DANIEL, LE PROPHÈTE (7b)
L’interprétation des visions (v. 15-28)
Interprétation générale
Interprétation de la vision de la quatrième bête
On remarquera qu'il y a en fait deux interprétations :
- une générale (v. 17-18)
- une plus spécifique (v. 23-27) en réponse à la question de Daniel au sujet de la quatrième bête. Toutes les deux doivent être considérées.
Dans l'interprétation générale, l'ange dit : « Ces grandes bêtes, qui sont quatre, sont quatre rois qui surgiront de la terre ; et les saints des lieux très-hauts recevront le royaume, et posséderont le royaume à jamais, et aux siècles des siècles » (v. 17-18). Cette explication a été déjà largement traitée par anticipation, cependant il y a deux ou trois points qui appellent encore une remarque.
Les quatre rois sont vus comme représentant leurs différents royaumes, à savoir, Babylone, la Perse, la Grèce et Rome ; et comme cela a été dit précédemment, ils comprennent, par conséquent, leurs dynasties ou successeurs jusqu'à la fin de leurs empires respectifs. Au verset 3, il est dit de ces rois, les bêtes, qu'elles montent de la mer, tandis qu'ici elles sont décrites comme surgissant de la terre. Dans le premier passage, elles sont vues à l'occasion de leur apparition et de l'acquisition qu'elles font de la puissance gouvernementale, élevant leur trône des vagues agitées des peuples ; dans notre verset, elles sont vues plutôt dans leur origine, « de la terre », en contraste avec Celui qui viendra des cieux pour établir sa puissance royale. Ces quatre remplissaient donc tout l'intervalle à partir des jours du prophète - car Babylone existait encore - jusqu'à la venue de Christ en gloire. De ce fait, il est ajouté : « et les saints des lieux très-hauts recevront le royaume… » ; il n'en existe point d'autre après lui, car ils le posséderont « aux siècles des siècles ».
Qui sont donc ces « saints des lieux très-hauts » ? Le terme « très-haut » est employé aux versets 22, 25 et 27, outre le verset 18 ; mais à part le verset 25, où le terme est employé pour Dieu lui-même comme le titre sous lequel il sera connu à l'avenir, l'expression est au pluriel, d'où notre traduction de saints des « lieux très-hauts ». Et il ne peut guère être mis en doute que le terme « lieux célestes » dans les Ephésiens est tiré de cette expression de Daniel. Il est à peine nécessaire de dire qu'une signification beaucoup plus vaste doit être rattachée à ces mots dans les Ephésiens que dans Daniel, du fait de la vérité présentée dans cette épître qui développe les conseils éternels de Dieu pour la gloire de son Fils bien-aimé et pour la bénédiction des saints en Lui. Toutefois leur portée dans les deux passages est la même en ce sens qu'ils parlent d'une sphère céleste, une sphère en dehors du monde, à laquelle appartiennent certains saints. Nous répétons donc la question : qui sont les saints décrits ici ? Dans le sens le plus large et le plus général, comme on peut facilement le déduire de l'épître aux Ephésiens, y sont inclus tous les croyants depuis la Pentecôte jusqu'à la venue de Christ, tous ceux qui sont unis à Christ par le Saint Esprit, et qui composent, par conséquent, Son corps. Mais on ne pourrait guère s'attendre à trouver une telle anticipation et révélation du « mystère » (Eph. 3 : 3) dans le prophète Daniel. Bien que, d'un côté, ils pouvaient être dans la pensée de l'Esprit (car ceux qui souffrent avec Christ régneront avec Lui et ne doivent donc pas être exclus par le lecteur chrétien) il faut cependant chercher une autre classe à laquelle la description s'applique. Si maintenant nous passons un instant à Apocalypse 20, nous verrons que deux compagnies sont ajoutées à la première résurrection, « ceux qui avaient été décapités pour le témoignage de Jésus, et pour la Parole de Dieu ; et ceux qui n'avaient pas rendu hommage à la bête (la quatrième bête de notre chapitre) ni à son image, et qui n'avaient pas reçu la marque sur leur front et sur leur main ; et ils vécurent et régnèrent avec le Christ mille ans » (v. 4). Durant les jours terribles de la domination de la « petite corne », ces saints avaient refusé de reconnaître sa puissance, car ils reconnaissaient et adoraient le Dieu des cieux, confessant qu'à Lui appartient la domination tant dans les cieux que sur la terre, et que « les cieux dominent » (4 : 26). De ce fait ils sont aussi nommés « saints des lieux très-hauts » en vue de ce qui les attendait et de l'honneur spécial qui leur serait accordé. Bien qu'étant sur la terre, ils appartenaient aux cieux, car au lieu d'être préservés pour des bénédictions terrestres sous le règne de leur glorieux Messie, une portion plus brillante les attendait : régner avec Lui dans le royaume. Et c'est à ceux-ci qu'il est spécialement fait allusion dans notre verset, bien que la constatation générale, lorsqu'il est dit que les saints des lieux très-hauts recevront le royaume, puisse inclure tous les saints célestes.
Daniel s'enquiert ensuite plus particulièrement de la quatrième bête ; et on remarquera que tout en répétant ce qu'il avait vu, comme nous l'avons dans les versets 7 et 8, il ajoute deux choses non mentionnées auparavant. Il dit : « Je regardais ; et cette corne fit la guerre contre les saints, et prévalut contre eux, jusqu'à ce que l'Ancien des jours vint, et que le jugement fut donné aux saints des lieux très-hauts, et que le temps arriva où les saints possédèrent le royaume » (v. 21-22). L'explication de ces adjonctions viendra lorsque nous considérerons l'interprétation pleine d'autorité donnée à Daniel ; mais nous attirons l'attention sur elles ici pour illustrer le fait qu'il n'y a pas de simples répétitions dans l'Ecriture. La relation, ou l'objet, est différent, ou comme ici, l'intérêt est rehaussé par une révélation supplémentaire, de sorte qu'aucun passage, qui paraît semblable à un autre, ne devrait jamais être laissé de côté avec légèreté. La présence d'une apparente répétition devrait inciter à une étude d'autant plus approfondie, pour recevoir la lumière nouvelle qui nous est communiquée par là.
Interprétation de la vision de la quatrième bête
Puis il nous est dit que « les dix cornes... ce sont dix rois qui surgiront du royaume » (v. 24). C'est là véritablement le point crucial de l'interprétation, car la question se pose, vu que le verset 23 s'applique sans aucun doute au passé, de savoir si ces dix rois sont passés ou futurs. Certains tiennent fermement à ce qui est appelé l'interprétation historique et maintiennent que la prophétie a ainsi été accomplie. Pour citer un interprète représentatif de cette école, M. Elliott dit qu'on trouve les dix rois dans « les Anglo-Saxons, les Francs, les Alamans, les Burgondes, les Visigoths, les Suèves, les Vandales, les Hérules, les Bavarois et les Ostrogoths : dix au total » ; et il échafaude là-dessus pour prouver « la relation de ces dix royaumes barbares primitifs avec les évêques de Rome comme leur tête ecclésiastique et spirituelle, en accord avec le symbole des dix cornes de l'Apocalypse, surgissant de la huitième tête de la Bête » (Horae Apocalypticae, vol. III, p. 124-134, 4ème édition).
L'objection décisive à cette théorie réside dans le fait qu'une fois ce quatrième royaume jugé, il est immédiatement suivi et remplacé par le royaume du Fils de l'homme (v. 13, 14, 26, 27 ; comp. aussi 2 : 43-44). Or quel événement du passé, on peut bien se le demander, pourrait répondre, même au moindre degré, à celui dont il est parlé dans les passages ci-dessus ? Ce n'est en fait qu'en spiritualisant le royaume du Fils de l'homme et en l'interprétant comme étant le christianisme, que l'on parvient à obtenir quelque apparence de preuve pour appuyer une telle théorie. Mais même ainsi, qu'y a-t-il dans le développement public du christianisme qui corresponde à la domination universelle, prédite dans la Parole du Fils de l'homme, devant qui tomberont tous les rois et que toutes les nations serviront ? Si l'on acceptait une telle explication, toutes les vues imaginables pourraient être lues dans les paroles de l'Ecriture. Mais ce n'est pas là la manière de l'Esprit de Dieu. Il parle clairement et avec précision, et quand il se sert du terme « Fils de l'homme », et décrit l'étendue et la gloire de Son royaume, et cela comme faisant suite aux gouvernements de la terre, ceux qui étudient la Parole avec droiture peuvent aisément affirmer qu'il ne fait allusion ni à l'Eglise ni au christianisme, mais au royaume que Christ établira dans ce monde dans un jour futur, lorsqu'il reviendra avec ses saints en gloire.
Ces dix rois sont donc futurs et ils indiquent la forme particulière de la dernière phase du quatrième royaume : il y aura dix royaumes en Europe occidentale, confédérés sous une tête impériale. Ce fait est préfiguré dans les dix orteils de la statue que vit Nebucadnetsar et il est pleinement établi dans l'Apocalypse (17 : 12-13). Tout en insistant sur cela comme étant la pensée du passage que nous avons devant nous, on peut bien concevoir que dans le passé, il y a eu des ombres de cet accomplissement final ; mais l'erreur est de vouloir faire de ces ombres l'accomplissement lui-même, au lieu de les regarder comme des poteaux indicateurs sur le chemin pour indiquer que la réalisation complète est encore à venir.
Non seulement il y aura ces dix rois, mais « un autre surgira après eux ; et il sera différent des premiers ; et il abattra trois rois. Et il proférera des paroles contre le Très-haut, et il consumera les saints des lieux très-hauts, et il pensera changer les saisons et la loi, et elles seront livrées en sa main jusqu'à un temps et des temps et une moitié de temps » (v. 24- 25). C'est la petite corne des versets 8, 20 et 21 ; mais elle est absolument distincte, comme nous l'expliquerons plus loin, de la petite corne du chapitre 8 : 9.
La corne de notre chapitre est en relation avec l'Empire romain en Europe occidentale, où les dix rois exerceront leur souveraineté dans les limites, d'une manière générale, de l'ancien Empire romain en Europe. On peut facilement tracer ces limites dans tout atlas biblique ou sur les cartes contenues dans la plupart des Bibles ; on comprendra alors la signification du terme « Europe occidentale ». La plus grande partie de l'Allemagne, la Scandinave et la Russie d'Europe, n'ont jamais été dans le territoire de l'Empire romain.
La corne du chapitre 8 est tout autre. Elle aura son siège en Syrie ; elle est souvent mentionnée dans l'Écriture comme étant le Roi du nord.
Il convient de relever diverses particularités de la petite corne de notre chapitre afin de pouvoir l'identifier. Tout d'abord, elle surgit après les dix rois et elle est différente de ceux-ci, bien qu'il ne soit pas établi en quoi elle diffère d'eux. Deuxièmement, il est dit qu'elle « abattra trois rois », c'est-à-dire trois d'entre les dix qui sont sur la scène quand elle surgit. Ensuite, il est évident qu'elle acquiert la puissance sur tout l'Empire romain, car c'est « sa domination » qui est enlevée quand le jugement s'assied. Enfin, les choses qui lui sont attribuées au verset 25 sont exactement les mêmes que celles qui sont imputées à la première bête d'Apocalypse 13, dans les versets 5-7. La conclusion s'impose ainsi que la petite corne n'est personne d'autre que la tête de l'Empire romain reconstitué aux derniers jours en Europe occidentale ; et cette conclusion est encore renforcée par la constatation d'Apocalypse 17, que les dix rois « ont une seule et même pensée, et ils donnent leur puissance et leur pouvoir à la Bête » (v. 13). La petite corne surgit donc après la formation des dix royaumes, puis en ayant soumis trois, soit par des actions militaires soit par d'autres moyens, les sept autres sont amenés, conjointement avec les trois royaumes soumis, à s'unir en une vaste confédération, dont la petite corne devient la tête impériale. Si on lit sous cet angle Apocalypse 13 : 1-8 et 17, toute la position de la petite corne sera plus facilement comprise. Si donc la petite corne de ce chapitre préfigure la tête de l'Empire romain revenu à la vie dans les derniers jours, il convient de se souvenir que l'Antichrist existera à la même époque, qu'il sera associé à la Bête romaine, qu'il exercera « tout le pouvoir de la première bête devant elle » et fera « que la terre et ceux qui habitent sur elle rendent hommage à la première Bête dont la plaie mortelle avait été guérie » ; il les induira aussi à lui faire une image pour lui rendre hommage (Apoc. 13). Il sera ainsi en toutes choses identifié moralement avec la bête occidentale, et c'est pourquoi il partagera le même sort, comme étant son prophète (Apoc. 19, 20).
Le caractère moral de la petite corne nous est ensuite présenté dans les mots : « Et il proférera des paroles contre le Très-haut » (v. 25). Non seulement, comme c'est le cas de tout homme irrégénéré, son esprit charnel est inimitié contre Dieu, mais dans sa folle impiété, il va jusqu'à se placer sur le terrain du défi ouvert (comp. Apoc. 13 : 5, 6). Il s'ensuit – car celui qui hait Dieu doit aussi haïr Son peuple – qu'« il consumera les saints des lieux très-hauts » (il « fit la guerre contre les saints, et prévalut contre eux » - v. 21), dans son effort présomptueux d'ôter le nom de Dieu de dessus la face de la terre (voir Apoc. 13 : 7 ; 14 : 12, 13). Dieu permettra par là même que la patience de son peuple terrestre soit mise à l'épreuve ; car jusque-là, ils ne sauront pas que Jésus de Nazareth est leur Messie promis. Ils crieront au Dieu de leurs pères, et chercheront auprès de lui le secours, comme nous le voyons dans les Psaumes qui traitent de cette période ; mais ce n'est pas avant que le Seigneur apparaisse des cieux qu'ils regarderont à Celui qu'ils ont percé et qu'ils auront les yeux ouverts pour discerner, comme Thomas, que le Jésus qui a été une fois crucifié est leur Seigneur et leur Dieu. Cela nous aide à comprendre pourquoi il permet qu'ils tombent à cette époque entre les mains de leurs ennemis, en châtiment et pour être purifiés. Mais bien que leur ennemi, comme instrument de Satan, puisse les cribler, pas un seul grain de blé ne tombera en terre. Ce serait impossible, car, pour citer une autre illustration, les cheveux de leurs têtes seront tous comptés.
La suite du verset 25 montre clairement qui sont ces saints. Cette petite corne pensera « changer les saisons et la loi, et elles seront livrées en sa main ». A cette époque, le temple juif aura été rebâti, bien que dans l'incrédulité ; et en relation avec ce temple, les ordonnances de la loi et les différentes fêtes auront été rétablies. Ce sont là « les saisons et la loi » que ce roi pensera changer, c'est-à-dire, abroger, car leur existence même, quel que soit l'état du peuple qui les observe, constituera un témoignage à l'existence de Dieu ; or cela sera insupportable à celui qui désire occuper lui-même la place de Dieu. Et il réussira à les abolir ; car elles (non pas les saints, mais les saisons et la loi) seront livrées en sa main. Antiochus Epiphane, tel qu'il est connu dans l'histoire, et dont nous trouverons des traces au chapitre 11, fit la même chose et profana le temple ; et ses exploits seront répétés d'une manière encore plus terrible par cette petite corne aux temps de la fin. Mais celui qui permettra que son peuple soit jeté dans la fournaise de feu ardent de la persécution, fixera la limite de la puissance de l'ennemi : ce ne sera que pour un temps et des temps et une moitié de temps, les 1260 jours, les quarante-deux mois, les trois ans et demi du livre de l'Apocalypse. Notre Seigneur parle du commencement de cette période lorsque, citant Daniel, il dit : « Quand donc vous verrez l'abomination de la désolation, dont il a été parlé par le prophète Daniel, établie dans le lieu saint (que celui qui lit comprenne), alors, que ceux qui sont en Judée s'enfuient dans les montagnes… » (Matt. 24 : 15 ; Dan. 12 : 11 ; comp. ch. 9 : 27).
A la fin de cette période déterminée, « le jugement s'assiéra ; et on lui ôtera la domination, pour la détruire et la faire périr jusqu'à la fin » (v. 26). Comme cette session de jugement avait été pleinement révélée au prophète, l'interprétation n'y fait allusion qu'en passant. C'est un jugement mené par l'Ancien des jours, de son trône de feu, avec toute la majesté qui s'y rattache, accompagné de ses myriades d'anges (v. 9-10). Nous apprenons en outre, et cela prouve également que l'Ancien des jours est le Fils de l'homme, que les saints qui viennent avec Christ, les saints célestes, lui seront associés dans le jugement (v. 22 ; comp. Ps. 149 : 6-9) de ce jour, lorsque Dieu prendra publiquement et formellement connaissance des actes et des paroles de cet audacieux ennemi. C'est à cet effet que les livres seront ouverts (v. 10), les livres qui contiendront les rapports infaillibles des actes de ce pécheur impie, et la sentence sera prononcée selon les exigences de la gloire de Celui qui sera assis sur son saint trône.
L'exécution de la sentence est rapportée ainsi : « Et on lui ôtera la domination, pour la détruire et la faire périr jusqu'à la fin » (v. 26). Si l'on ajoute à cette description ce qu'on trouve au verset 11, on verra ce que le jugement a été sur sa personne - à strictement parler, il n’est question là que du « corps » de la Bête. Les « grandes paroles que la corne proférait » sont néanmoins mentionnées comme étant le motif du jugement. Si nous passons un instant à Apocalypse 19, nous trouvons quelques informations supplémentaires. En relation avec le même jugement, nous lisons que tant la bête que le faux prophète furent jetés vifs dans l'étang de feu embrasé par le soufre (v. 20). Dépouillé de sa domination, ayant, comme Belshatsar, été pesé à la balance et ayant été trouvé manquant de poids, il subit avec le faux prophète la vengeance du feu éternel et il y sera jeté vivant. La prière de David trouve ainsi son accomplissement : « Que Dieu se lève, que ses ennemis soient dispersés, et que ceux qui le haïssent s'enfuient devant lui. Comme la fumée est dissipée, tu les dissiperas ; comme la cire se fond devant le feu, les méchants périront devant Dieu » (Ps. 68 : 1-2) ; ou comme il le dit ailleurs : « Que la mort les saisisse ! qu'ils descendent vivants dans le shéol ! Car la malice est dans leur demeure, au milieu d'eux » (Ps. 55 : 15).
Après que le jugement aura été exécuté sur la petite corne et que la domination lui aura été ôtée, pour la détruire et la faire périr jusqu'à la fin, « le royaume, et la domination, et la grandeur des royaumes sous tous les cieux, seront donnés au peuple des saints des lieux très-hauts. Son royaume est un royaume éternel, et toutes les dominations le serviront et lui obéiront » (v. 27). C'est là le royaume du Fils de l'homme qui, à la suite du jugement et de l'anéantissement du dernier des quatre empires mondiaux, est établi sur la terre. Aux versets 13 et 14, nous avons son investiture. Comme Fils de l'homme, il reçoit le royaume de l'Ancien des jours. Déjà nous voyons Jésus, qui a été fait un peu moindre que les anges à cause de la passion de la mort, couronné de gloire et d'honneur. Dans la scène placée devant nous, toutes choses sont remises entre ses mains pour Lui être assujetties ; car Il doit régner jusqu'à ce que tous ses ennemis soient mis sous ses pieds. Dans le verset 27 toutefois, c'est le « peuple des saints des lieux très-hauts » qui est mis en évidence et dont il est dit qu'ils reçoivent le royaume. Pourtant ce n'est pas indépendamment de Christ, vu qu'à la fin du verset, il est dit : « Son royaume (c'est-à-dire celui de Christ) est un royaume éternel, et toutes les dominations le serviront et lui obéiront ». C'est son royaume, seulement dans sa grâce Il se plaît à s'associer le « peuple des saints des lieux très-hauts ». Qui sont-ils donc ? Comme cela a déjà été indiqué au verset 18, il est dit des « saints des lieux très-hauts » qu'ils prennent le royaume ; et au verset 22, « les saints » le possèdent, tandis qu'ici c'est le « peuple des saints des lieux très-hauts ». Il y a une raison à cette expression. Elle indique les Juifs ; et ils sont nommés ainsi comme étant, durant le règne millénaire, en relation avec les saints des lieux très-hauts, sinon dépendants d'eux. Ces derniers règnent avec Christ ; par les premiers, Christ soumettra les nations et exercera sa souveraineté sur la terre ; car « l'Éternel enverra de Sion la verge de ta force : Domine au milieu de tes ennemis ! » (Ps. 110 : 2 ; voir aussi Jér. 51 : 19-21 ; Es. 60 : 10-16).
Trois classes sont donc spécifiées dans ce chapitre. Les « saints des lieux très-hauts », au verset 22, sembleraient être les saints célestes ; aux versets 18 à 25, la même expression, sans exclure les saints célestes, se réfère spécialement aux saints sur la terre pendant la domination de la petite corne, qui regardent à Dieu et le reconnaissent comme le Dieu des cieux et comme la seule source d'autorité, soit dans les cieux, soit sur la terre. Ils sont considérés, à cet égard, comme appartenant aux cieux et, comme nous l'apprenons par Apocalypse 20, ils auront finalement part à la première résurrection et régneront avec Christ mille ans. Enfin, le peuple des saints des lieux très-hauts, sont les saints terrestres, l'ancien peuple de Dieu, qui dans la grâce et la fidélité de leur Dieu, portés au travers de toutes leurs épreuves et peines, posséderont finalement le royaume et la domination sur la terre sous le règne de leur Messie exalté et glorifié.
Le prophète ajoute : « Quant à moi, Daniel, mes pensées me troublèrent beaucoup, et ma couleur fut changée en moi. Mais je gardai la chose dans mon coeur » (v. 28). Si c'est un honneur inexprimable d'être fait le dépositaire des pensées divines, le vase doit souffrir et d'autant plus que le moment de les communiquer n'était pas encore arrivé. A cette période, Daniel était au milieu de toute la splendeur et la magnificence de l'empire de Babylone, dont l'autorité s'étendait jusqu'aux bouts de la terre, et dont la stabilité était incontestée. Mais le rouleau de l'avenir avait été déployé sous son regard étonné, et il voyait dans la vaste perspective qui s'étendait loin dans les siècles futurs, une succession de guerres, de conflits, de tyrannies et d'oppressions, avant que Celui qui avait quitté son trône à Jérusalem n'intervienne, ne donne la souveraineté de la terre à l’Objet de toutes les espérances juives et ne rétablisse son peuple bien-aimé en bénédiction, sous le règne de paix et de gloire du Messie. Daniel avait véritablement vu les visions de Dieu, mais elles avaient amené la mort dans sa propre âme, et par là, il était divinement qualifié pour être le canal de ces révélations divines (comp. 2 Cor. 4 : 7-18).
D’après E. Dennett