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VOICI  L’HOMME  (6)

 

La fin du traître (Matt. 27 : 3-10)

 « Alors Judas, celui qui avait livré Jésus, voyant qu’il avait été condamné, fut pris de remords... » (Matt. 27 : 3). Sans doute n’avait-il pas songé à une telle issue pour le Seigneur qui était toujours parvenu à échapper aux complots de ses ennemis. Il avait jugé l’occasion favorable de satisfaire une fois de plus sa cupidité. Celui qui s’engage dans le chemin du péché devient l’esclave de Satan, et lorsqu’il en récolte le fruit inattendu, le réveil est terrible.

Le remords de Judas se produisit trop tard et n’était pas profond, comme c’est toujours le cas quand le cœur est effrayé des conséquences d’un péché plutôt que de la gravité de l’acte lui-même. « J’ai péché » (v. 4). Combien facilement les hommes prononcent ces mots sans vrai repentir devant Dieu ! Nous trouvons cette expression à plusieurs reprises dans l’Écriture : le Pharaon (Ex. 9 : 27 ; 10 : 16) ; Balaam (Nom. 22 : 34) ; Acan (Jos. 7 : 20) ; Saül (1 Sam. 15 : 24 ; 26 : 21) ; David (2 Sam. 12 : 13 ; 24 : 10 - voir aussi Ps. 51 : 4) ; le fils prodigue (Luc 15 : 18, 21). Mais dans trois cas seulement Dieu discerne une réelle repentance et peut accorder son pardon : David (deux fois) et le fils prodigue. Dans toute sa marche, Judas avait manqué d’une véritable crainte de Dieu, et celle-ci lui fit défaut jusqu’à la fin, en dépit de sa déclaration. « J’ai péché en livrant le sang innocent ». Etait-ce vraiment là tout son péché ? Celui qu’il avait trahi d’une manière si odieuse, n’était-il pas en droit d’attendre de son disciple une tout autre confession ?

 Nous ne voyons, en Judas, aucune « tristesse selon Dieu » (2 Cor. 7 : 10), comme ce fut le cas chez Pierre, mais seulement « la tristesse du monde qui opère la mort ». Satan remporte ainsi une double victoire : il avait atteint son but en ce qui concernait le Seigneur Jésus, et, d’autre part, il poussa au désespoir l’instrument dont il s’était servi. Judas « se retira ; puis il alla se pendre » (Matt. 27 : 5). Se référant à la prophétie de David, Pierre décrit le terrible jugement qui l’atteignit, lui et sa maison (Act. 1 : 16-18 ; Ps. 109 : 6-20).

Judas avait jeté dans le temple, aux pieds des principaux sacrificateurs, « le salaire de l’iniquité » (Act. 1 : 18). Ni le remords de leur malheureux complice, ni le témoignage qu’il rend à l’innocence de Jésus ne touchent leurs cœurs insensibles. « Que nous importe ! A toi de voir ! » (Matt. 27 : 4). Une seule chose les préoccupe : l’emploi qu’il convenait de faire de l’argent rendu par le traître. Ayant pris les pièces d’argent, ils dirent : « Il n’est pas permis de les mettre dans le Trésor sacré, puisque c’est le prix du sang » (v. 6). Voilà le cœur de l’homme ! Au lieu de juger son péché à la lumière divine, il se complaît dans l’observation d’une religion extérieure. Le passage sur lequel ils se fondaient sans doute (Deut. 23 : 18) fait ressortir leur dessein d’insulter le Seigneur même après sa mort, en mettant le prix de son sang au même niveau que « le salaire d’une prostituée et le prix d’un chien », qui « sont tous les deux en abomination à l’Eternel ».

« Après avoir tenu conseil, ils achetèrent avec cet argent le champ du potier, pour la sépulture des étrangers ; c’est pourquoi ce champ-là a été appelé Champ de sang, jusqu’à aujourd’hui » (Matt. 27 : 7-8). Ils élevèrent ainsi, en quelque sorte, un monument à leur propre infamie, au su et au vu « de tous les habitants de Jérusalem » (Act. 1 : 19).

Lorsqu’il « ôta de devant lui le Saint d’Israël » (Es. 30 : 8-14 ; Jér. 19 : 10-13) et se chargea ainsi de son sang, le peuple juif n’a-t-il pas fait du pays de la promesse un « Aceldama » ? N’a-t-il pas été dispersé parmi les nations, « brisé, comme on brise un vase de potier, qu’on casse sans ménagement : et, dans ses fragments, il ne se trouvera pas un tesson » ? C’est cela que rappelle le champ du potier : un champ inculte et stérile sur lequel le potier jette ses rebuts et les fragments de ses vases brisés. Occupé par les nations, le pays d’Israël est devenu un lieu « pour la sépulture des étrangers ». Mais la terre entière est, elle aussi, un « champ du sang » et un « champ du potier ». Le sang du Fils de Dieu qui y a été répandu crie, aujourd’hui encore, vers le ciel. La création, sortie parfaite des mains de Dieu, est maintenant un champ couvert de ruines, un cimetière. Qu’est-ce que le croyant pourrait rechercher encore pour son cœur dans un tel monde ? Le Seigneur lui-même n’y a trouvé qu’une croix et une tombe - pensée bien propre à nous faire considérer cette scène passagère sous sa vraie lumière.

« Alors fut accompli ce qui avait été dit par le prophète Jérémie : Ils ont pris les trente pièces d’argent, le prix auquel il a été évalué, oui, évalué par des fils d’Israël ; et ils les ont données pour le champ du potier, comme le Seigneur m’avait ordonné » * (Matt. 27 : 9-10). Cette parole de Jérémie ne nous a pas été transmise. Certains expliquent ainsi la difficulté soulevée par cette citation : dans la collection juive des écrits des prophètes, le livre de Jérémie venait en tête, de sorte que les Juifs avaient coutume, quand ils citaient un prophète, de dire « Jérémie ou l’un des prophètes » ou simplement « Jérémie » (voir Matt. 16 : 14). Toutefois, le passage de Zacharie 11 : 12-13 : « Jette-le au potier, ce prix magnifique auquel j’ai été estimé par eux » ne correspond pas exactement à la citation de Matt. 27.

Seul Matthieu mentionne ce prix, attestant ainsi qu’Israël avait évalué son Messie au prix d’un serviteur tué par un bœuf (Ex. 21 : 32). Lorsque Dieu reprendra ses relations avec son peuple terrestre, le résidu reconnaîtra : « Il est méprisé, et nous n’avons eu pour lui aucune estime » (Es. 53 : 3).

 Le Seigneur Jésus « n’a pas regardé comme un objet à ravir d’être égal à Dieu, mais s’est anéanti lui-même » (Phil. 2 : 6). Il « a vendu tout ce qu’il avait » afin d’acquérir la « perle de très grand prix » (Matt. 13 : 46). « Notre grand Dieu et Sauveur Jésus Christ… s’est donné lui-même pour nous, afin de nous racheter de toute iniquité et de purifier pour lui-même un peuple qui lui appartienne en propre, zélé pour les bonnes œuvres » (Tite 2 : 14).

 

D’après  von Kietzell Fritz  – « Messager Evangélique » (1969 p. 147-151)

 

A suivre