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LES PAROLES D’AGUR (2)


Perfection de la Parole de Dieu
Les deux requêtes d’Agur
Les caractéristiques d’une génération apostate
      

Perfection de la Parole de Dieu

            « Toute parole de Dieu est affinée (v. 5a) ; il n’y a rien de superflu, rien d’inutile. Ayant vécu dans un temps que j’ignore, Agur s’est constitué, non pas le défenseur de la Parole, quoique la chose soit vraie, mais le gardien du Saint Livre et de son précieux contenu.
            Il déclare : « N’ajoute pas à ses paroles, de peur qu’il ne te reprenne, et que tu ne sois trouvé menteur » (v. 6). La même pensée se retrouve trois fois dans le cours des Ecritures :
                        - Le premier écrivain, Moïse, a dit : « Tu n’y ajouteras rien, et tu n’en retrancheras rien » (Deut. 12 : 32).
                        - Ici, Agur, dans un livre qui est placé à peu près au centre de la Bible, vient nous dire : rien n’y manque et il n’y a rien de trop.
                        - Enfin, le dernier écrivain, l’apôtre Jean, tout à la fin du livre de l’Apocalypse, qui clôture la Bible, nous dit : « Si quelqu’un ajoute à ces choses, Dieu lui ajoutera les plaies écrites dans ce livre ; et si quelqu’un ôte quelque chose des paroles du livre de cette prophétie, Dieu ôtera sa part de l’arbre de vie et de la cité sainte, qui sont décrits dans ce livre » (Apoc. 22 : 18-19).

            Agur était donc d’accord avec ceux qui l’ont précédé comme écrivains inspirés et ceux qui allaient venir après lui, pour terminer un Livre commencé déjà depuis plusieurs siècles. Il nous avertit de ne rien ajouter à la révélation de Dieu. Ce livre, écrit par notre grand Dieu, est parfait ; rien n’y manque. Les auteurs profanes du siècle ont bien essayé d’y supprimer ou d’y ajouter quelque chose, comme si Dieu dépendait d’une misérable créature, elle-même dans la nuit et dans l’incapacité la plus complète d’ajouter un seul mot à ce que Dieu a fait. Le temps viendra où ils seront trouvé menteurs. Aujourd’hui, sans doute, on leur accorde du crédit, car l’homme est de glace pour la vérité et de feu pour le mensonge, mais bientôt ces conducteurs aveugles, comme leurs auditeurs, seront trouvés menteurs devant Dieu.
            La Parole n’a jamais cédé devant personne ; les générations ont passé, mais la Parole est restée comme un rocher au milieu de l’océan humain. Rien n’a pu l’ébranler, ni le feu des persécutions, ni l’incrédulité moderne. Elle est restée elle-même et demeurera jusque dans l’éternité. Alors, je le répète, ceux qui ont essayé de toucher à ce Livre, en quoi que ce soit, seront trouvés menteurs en leur propre temps. Alors, leur procès se terminera : ils seront trouvés menteurs. Or, la part de ceux-ci est dans l’étang brûlant de feu et de soufre. Ainsi, en deux mots, Dieu termine l’histoire d’une race déchue, jugée parce qu’elle a mis la main sur Sa Parole et sur la personne de Son Fils que cette Parole nous a révélée.
            Notre Dieu, qui habite la lumière inaccessible, a voulu se révéler comme le Dieu créateur par les mondes qu’Il a créés. Puis, Il s’est plu à révéler l’amour de son cœur en envoyant son Fils dans ce monde, se faisant connaître comme Dieu rédempteur, s’occupant en grâce de sa créature déchue. C’est ainsi qu’Il a révélé son Fils dans sa précieuse Parole, pour nous faire connaître l’excellence de cette Personne et l’infini de son amour. Mais, Il est encore le Dieu de la foi, suivant ce que nous trouvons ici : « Il est un bouclier pour ceux qui s’attendent à lui » (v. 5b).
            Combien de fois, derrière ce bouclier, nous avons tremblé. Ce Dieu, qui tient le vent dans le creux de sa main, qui a placé les océans dans un manteau (montrant ainsi sa toute-puissance, comme nous l’avons déjà vu), est le bouclier, le protecteur de celui qui s’attend à Lui. Mais, derrière un tel bouclier, le combattant, le voyageur fatigué, aux prises avec les nombreuses difficultés de la vie, a souvent tremblé, et parfois pour très peu de chose.
            L’exemple d’Elie, le prophète, est frappant, dans cet ordre d’idées. Ce serviteur de l’Eternel avait accompli les plus grands exploits et Dieu lui avait montré sa puissance de sept manières remarquables (1 Rois 17-18) :
                        - fermant les cieux,
                        - le nourrissant par le moyen des corbeaux,
                        - le nourrissant par le moyen d’une veuve dépourvue de tout,
                        - ressuscitant le fils de cette veuve,
                        - l’amenant à se tenir devant Achab, qui désirait le faire mourir, sans que ce roi ne le touche,
                        - faisant descendre le feu sur l’autel,
                        - suscitant un nuage large comme la main, qui apporta la pluie à Israël.

            Mais voilà que se lève une femme, une fille de la terre de Sidon, du pays des idoles et, lorsqu’elle le fait avertir que le lendemain son âme serait comme celle des prophètes de Baal qu’il avait tués, savez-vous ce que fit Elie ? Il quitta son champ d’activité, s’enfuit dans les plaines de Juda puis au désert, se coucha sous un genêt, et, demandant la mort pour son âme, s’endort profondément (1 Rois 19). Oui, il ne faut pas grand-chose pour nous décourager, derrière pourtant ce « bouclier », mais pensons cependant que Dieu lui-même condescend à être un bouclier pour tous ceux qui s’attendent à Lui !
 

Les deux requêtes d’Agur

            Notre Dieu écoute la prière de quelqu’un qui se connaît et qui se méfie de lui-même, car ce sont les deux conditions indispensables à l’homme qui désire être gardé ; d’abord se connaître et ensuite se méfier de soi.
            Agur s’adresse donc à Dieu pour lui faire deux requêtes et il insiste pour qu’elles soient satisfaites avant sa mort. S’il désire ainsi être exaucé avant de mourir, ce n’est pas pour sa satisfaction personnelle, mais pour être capable, par ce moyen, de glorifier Dieu dans le monde ! Remarquons que la première de ces requêtes est d’ordre moral ; la seconde est matérielle.
            Il demande tout d’abord : « Eloigne de moi la vanité et la parole de mensonge » (v. 8a). La vanité, c’est la bonne opinion de soi-même. Or, il est impossible de servir le Seigneur en ayant une bonne opinion de soi-même.       Il peut arriver que certaines personnes aient sur les lèvres le témoignage d’une mauvaise opinion d’elles-mêmes, mais touchez un peu à leur personne et vous verrez si le cœur est bien en accord avec les lèvres, si le témoignage des deux est bien en harmonie ! L’expérience sera très certainement concluante.
            Quant à la parole de mensonge, mentionnée également ici, il s’agit de tout ce qui n’est pas la vérité. Aussi, quand l’apôtre écrit à Timothée, il lui dit : « Prêche la parole » (2 Tim. 4 : 1), c’est-à-dire rien d’autre.
            Mais il y a aussi un côté matériel dans le service, qui peut constituer une entrave sérieuse. C’est pourquoi Agur demande à Dieu : « Ne me donne ni pauvreté, ni richesse » (v. 8b). Il faut reconnaître que l’on n’entend pas souvent un cœur angoissé devant Dieu, pour demander de ne pas avoir de richesses. Malheureusement l’Eglise devient riche aujourd’hui, matériellement.
            Or, pour quelle raison cet homme demande-t-il à Dieu de ne pas être riche ? Parce qu’il a compris qu’il vaut la peine de dépendre d’un tel Dieu et non des circonstances. Et pourtant, objectera-t-on, y a-t-il des personnes qui sont riches dans l’Assemblée. Oui, et c’est une chose précieuse, mais à une condition, c’est que, si nos biens augmentent, nous n’y mettions pas notre cœur (Ps. 62 : 10). Craignons surtout de désirer la richesse, car « c’est une racine de toutes sortes de maux que l’amour de l’argent » (1 Tim. 6 : 9-10).
            Ici, Agur insiste et il demande à Dieu de n’avoir ni pauvreté, ni richesse. Il ajoute : « Nourris-moi du pain qui m’est nécessaire de peur que je ne sois rassasié… » (v. 8c-9). Oui, lorsqu’on devient riche, on acquiert de l’importance à ses propres yeux. On court le risque de s’écrier : « Qui est l’Eternel ? ». Salomon, dans sa chute, aurait voulu entraver l’œuvre de Dieu en gouvernement, en saisissant l’instrument choisi de Dieu pour le juger - Jéroboam (1 Rois 11 : 40).
            Quand on se connaît, on a peur aussi des choses qui peuvent se produire dans la vie. Si je manque de pain, connaissant mon cœur et étant incapable de supporter une humiliation de ce genre et une telle épreuve, je peux avancer la main vers ce qui ne m’appartient pas et qui est la propriété d’autrui.
            Si encore, semble dire Agur, j’étais déshonoré moi seul, dans une telle éventualité, mais c’est « le nom de mon Dieu » qui serait traîné dans la boue et sa gloire en serait ternie. C’est pourquoi il fait preuve d’une sainte crainte dans son cœur, de peur qu’il ne parjure le nom de son Dieu.          
            Nous pouvons donc dire que, lorsqu’on se connaît, il y a deux moyens efficaces pour être gardés : le jugement de soi-même et la dépendance de Dieu.
            Si Dieu nous accorde quelque chose sur la terre, nous n’avons pas le droit de passer au voisin la responsabilité administrative qui en découle ; la grande affaire, c’est d’accepter ces biens avec crainte et tremblement, en nous demandant si nous aurons la capacité voulue pour les gérer, ne perdant pas de vue que l’heure viendra où Dieu nous demandera compte de notre administration (Luc 16 : 2).
            Le verset 10 vient compléter la prière d’Agur. Celui-ci découvre un autre danger ; c’est qu’on est enclin à faire le procès des riches par anticipation. N’oublions pas que c’est Dieu seul qui le fera, ce procès, au temps convenable et alors chacun sera jugé en rapport avec sa propre responsabilité.
            Quand le sacrificateur avait égorgé l’un des deux oiseaux (Lév. 14 : 4-7), il trempait dans son sang le cèdre et l’hysope. Cela signifie que le riche a autant besoin du sang du Christ que le pauvre, et inversement. Sur un tel terrain, tous les hommes sont égaux. A la croix, tous ont été jugés et, quand le moment sera venu, Dieu rendra à chacun selon ses œuvres ; c’est pourquoi le cèdre et l’hysope se retrouvaient dans le sang. Toute la gloire et la puissance humaines étaient là, en figure, parce que l’homme se glorifie aussi bien en haut qu’en bas  de l’échelle sociale !
            Il y a des frères qui sont riches, dans l’Assemblée. Ils ne me doivent rien, mais on peut dire que ceux qui ont de gros bagages ont toujours eu de la peine à les porter et à les garder. Ils ont leur responsabilité devant Dieu, à cet égard. Quant à moi, si je n’ai rien à manger aujourd’hui, un frère riche ne me doit pas le pain dont j’ai besoin. Ce qu’il possède est à lui et ne m’appartient pas. Dieu  décide les parts qui conviennent ; rien n’est à moi.       
            Toutefois, si quelqu’un est riche, il a affaire avec Dieu et, au grand jour des rétributions, il rendra compte de ce qui lui a été confié. Mon grand souci, c’est d’être trouvé fidèle dans le peu qui a été entre mes mains.
            « De peur qu’il ne te maudisse », ajoute Agur dans ce verset. Si quelqu’un tombe, il tombe pour son maître et si un riche fait fausse route, c’est au détriment de son maître. Je n’ai pas été établi sur la terre pour le juger, mais plutôt pour me juger moi-même. Reste à savoir si les sentences prononcées sur moi sont en accord avec le code divin à mon égard.
            Mais maintenant qu’Agur vient de faire ses recommandations, il va se placer devant nous comme un prophète de valeur.
 

Les caractéristiques d’une génération apostate

            « Il est une génération qui maudit son père et qui ne bénit pas sa mère » (v. 11). C’est le mépris de ce qui a été établi par Dieu au commencement, et si une génération a justifié ce verset, c’est bien celle d’aujourd’hui, car, si nous interrogeons ceux qui ont blanchi dans le chemin de la vie et que nous nous enquerrions auprès d’eux de ce qui se passait il y a seulement cinquante ans, nous apprendrons que la génération précédente avait encore du respect pour ses parents.
            Mais, dira peut-être quelqu’un, je ne me suis jamais permis de maudire mon père ou ma mère. A cela, nous pouvons répondre qu’il n’est pas nécessaire de le dire ; il suffit de mépriser ses parents dans son cœur. N’avez-vous pas trouvé, dans l’Ecriture, que l’on peut maudire le sourd ? (Lév. 19 : 14).
            Laissez-moi, à ce sujet, vous dire quelques mots sur Joseph, le gouverneur de la terre d’Egypte. Il avait trois titres glorieux : Révélateur des secrets, Sauveur du monde, et Soutien de la vie, ainsi qu’on le proclamait alors. Or, son père, Jacob, était un homme sans renommée dans le pays d’Egypte. Bien plus, c’était une abomination pour un Egyptien, de manger avec un Hébreu, à cause d’une ancienne guerre avec Abraham. Quand donc le grand Joseph, un homme qui craignait Dieu, arrivé à l’apogée de la gloire (tous genoux se ployaient devant lui, en Egypte), accompagne Jacob, ce vieillard d’apparence misérable, qui se traînait péniblement appuyé sur un bâton, devant le grand Pharaon, il dit sans hésitation et sans honte : c’est mon père. Oui, chers amis, certains détourneraient la tête pour dire, de leur propre père ou de leur père : je ne connais pas cette femme ou cet homme. Quel contraste avec Joseph !
            L’apôtre Paul, écrivant à Timothée, indique que le signe caractéristique des derniers jours, c’est que les enfants n’obéiront plus à leurs parents (2 Tim. 3 : 2). La chose n’est-elle pas pleinement réalisée aujourd’hui ?
            Il est dit trois fois : Honore ton père et ta mère, crains ta mère et ton père ; et il est ajouté : obéis-leur. Les honorer, c’est quant à leur personne ; les craindre, c’est en rapport avec leur autorité, reçue de la part de Dieu ; enfin, leur obéir, c’est se soumettre quand ils ont parlé. Dieu a dit : « Afin que tu prospères et que tu vives longtemps sur la terre » (Eph. 6 : 3).
            On peut citer encore le cas de Salomon, qui, lui, honora sa mère d’une façon toute particulière. Je ne dirai rien sur les antécédents de Bath-Shéba, mais je rappellerai que Salomon, cet homme qui se trouvait sur le trône de l’Eternel, qui avait, pour ainsi dire, le monde civilisé d’alors à ses pieds, quand sa mère s’approche, il se lève, la fait asseoir sur un trône à sa droite, après d’être incliné devant elle (1 Rois 2 : 19).
            Mais quelqu’un de plus grand encore réalisa d’une manière parfaite le commandement de Dieu relatif aux parents. Je veux parler de notre Seigneur Jésus Christ. Lui, le jeune homme qui avait vu le jour à Bethléem, mais qui avait appelé les mondes à l’existence, qui soutient toutes choses par la parole de sa puissance, qui a compté vos jours et les miens, n’avait pas, comme mère, une personne de rang élevé en Israël. C’était vraisemblablement une femme d’origine modeste, des montagnes de Juda, qui n’a pu d’ailleurs offrir que deux tourterelles (Luc 2 : 24). Quant à son père, c’était un pauvre charpentier. Eh bien ! il nous est dit qu’à douze ans il était soumis à ses parents. Quelle chose remarquable et merveilleuse, car c’est à cet âge que les enfants commencent à manifester leur insubordination.
            Ah ! ne nous y méprenons pas ; Dieu ne supportera pas toujours cette insubordination ouverte des enfants envers leurs parents. Celui qui n’honore pas son père et sa mère, « les corbeaux du torrent le crèveront et les petits de l’aigle le dévoreront » (v. 17). C’est très solennel. Il y a un gouvernement de Dieu sur la terre, ne l’oublions jamais.
            Quelqu’un dira peut-être qu’il semble pourtant aujourd’hui que Dieu n’intervient pas. En effet, et ce semblant d’inactivité divine d’une manière directe à l’égard du mal est appelé le « mystère de Dieu ». Toutefois, Dieu ne ferme pas les yeux sur les choses qui se passent sur cette pauvre terre. Les dettes se paieront, chacune en son temps. « Ce qu’un homme sème, cela aussi il le moissonnera » (Gal. 6 : 7). Je ne veux pas faire le procès de ces chers enfants qui débutent dans la vie ; je les plains, j’essaie de les aimer et j’en ai pitié, mais Dieu ne sommeille pas. On peut craindre que ce que nous avons fait à d’autres nous soit fait plus tard à nous, par un concours de circonstances, connu de Dieu seul.
            Ici, une question se pose : Pourquoi le cœur d’une mère n’a-t-il pas sombré avec tout le reste ? Je crois, chers amis, que c’est parce que Dieu y a placé un amour qui ne se fatigue pas. Notre Dieu a, pour ainsi dire, conservé cela soigneusement au jour du naufrage ; il a gardé le cœur de la mère, parce qu’il est destiné à être mis à l’épreuve souvent, quelquefois pendant toute une vie. Or, il semble que, plus on le meurtrit, plus il aime. Dieu seul a pu faire cela ; il a laissé dans le cœur d’un être ruiné, qui a été l’instrument pour introduire le péché sur la terre, un amour qui s’altère difficilement.
            Oui, la génération qui maudit son père et qui ne bénit pas sa mère est le signe caractéristique de la fin ; à l’horizon, le soleil de la grâce et de la patience de Dieu baisse rapidement.
            « Une génération pure à ses propres yeux », ajoute Agur (v. 12). C’est le manteau de la propre justice, mais qui n’a de valeur qu’à ses propres yeux, pas devant Dieu, chers amis. La propre justice règne en maîtresse.          Cette génération est pure à ses yeux, mais l’Ecriture nous dit qu’elle n’est pas lavée de son ordure. Pour être pur devant Dieu il faut être lavé dans le sang de l’Agneau.
            Quand le lépreux sortait du camp, il devait déchirer son manteau. Aussi longtemps que quelqu’un n’a pas déchiré le manteau de sa propre justice, il ne peut pas accepter celui que Dieu lui offre, la « plus belle robe » (Luc 15 : 22).
            « Ses yeux sont hautains » (v. 13), est-il dit aussi. Avez-vous déjà fait la différence entre « hautains » et « orgueilleux » ? Etre orgueilleux, c’est s’occuper de sa propre personne, faire de soi-même le centre de ses pensées et échafauder sur ce centre des horizons très élevés à atteindre. Etre hautain, en revanche, c’est se placer sur sa propre éminence et considérer les autres dans la vallée, avec dédain et mépris, les estimant comme étant tous inférieurs à nous.
            Mais ne croyez pas que cette génération aux yeux hautains a passé sur la scène. Interrogez le temps et jetez un regard autour de vous ; vous vous convaincrez du contraire. On entend dire parfois : ce sont les gens de l’autre siècle. Non, ces gens d’autrefois ont eu plus qu’il ne leur fallait, avec le peu qu’ils possédaient, pour accomplir leur course. Mais si vous êtes attentifs à ce que Dieu vous dit, vous ne possédez que la moitié de ce qui est nécessaire pour le voyage de cette vie. Ne courez pas trop vite : dans le chemin, vous vous rendrez compte que vous n’aurez jamais que la moitié de ce qu’il vous faut pour faire face aux difficultés sans cesse croissantes de la vie des derniers jours, dans laquelle vous rencontrerez tant d’exigences nouvelles. Dieu a permis à nos devanciers de vivre dans un temps où, avec peu de choses, on faisait beaucoup. Aujourd’hui, la vie est devenue un problème ; mais pensez à ceux qui ont passé avant nous sur la scène de ce monde et dites-vous qu’ils ont eu assez de ce qu’ils possédaient alors. L’Ecriture nous dit : « Ne pensant pas aux choses élevées, mais vous associant aux humbles » (Rom. 12 : 16), aussi bien aux choses qu’aux personnes humbles.
            Ici, c’est précisément le contraire de ce que la Parole nous enseigne. Cette génération a une haute opinion d’elle-même.
            « Une génération dont les dents sont des épées et les molaires de couteaux, pour dévorer les affligés de dessus la terre, et les nécessiteux d’entre les hommes » (v. 14). N’est-il pas vrai, chers amis, qu’il y avait encore, il y a quelques dizaines d’années, un certain intérêt – purement humain, sans doute – pour les misères du voisin. Aujourd’hui, c’est chacun pour soi. Jadis, et tout près de nous encore, en dehors des lois et des règlements, il y avait la voix de la conscience qui était entendue. Dans les affaires, par exemple, les hommes avaient une parole, pour le respect de laquelle ils auraient sacrifié une partie de leur capital, sinon la totalité, s’il le fallait. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, où les dents sont devenues des épées. Qu’importent les moyens : l’honneur, la moralité, tout cela est jeté par-dessus bord et une seule chose prime : arriver à ses fins.
            « La sangsue a deux filles (v. 15a) et ces deux filles sont : « Donne ! Donne ! ». Et, à côté de cela « il y a trois choses qui sont insatiables, quatre qui ne disent pas : c’est assez… » (v. 15b-16) - c’est-à-dire quatre gouffres, quatre vides qu’on ne peut combler.
            Il y a, en effet, aujourd’hui un cri qui monte du cœur de l’homme, le cri de la convoitise, de la satisfaction charnelle, qui ne trouve pas à s’assouvir sur la terre : donne, donne encore, donne toujours. Il faut des distractions incessantes et toujours renouvelées, parce que le cœur de l’homme devient insatiable dans ces derniers jours. Mais la terre n’offre pas des ressources suffisantes pour satisfaire ce gouffre, qui se creuse toujours plus profondément et s’agrandit dans le cœur humain. Comme de l’eau qui serait versée dans un désert, sur une terre altérée, jamais rassasiée, tel est le cœur de l’homme, insatiable. Il ne dit jamais : Assez !
            Et si un chrétien se demande ce qu’il faut faire au milieu d’un tel état de choses, nous lui dirons : N’essaie pas de réformer ; les choses iront, au contraire, de mal en pis. Cher enfant de Dieu, tu es du ciel, sans doute, et tu vas au ciel ; passe donc paisiblement ton chemin à travers un tel monde et, quand Dieu t’en fournit l’occasion fais comme Agur, présente une parole de Dieu, te souvenant de ce que dit l’Eternel au prophète : « Tu leur diras mes paroles, soit qu’ils écoutent, soit qu’ils n’en fassent rien » (Ezé. 2 : 7).
            Tous nos efforts, en vue d’améliorer la société actuelle, seraient d’ailleurs parfaitement vains. Les choses subsisteront jusqu’à ce que le Seigneur nettoie son aire. Sans doute, ce jugement commencera par la terre d’Israël, mais le Seigneur va juger cette génération hautaine, juste à ses propres yeux, qui méprise sa grâce aujourd’hui comme au début de son histoire. Oui, nous attendons maintenant un événement précieux à nos cœurs : le retour du Seigneur. Mais aussitôt après fondra le jugement sur cette génération, de laquelle Agur, comme un peintre fidèle, nous fait ici un tableau juste, dernière génération sur la scène, destinée à être balayée par le jugement de Celui qui s’appelle encore aujourd’hui le Sauveur du monde.

 

D’après M. Capelle

 

A suivre