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Les textes formels

             Est-ce un principe fâcheux de demander un texte formel ? Je le crois. On est heureux d'en avoir, assurément, mais il me semble clair que, si j'ai pu saisir la pensée et comprendre la volonté de Dieu, je dois faire sa volonté et suivre sa pensée sans pouvoir toujours invoquer un texte formel. Très souvent des chrétiens qui aiment, sur quelque point, à faire leur propre volonté, demandent un texte formel alors que la volonté de Dieu est très claire et parfaitement évidente ; en réalité, ils cherchent à « justifier » leur désobéissance en arguant de l'absence d'un texte formel.

            S'il n'y a qu'un texte formel qui oblige - le fait-il d’ailleurs de nos jours ? -, aucune place n'est laissée pour du progrès dans la spiritualité. « Pour marcher d’une manière digne du Seigneur » et «  pour lui plaire à tous égards », nous devons être « remplis de la connaissance de sa volonté, en toute sagesse et intelligence spirituelle » (Col. 1 : 9-10) ; or, il n'y a aucune place pour cet exercice, s'il ne s'agit que d’appliquer des textes formels.
            Nous sommes appelés à « discerner les choses excellentes » (Phil. 1 : 10), et il est pour moi parfaitement clair que, si je vois ce qu'est la volonté de Dieu, je suis tenu de l'accomplir, même s'il n'y a pas de texte précis qui me le demande. Un passage qui rend cette volonté claire m’engage à la « faire » (Héb. 13 : 21), sans avoir à rechercher dans la Parole un texte formel.
            En Actes 13 : 46-47, Paul a pris la prophétie du chapitre 49 d'Esaïe (v. 6) pour diriger sa conduite, comme un commandement, là où il n'y avait aucun texte formel. On me dira qu'il était inspiré. Sans doute comprenait-il la Parole mieux que nous-mêmes, mais ce n'est pas un motif pour que je désobéisse à la volonté de Dieu quand la Parole me la montre.
            Voici un exemple pour faire comprendre ce qu'il y a de mauvais dans ces principes. Un enfant entend son père prier pour lui dans une chambre de la maison ; il demande à Dieu, en épanchant son cœur devant Lui, de garder son enfant de la mauvaise société et des compagnons qui l'entraînent dans le mal. Le fils comprend alors très bien qu'il s'agit de sa fréquentation d'une salle de jeux où ses parents l'engagent à ne pas aller. Il répond : Il me faut une défense formelle. Que dirait un chrétien, un homme qui a un cœur sensible, en voyant cet enfant demander une parole formelle alors qu’il sait très bien ce que son père veut dire ?
            Au fond, la demande d’un texte formel est faite selon ce principe : Tout ce qui n'est pas défendu est permis, et, si je n'ai pas un texte formel, un commandement, je n'ai rien dans la Parole qui me dirige ou m'oblige… Un tel principe ouvre la porte à un flot d'iniquités et d'erreurs qui sont entièrement contraires à la pensée et à la volonté de Dieu. Celui qui est instruit par le Père les trouvera révélées dans la Parole, sans qu'il y ait un texte formel qui en parle. Je ne peux que dire que je regarde ce principe comme très préoccupant. Je suis heureux d'avoir un texte formel, mais prêt à obéir si la volonté de Dieu est claire par la Parole sans qu'il y en ait un.
            On peut comprendre maintenant pourquoi, pour ma part, je repousse le principe qui sanctionne la demande d'un texte formel, et qui dit que, sans un tel texte, on n'est pas tenu d'obéir…
            Je me souviens d’un cas où l'on a voulu chercher un texte formel pour justifier la discipline. Et certains ont cité le passage 1 Corinthiens 5 : 11, comme une liste complète des personnes qui, par leur conduite, méritaient l'excommunication. Or voici que ni un meurtrier, ni un voleur ne s'y trouvent. On peut me dire : Mais il est dit : « Otez le méchant du milieu de vous-mêmes » (v. 13). D'accord. Cela suffit. Mais vous n'avez pas de texte formel qui décidera de l’importante question : Qui est un méchant ? Il faut le jugement spirituel.
            J'en ai assez dit. Il y a des cas clairs pour tout le monde, où la Parole de Dieu s'exprime positivement ; mais limiter l'obéissance à ces cas-là, lorsque la volonté de Dieu est suffisamment connue, n'est pas agir dans la crainte de Dieu.
            Supposez le cas de quelque chrétien ou chrétienne qui veut épouser une jeune fille « mondaine » ou un homme « mondain ». C'est une preuve que le cœur est éloigné de Dieu, qu’il trouve son plaisir ailleurs qu'en Christ, et c'est la source de bien des misères. Je fais mon possible pour détourner cette personne de son projet. Elle me dit : Montrez-moi un texte formel qui le défende. Je cite comme preuve le principe : « Ne vous mettez pas sous un joug mal assorti avec les incrédules » (2 Cor. 6 : 14). Comme principe, le passage est de toute force pour indiquer où est le mal ; il montre clairement l'impossibilité de glorifier le Seigneur ou de jouir ensemble de sa communion, là où le lien le plus étroit devrait exister. Mais, hélas, on ne veut pas y voir un texte formel qui parle du mariage et l'on passe outre.
            Ne recevoir que des textes formels, c'est nier la nécessité et l'avantage de la spiritualité pour obéir à Dieu et comprendre Sa volonté. On me dira : Mais on nous abandonne ainsi à la fantaisie des hommes. Je réponds : Nullement. Le Saint Esprit de Dieu conduit les chrétiens, les forme à l'image du Seigneur, leur fait faire toutes choses au nom du Seigneur Jésus. Christ est gravé par lui dans leurs cœurs, pour les faire marcher d'une manière digne du Seigneur. « Si quelqu’un veut faire la volonté de celui qui m’a envoyé, il connaîtra, au sujet de cette doctrine, si elle vient de Dieu », a dit Jésus (Jean 7 : 17). Ensuite, tout jugement spirituel, présenté comme étant la pensée de Dieu, doit être contrôlé par la Parole écrite. Mais il reste toujours vrai qu'il y a une spiritualité qui discerne ce qui est excellent, des « sens exercés » qui discernent le bien et le mal. La dénégation de l'Esprit est aussi fausse que le refus de la Parole écrite; on doit reconnaître et l'un et l'autre. Celui qui prétend se servir de la Parole sans l'Esprit nie la vérité du christianisme ! Celui qui est enseigné de l'Esprit trouvera, dans la Parole écrite, la connaissance de la volonté de Dieu, là même où il n'y a pas de texte qui l'exprime formellement. Le Seigneur prouve la résurrection par ces paroles : « Je suis le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob ». Nous n'avons, dira-t-on, ni sa sagesse, ni son autorité. Assurément non ; mais là où j'ai trouvé sa volonté, je dois obéir. La spiritualité décidera, en tenant compte de tout ce que la Parole contient. Dieu jugera les écarts et légitimera la conduite de ceux qui se montrent fidèles.

            J'ai exprimé ma pensée et je ne cherche pas la controverse, autrement j'aurais bien des choses à relever. Je dis que là où la volonté de Dieu est certaine, c'est un mauvais principe que de demander un texte formel. On voudrait échapper ainsi à l'obéissance et à la fidélité !           

                         J. N. Darby – d’après un article paru dans le « Messager Evangélique » (1952)