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LA PREMIERE EPITRE AUX CORINTHIENS (9)
 
 
 

CHAPITRE 9          

Ministère et salaire (v. 1 à 27)

  
                        L'ouvrier et son salaire (v. 1-14)

            Dans ce chapitre, Paul semble changer de sujet, mais en réalité, il présente aux Corinthiens un exemple pour l'enseignement qu'il vient de donner, savoir qu'ils devaient user de grâce, et non pas insister sur leurs droits. Il applique à lui-même le principe de considération affectueuse qu'il a placé devant eux. Dieu avait ordonné que ceux qui annoncent l'évangile puissent aussi vivre de l'évangile, mais Paul n'usait pas de ce droit à Corinthe, afin de ne pas être une pierre d'achoppement pour ces croyants.
            Il mentionne premièrement (v. 1-2) sa légitimité apostolique qui, à Corinthe, était contestée par quelques-uns (2 Cor. 11 : 5 ; 12 : 11-12). En tant qu'apôtre, il ne connaissait que l'autorité du Seigneur qui l'avait appelé ; dans ses rapports avec les autres croyants, il était libre : il n'était soumis à aucune autorité humaine. Une condition préalable pour le ministère des apôtres était qu'ils devaient avoir connu personnellement le Seigneur et avoir été témoins de sa résurrection (voir Act. 1 : 21-22). Lorsque le Seigneur est ressuscité d'entre les morts, Paul n'était cependant pas encore converti, et il ne l'a probablement pas connu personnellement durant sa vie sur la terre. Mais le Seigneur ressuscité et glorifié lui était apparu aussi, de sorte qu'il pouvait se nommer, comme le dernier, dans la liste des sept témoins de la résurrection de Christ au chapitre 15 (v. 4-8). Si d'autres croyants, qui ne connaissaient pas personnellement l'apôtre, pouvaient mettre en doute son apostolat, les Corinthiens, eux, n'en avaient pas le droit. C'est bien par Paul qu'ils avaient été amenés à la foi au Seigneur Jésus et ils étaient donc la confirmation vivante de son apostolat (comp. 4 : 15 ; 2 Cor. 3 : 2-3).
            Si donc il y avait à Corinthe des gens qui voulaient indûment exiger une justification de sa part, il répliquait : « N'avons-nous pas le droit de manger et de boire ? » (v. 3). Devaient-ils, lui et les autres serviteurs du Seigneur, être les seuls auxquels le droit de satisfaire les besoins vitaux pouvait être refusé ? Paul et ses collaborateurs étaient-ils les seuls à ne pas avoir le droit de se marier, tandis que les autres apôtres, tels que Céphas (Pierre) et les frères du Seigneur étaient mariés ? Il nous est dit en Matthieu 8 : 14 déjà que Pierre, considéré par certains à Corinthe comme leur chef de parti (1 : 12), était marié, mais Paul n'était manifestement pas le seul frère travaillant pour le Seigneur qui soit non marié. Les noms des autres ne sont toutefois pas donnés ici.

            Mais quand Paul aborde maintenant au verset 6 son véritable sujet, il mentionne aussi Barnabas qui l'avait accompagné lors de son premier voyage missionnaire. Il semble bien que, contrairement aux autres apôtres, il pourvoyait, comme Paul, à sa propre subsistance dans son service pour le Seigneur. Ces deux serviteurs de Christ devaient-ils être les seuls qui n'aient pas le droit de renoncer à leur profession terrestre afin de travailler librement pour le Seigneur ? Il est possible même que les opposants de l'apôtre prenaient prétexte du fait que seuls lui et Barnabas travaillaient encore pour leur entretien à côté de l'œuvre du Seigneur, pour mettre en doute leur mission divine de semer, vu que visiblement tous les autres serviteurs du Seigneur faisaient usage de leur droit de ne pas travailler !
            Paul et Barnabas avaient évidemment aussi ce droit. C'est ce que l'apôtre explique maintenant à l'aide de trois exemples : le soldat est payé par celui pour qui il combat ; le vigneron mange le fruit de la vigne qu'il a plantée ; le berger se nourrit du lait du troupeau qu'il fait paître (v. 7). Ce principe valable dans la vie ordinaire se trouve cependant aussi dans la loi de Moïse. En Deutéronome 25 : 4, il est écrit : « Tu n'emmuselleras pas le bœuf, pendant qu'il foule le grain ». A côté du sens littéral, ce commandement a – comme presque tout dans l'Ancien Testament (comp. 1 Cor. 10 : 6, 11 ; Gal. 4 : 24) – une portée spirituelle. Paul l'applique, au verset 10, aux serviteurs du Seigneur en empruntant encore deux autres images de la vie quotidienne. L'agriculteur qui laboure le fait dans l'espérance que les semailles seront suivies de la moisson, et ensuite, lors du battage, il espère une abondante récolte qui lui assurera sa subsistance.

            Lorsque Paul et ses compagnons ont annoncé l'évangile à Corinthe, ils ont semé une semence spirituelle. Conformément au principe qui vient d'être énoncé, il n'y avait en fait rien d'extraordinaire, mais au contraire il était normal qu'ils reçoivent en retour de la part des Corinthiens les biens matériels, c'est-à-dire le nécessaire pour la subsistance de leur corps.
            Or ce n'était absolument pas que les Corinthiens aient ignoré cette ordonnance de Dieu et ce droit de ses ouvriers. Ils avaient apporté leur soutien à d'autres frères et, de ce fait, reconnu en même temps qu'il leur était dû. Pourtant combien plus grand était le droit de l'apôtre, que quelques-uns à Corinthe lui refusaient maintenant ! Intentionnellement, Paul n'en avait pas fait usage, afin de ne pas faire obstacle à l'évangile du Christ. Nous lisons en Actes 18 : 1 à 3, que Paul habitait chez un couple de croyants, Aquilas et Priscilla ; comme lui, ils fabriquaient des tentes. Il avait tout de suite discerné les traits de caractère négatifs des croyants à Corinthe, et avait par conséquent renoncé d'emblée à tout soutien matériel de leur part, alors qu'il avait volontiers accepté dès le début l'aide des Philippiens, bien plus pauvres (Phil. 4 : 15).
            Dans les versets 13 et 14, Paul explique encore une fois le principe du soutien matériel des ouvriers du Seigneur en prenant l'exemple des lévites et des sacrificateurs dans l'Ancien Testament. Les lévites, « qui s’occupent du service du temple » se nourrissaient de la dîme que le peuple d'Israël apportait au sanctuaire (Nom. 18 : 24), et les sacrificateurs « qui servent à l'autel » recevaient en outre certaines parties des sacrifices (Lév. 2 : 3 ; 6 : 19 ; 7 : 34). De même, selon la volonté du Seigneur, ceux qui annoncent l'évangile, doivent vivre de l'évangile (Luc 10 : 7). L'évangile, ici, ne désigne certainement pas seulement le message annoncé à ceux qui sont perdus, mais englobe tout le conseil de Dieu, comme en Romains 1 : 15.

                        L'apôtre et son ministère (v. 15-27)

            Lorsque Paul déclare encore une fois au verset 15 ne pas avoir fait valoir son droit de vivre de l'évangile, il ne veut nullement donner l'impression de revendiquer malgré tout un soutien de la part des Corinthiens. Il ne voulait en aucun cas se faire ôter sa gloire. Le motif de sa gloire consistait en ce qu'il respectait les droits des autres, mais ne faisait aucun usage de ses propres droits si cela devait scandaliser quelqu'un.
            Dans leur état d'esprit charnel, les Corinthiens pouvaient bien penser que Paul ressentait comme le plus grand honneur d'être un évangéliste connu. Lui-même en jugeait autrement. Le Seigneur lui avait certes fait un don exceptionnel, mais en même temps, il lui avait aussi donné la mission de l'exercer. Paul n'avait donc aucun motif de se glorifier, mais c'était pour lui une nécessité d'obéir à son Seigneur bien-aimé et d'accomplir son service. S'il ne l'avait pas fait, il aurait désobéi. Les paroles « malheur à moi si je n'évangélise pas », montrent avec quel sérieux Paul considérait la désobéissance. Même si le chrétien n'est pas assujetti à une loi comme le Juif, l'autorité de Dieu n'en est pas moins grande pour lui. Et l'amour pour le Seigneur devrait être un plus grand mobile pour obéir qu'une simple soumission.
            En accomplissant son ministère de plein gré et volontiers, Paul savait que le Seigneur le récompenserait, Lui qui avait dit dans la parabole des talents : « Bien, bon et fidèle esclave ; tu as été fidèle en ce qui est peu, je t'établirai sur beaucoup » (Matt. 25 : 23). Néanmoins l'absence d'ardeur et de joie pour le service ne l'aurait pas excusé. Il aurait dû alors se souvenir que le Seigneur lui avait confié ce ministère comme une administration. Il ne pouvait pas simplement s'y soustraire (comp. 4 : 1, 2).

            Ce que Paul avait désigné comme étant « les motifs que j’aurais de me glorifier » au verset 15, il le nomme au verset 18 « son droit dans l’évangile ». Celui-ci consistait en ce qu'il rendait l'évangile « exempt de frais ». Par ces paroles, Paul résume ce qu'il veut faire comprendre aux Corinthiens dans tout ce chapitre. En tant qu'apôtre, il avait le droit de vivre de l'évangile. Mais afin de n'être une pierre d'achoppement pour personne, il avait pris sur lui de renoncer à ce droit et de pourvoir lui-même à son entretien. Sa récompense, c'était de savoir que personne ne pouvait lui imputer des motifs déloyaux dans son ministère, et qu'il ne prêchait pas seulement la grâce, mais la mettait en pratique.
            Libre à l'égard de tous, c'est-à-dire ne dépendant de personne, il ne se servait pas de sa liberté pour se placer au-dessus de ses semblables, mais il était prêt à se faire esclave de tous, c'est-à-dire à se soumettre à eux. Une telle attitude faisait de lui un modèle pour les Corinthiens. Ceux-ci croyaient, dans leur prétendue liberté, pouvoir se placer au-dessus des sentiments de leurs frères et sœurs plus faibles. Paul, au contraire, renonçait à un droit réel, et ceci dans quelle intention ? « Afin de gagner le plus possible de gens » (v. 19). Son but principal était d'amener le plus grand nombre possible de personnes au Sauveur. Pour atteindre ce but, il était prêt aux plus importants sacrifices. Quel exemple pour nous qui sommes souvent si paresseux, si indifférents et si occupés de nous-mêmes, sans remarquer qu'ainsi nous sommes un obstacle à la propagation de l'évangile.

            Paul illustre maintenant son attitude par quelques exemples (v. 20-22). Il s'adaptait autant que possible à ses auditeurs, sans cependant renoncer pour autant à sa dépendance du Seigneur. En annonçant l'évangile aux Juifs, il le faisait en qualité de Juif, tel qu'il l'était par naissance. A l'objection éventuelle que cela n'avait rien d'extraordinaire, il répond par l'exemple suivant : « pour ceux qui étaient sous la Loi, comme si j'étais sous la Loi (sans être moi-même sous la Loi), afin de gagner ceux qui étaient sous la Loi » (v. 20). Ainsi, il avait circoncis Timothée, à cause des Juifs, alors que, dans une autre occasion, il avait proclamé que la circoncision n'a aucune signification pour le chrétien (Act. 16 : 3 ; 1 Cor. 7 : 19). Parmi les païens, qui ne connaissaient pas la Loi, il n'exigeait pas la connaissance de la Loi, ni ne se comportait comme quelqu'un de soumis à la Loi. Bien qu'il ne soit plus désormais sous la loi du Sinaï comme Juif, cela ne signifiait pas qu'il était sans loi, car maintenant aussi il n'était pas sans loi quant à Dieu, mais il était justement soumis à Christ. Un lien étroit et fort existait entre lui et son Seigneur, car il était un esclave de Christ. Il évoque comme troisième exemple les faibles dont il avait déjà parlé au chapitre 8. Si les Corinthiens s'élevaient au-dessus de leurs frères faibles, lui, Paul se mettait à la portée de faibles incrédules. Il faisait tout cela afin que, de quelque manière que ce soit, des hommes soient atteints et sauvés par l'évangile de la grâce, et qu'il puisse se réjouir des fruits de celui-ci.
            Par les paroles : « Ne savez-vous pas…? » (v. 24), Paul, dans cette épître, introduit souvent des exhortations dont les Corinthiens n'auraient en fait plus dû avoir besoin, parce qu'ils devaient connaître ces choses (3 : 16 ; 5 : 6 ; 6 : 9). Ici, l'apôtre leur rappelle une règle bien connue dans le domaine sportif, à savoir que le seul enjeu d'une course est de gagner le prix. Mais du fait que, dans le domaine spirituel, non seulement un, mais tous ceux qui courent bien, obtiennent le prix, Paul veut encourager les Corinthiens à fournir l'effort pour le recevoir. Tout sportif renonce déjà au cours de son entraînement à bien des choses que d'autres peuvent se permettre (v. 25). Si donc il en est déjà ainsi pour un trophée périssable, combien plus cela ne devrait-il pas être le cas pour les croyants, qui recevront une couronne incorruptible ! Paul rappelle ainsi aux Corinthiens d'une manière délicate et pleine d'affection qu'ils n'étaient pas disposés à renoncer à leurs prétendus droits par amour pour leurs frères et sœurs plus faibles.

            Mais plutôt que de leur adresser une exhortation directe, Paul se présente alors lui-même – ainsi qu'il le fait si souvent – comme modèle (v. 26). En contraste avec eux qui ne voulaient pas voir le sérieux de leur responsabilité, le grand apôtre vivait dans une abnégation continuelle, afin de maintenir et de fortifier sa force spirituelle. Sa conclusion : « de peur qu'après avoir prêché à d'autres, je ne sois moi-même réprouvé » (ou : disqualifié) ne signifie pas qu'il craignait de perdre son salut. Il est certes possible que quelqu'un prêche durant toute sa vie, et cependant soit éternellement perdu. Mais un véritable enfant de Dieu ne peut pas perdre son salut. Ce que Paul présente ici dans sa propre personne, c'est l'impossibilité de séparer la grâce et la responsabilité. Celui qui confesse être sauvé et servir le Seigneur, a aussi la responsabilité de vivre en conséquence. Une simple profession ne suffit pas ; elle conduit à la perdition éternelle. C’est ce que pourrait aussi signifier le verset 27 dans le cas d’un prédicateur incrédule.

 

                                                                                                   A. Remmers