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Le sermon sur la montagne (9)

Jurer - oui ou non ? (Matt. 5 : 33-37)  
Œil pour œil (Matt. 5 : 38-42)
 


Jurer - oui ou non ? (Matt. 5 : 33-37) 

            Dans notre société actuelle, le fait de jurer, de prêter serment, ne nous est plus guère familier. C'est tout au plus devant un tribunal ou devant certaines autorités officielles qu'un serment est exigé. Dans la vie quotidienne, personne n'est tenu de jurer.
            Mais dans le sermon sur la montagne, son premier grand discours dans l'évangile de Matthieu, le Seigneur Jésus aborde ce sujet. Il y reviendra de manière plus détaillée au chapitre 23 : 16-22.

                        Jurer - selon la Loi

            Le Seigneur introduit un quatrième exemple de ce qui avait été enseigné aux Juifs : « Vous avez encore entendu qu'il a été dit aux anciens : Tu ne te parjureras pas, mais tu t’acquitteras envers le Seigneur de tes serments » (v. 33). Il ne s'agit pas ici d'un commandement divin formel, mais de l'une des traditions des anciens et des scribes, qui avaient, pour la plupart, pris naissance après la captivité à Babylone. Ces traditions se voulaient seulement des interprétations des commandements divins, mais les Juifs y attachèrent progressivement plus d'importance qu'à la Parole de Dieu elle-même (Marc 7 ; 8 ; 9) !
            Le troisième commandement : « Tu ne prendras point le nom de l'Eternel, ton Dieu, en vain », puis le neuvième : « Tu ne diras point de faux témoignage contre ton prochain », contiennent le fondement moral de la prescription de ne pas se parjurer, c'est-à-dire de ne pas faire un faux serment. D'autres passages de l'Ancien Testament exhortent aussi le peuple à ne pas jurer à la légère. En Lévitique 19 : 12, il est dit : « Et vous ne jurerez pas par mon nom, en mentant ; et tu ne profaneras pas le nom de ton Dieu » (comp. Nom. 30 : 3 ; Deut. 23 : 22 et suivants ; Zach. 8 : 17).
            Mais d'autre part, Dieu engageait son peuple à jurer par son nom, et, en différentes occasions, la Loi ordonnait de prêter serment (Deut. 6 : 13 ; comp. Ex. 22 : 11 ; Lév. 5 : 1 ; Nom. 5 : 19-21). Le serment ne servait pas seulement à l'affirmation de la vérité, il accompagnait aussi un vœu solennel dans la conscience de la présence de Dieu, celui qui, lui-même, jura un jour à Abraham (Gen. 22 : 16 ; Héb. 6 : 13-20).

            Tout ceci est résumé dans la déclaration : « Tu ne te parjureras pas, mais tu t’acquitteras envers le Seigneur de tes serments ».

                        Jurer à la légère

            Les Juifs prêtaient serment à tout propos. Ils juraient par le ciel, par la terre, par Jérusalem, par le temple, etc. Les scribes enseignaient que seuls les serments formulés expressément au nom de Dieu obligeaient ceux qui les avaient prononcés. En outre, ils faisaient des différences selon que l’on jurait par le temple ou l'or du temple, entre l'autel et le don qui se trouvait dessus, etc. (Matt. 23 : 16-22). Prêter serment à la légère, faire des vœux et des promesses et ne pas les tenir, n'était pas considéré par les Juifs comme des péchés, pourvu que le nom de Dieu ne soit pas mentionné.
            Mais examinons un instant notre cœur naturel : n'y découvrons-nous pas les « deux poids » dont il est question en Proverbes 20 : 10, 23 ? Ne faisons-nous pas parfois une différence entre le langage courant - dans lequel chaque mot n'est pas vraiment pesé, et où s'introduisent les demi-mensonges (qui sont en fait des mensonges entiers !) - et les circonstances sérieuses dans lesquelles nous devons engager notre parole ? Combien y a-t-il de promesses et d'affirmations qui auraient été évitées, si nous avions pensé au jour futur où nous aurons à rendre compte de toutes les paroles vaines que nous aurons dites (Matt. 12 : 36) !



                         Ne pas jurer du tout

            L'enseignement humain supprime ici, ajoute là, quelque chose à la Parole de Dieu. Non seulement il lui ôte son tranchant et sa force, mais il empêche le contact direct et personnel de l'âme avec cette parole de grâce. C'est à cet enseignement que le Seigneur oppose sa divine parole : « Mais moi, je vous dis de ne pas jurer du tout » (v. 34).
            Les disciples du Seigneur doivent apprendre que ni « le flot de paroles » ni l'exagération ne donnent du poids aux mots ! Mais Dieu veut la vérité aussi bien dans l'homme intérieur (Ps. 51 : 6) que dans les paroles qu'il exprime. Paul écrit aux Ephésiens : « C'est pourquoi, ayant renoncé au mensonge » (c'est-à-dire tout ce qui est faux et contraire à la vérité), « parlez la vérité chacun à son prochain » (Eph. 4 : 25).
            Dans les versets suivants, le Seigneur fait allusion aux différentes formules dont se servaient les Juifs dans leurs nombreux serments : « Mais moi, je vous dis de ne pas jurer du tout ; ni par le ciel, car il est le trône de Dieu ; ni par la terre, car elle est le marchepied de ses pieds ; ni par Jérusalem, car elle est la ville du grand Roi. Tu ne jureras pas non plus par ta tête, car tu ne peux pas faire blanc ou noir un cheveu » (v. 34-36). Ils se trompaient grandement lorsqu'ils pensaient qu'on pouvait utiliser ces formules sans se sentir obligé, parce qu'elles ne contenaient pas le nom de Dieu. Le ciel est bien le trône de Dieu, la terre est le marchepied de ses pieds (Es. 66 : 1), et Jérusalem est la ville de Dieu et de son roi (Ps. 48 : 1-2). Celui qui jurait par sa tête, donnait sa vie en gage, et devait bien se rappeler que Dieu seul est Seigneur sur la vie et la mort, et qu'il n'est pas même au pouvoir de l'homme de changer la couleur de ses cheveux.

            « Mais que votre parole soit oui : oui, et votre non : non ; car ce qui est de plus provient du mal »
(v. 37). Si nos paroles sont vraies, elles n'ont besoin d'être confirmées que par oui et non. Le passage de Jacques 5 : 12 : « que votre oui soit oui, et votre non, non » exprime clairement la même pensée. « Ce qui est de plus » ne peut qu'altérer la stricte vérité, et ainsi « vient du mal ».

                        Un chrétien peut-il jurer ?

            Certains ont pensé que l'ordre du Seigneur « de ne pas jurer du tout » signifiait qu'un chrétien ne devait en aucun cas prêter serment. Et jusqu'à ce jour, il y a des chrétiens qui refusent tout serment. Est-ce ce que le Seigneur nous demande ?
            N'ajoutons aucun serment pour donner de la force à nos propos, sous prétexte qu'autrement ils ne seraient pas crus. Mais si c'est le gouvernement ou le tribunal qui exigent un serment, la situation est différente. Dans le monde, le mensonge est chose courante. Devant un tribunal, une déposition de témoins doit généralement être confirmée par un serment, et cette exigence souligne l'importance légitime que l'on attache à l'établissement de la vérité. Même si le gouvernement ne reconnaît pas Dieu, le chrétien doit néanmoins reconnaître l'autorité ordonnée de Dieu (Rom. 13 : 1 et suivants).
            Un serment que des fonctionnaires de l'Etat ou des militaires sont obligés de faire est certainement à considérer de cette façon. Lorsque notre Seigneur se tient devant le sanhédrin, Il ne répond à aucune des fausses accusations portées contre lui. Mais lorsque le souverain sacrificateur Lui dit : « Je t'adjure, par le Dieu vivant… », Il ne garde plus le silence. Il se soumet à l'autorité instituée par Dieu, et rend témoignage à la vérité : « Tu l'as dit » (Matt. 26 : 63-64 ; comp. Lév. 5 : 1).

 
Œil pour œil (Matt. 5 : 38-42)

                        Juste châtiment

            La « loi du talion » est le cinquième exemple que le Seigneur Jésus puise dans la Loi et les traditions des anciens. « Vous avez entendu qu'il a été dit : oeil  pour œil, et dent pour dent » (v. 38 ; cf. Ex. 21 : 24 ; Lév. 24 : 20 ; Deut. 19 : 21). Ce principe de rétribution est souvent considéré comme la caractéristique distinctive de la loi de Moïse. Mais c'est un aspect seulement de cette loi du Sinaï, qui a été donnée par Dieu lui-même et que Paul qualifie non seulement de juste, mais aussi de sainte et de bonne (Rom. 7 : 12).
            Il ne s'agit pas d'une règle de conduite pour l'individu, mais d'une ordonnance pénale pour les juges en Israël. Des passages tels que Exode 21 : 22 et Deutéronome 19 : 18, dans lesquels les juges sont expressément mentionnés, le montrent clairement. Ces châtiments sévères se fondaient sur le principe d'une justice absolue et devaient servir d'avertissement pour les autres (Deut. 19 : 20).
            Il était interdit à l'individu d'agir personnellement selon le principe « œil pour œil, et dent pour dent ». La vengeance ne lui était pas permise : « Tu ne te vengeras pas, et tu ne garderas pas rancune aux fils de ton peuple; mais tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Lév. 19 : 18).


                         Grâce et miséricorde

            Le Seigneur Jésus ne relève pas la fausse interprétation du commandement de l'Ancien Testament « œil pour œil, et dent pour dent », mais lui oppose un tout autre principe : « Mais moi, je vous dis : Ne résistez pas au mal ; au contraire, si quelqu'un te frappe sur la joue droite, présente-lui aussi l'autre ; à celui qui veut plaider contre toi et prendre ta tunique, laisse-lui aussi le manteau ; et si quelqu'un veut te contraindre à faire un mille, fais-en deux avec lui. Donne à qui te demande, et ne te détourne pas de celui qui veut emprunter de toi » (v. 39-42).
            Dans sa grâce, le Seigneur Jésus non seulement n'envisage pas des représailles atténuées ou même un complet renoncement à la vengeance, mais il enseigne à ne pas rendre le mal pour le mal, et à surmonter le mal par le bien (Rom. 12 : 17-21). Dans un monde rempli d'injustice, les disciples de Jésus doivent manifester la même attitude de grâce et de miséricorde que celle que leur Seigneur, le Roi rejeté, a montrée dans sa vie. Nous avons déjà pu le voir en méditant les béatitudes ; elles nous ont montré les qualités de ceux qui, par la nouvelle naissance, sont entrés dans le royaume de Dieu.
            Ces paroles de notre Seigneur montrent clairement que le sermon sur la montagne ne fournit en aucune manière des directives pour les autorités de ce monde. Quel chaos ce serait, dans une société composée de pécheurs, si la grâce régnait à la place de la justice ! Par ces paroles, le Seigneur Jésus n'entend nullement supprimer l'exercice de la justice dans ce monde. Selon Romains 13 : 4, le magistrat est aujourd'hui encore serviteur de Dieu, vengeur pour punir celui qui fait le mal.

            Quant à la règle de conduite indiquée ici par le Seigneur, il y a des chrétiens qui voudraient en limiter l'application à certaines circonstances, de façon à éviter chez autrui des comportements qui sont insupportables pour la chair. Le Seigneur Jésus n'a-t-Il pas réprimandé l'huissier qui L'avait souffleté, sans lui présenter l'autre joue (Jean 18 : 22-23) ? Et Paul n'a-t-il pas revendiqué ses droits à plusieurs reprises (Act. 16 : 35-40 ; 25 : 11) ? Mais le Seigneur a simplement adressé une remontrance légitime sous la forme d'une question, alors qu'Il a supporté en silence tous les autres outrages (Matt. 27 : 37-31 ; Jean 19 : 1-3). Quant au comportement de l'apôtre Paul à Philippes ou devant Festus, était-il entièrement conforme à la volonté du Seigneur ? Si un chrétien peut faire remarquer avec douceur les torts qui lui sont faits, il ne doit pas oublier qu'il est retiré du monde (Gal. 1 : 4) et n'a pas la mission d'y faire régner la justice. Nous ne devons pas nous soustraire à nos obligations envers autrui si les autorités l'exigent : pour aller témoigner par exemple. Mais nous le faisons alors par soumission à tout ordre humain, pour l'amour du Seigneur (1 Pier. 2 : 13).
            Dans notre passage le Seigneur dit : « Ne résistez pas au mal ». Le mot grec traduit ici par « mal » peut désigner aussi bien ce qui est mal, c'est-à-dire le péché (Luc 3 : 19 ; 1 Thes. 5 : 22), que celui qui fait le mal, c'est-à-dire le méchant (Luc 6 : 35 ; 1 Cor. 5 : 13). Comme partout ailleurs dans le Nouveau Testament, il nous est dit ici de ne pas résister, de ne pas revendiquer nos droits, lorsque des méchants nous font personnellement du mal. La grâce nous rend capables de suivre les traces du Seigneur, « qui, lorsqu'on l'outrageait, ne rendait pas l'outrage, quand il souffrait, ne menaçait pas, mais se remettait à celui qui juge justement » (1 Pier. 2 : 23 ; cf. 2 : 19 ; 3 : 14, 17 ;  4 : 13). Et le principe est le même lorsqu'il s'agit de nos rapports avec les croyants. Paul dit aux Corinthiens : « C'est, de toute manière, déjà une faute de votre part d’avoir des procès entre vous. Pourquoi ne supportez-vous pas plutôt des injustices ? Pourquoi ne vous laissez-vous pas plutôt causer du tort ? » (1 Cor. 6 : 7).

            Nous qui nous appelons disciples de Jésus, ne devons-nous pas confesser à notre honte combien peu nous manifestons cette attitude de patience et d'amour lorsqu'on nous cause du tort ? Et pourtant notre Dieu voudrait voir se refléter l'humilité, la douceur, la longanimité, la grâce et la miséricorde de Christ dans la vie de ceux qu'Il a rachetés pour lui-même et qui disent suivre leur Seigneur. Il veut et peut nous donner la force d'apprendre de Celui qui dit : « Apprenez de moi, car je suis débonnaire et humble de cœur » (Matt. 11 : 29).


                         Quatre exemples

            Le Seigneur Jésus illustre ses propos au moyen de quatre exemples. Voici le premier : « Si quelqu'un te frappe sur la joue droite, présente-lui aussi l'autre » (v. 39). Déjà dans ces temps-là, une gifle était une grave insulte. Elle était spécialement humiliante lorsque le coup était donné avec le dos de la main, donc sur la joue droite. Administrée de la sorte, la gifle comptait double, selon le talmud juif. Au lieu de demander réparation de telles offenses, les disciples du Seigneur doivent les endurer (cf. 1 Pier. 2 : 20). A ce propos, nous nous souvenons de la prophétie d'Esaïe, concernant notre Seigneur : « J'ai donné mon dos à ceux qui frappaient, et mes joues à ceux qui arrachaient le poil; je n'ai pas caché ma face à l'opprobre et aux crachats » (Es. 50 : 6).
            « A celui qui veut plaider contre toi et prendre ta tunique, laisse-lui aussi le manteau »
(v. 40). A un exemple tiré de la vie privée, en succède un relevant du domaine juridique. Mais la règle de conduite est la même. La Loi interdisait de prendre en gage pendant la nuit le manteau d'un débiteur pauvre. Son gage devait lui être rendu le soir, pour qu'il puisse se couvrir pendant la nuit (Ex. 22 : 26 ; Deut. 24 : 12-13). Le Seigneur fait probablement allusion à cette ordonnance. Il enseigne ici ses disciples à ne pas refuser ce qui est demandé et même à donner plus que ce qui est exigé. Voilà la grâce !
            « Et si quelqu'un veut te contraindre à faire un mille, fais-en deux avec lui »
(v. 41). Même si un service pouvait paraître pénible, incongru et désagréable, les disciples devaient non seulement l'accomplir de bon cœur, mais faire encore plus qu'il ne leur était demandé.
            Le dernier exemple montre encore une fois clairement que le Seigneur s'adresse au cœur de ses disciples : « Donne à qui te demande, et ne te détourne pas de celui qui veut emprunter de toi » (v. 42). D'après la Loi déjà, il était interdit à un Israélite de prêter à intérêt à un autre Israélite (Lév. 25 : 35-37 ; Deut. 23 : 19). Il devait prêter aux pauvres libéralement sur gage (Deut. 15 : 7-8). Mais le Seigneur retire ici toute réserve quant au don ou au prêt. Dieu, le grand donateur, n'a pas épargné son propre Fils, mais l'a livré pour nous tous. Lui qui veut nous faire don librement de toutes choses avec Lui, aime celui qui donne joyeusement (Rom. 8 : 32 ; 2 Cor. 9 : 7).

 

                        A. Remmers – article paru dans le « Messager Evangélique » (1994 p. 308-316)

 
A suivre