LES NOURRITURES DU CROYANT (3)
3 – La manne (Ex. 16)
Lorsque Israël parvient au désert de Sin (v. 1), un mois s'est écoulé depuis la nuit où, sortant d'Egypte, ils ont été à toujours délivrés de leur condition d'esclaves du Pharaon. L'Eternel ayant soufflé de son souffle, leurs oppresseurs, recouverts par les flots, se sont enfoncés comme du plomb dans les eaux magnifiques. Cette délivrance, à jamais mémorable, donne lieu au « cantique de la rédemption » chanté sur le rivage de la mer Rouge. Cette mer qu'ils redoutaient et qui semblait les livrer aux chars et aux cavaliers s'ouvre devant eux et devient le moyen de leur salut. La mort dans laquelle Christ est descendu et qu'il a vaincue nous délivre pour toujours de la puissance et des terreurs de cette mort même : « afin que, par la mort, il rende impuissant celui qui avait le pouvoir de la mort » (Héb. 2 : 14). La foi peut s'écrier en contemplant le tombeau vide : « Où est, ô mort, ta victoire ? » (1 Cor. 15 : 55).
Dans le désert de Sin
Depuis Elim, halte bienfaisante (Ex. 15 : 27), les fils d’Israël ont à poursuivre à nouveau le chemin du désert. Sans doute, l'Eternel allait-il devant eux pour les conduire, de jour dans la nuée et de nuit dans la colonne de feu. Des manifestations notables des soins de Dieu n'ont pas manqué envers eux jusqu'ici ; les eaux de Mara rendues douces, les ombrages d'Elim, lieu de fontaines et de fraîcheur bienfaisante qu'il faut à regret laisser derrière soi. Ce sont à nouveau les lieux arides, la marche en avant avec toutes ses fatigues. Non, ce n'est pas ici le lieu de repos, ce n'est pas encore le pays ruisselant de lait et de miel, où l'on ne manquera de rien.
Pendant un nouveau mois, ils vont séjourner dans un autre désert, celui de Sin, avant de parvenir à Sinaï - la mémorable étape où les oracles vivants leur seront donnés. Jusque-là, comme on l'a souvent souligné, c'est la grâce seule qui s'est déployée à leur égard. L'Eternel leur dispense les ressources nécessaires, répond à leurs nombreux besoins. Malgré leurs murmures, tristes penchants de nos cœurs naturels (1 Cor. 10 : 10), force leur est pourtant d'admettre que Dieu les a portés sur des ailes d'aigle (19 : 4). Selon l'élection de la grâce, n'étaient-ils pas son peuple dont Il voulait faire un royaume de sacrificateurs, une nation sainte ?
Cette grâce dispensée est particulièrement sensible dans les circonstances de ce chapitre 16 de l’Exode.
Le don de la manne
Au lieu du jugement mérité par tous ces coupables, qui regrettent de ne pas être morts dans le pays d'Egypte, c'est le pain du ciel qui va descendre sur eux ! C'est la manne, « le pain des puissants » (Ps. 78 : 24-25) ! Leur étonnement sera tel qu'ils se diront l'un à l'autre : « Qu’est-ce que cela ? (v. 15), d'où son nom de manne.
Si nous pensons maintenant à Celui dont la manne est un type remarquable - le Fils, l’envoyé du Père dans ce monde -, nous voyons qu’Il n'a pas été mieux connu ici-bas : « Il était dans le monde, et le monde fut fait par lui, et le monde ne l'a pas connu » (Jean 1 : 10). Les fils d'Israël n'avaient pas un cœur pour connaître, ni des yeux pour voir (Deut. 29 : 4) ; de même, les chefs de ce siècle n'ont pas connu Christ, la sagesse de Dieu. « S'ils l'avaient connue, ils n’auraient pas crucifié le Seigneur de gloire » (1 Cor. 2 : 8) !
Expression de l'amour du Père qui nous a aimés le premier, envoyé du Père, sorti d'auprès du Père et venu dans le monde, quel sujet d'inépuisable contemplation pour la foi ! Lorsque, par exemple, les Juifs le cherchaient dans le seul but de profiter de ses miracles, tel la multiplication des pains en Jean 6, le Seigneur ne manque pas de découvrir leurs motifs purement égoïstes. Il les invite à travailler « non pour la nourriture qui périt, mais pour la nourriture qui demeure jusque dans la vie éternelle » (v. 27). Repris ainsi quant à leurs motifs courants, ils opposent aussitôt au miracle du Seigneur ce qui s'était passé au désert lorsque leurs pères avaient été nourris pendant quarante ans. Appelant cette nourriture le « pain du ciel », ils peuvent ainsi rabaisser et dénigrer le miracle du Seigneur. Effectivement, ils citent le Psaume 78 : 24 : « Il leur a donné à manger du pain venant du ciel » (Jean 6 : 32). Aussi, leur étonnement est grand d'entendre la réponse du Seigneur, introduite par l'expression « En vérité », répétée deux fois : « Ce n’est pas Moïse qui vous a donné le pain qui vient du ciel » (6 : 32). En effet, il ne leur avait donné que la manne répondant à des besoins toujours renouvelés de leur corps. Le don avait à se répéter chaque jour et n'apaisait que les besoins physiologiques. Au contraire, Il était, Lui, le véritable pain venu du ciel, non comme le don de Moïse qui ne pourvoyait qu'à l'entretien d'une vie périssable, mais le don du Père qui dépassait infiniment celui de Moïse.
Le pain de Dieu... qui donne la vie au monde (Jean 6 : 33)
Aveuglés comme ils l'étaient, les disciples n'ont pas discerné dans la multiplication des pains, une preuve que Jésus était Celui « qui donne du pain à toute chair » (Ps. 136 : 25).
Ayant pris part au sang et à la chair dans l'humble et sainte humanité revêtue, prenant la forme d'esclave dans son abaissement tout en étant en forme de Dieu, voilà le pain du ciel pour ceux dont les yeux sont ouverts (Jean 9 : 36, 38).
Les fils d'Israël n'étaient pour rien dans le don de la manne - quel motif avaient-ils fourni pour l'attirer à eux ? Le monde, ce vaste système en inimitié contre Dieu, n’explique pas davantage le don du Fils par le Père. C'est en ceci que l'amour de Dieu a été manifesté. En outre, Celui que nous avons reçu comme notre vie (v. 47) est en même temps la nourriture propre à l'entretenir.
Pour eux également Moïse soulignera, lorsqu'ils seront parvenus au Jourdain, que la manne fut la seule nourriture qui les soutint pendant la traversée du désert : « Je vous ai conduits quarante ans par le désert... Vous n'avez pas mangé de pain, et vous n'avez bu ni vin ni boisson forte, afin que vous connaissiez que moi, l'Eternel, je suis votre Dieu » (Deut. 29 : 5-6). « Et tu les entretins quarante ans dans le désert : ils ne manquèrent de rien » (Néh. 9 : 21). Hélas ! regrettant bientôt l'Egypte et ses ressources, leurs cœurs encore « séduits » les portent à mépriser la manne et ils vont jusqu'à l'appeler « un pain misérable » (Nom. 21 : 5). En même temps qu'Il leur assurait l'eau du Rocher qui les suivait, Dieu nourrissait son peuple et lui donnait chaque jour des forces nouvelles. En dehors de la manne, il n'y avait rien au désert. Le monde non plus n'a rien pour nourrir ou fortifier l'enfant de Dieu ! Aucun mélange avec les ressources du monde n'est possible pour développer la vie du croyant. De même, tout est de Dieu pour la communiquer. C'est Christ et rien d'autre !
Le pain du ciel, qui rassasie,
Est devenu notre aliment ;
En Jésus nous avons la vie
Qui demeure éternellement.
La « manne cachée » (Apoc. 2 : 17)
Nous sommes bien obligés de reconnaître que l'affaiblissement du témoignage que nous rendons n'a pas d'autre cause que l'introduction du monde dans notre vie. Quelqu'un a justement dit : Si le monde n'est pas un désert pour notre cœur, c'est notre cœur qui devient un désert pour le Seigneur (voir 1 Jean 2 : 15).
N'est-il pas significatif à cet égard que la récompense du vainqueur de Pergame (cette assemblée qui habite dans le monde), soit la « manne cachée » ? Cette manne était quelque chose de menu, de grenu et descendant sur la terre, elle n'avait cependant aucun contact avec elle (Nom. 11 : 9). Elle parle de l'humiliation de Jésus lorsqu'Il prit place dans ce monde - un petit enfant emmailloté, couché dans une crèche ! Mais Lui dira : « Vous êtes d'en bas ; moi, je suis d'en haut » (Jean 8 : 23).
Chacun recueillait la manne en proportion de ce qu'il pouvait manger et cela avant que le soleil soit chaud. Que ce soient les pères, les jeunes gens, ou les enfants, aucun d'eux n'aurait pu trouver les forces nécessaires à la journée de marche sans cette ration de pain du ciel. Soulignons qu'aucune provision n'était possible, il fallait la ramasser chaque matin.
C'est Christ, l'homme céleste, « le Fils de l'homme qui est dans le ciel » (Jean 3 : 13), bien que marchant sur la terre. Le Saint Esprit prend plaisir à nous entretenir de Lui, nous montrant au désert toute la gloire morale qui brille dans son chemin d'abaissement. N'ayant ni forme, ni éclat, homme de douleurs, Il a connu toutes nos peines, apprenant l'obéissance « par tout ce qu'Il a souffert » (Héb. 5 : 8). En même temps, Il est l'homme de l'inépuisable charité, allant de lieu en lieu, faisant du bien à tous (Act. 10 : 38), malgré « une telle contradiction de la part des pécheurs contre lui-même » (Héb. 12 : 3). Sur Lui, dont chaque mouvement est à la gloire de Dieu, le ciel s'ouvre, la voix du Père se fait entendre : « Tu es mon Fils bien-aimé ; en toi j'ai trouvé mon plaisir » (Marc 1 : 11). Quel repos pour Dieu que cet Objet pour son cœur ! C'est à ce repos que nous sommes conviés, et le Saint Esprit lie précisément dans ce même chapitre le sabbat (le repos) au don de la manne (Jean 6 : 2).
Ayant traversé toutes les souffrances, accomplissant la parole du prophète : « Lui-même a pris nos infirmités et a porté nos maladies » (Matt. 8 : 17), Il est à même, en ce qu'Il a souffert lui-même, étant tenté, de secourir ceux qui sont tentés (Héb. 2 : 18). Cœur humain du Sauveur qui n'a côtoyé aucune souffrance sans y étendre le baume de son incomparable sympathie !
Bientôt, loin de la terre, là où Il nous attend, nous L'aurons à jamais dans le souvenir de ce qu'Il fut ici-bas : un plein « omer » (2,4 litres) de manne gardée dans une cruche d'or (Ex. 16 : 32), non pour être mangée mais contemplée dans son inflétrissable valeur. En sainte humanité glorifiée - l'offrande de gâteau qui accompagnait l'holocauste continuel avait la même mesure (Nom. 28 : 5) - après avoir souffert et vaincu la mort, ressuscité par la gloire du Père, Il va nous apparaître tout brillant de majesté !
Oh ! félicités ineffables !
Voir de près tes traits adorables
Et t’être enfin rendus semblables,
Divin Sauveur.
D’après P. Ft – « Messager Evangélique » (1976 p. 316-321)
A suivre