soient à notre faible appréciation.
Mardochée n’a pas reçu immédiatement une récompense pour avoir sauvé la vie du roi. Mais Dieu permettra que le roi s’en souvienne en temps voulu (6 : 3). Faisons simplement de cœur les bonnes œuvres qu’Il place aujourd’hui devant nous et laissons-Lui les conséquences.
Chapitre 3
« Après ces choses, le roi Assuérus agrandit Haman, fils d’Hammedatha, l’Agaguite ». C’était un membre de la famille royale d’Amalek. Assuérus élève cet homme vaniteux, « et place son siège (ou son trône) au-dessus de tous les princes qui étaient avec lui ». « Tous les serviteurs du roi qui étaient à la porte du roi se courbaient et se prosternaient devant Haman : car le roi l’avait ainsi commandé à son égard » (v. 1-2). Le but poursuivi par Satan, « cet astre brillant, fils de l’aurore », était d’être « semblable au Très-Haut » (Es. 14 : 12-14). Il n’y a rien d’étrange à ce que ses esclaves, dont Haman fait partie, soient gouvernés par le même orgueil.
Mais devant Haman, « Mardochée ne se courbait pas et ne se prosternait pas » (v. 2 ; voir Dan. 3 : 12 ; 6 : 13). Tous s’étonnaient de cette attitude, insensée à leur avis. Ils parlaient à Mardochée jour après jour, mais il ne les écoutait pas. Finalement, ils en informent Haman, « pour voir si les affaires de Mardochée se maintiendraient, car il leur avait déclaré qu’il était Juif » (v. 4).
La délation est fréquente dans ce monde. Et à cause de cela, la crainte peut retenir les enfants de Dieu de confesser ouvertement Christ, que ce soit à l’école, dans leur travail, ou auprès de leurs voisins. Notre conduite devrait montrer à notre entourage que nous sommes des chrétiens (Act. 11 : 26). Mais sommes-nous disposés à souffrir comme tels ? (1 Pier. 4 : 16).
Pour comprendre les motifs de l’attitude de Mardochée, il faut se rappeler que Dieu avait déclaré au début de la marche d’Israël au désert : « L’Eternel aura la guerre contre Amalek de génération en génération » (Ex. 17 : 16). Plus tard, Il avait dit à son peuple : « Souviens- toi de ce que t’a fait Amalek, en chemin, quand vous sortiez d’Egypte : comment il te rencontra dans le chemin, et tomba en queue sur toi, sur tous les faibles qui se traînaient après toi, lorsque tu étais las et harassé, et ne craignit pas Dieu ». Israël devait effacer la mémoire d’Amalek de dessous les cieux - « Tu ne l’oublieras pas » (Deut. 25 : 17-19 ; 1 Sam. 15 : 3). Ces commandements divins empêchaient un Israélite fidèle de montrer le moindre signe de déférence à un ennemi de l’Eternel et de son peuple. Comme Daniel (Dan. 6 : 10), Mardochée désire obéir à la parole de Dieu, sans se préoccuper des conséquences. Ce devrait être notre attitude, dictée par nos affections pour Christ (Act. 5 : 29).
Durant la période actuelle, le Seigneur avertit aussi les siens : « Si le monde vous hait, sachez qu’il m’a haï avant vous » (Jean 15 : 18).
Mais le monde a-t-il vraiment des motifs pour nous haïr ? Nous semblons souvent avoir oublié que nous ne sommes pas du monde, ce système organisé sans Dieu, dont Satan est le chef. Et le monde nous attire plutôt par ses principes et sa manière de vivre, séduisants pour la chair (Jean 16 : 11).
Haman est blessé dans son orgueil. Il est rempli de fureur, mais il lui paraît méprisable de mettre la main seulement sur Mardochée. Il va donc chercher à détruire tous les Juifs qui vivent dans le royaume, « le peuple de Mardochée » (v. 5-6). Il flatte habilement Assuérus : « Si le roi le trouve bon… » (v. 9). Dans ses propos, il rend involontairement un bon témoignage au sujet de ce peuple dispersé dans toutes les provinces de l’empire. Il expose en effet au roi que « leurs lois sont différentes de celles de tous les peuples ; ils ne pratiquent pas les lois du roi » (v. 8 ; Act. 16 : 20-21). Haman sait qu’aucun souverain ne désire avoir dans son royaume des personnes susceptibles de troubler l’ordre public.
Quelle est la conclusion d’Haman ? Il ne convient pas au roi de les laisser faire : il faut les détruire ! Généreux quand il s’agit d’aider au mal, il se déclare prêt à donner dans ce but dix mille talents d’argent, une somme énorme. Il propose de les faire porter dans le trésor du roi (v. 9). Sans offrir de résistance, ni même chercher à s’enquérir, le roi donne son anneau à Haman, l’Agaguite, l’adversaire des Juifs. Celui-ci a maintenant « les pleins pouvoirs » (voir Gen. 1 : 42). Le roi ajoute même : « L’argent t’est donné, et le peuple, pour en faire ce qui sera bon à tes yeux » (v. 11). On voit quelle est l’influence malfaisante de cet agent de Satan sur le roi ! Il croit triompher, mais il vient de signer son arrêt de mort ! (Ps. 10 : 2).
Superstitieux comme le sont beaucoup d’incrédules (Ezéch. 21 : 26), et même, hélas ! aussi certains croyants, Haman veut choisir un jour favorable pour exécuter son cruel dessein. Il s’en remet donc au sort pour décider de la date du massacre : ce sera le treizième jour du douzième mois, au mois d’Adar. Mais il ignore que si « l’on jette le sort dans le giron… toute décision est de par l’Eternel » (Prov. 16 : 33). Ce long délai (onze mois) va permettre l’accomplissement des desseins de Dieu en grâce vis-à-vis des siens, même s’ils sont présentement « Lo-Ammi », c’est-à-dire « pas mon peuple » (Os. 1 : 9).
Pour satisfaire la folie meurtrière d’Haman, l’édit est rapidement préparé et signé au nom d’Assuérus. D’après la loi des Mèdes et des Perses, comme le rappellent aussi les ennemis de Daniel, il ne peut plus être abrogé (8 : 8 ; Dan. 6 : 8, 12).
Puis des courriers royaux, « pressés par la parole du roi », le portent jusque dans les provinces les plus lointaines de l’empire. Le décret précise que tous les Juifs doivent périr, être détruits, tués, du jeune garçon au vieillard, sans épargner ni femmes ni enfants. De plus, tous leurs biens seront livrés au pillage ! (v. 13-14).
On sait quelle a été la haine perpétuelle de Satan, ses efforts inouïs en se servant d’instruments divers, pour détruire entièrement - si la chose était possible - les Juifs, le peuple du Messie. L’Ennemi redoute, à juste titre, l’avènement de Christ, qui scellera définitivement sa perte.
Tandis qu’une fois encore le roi et Haman sont assis à boire, la ville de Suse, où se trouve de nombreux Juifs, est dans la consternation (v. 15). Mais de telles périodes d’épreuve ne sont-elles pas permises pour amener chacun à s’examiner et à porter une appréciation plus juste sur sa conduite passée ? « A celui qui règle sa voie je ferai voir le salut de Dieu » (Ps. 50 : 23).
Chapitre 4
Mardochée apprend tout ce qui s’est fait. Il déchire ses vêtements et se couvre d’un sac et de cendres. Puis il sort au milieu de la ville et pousse un cri grand et amer. Comment cacher sa douleur devant ce plan diabolique ? Ce grand deuil est partagé par tous les Juifs. Ils sont dispersés mais, objets de soins providentiels de Dieu, ils ne se sont pas mêlés aux peuples au milieu desquels ils se trouvent ; ils ont conservé leur identité (v. 1-5).
Il semble évident ici, comme au temps de la grande tribulation qui suivra l’enlèvement de l’Eglise, qu’il n’y a plus aucune lueur d’espérance. Mais Dieu s’est réservé le domaine de l’impossible.
Esther, reine déjà depuis quatre ans environ, ne pourrait-elle pas intercéder auprès de son époux ? Cette circonstance dramatique va être l’occasion de montrer la hardiesse de sa foi.
Il faudra plus tard la crucifixion, pour que Joseph d’Arimathée ose se faire connaître comme un disciple, en demandant à Ponce Pilate le corps de Jésus (Jean 19 : 38). N’oublions pas les paroles du Seigneur : « Celui qui aura honte de moi et de mes paroles… le fils de l’homme aura aussi honte de lui » (Marc 8 : 38).
Esther va accepter de jouer le rôle important dans le plan de Dieu en faveur des siens. Son exemple doit nous encourager à le servir quoi qu’il en coûte. Ne nous laissons pas surmonter par ce qui paraît un lourd handicap ou un trop grand sacrifice : obéissons au Seigneur. Sa puissance s’accomplira dans notre infirmité. Dieu peut faire tourner en bien ce qui, au départ, paraissait être une tragédie (voir Gen. 50 : 20).
Cloîtrée dans le palais, coupée du monde extérieur, Esther ignore le génocide qui se prépare. Mais ses jeunes filles l’avertissent et « la reine… fut dans une grande angoisse » (v. 4). Elle cherche à faire accepter des vêtements à Mardochée, mais il les refuse. Alors elle envoie vers lui un eunuque, Hathac, et apprend de façon plus précise ce qui est arrivé. Elle reçoit même de la part de Mardochée une copie de l’édit rendu en vue de détruire les Juifs.
Son père adoptif lui commande « d’entrer vers le roi, de le supplier et de faire requête devant lui en faveur de son peuple » (v. 4-8). La première réaction d’Esther est plutôt négative. Elle fait dire à Mardochée que personne ne peut entrer auprès du roi « sans avoir été appelé ». Sinon la loi prescrit de le mettre à mort, à moins que le roi ne lui tende le sceptre d’or pour qu’il vive. Pour motiver ses réticences, et faire ressortir tout ce que cette démarche a de risqué, Esther ajoute : « et moi, je n’ai pas été appelée à entrer vers le roi ces trente jours » (v. 11).
Telles sont les raisons qu’elle met en avant. La « bien-aimée » aussi avait des raisons pour ne pas ouvrir à son Bien-aimé : « Je me suis dépouillée de ma tunique, comment la revêtirais-je ? J’ai lavé mes pieds, comment les salirais-je ? » (Cant. 5 : 3).
Le sacrificateur et le lévite également avaient des raisons pour passer outre de l’autre côté du chemin, au lieu de s’approcher et de prendre soin d’un homme à demi-mort, couvert de blessures, dépouillé par des brigands (Luc 10 : 31-32). C’étaient même des raisons d’ordre religieux. Ils devaient veiller à ne pas se souiller. Ainsi chacun est capable, hélas! de trouver des raisons pertinentes pour se dérober devant les bonnes œuvres que Dieu prépare à l’avance pour que nous marchions en elles (Eph. 2 : 10).
Toutefois un certain nombre d’éléments vont encourager la reine à faire ce pas décisif. Mardochée fait répondre à Esther : « Ne pense pas en ton âme d’échapper, dans la maison du roi, plutôt que tous les Juifs ; car, si tu gardes le silence en ce temps- ci, le soulagement et la délivrance surgiront pour les Juifs d’autre part, mais toi et la maison de ton père vous périrez ».
Mardochée ne manque ni de foi, ni de discernement, ni de fermeté. Il rappelle à sa protégée que ses hésitations et ses craintes n’empêcheront pas la Providence d’agir. Esther doit réaliser combien sa position de reine augmente sa responsabilité : « Qui sait si ce n’est pas pour un temps comme celui-ci que tu es parvenue à la royauté » (v. 13-14) ? Ces avertissements nous concernent aussi : Chacun doit réaliser que c’est dans un but précis que Dieu l’a placé là où il est. Comme David, il est appelé à servir au propos divin dans sa propre génération (Act. 13 : 36 ; Eph. 2 : 10). Si l’on est tenté de rester passif, il faut se souvenir d’Esther. Retenons cette exhortation solennelle : « Délivre ceux qui sont menés à la mort, et ne te retire pas de ceux qui chancellent vers une mort violente. Si tu dis : Voici, nous n’en savions rien ; celui qui pèse les cœurs, lui ne le considérera-t-il pas ? et celui qui garde ton âme, lui le sait ; et il rend à l’homme selon son œuvre » (Prov. 24 : 11-12). Avec Esther, soyons conscients que si l’on refuse d’assumer ses responsabilités, un autre sera appelé à prendre notre place dans le service, mais nous en éprouverons une perte. Quoiqu’il en soit, le propos de Dieu s’accomplira toujours.
Un autre point a certainement eu une influence capitale sur Esther. Mardochée lui a rappelé que les Juifs étaient son peuple ; c’était en leur faveur qu’elle devait intercéder auprès du roi (v. 8). Alors, elle devient hardie, car elle réalise ses liens avec ce peuple sur lequel pèse cette terrible menace.
En empruntant des expressions du Nouveau Testament, on peut dire qu’Esther est désormais prête « à laisser sa vie pour les frères » (1 Jean 3 : 16). Aquilas et Priscilla, Epaphrodite aussi, en leur temps, « ont risqué leur propre tête » (Rom. 16 : 3-4 ; Phil. 2 : 30) pour la vie de l’apôtre Paul. Frères et sœurs en Christ, pourrions-nous dire en vérité, avec Paul : « Moi, très volontiers je dépenserai et je me dépenserai moi-même entièrement pour vos âmes » (2 Cor. 12 : 15) ?
Fermement décidée, Esther a besoin d’une préparation particulière avant de s’approcher du roi. Et il ne s’agit plus ici de parfums, comme au commencement ! (2 : 9). Elle demande à Mardochée que tous les Juifs de Suse jeûnent pour elle, pendant trois jours et trois nuits. De son côté, elle fera de même, avec ses jeunes filles (v. 15-16). Jeûner est, doit être, le signe d’une grande humiliation devant Dieu (Es. 58 : 3, 5-6). Il faut apprendre à agir sans précipitation. Daniel est un bel exemple à cet égard (Dan. 2 : 12, 17-19, 23, 27-29). Aujourd’hui, quand les circonstances sont pressantes, « l’assemblée tout entière » (1 Cor. 14 : 23) peut se réunir pour prier.
Mais quel contraste entre cet Assuérus inabordable et Celui qui est toujours disposé à sympathiser à nos infirmités ! « Approchons-nous donc avec confiance du trône de la grâce, afin de recevoir miséricorde et trouver grâce pour avoir du secours au moment opportun » (Héb. 4 : 15-16). Esther envisage très courageusement les conséquences possibles de sa démarche : « Si je péris, je périrai » (v. 16; voir Act. 20 : 24).
Chapitre 5
Le troisième jour, revêtue de son vêtement royal, elle se présente dans la cour intérieure de la maison du roi. Et aussitôt qu’Assuérus la voit elle trouve faveur à ses yeux (v. 2). Il lui tend le sceptre d’or, elle le touche. Alors il lui dit : « Que veux-tu, reine Esther, et quelle est ta requête ? Quand ce serait jusqu’à la moitié du royaume, elle te sera donnée » (v. 3).
La réponse d’Esther surprend : « Si le roi le trouve bon, que le roi, et Haman avec lui, vienne aujourd’hui au festin que je lui ai préparé » (v. 4). Assuérus accepte et envoie en hâte chercher Haman.
Pendant qu’on boit le vin, le roi interroge à nouveau Esther : Quelle est ta demande ? Mais au lieu de répondre aussitôt, elle se contente de les inviter à nouveau et promet « demain je ferai selon la parole du roi » (v. 6-8). Ce jour-là, Haman sort, joyeux et le cœur gai. Il peut être saisi de vertige dans son esprit quand il réalise combien son ascension est rapide et répond à ses désirs les plus fous. Mais quand il passe, ce misérable Mardochée, assis à la porte du roi, ne se lève pas et ne bouge pas (v. 9). C’est vraiment intolérable ! Et voici Haman à nouveau rempli de fureur contre Mardochée.
Il se contient et rentre à la maison. Là, il énumère avec complaisance à ses amis et à sa femme, le nombre de ses fils, l’importance de ses richesses et tous les honneurs dont il est l’objet (Prov. 18 : 12). Et il raconte comment la reine Esther l’a même convié lui seul au festin qu’elle a offert au roi. D’ailleurs, il est encore le seul invité pour un nouveau festin, demain ! (v. 9-12).
Mais il est incapable de cacher la haine qui remplit son cœur à l’égard de Mardochée, et il affirme : « Tout cela ne me sert de rien, aussi longtemps que je vois Mardochée, le Juif, assis à la porte du roi » (v. 13; voir 1 Rois 21 : 4-7). Dans sa bouche, cette épithète « le Juif » était méprisante. Elle prendra plus loin dans ce livre un caractère tout différent, triomphal (8 : 7 ; 9 : 29, 31).
Au faîte des honneurs dans ce monde, cet homme est constamment rongé intérieurement par la haine. Quel tableau saisissant des profondeurs insoupçonnées du méchant cœur de l’homme naturel (Jér. 17 : 9-10). Qu’à cela ne tienne ! Sa femme et son entourage l’encouragent à préparer un bois haut de 50 coudées (près de 23 mètres) et d’y pendre Mardochée. Son supplice aura ainsi un caractère plus humiliant et se verra de loin !
Ceci rappelle la croix de notre Seigneur Jésus Christ, dressée par les hommes dans ce lieu appelé Crâne, devant laquelle toutes les foules se sont assemblées, attirées par ce spectacle (Luc 23 : 48).
C’est entendu ; Haman ira en parler au roi dès le lendemain matin. Assurément, après lui avoir donné si aisément l’autorisation de massacrer le peuple juif tout entier, Assuérus ne fera aucune difficulté pour accepter le supplice immédiat de ce Juif insolent et méprisable ! Sa femme, jouant auprès de lui le même rôle que Jésabel auprès d’Achab, ajoute : Va-t’en joyeux au festin avec le roi. La proposition plaît à Haman et il fait préparer le bois… mais il ne sera pas pour le Juif (v. 14 ; 7: 10).
Esther a été dirigée par la « sagesse d’en haut » (Jac. 3 : 17) en commençant par inviter le roi à ces deux festins consécutifs. Notre comportement est souvent bien différent. Nous cherchons à être délivrés le plus rapidement possible de ce qui nous oppresse. Il y a un contraste évident entre l’attitude calme et déterminée d’Esther et tout ce qui, dans ce livre, se fait à la hâte.
Chapitre 6
Tout a été dirigé selon un enchaînement admirable. Dieu ne se montre pas, mais il agit constamment en faveur de son peuple, qu’il veut sauver de la destruction.
D’abord, entre les deux festins, il y aura cette insomnie du roi. C’est un incident futile en apparence, mais Dieu, tout en restant invisible, dirige les pensées d’Assuérus. Il l’incite à ordonner à ses serviteurs de lui lire les annales du royaume (v. 1). Il conduit ceux-ci à y lire justement ce qui concerne Mardochée, ce qu’il a fait dans le passé en faveur du roi (v. 2 ; 2 : 23).
Alors Assuérus pose la question : « Quel honneur et quelle distinction a-t-on conférés à Mardochée » ? Les serviteurs doivent répondre : « On n’a rien fait pour lui » (voir Ecc. 9 : 15). Puis le roi s’enquiert : « Qui est dans la cour » ? Or à ce moment précis, Haman entre dans cette cour. Tout est dirigé, réglé minutieusement par une main souveraine (v. 2-4).
Les incrédules jugeront invraisemblable un tel concours de circonstances, mais nous n’en sommes nullement étonnés. Nous connaissons bien, pour en avoir fait l’expérience, l’intervention toute puissante qui fait travailler toutes choses ensemble pour le bien de ceux qui aiment Dieu (Rom. 8 : 28).
Haman haïssait tellement « le Juif » qu’il s’est levé de bonne heure « pour dire au roi de faire pendre Mardochée au bois qu’il avait dressé pour lui » (v. 4). Le roi dit : « Qu’il entre ! » et pose la question à Haman : « Que faut-il faire à l’homme que le roi se plaît à honorer ? » Aveuglé par son orgueil insensé, Haman est immédiatement convaincu que c’est à lui que le roi pense. Il propose toute une série de distinctions honorifiques, dont une seule eût marqué la vie d’un homme (v. 6-9).
Alors « le roi dit à Haman : Hâte- toi, prends le vêtement et le cheval, comme tu l’as dit, et fais ainsi à Mardochée, le Juif, qui est assis à la porte du roi. N’omets rien de tout ce que tu as dit » (v. 10 ; voir 1 Sam. 2 : 7-8). Quel effondrement pour ce méchant ! (voir Ps. 73 : 18). C’est de la main de cet ennemi, horrifié mais obligé d’obéir, que Mardochée, le Juif, reçoit ces honneurs royaux. Puis il revient modestement à sa place habituelle, à la porte du roi (v. 10-12). Comme Daniel (Dan. 5 : 17), il ne se laisse pas éblouir par les vains honneurs du monde.
Ici encore, Mardochée rappelle un plus grand que lui. Le Seigneur répond à Satan, qui s’engage à lui donner « tous les royaumes du monde et leur gloire » si seulement il se prosterne devant lui : « Va-t’en, Satan » (Matt. 4 : 8-10).
En voyant ainsi Mardochée traverser Suse, son pire ennemi étant obligé de tenir la bride de son cheval, on pense à quelqu’un de beaucoup plus grand que lui. Le Seigneur a été méprisé et rejeté, mais il sortira en triomphe (Apoc. 19 : 11-13). Tout genou devra se ployer devant lui, des êtres célestes, et terrestres, et infernaux, et toute langue devra confesser que Jésus Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père (Phil. 2 : 10-11).
D’autres personnes déjà dans l’Ecriture avaient été des ombres de la gloire à venir du Roi des rois. Ainsi Joseph, monté dans un char du Pharaon, tandis que devant lui on criait : « Qu’on s’agenouille ! » (Gen. 41 : 43) ou encore Salomon, monté sur la mule de David, au moment où il a reçu l’onction royale (1 Rois 1 : 33).
Haman doit exécuter point par point cette tâche si humiliante pour lui. Pourtant ce n’était que le prélude de sa ruine complète. Ensuite il retourne en hâte à sa maison, triste et la tête couverte (Es. 21 : 4). Est-il rempli d’un sentiment de honte ou a-t-il simplement le désir de ne pas être reconnu ? Il raconte à sa femme et à tous ses amis ce qui vient d’arriver. Son épouse Zéresh qui, hier encore, l’excitait à la vengeance, va elle-même sonner à ses oreilles le glas de sa grandeur (Prov. 16 : 18). Elle pressent qu’on ne peut pas résister à cette race des Juifs et conclut : « Tu tomberas certainement devant lui » (v. 13 ; voir Prov. 28 : 18). Elle ne reverra son mari qu’au moment de sa pendaison (7 : 9).
Selon les conseils divins, Israël sera bientôt à la tête et les nations à la queue (Deut. 28 : 10-13). S’il n’en est pas ainsi aujourd’hui, c’est la conséquence de leur désobéissance (Deut. 28 : 15-44). Pour Haman, le dénouement est maintenant tout proche (v. 13). « Encore un peu de temps, et le méchant ne sera plus » (Ps. 37 : 10).
Le verset suivant (v. 14) fait d’ailleurs ressortir combien le rythme de l’action s’accélère : « Comme ils parlaient encore avec lui, les eunuques du roi s’approchèrent et se hâtèrent de conduire Haman au festin qu’Esther avait préparé ». Il n’y a plus d’échappatoire possible (Prov. 7 : 23 ; Deut. 32 : 35-36).
Chapitre 7
Pendant ce festin, alors qu’une fois encore on buvait le vin, le roi pose à nouveau la question : « Quelle est ta demande, reine Esther ? » Et cette fois, sans se départir de son humilité, la reine va droit au fait : Elle demande au roi lui accorder sa vie et celle de son peuple. Elle s’identifie nettement, comme Moïse (Héb. 11 : 25), avec son peuple méprisé. Elle ajoute, reprenant les termes de l’édit : « Nous sommes vendus, moi et mon peuple, pour être détruits et tués, et pour périr ». Elle affirme qu’elle aurait gardé le silence, s’ils avaient été seulement vendus pour être serviteurs et servantes, « bien que l’ennemi ne pût compenser le dommage fait au roi » (v. 4).
Jusqu’ici elle s’est gardée de révéler l’identité de cet ennemi. Elle a su attendre la question du roi. A celui qui en fait la demande, Dieu donne la sagesse nécessaire, en paroles et en actes, au moment opportun (Jac. 1 : 5). Assuérus s’interroge : se peut-il que quelqu’un cherche à toucher à celle qu’il aime et à son peuple ? Il demande : « Qui est-il, et où est-il, celui que son cœur a rempli de la pensée de faire ainsi ? » La reine le désigne en quelque sorte du doigt : « L’adversaire et l’ennemi, c’est ce méchant Haman» (v. 6). Trois noms que la parole de Dieu donne au diable lui-même.
Haman est terrifié devant le roi et la reine. Tout s’effondre pour lui en un instant (Ps. 73 : 17-19). Il voit que son malheur est décidé de la part du roi. Aussi, tandis qu’Assuérus, bouillant de colère, est sorti dans le jardin attenant (voir Prov. 16 : 14), Haman tente un dernier effort et fait requête pour sa vie auprès de la reine. Dans son désespoir, il tombe sur le divan sur lequel se trouve Esther.
Le roi revient, et donne volontairement à ce spectacle insolite la pire signification possible. Il ordonne que l’on couvre la face de Haman, signe qu’il est condamné. Un eunuque, Harbona, intervient pour signaler qu’il y a justement un « bois » dressé dans la maison d’Haman, celui qui était préparé pour Mardochée (Ps. 7 : 14-15). « Qu’on l’y pende ! » réplique le roi, et sa colère s’apaise seulement quand Haman est pendu (v. 7-10).
Mardochée avait refusé de se courber devant Haman. Christ a été le seul homme à ne pas se courber devant Satan. On se souvient de ses paroles lors de la tentation au désert : « Tu rendras hommage au Seigneur ton Dieu, et tu le serviras lui seul » (Matt. 4 : 9-10). Rien ne pouvait faire fléchir l’Homme parfait. L’Ennemi a redoublé d’efforts contre lui (Jér. 11 : 19). Il a dressé les hommes contre lui, les a poussés à le crucifier, comme Haman a préparé un gibet pour Mardochée.
Or c’est précisément cette croix, où Satan pensait triompher et en finir avec Christ, qui a consacré sa défaite définitive (Col. 2 : 15 ; Héb. 2 : 14).
Chapitre 8
Dieu est intervenu, le cours des évènements est changé. Esther reçoit en partage tous les biens d’Haman, l’oppresseur des Juifs. Avec l’assentiment du roi, elle établit Mardochée le Juif - c’est maintenant un titre de gloire - intendant sur toute la maison d’Haman (v. 1-2). Le temps où Mardochée se tenait humblement à la porte du roi appartient au passé. Il entre devant le roi, car Esther a fait connaître à Assuérus quelles sont leurs relations de famille.
« Le roi ôte son anneau qu’il avait retiré à Haman, et le donne à Mardochée » (v. 2). Mais qu’en sera-t-il de ce peuple d’Israël, toujours voué à la mort ? Le roi, lié par son propre sceau, ne peut pas annuler le funeste décret. Alors Esther pleure devant lui et le supplie : « Comment pourrai-je voir le malheur qui atteindra mon peuple ? » (v. 6).
Là encore Dieu va incliner le cœur d’Assuérus. « Vous donc, écrivez au nom du roi », dit-il (v. 8). Il laisse à Esther et à Mardochée le soin de dénouer le complot d’Haman, d’annuler indirectement la portée du décret. Les scribes sont appelés, et cette fois ils vont écrire avant tout aux Juifs des 127 provinces des lettres scellées du sceau du roi. Un peu plus de deux mois se sont déjà écoulés depuis le précédent décret.
Le nouvel édit est aussi rendu à Suse, la capitale. Il y a un parallélisme rigoureux entre cette partie du récit et celui qu’on trouve au chapitre 3, versets 12-15. Visiblement, le narrateur veut montrer jusque dans les détails à quel point la situation est complètement renversée. A l’heure d’Haman succède celle de Mardochée.
Quelle joie pour les enfants de Dieu de savoir qu’il en sera bientôt ainsi pour Christ, notre Seigneur, sur cette terre! Il faut qu’il règne, là où il a été le méprisé de l’homme et celui que la nation abhorre, jusqu’à ce qu’il ait mis tous ses ennemis sous ses pieds (1 Cor. 15 : 25 ; Es. 49 : 7).
Les lettres, portées par des coursiers rapides, accordent aux Juifs de se mettre en défense pour leur vie et de faire périr toute force du peuple ou de la province qui les opprimerait, le treizième jour du douzième mois, qui est le mois d’Adar (v. 11-12).
Chrétiens, nous avons aussi reçu les moyens de combattre efficacement nos ennemis (Eph. 6 : 12). Usons de tous les moyens que Dieu met à notre disposition. En particulier de sa Parole, l’épée de l’Esprit, et de la prière.
Ajoutons qu’aujourd’hui encore chaque enfant de Dieu est un envoyé, hâté et pressé par la parole du roi (v. 14). Il est responsable de répandre la bonne nouvelle du salut jusqu’aux bouts de la terre (Matt. 28 : 19).
Ainsi ceux qui étaient, du fait de leurs péchés, sous la juste condamnation de Dieu, peuvent désormais échapper à la mort éternelle, en se mettant à l’abri de l’œuvre de la croix (Rom. 6 : 23).
Après les souffrances viennent les gloires : « Mardochée sortit de devant le roi, avec un vêtement royal bleu et blanc, une grande couronne d’or, et un manteau de byssus et de pourpre » (v. 15). Assuérus lui a conféré gloire, majesté, honneur et puissance. Cette scène est une figure de l’élévation du Seigneur Jésus Christ, que nous verrons surgir rayonnant de gloire. Contemplons par la foi, avec adoration, le triomphe de Jésus. Son apparition sera la destruction de tous ses ennemis (Ps. 66 : 3-4).
« La ville de Suse poussait des cris de joie et se réjouissait. Pour les Juifs il y avait lumière et joie, et allégresse et honneur ». Beaucoup se firent Juifs « car la frayeur des Juifs tomba sur eux » (v. 15-17; Deut. 2 : 25 ; 11 : 25 ; Zach. 8 : 20-23).
Chapitre 9
Les dix fils d’Haman, dont il était si fier, périssent (5 : 11 ; 9 : 9; Es. 14 : 20). Les deux derniers chapitres du livre montrent que les ennemis du peuple de Dieu étaient nombreux, même à Suse. Il en a toujours été ainsi au cours des âges. Nous ne savons pas de quelle manière ces ennemis avaient persécuté les Juifs, mais le jour des rétributions (Es. 35 : 4) avait sonné pour eux aussi.
Esther n’est pas un type des voies de Dieu envers l’Eglise. Le livre montre en figure: avec Vasthi, les nations mises de côté, et avec Esther, les Juifs appelés à partager les honneurs du royaume. La grâce est le caractère divin mis en évidence actuellement par l’Eglise. L’exécution d’une vengeance est absolument incompatible avec l’appel du chrétien (Rom. 12 : 19).
Par contre, durant le règne millénaire de justice et de vérité, l’exercice d’une juste vengeance sera tout à fait à sa place. Quand le Messie régnera et que Jérusalem sera « la reine », alors s’accomplira ce que la parole de Dieu annonce : « La nation et le royaume qui ne te serviront pas périront » (Es. 60 : 12).
Les ennemis ne seront pas frappés seulement au début du règne. Les adversaires seront abattus (Mich.5 : 9) de même que ceux qui se sont soumis en dissimulant (Ps. 18 : 44). « Chaque matin, je détruirai tous les méchants » (Ps. 101 : 8).
Ainsi, le jour qui devait marquer la disparition d’Israël fut au contraire celui de son triomphe, et de l’anéantissement de ses ennemis. Ce n’est pas impunément que l’on s’attaque au peuple de Dieu (Zach. 2 : 8 ; Ps. 105 : 12-15).
D’année en année, la grande délivrance dont le peuple a été l’objet devra être commémorée par la fête des Purim, et elle l’est encore : ce seront des jours de grande joie (v. 22, 27; voir Ps. 30 : 11-12).
Israël, sous la discipline divine, a encore aujourd’hui ce caractère d’une nation répandue loin et ravagée, qui attend et qui est foulée aux pieds (Es. 18 : 2). Mais c’est en même temps, aux yeux de Dieu, un peuple « merveilleux », au milieu duquel est né le Sauveur du monde. Serions-nous les objets de moins de tendresse, si nous faisons partie du peuple céleste, de l’épouse de Christ ?
Le Seigneur est mort pour cette nation juive, mais aussi « pour rassembler en un les enfants de Dieu dispersés » (Jean 11 : 52). Tous ceux qui aujourd’hui peuvent dire en vérité « Abba Père » forment ensemble le seul corps de Christ (1 Cor. 12 : 12, 27). Mais ils sont actuellement eux aussi, du fait de leurs péchés et de leur désobéissance aux enseignements de sa Parole, dispersés et dans une grande misère. Ils attendent la délivrance que le Seigneur leur accordera à sa venue.
Chapitre 10
Nous avons déjà vu que « Mardochée était grand dans la maison du roi », il « allait toujours grandissant » (9 : 4). Des expressions similaires sont employées pour Moïse : « L’homme Moïse aussi était très grand dans le pays d’Egypte, aux yeux des serviteurs du Pharaon et aux yeux du peuple » (Ex. 11 : 3).
Et le livre se termine en parlant encore de la grandeur de Mardochée. Il était « grand parmi les Juifs et agréable à la multitude de ses frères, cherchant le bien de son peuple et parlant pour la paix de toute sa race » (v. 3).
Ces types, tout imparfaits qu’ils soient, rappellent que la place suprême appartient à Jésus, qui s’est abaissé lui- même jusqu’à la mort de la croix, mais que maintenant le ciel a reçu, jusqu'à l’heure si proche de son exaltation (Act. 3 : 21). Il sera placé très haut (Es. 52 : 13) ; « Dieu lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom » (Phil. 2 : 9). Sondons les Ecritures, elles rendent témoignage de Lui (Jean 5 : 39). C’est en leur parlant de ce qui Le concerne dans toutes les Ecritures, que le Seigneur a fait brûler le cœur des disciples d’Emmaüs (Luc 24 : 32). Il est digne d’occuper la première place dans nos pensées et dans nos affections (Col. 1 : 18). Nos cœurs Lui appartiennent-ils entièrement ?
Ph. L - « Messager évangélique » (2007)