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ETUDE SUR L’EPITRE AUX HEBREUX (13)

                                                 

CHAPITRE 13

Vers Jésus Christ, le vrai but (10 : 19 à 13 : 25)

            Ce que l’auteur de l’épître recommande avant tout ici c’est l’amour fraternel (v. 1) : qu’il demeure, écrit-il aux Hébreux qui, dès l’origine de l’Eglise, s’étaient distingués par leur amour mutuel. L’un des plus beaux fruits de cet amour est certainement l’hospitalité. L’auteur désirait la voir se manifester parmi eux dans ces temps si difficiles où les disciples de Jésus se voyaient fréquemment bannis de leurs demeures ; il leur rappelle que, par elle, quelques-uns avaient logé des anges sans le savoir (v. 2).
            Un autre fruit, non moins précieux de l’amour fraternel, c’est l’empressement à soulager ceux qui sont emprisonnés et maltraités pour la cause de l’évangile ; de telles souffrances sont bien souvent en effet, sur la terre, le sort des héritiers de la gloire à venir. L’auteur souhaitait que les Hébreux sympathisent avec les chrétiens persécutés comme s’ils subissaient, dans leurs propres corps, les mauvais traitements qu’on faisait endurer à leurs frères (v. 3). Il les exhorte ensuite à fuir, comme étrangers et voyageurs, les souillures de la chair ; il les encourage à garder la chasteté et la fidélité conjugales, et leur déclare que Dieu punira les fornicateurs et les adultères (v. 4). Puis, mettant ses lecteurs en garde contre l’amour de l’argent, il leur recommande d’être contents de ce qu’ils ont ; et, cependant ils étaient pour la plupart si dépourvus des biens de ce monde que plusieurs fois on avait dû faire pour eux des collectes dans les assemblées des Gentils. Bien qu’étant entourés d’ennemis acharnés, toujours prêts à leur nuire en toute occasion, ils n’avaient rien à craindre : Celui qui avait fait les promesses et qui est puissant aussi pour les accomplir (v. 5 et 6), saurait bien les garder jusqu’au terme de leur pèlerinage et pourvoir à tous leurs besoins.

            Afin d’encourager toujours davantage les Hébreux à persévérer jusqu’à la fin, l’exemple des conducteurs qui leur avaient annoncé la Parole de Dieu est placé devant eux (v. 7) ; au chapitre 12, l’exemple des témoins pieux d’autrefois leur avait déjà été proposé, et surtout celui de Jésus, le parfait Modèle des chrétiens. Ces conducteurs étaient, soit des anciens et des diacres, soit même des apôtres, Jacques, fils de Zébédée et frère de Jean, Etienne et tant d’autres, qui avaient quitté ce monde depuis longtemps, ou qui venaient de le quitter. L’auteur exhorte ses lecteurs à imiter la foi de ces nobles confesseurs de Christ qui se reposaient maintenant de leurs travaux au sein de la nuée de témoins qu’ils avaient grossie.
            Mais si les conducteurs des troupeaux de Jésus, si les serviteurs du Grand Berger, s’en vont ainsi l’un après l’autre, Il demeure, Lui, et Il est le même hier, aujourd’hui et pour tous les siècles (v. 8), le même dans son essence éternelle, le même aussi dans son amour et sa fidélité. Il a gardé les bergers jusqu’au terme de leur course et Il gardera pareillement les brebis.
            C’est donc à Lui, notre Souverain Sacrificateur, comme notre Souverain Berger - à Lui, notre vrai sacrifice expiatoire, et notre aliment spirituel,  à sa doctrine immuable comme Lui-même, à sa grâce libre et souveraine, qui seule affermit l’âme et la vivifie - que nous devons rester invariablement attachés, cherchant en Lui seul notre pardon, notre paix, notre nourriture, et ne nous laissant plus entraîner désormais par des doctrines diverses et étrangères, par toutes ces distinctions d’aliments purs et impurs, toutes ces pratiques mosaïques qui n’ont point profité à ceux qui s’y sont attachés (v. 9).
            Christ est assimilé à l’autel de la nouvelle alliance. Il en est aussi le sacrificateur, la victime et l’aliment. Mais le sacerdoce nouveau ouvre le droit à cette nourriture mystique, dit encore l’auteur (v. 10). Manger de la chair de Jésus, de cette chair qui est la vie de notre âme, est interdit à ceux qui demeurent encore, ou qui se replacent, sous la Loi de Moïse. Que déclare, en effet, cette Loi ? Nulle victime pour le péché dont on portera du sang dans le tabernacle d’assignation pour faire la propitiation dans le sanctuaire, ne sera mangée, mais elle sera brûlée au feu (Lév. 6 : 23) sur du bois, hors du camp (4 : 12, 21). Or, la sainte victime de l’évangile appartient précisément à la catégorie de victimes  dont il n’est pas permis de manger, son sang ayant été porté dans le sanctuaire (céleste) pour y faire la propitiation. Aussi y avait-il, pour les chrétiens juifs, une inévitable alternative : renoncer à toute communion avec Jésus Christ, à toute participation aux fruits précieux de sa mort, ou bien en finir avec le système mosaïque.
            Jésus, selon le type lévitique (Lév. 4 : 12, 21), s’est laissé conduire hors du camp, et clouer au bois sur le Calvaire, afin de sanctifier, par l’effusion de son sang, le peuple, le vrai peuple de Dieu (v. 12). Il est sorti de Jérusalem, chargé de notre ignominie (Ps. 69 : 19). Suivons-le maintenant chargés de son opprobre (v. 13). Rejeté de la nation comme une victime vouée à la malédiction, excommunié par elle, Jésus l’a rejetée. Il l’a excommuniée à son tour. Il a rompu avec la race incrédule et perverse et lui a donné les lettres de divorce (Es. 50). Rompons de même avec elle (Es. 52 : 11), rompons avec son culte, avec toutes ses cérémonies, toutes ses pratiques religieuses, images fugitives des biens que nous possédons. Rompons avec la Loi qui la régit, dispensation temporaire, provisoire, impuissante à procurer ici-bas le salut et la paix avec Dieu. Sortons avec Jésus de la Jérusalem actuelle, de la cité qui va périr, pour rechercher avec les patriarches (ch. 11) celle qui est permanente, éternelle, et dont le sang que Jésus a versé nous a pleinement ouvert l’entrée (v. 13-14). Parole solennelle, et d’une saisissante actualité ! Glas funèbre sonnant le dernier jour de Jérusalem ! Malheur au temple ! Malheur au sacerdoce ! Malheur à la nation ! Voici, le Juge est à la porte !
            Le sacerdoce lévitique touche donc à son terme : c’est une ombre qui s’évanouit (8 : 13) ; le temps des sacrifices symboliques n’est plus ; celui des sacrifices spirituels a commencé, et nous sommes, nous, chrétiens, le vrai sacerdoce établi pour les offrir. Ces sacrifices - après celui de notre personne toujours sous-entendu (Rom. 12 : 1) - sont d’abord le sacrifice de la louange ou la franche confession du nom de Christ, puis la bienfaisance et le don de nos biens (v. 15-16). Offerts à Dieu par Jésus Christ, qui est tout à la fois l’autel qui sanctifie le don, et le Souverain Sacrificateur qui en ôte l’iniquité, les sacrifices mentionnés ici, sacrifices de reconnaissance et non d’expiation, Lui sont agréables. Il les accepte avec amour de la main du Médiateur que Lui-même nous a donné.

            Comme dernière exhortation (v. 17-19), l’auteur recommande à ses frères de la Palestine d’obéir aux conducteurs spirituels que Dieu leur a laissés, et d’avoir pour eux du respect. Il ajoute qu’ils veillent pour leurs âmes comme devant rendre compte. Quelle responsabilité que la leur ! Et quel besoin, par conséquent, n’ont-ils pas d’être continuellement soutenus par le respect et les encouragements des croyants pour accomplir jusqu’au bout leur tâche avec joie, ce qui vaut mieux assurément, dans l’intérêt de tous, que de le faire en gémissant ! Puis, l’auteur invite ses frères à prier pour lui, afin que, délivré de sa captivité de Rome, il leur soit rendu plus tôt. A son tour, il prie pour eux (v. 20-21) : il demande que Dieu avec qui nous sommes pleinement réconciliés par le sacrifice expiatoire de son Fils, le « Dieu de paix », les forme en toute bonne œuvre, pour faire sa volonté, faisant Lui-même en eux ce qui Lui est agréable par Jésus Christ. « A lui soit la gloire aux siècles des siècles ! Amen » (v. 20-21). Il prie ensuite ses lecteurs de supporter la parole d’exhortation qu’il vient de leur adresser (v. 22). Il leur annonce que Timothée est relâché, et qu’il ira les voir avec ce cher disciple, s’il revient bientôt (v. 23). Il leur demande de saluer tous leurs conducteurs et tous les saints (v. 24). Il termine enfin, par la bénédiction accoutumée : « Que la grâce soit avec vous tous ! Amen » (v. 25).

                        L’amour fraternel et la fidélité conjugale

            « Que l’amour fraternel demeure. N’oubliez pas l’hospitalité ; car en la pratiquant, certains, à leur insu, ont logé des anges » (v. 1 et 2).
            Cet amour fraternel avait été manifesté au commencement parmi les croyants d’une façon très vive (Act. 2 et 4) ; il subsistait encore, mais avait probablement perdu quelque chose de sa première ferveur. Les apôtres Pierre et Jean nous y exhortent (1 Pier. 1 : 22 ; 1 Jean 4 : 7). 
            Par l’hospitalité, l’amour fraternel était mis en pratique. « Appliquez-vous à l’hospitalité », dit Paul aux Romains (12 : 13). L’apôtre Pierre recommande qu’elle soit exercée « sans murmurer » (1 Pier. 4 : 9). Elle s’exerçait alors, soit envers des chrétiens chassés de leur région natale par la persécution, soit envers d’autres qui allaient prêcher l’évangile ou qui voyageaient pour tout autre motif (3 Jean 5-7).
            Abraham et Lot (Gen. 18 et 19) ont, en effet, logé des anges ; à leur apparence, ils avaient d’abord pris ceux-ci pour de simples hommes de bien.

            « Souvenez-vous des prisonniers, comme si vous étiez en prison avec eux, de ceux qui sont maltraités, comme étant vous-mêmes aussi dans le corps » (v. 3).
            La sympathie devait être montrée envers les prisonniers, ceux qui l’étaient pour la cause de Christ. Ainsi, leurs frères pouvaient prier pour eux, les visiter dans leurs prisons (Matt. 25 : 36), les consoler, les soulager. L’apôtre Paul dit aux Colossiens : « Souvenez-vous de mes liens » (Col. 4 : 18).  Ici, l’auteur dit : « comme si vous étiez en prison avec eux », et « comme étant vous-mêmes aussi dans le corps », un corps mortel, susceptible de souffrir et par conséquent aussi de sympathiser avec ceux qui souffrent. Il désigne peut-être aussi le corps de Christ ; il est dit que « si un membre souffre, tous les membres souffrent avec lui » (1 Cor. 12 : 26). Le premier sens est plus simple et plus naturel.

            « Que le mariage soit tenu en honneur à tous égards, et le lit conjugal sans souillure ; car les fornicateurs et les adultères, Dieu les jugera » (v. 4).
            Dieu a institué le mariage dans le paradis terrestre avant la chute, et pour le bonheur de l’humanité (Gen. 2). Jésus l’a honoré de sa présence aux noces de Cana (Jean 2 : 1-11) et l’a rétabli dans son état primitif (Matt. 19 : 4-6). Enfin, Paul le recommande à tous ceux qui n’ont pas reçu le don de continence (1 Cor. 7 : 9) ; il annonce qu’il s’élèvera par la suite des faux docteurs qui ordonneront de ne pas se marier, et il met d’avance les fidèles en garde contre les séductions de ces diseurs de mensonges (1 Tim. 4 : 1-3).
            Mais Dieu jugera les fornicateurs et les adultères (1 Cor. 6 : 9-10 ; Apoc. 21 : 8 ; 22 : 15). Il punira sévèrement l’adultère, ou relation impure entre deux personnes dont l’une au moins est mariée ; la simple fornication n’échappera pas non plus à ses châtiments. « L’auteur oppose le mariage à la débauche comme un remède à ce mal, et comme un moyen d’éviter le jugement qui doit atteindre leurs auteurs» (Calvin).

                        La confiance en Celui qui est le Même

            « Que votre conduite soit sans avarice, étant satisfaits de ce que avez présentement, car lui-même a dit : « Je ne te laisserai pas et je ne t’abandonnerai pas ; de sorte que, pleins de confiance, nous disions : « Le Seigneur est mon aide ; je ne craindrai pas : que me fera l’homme ? » (v. 5-6).
            Dans sa manière de vivre, le chrétien doit veiller à ne pas aimer l’argent (1 Tim. 6 : 6-10), étant content de ce qu’il a. L’exemple de Paul est donné  aux Philippiens (4 : 11-12). On est déjà avare quand on n’est pas content de ce qu’on a présentement.
            Cette promesse du Seigneur, faite à Josué (1 : 5), est applicable à tout croyant (2 Cor. 1 : 20). « L’auteur, en la citant, dit Calvin, arrache le mal dès sa racine ; car il est certain que la source de toute avarice est la défiance ; il nous ramène aux promesses par lesquelles Dieu proteste qu’il sera avec nous et nous assistera ». Le passage a, dans le grec, une force toute particulière, et peut être ainsi rendu : « Non, je ne te laisserai point, non, non je ne t’abandonnerai point » - parole admirablement propre à rassurer, au besoin, notre pauvre cœur naturellement incrédule et défiant.
            Le verset 6 est une citation du Psaume 118 (v. 6). Comme le psalmiste, les Hébreux éprouvés pouvaient s’approprier cette promesse et dire : « Que me fera l’homme ? », le Juif incrédule et persécuteur est toujours prêt à disputer aux disciples de Jésus leur pain de chaque jour, et à leur faire tout le mal qui est en son pouvoir !

            Souvenez-vous de vos conducteurs qui vous ont annoncé la parole de Dieu, et, considérant l’issue de leur conduite, imitez leur foi » (v. 7)
            Les Hébreux devaient se souvenir des apôtres, ou anciens décédés, qui leur avaient annoncé la parole de Dieu. Ils avaient trois choses à considérer en eux :
                   - la parole qu’ils avaient annoncée, et qui n’était pas la leur, mais celle de Dieu (1 Thes. 2 : 13 ; 1 Jean 4 : 6) pour la retenir avec soin ;
                   - leur conduite dans ce monde, leur foi, leur patience, pour l’imiter ;
                   - enfin, l’issue de leur pèlerinage terrestre pour en désirer une semblable (Héb. 6 : 12) ; l’issue, non de leur vie seulement, mais de la conduite qu’ils avaient eue pendant leur vie. Issue (1 Cor. 10 : 13) - le terme grec traduit par « issue » signifie sortie, débarquement : la vie du fidèle, ici-bas, est comme une navigation sur une mer semée de récifs et battue par de continuels orages ; la mort est comme le débarquement dans le port du salut.

            « Jésus Christ est le Même, hier, et aujourd’hui, et éternellement » (v. 8).
            Il est le même en Lui-même : l’immutabilité et l’éternité de Christ est indiquée dès le premier chapitre (v. 12 ; Ps. 102 : 27). Il est le même dans ses relations avec les siens qu’Il dirige et protège à travers toutes les économies ; Il est le même, constamment le même, dans ses dispositions à leur égard.          

            « Ne soyez pas égarés par des doctrines diverses et étrangères, car il est bon que le cœur soit affermi par la grâce, non par les aliments, qui ont été sans profit pour ceux qui y ont marché » (v. 9).
            Ces doctrines « diverses » (Col. 2 : 16-23) sont étrangères à la nouvelle alliance, à l’évangile, à nos vrais besoins, à notre bonheur. Nous ne devons pas être « ballotés et emportés çà et là à tout vent de doctrine » (Eph. 4 : 14). Puisque Jésus Christ demeure éternellement, ne cherchons plus la paix, ni la nourriture de notre âme dans les ordonnances et les oblations mosaïques, mais seulement en Lui.
            « Il est bon que le cœur soit affermi par la grâce », cette grâce libre et souveraine de Dieu, révélée dans le sacrifice expiatoire de Christ. Les aliments charnels et toutes les observations de la Loi n’ont point profité à ceux qui s’y sont attachés, car ils ne sont que l’image, que l’ombre du véritable sacrifice et du véritable aliment, et ne sauraient par conséquent sanctifier notre âme ni la nourrir (9 : 9-10 ; Col. 2 : 17). Laissons-les donc pour nous attacher à Christ qui est le corps, la substance de toutes ces choses, et nous repaître de la réalité qui est en Lui. Il fallait dire cela aux disciples nés sous la Loi, et le leur répéter sans relâche, à cause de leur tendance perpétuelle à chercher, dans les observations lévitiques, telles que l’usage de certains aliments, et l’abstention de certains autres, l’affermissement de leur cœur, au lieu de le chercher uniquement en Christ, le substantiel et impérissable aliment de la foi.

            « Nous avons un autel dont ceux qui font le service du tabernacle n’ont pas le droit de manger » (v. 10).
            Jésus est à la fois l’autel et le sacrifice de la nouvelle alliance : le sacrifice, dans sa nature humaine, et l’autel, dans sa nature divine qui a soutenu sa nature humaine pendant le sacrifice qu’Il a offert à Dieu pour nous.
            Ceux qui rendaient encore leur culte dans le tabernacle, dont le temple n’était que la reproduction dans les proportions agrandies, n’avaient pas « le droit » de manger à cet autel, car ils servaient encore Dieu selon le rite judaïque - c’est ce que déclare expressément la Loi.

                        L’appel à sortir vers Jésus

            « Car les corps des animaux dont le sang est porté, pour le péché, dans les lieux saints, par le souverain sacrificateur, sont brûlés hors du camp. C’est pourquoi aussi Jésus, afin de sanctifier le peuple par son propre sang, a souffert hors de la porte » (v. 11-12).
            Les corps de ces animaux pour le « sacrifice pour le péché » ne pouvaient pas être mangés, mais étaient transportés et consumés hors du camp (Lév. 6 : 23). Remarquez, en passant, la forme absolue de cette prescription lévitique. Or, ces sacrifices-là préfiguraient celui de Christ qui a accepté de porter nos péchés sur la croix. Il est la substance, le corps, la réalité de ces ombres lévitiques. Il a sanctifié le peuple, le peuple entier des croyants. Il l’a purifié du péché, pour le consacrer et le mettre à part comme son peuple particulier.
            Son sang, qu’Il a versé sur la terre et qu’Il a porté dans le sanctuaire céleste (Lév. 16 : 14-15 ; Héb. 9 : 24) nous a ouvert le chemin du sanctuaire céleste. Il a souffert hors de la porte, hors de Jérusalem qui représente ici le camp du désert ; sortir hors de Jérusalem (v. 12), c’est aussi sortir hors du camp (v. 13). Pour mieux comprendre ces versets, il faut recourir à l’enseignement du livre du Lévitique (16 : 27 ; 4 : 11-12, 21). Parmi les victimes qu’on offrait pour le péché, il y en avait auxquelles Dieu avait trouvé bon d’attacher une idée particulière d’opprobre et de réprobation : celle qu’on offrait pour le souverain sacrificateur, celle qu’on offrait pour l’assemblée, puis le veau et le bouc annuels des propitiations. Après qu’elles avaient été égorgées dans le parvis, leur sang était porté dans le Tabernacle (lieu saint ou lieu très saint) pour y faire la propitiation, et leur corps emmené hors du camp et consumé sur du bois, sans qu’il n’en reste rien pour les sacrificateurs. C’était une déviation de la règle générale qui leur accordait la chair des sacrifices expiatoires (Lév. 6 : 17-19). La place où les victimes que nous venons de mentionner étaient brûlées a été fort à propos nommés « la place du jugement ». C’était près de là que se trouvaient les Israélites (ceux du moins de la division sur laquelle flottait l’étendard général de Juda) que leurs impuretés cérémonielles avaient fait exclure de l’assemblée d’Israël ; c’était là également qu’étaient mis à mort les malfaiteurs (de la même division). Les victimes qu’on y consumait étaient l’image la plus saisissante de ce Rédempteur adorable qui a porté nos péchés en son corps sur le bois hors de la porte (Lév. 4 : 12 ; 1 Pier. 2 : 24) et qui est devenu malédiction pour nous, afin de nous racheter de la malédiction de la Loi (Gal. 3 : 13). Jésus sortant de Jérusalem pour aller au Calvaire, c’est donc Jésus rejeté de Dieu à cause de nos offenses ; c’est en même temps Jésus rejeté de la nation comme un objet d’horreur ; mais c’est aussi Jésus l’abandonnant, la rejetant à son tour, et la vouant à l’anathème.

            « Ainsi donc, sortons vers lui hors du camp, portant son opprobre ; car nous n’avons pas ici de cité permanente, mais nous recherchons celle qui est à venir » (v. 13-14).
            Il s’agit de sortir vers Lui, en Le suivant hors du camp, hors de la communion juive, en portant son opprobre. C’est laisser enfin le sacerdoce lévitique et son culte (v. 9 à 12), la Loi et ses ombres, la cité coupable qui a rejeté le Seigneur et dont les jours sont comptés (1 Thes. 2 : 16). Puis, sur les traces de Jésus, de ce Sauveur un instant humilié et maintenant glorifié, nous recherchons la cité qui est à venir (ch. 11), portant avec joie l’opprobre de Celui qui, pour nous, endura la croix et méprisa la honte (12 : 2 ; Act. 5 : 41). Tel est, en quelque sorte, le dernier mot de l’auteur de l’épître ; il en finit ici avec le judaïsme.

                        Les sacrifices de louanges et la bienfaisance

            « Offrons donc, par lui, sans cesse à Dieu un sacrifice de louanges, c’est-à-dire le fruit des lèvres qui confessent son nom » (v. 15).
            Nous que Jésus a sanctifiés par son sang (v. 12) et qu’Il a consacrés  à son service (1 Pier. 2 : 5, 9), offrons continuellement à Dieu un sacrifice de louanges. Telle est l’action de grâce et la franche confession du Nom de Christ, opposée à cette pusillanimité combattue dans toute l’épître, et pouvant conduire progressivement à l’apostasie. Ce sont le nouveau sacerdoce, les nouveaux sacrifices offerts à Dieu par le moyen d’un nouveau souverain sacrificateur. Jésus a aboli tous les sacrifices expiatoires en abolissant le péché par le sacrifice de Lui-même (10 : 14, 18). Il n’a laissé subsister que les sacrifices eucharistiques ou d’actions de grâce qui dès lors ont pris une autre forme appropriée à la nouvelle économie. Dieu n’en veut plus d’autres. Le sacrifice pour le péché et celui pour le délit supposaient une faute quelconque, et ils avaient pour but de l’expier et de réconcilier ainsi le coupable avec Dieu. Mais il n’en était pas de même du sacrifice de prospérité ; celui qui l’offrait était censé être en paix avec Dieu ; c’était plutôt un témoignage d’actions de grâce qu’il lui présentait pour des bénédictions reçues. Ce même sacrifice accompagnait aussi des vœux destinés à obtenir de nouvelles bénédictions ; en général, il était plutôt l’expression d’une dévotion libre et spontanée (Lév. 7 : 11-21). C’est à ce sacrifice que l’auteur fait allusion ici. Il veut qu’on offre continuellement à Dieu le sacrifice de la louange ; car, il est juste que ceux qui sont rachetés par le sacrifice expiatoire de Christ, abondent dans les actions de grâce et l’adoration. Et il veut qu’on l’offre par le moyen de Jésus Christ ; ce Dieu saint ne l’agrée, et ne peut l’agréer, que de la main de notre grand sacrificateur (1 Pier. 2 : 5). « C’est Lui seul qui sanctifie nos lèvres autrement impures, de telle sorte que nous puissions chanter les louanges à Dieu ; c’est Lui qui donne entrée à nos prières ; bref, c’est Lui qui fait l’office de sacrificateur, pour se présenter devant la face de Dieu en notre nom » (Calvin).

            « Mais n’oubliez pas la bienfaisance, et de faire part de vos biens, car Dieu prend plaisir à de tels sacrifices » (v. 16).
            Voici un autre sacrifice, également eucharistique (Rom. 12 : 13 ; Gal. 6 : 10). L’apôtre Paul, à cet égard encore, est un exemple : il s’était appliqué à se souvenir des pauvres (Gal. 2 : 10). Il recommande aux Hébreux la bienfaisance, et cependant ils avaient été dépouillés de leurs biens terrestres (10 : 34) ; c’est qu’il faut savoir partager avec ses frères plus pauvres que soi le peu qu’on possède. Mais communication dit plus que bienfaisance ; il comprend tous les services que les chrétiens peuvent se rendre les uns aux autres dans l’amour qui les unit. Cette exhortation avait un à-propos tout particulier dans ces temps de grandes difficultés matérielles et de privations toujours croissantes, et à la veille des jugements terribles qui allaient tomber sur la nation. « Dieu prend plaisir à de tels sacrifices » (Ps. 50 : 23 ; Phil. 4 : 18).

                        Le grand pasteur des brebis

            « Obéissez à vos conducteurs, et soyez soumis, car ils veillent pour vos âmes, comme ayant à rendre compte ; afin qu’ils le fassent avec joie, et non en gémissant, car cela ne vous serait pas profitable » (v. 17).
            Les Hébreux avaient à obéir à leurs conducteurs, leurs anciens ou surveillants, et à avoir pour eux du respect (1 Thes. 5 : 12-13). Il fallait leur obéir dans tout ce qu’ils leur prescrivaient, conformément à la Parole de Dieu - leur pouvoir est nécessairement limité par cette Parole. Mais aussi longtemps qu’ils lui demeurent soumis, ils peuvent et doivent enseigner, exhorter, reprendre, gouverner avec toute autorité, sans jamais toutefois dominer sur les héritages du Seigneur (1 Pier. 5 : 1-4). « L’apôtre parle seulement de ceux qui exercent fidèlement leur office ; car ceux qui n’ont que le titre, et qui même abusent du titre de pasteurs pour détruire l’église, ne méritent pas grande révérence, et encore moins qu’on leur ajoute foi et qu’on se fie en eux » (Calvin).
            L’auteur donne ensuite aux Hébreux les raisons pour obéir à leurs conducteurs spirituels : ils veillent pour leurs âmes (Act. 20 : 28), ils doivent en rendre compte (1 Pier. 5 : 3). Les conducteurs pourraient ainsi accomplir ce service « avec joie et non en gémissant », autrement ce ne serait pas profitable.

            « Priez pour nous, car nous croyons que nous avons une bonne conscience, ayant le désir de bien nous conduire à tous égards » (v. 18).
            L’auteur réclame donc ici, pour lui et pour ses compagnons d’œuvre, les requêtes des fidèles en sa faveur. C’est ce que Paul fait ordinairement dans ses épîtres (1 Thes. 5 : 25). Il lègue ainsi à tous les prédicateurs de l’évangile un noble exemple à suivre.
            Puis, comme les Hébreux pouvaient être prévenus contre lui surtout, par les calomnies des judaïsants, soit à cause du zèle avec lequel il établissait le salut gratuit et la liberté chrétienne, soit à cause de son emprisonnement et des souffrances qu’il endurait, étant tenu pour un malfaiteur, l’auteur ajoute : « car nous croyons que nous avons une bonne conscience, ayant le désir de bien nous conduire à tous égards », ou parmi tous (voir aussi : Act. 24 : 16 ; 2 Cor. 1 : 12). Il sait aussi que, pour la même raison, les prières qu’il sollicite seront entendues.

            « Mais je vous prie d’autant plus instamment de faire cela, afin que je vous sois rendu plus tôt » (v. 19).
            Cette invitation est analogue à celle de Paul en Romains 15 : 22-24, 30-33.

            « Que le Dieu de paix - qui a ramené d’entre les morts le grand Pasteur des brebis, dans la puissance du sang de l’alliance éternelle, notre Seigneur Jésus - vous rende accomplis en toute bonne œuvre pour faire sa volonté, produisant en vous ce qui est agréable devant lui, par Jésus Christ. A lui soit la gloire aux siècles des siècles ! Amen » (v. 20-21).
            Le « Dieu de paix » est un nom que Paul aime à donner au Dieu de l’évangile (Rom. 15 : 33 ; 16 : 20 ; Phil. 4 : 9 ; 1 Thes. 5 : 23 ; 2 Thes. 3 : 16 ; 1 Cor. 14 : 33). Dieu nous a pleinement réconciliés avec Lui par le sacrifice de Christ. Il est l’auteur de la paix, et Il la donne continuellement en toute manière.
            Il a fait monter d’entre les morts le grand Berger des brebis, notre Seigneur Jésus, et  en le ressuscitant pour L’introduire dans le sanctuaire où Il comparaît maintenant devant sa face. Il a démontré de la manière la plus éclatante qu’Il a pleinement accepté le sacrifice que ce précieux Sauveur lui a offert pour nous. Jésus est le grand Berger qu’avaient annoncé les prophètes (Es. 40 : 11 ; Ezé. 34 : 23). Il est le Berger de tous ceux qui croient, Gentils comme Juifs (Jean 10 : 11, 16). Il a donné pour eux sa vie, Il les fait paître et les garde sous sa houlette jusqu’au jour de leur entière rédemption.
            Par le sang de l’alliance, le tombeau ne pouvait retenir le Fils de Dieu, le Prince de la vie ; mais il aurait pu y retenir le représentant d’une race coupable, le répondant des élus. Seul le sacrifice de Jésus Christ a pu lui ouvrir la tombe d’abord, puis le sanctuaire où il officie maintenant pour nous ; Jésus n’est sorti du sépulcre pour monter au ciel que par la vertu du sang de l’alliance éternelle. Le sang qui a ratifié l’alliance de grâce est ainsi nommé par opposition à celui qui avait ratifié l’alliance temporaire de Sinaï (8 : 13) ; et l’alliance qu’il a scellée est elle-même appelée l’alliance éternelle, parce qu’elle procède de l’élection éternelle de Dieu, et qu’elle a pour objet, comme elle aura pour résultat final, la gloire éternelle des rachetés.
            « Rendre accompli » a le sens ici de former, de préparer, de disposer afin de rendre propre à accomplir tout ce qui est bien (1 Pier. 5 : 10). Il faut le répéter ici : une œuvre n’est vraiment bonne, aux termes de la Bible, que si elle a pour principe la foi et l’amour - pour fin, la gloire de Dieu, et pour règle, sa Parole. C’est assez dire qu’il n’y a pas de bonnes œuvres, qu’il ne peut y en avoir, avant l’union avec Christ par le Saint Esprit. Jésus dit : « Séparés de moi, vous ne pouvez rien faire » (Jean 15 : 5). « Nous ne sommes point propres à bien faire jusqu’à ce que Dieu nous ait formés ; et nous ne demeurerons pas longtemps au bien, s’il ne nous confirme, car la persévérance est un don particulier de Dieu » (Calvin).
            Le « Dieu de paix » rend les siens capables de faire sa volonté. Il « opère en vous et le vouloir et le faire », dit Paul aux Philippiens (Phil. 2 : 13). « Il ne faut pas tenir autres œuvres pour bonnes, que celles qui sont accomplies selon la volonté de Dieu (Rom. 12 : 2 » (Calvin).
            Dieu produit « en nous », croyants - mais non pas sans nous - ce qui est « agréable devant lui », en particulier tout ce que recommande l’épître. Et Il le fait par le moyen de Jésus Christ (Phil. 1 : 11) vivant et agissant en nous par son Esprit. « L’Esprit de régénération et toutes autres grâces nous sont conférées par le moyen de Christ. Rien aussi ne peut être agréable à Dieu sans le pardon de nos péchés, lequel nous obtenons par Christ ; ainsi nos œuvres, remplies du parfum de la grâce de Christ, rendent une bonne odeur devant Dieu » (Calvin).
            A Jésus Christ est la gloire aux siècles des siècles ! Il est l’objet de nos actions de grâce et de notre éternelle adoration (Apoc 5 ; 7) ; divinité suprême du Rédempteur.
            Remarque générale sur le verset 21. L’œuvre de notre salut a deux parties : ce que Dieu a fait pour nous par Jésus Christ, et ce qu’Il fait maintenant en nous par l’Esprit de Christ. Le premier de ces points a été développé dans tout le corps de la lettre ; l’auteur ne veut pas la terminer sans indiquer au moins le second, et sans présenter ainsi à ses lecteurs un nouveau sujet d’encouragement dans les circonstances particulièrement difficiles où ils se trouvent.

            « Or je vous exhorte, frères, à supporter la parole d’exhortation, car ce n’est qu’en peu de mots que je vous ai écrit » (v. 22).
            Les Hébreux, par suite de leurs préjugés nationaux, auraient pu trouver dans cette épître bien des choses difficiles à accepter. Aussi l’auteur les prie-t-il de la supporter. Il l’appelle une « parole d’exhortation », ce qu’elle est aussi, puisqu’elle a pour objet unique de les affermir dans la foi. L’exhortation est continuellement mêlée à l’instruction ; et l’auteur la qualifie de brève, malgré sa longueur, eu égard à la variété, à l’étendue et à l’importance des sujets qu’il y traite, aux besoins de ses lecteurs, ainsi qu’à la plénitude de ses propres sentiments.

            « Sachez que notre frère Timothée a été remis en liberté : s’il vient bientôt, je vous verrai avec lui » (v. 23).
            Timothée avait donc été mis en prison, son empressement auprès de Paul lui ayant probablement attiré à lui-même quelque temps de captivité. Mais on peut traduire aussi : Vous savez que le frère Timothée est parti, qu’il est absent, ce qui est peut-être plus simple et plus exact. D’ailleurs, cela s’accorderait parfaitement avec les faits et écarterait ainsi toute difficulté. Je vous verrai avec lui, s’il vient bientôt. Nous ignorons si l’auteur de l’épître a pu accomplir ce vœu de son cœur.

            « Saluez tous vos conducteurs et tous les saints. Ceux d’Italie vous saluent » (v. 24).
            On présume que cette épître fut d’abord adressée à l’église à Césarée, pour être ensuite communiquée à toutes les autres églises de la Palestine.
            La salutation transmise ici provenait des frères qui étaient en Italie, qui appartiennent à ce pays, et non de ceux qui étaient venus d’Italie ; c’est le sens du grec (Matt. 15 : 1 ; 21 : 11 ; Act. 17 : 13) où l’original présente une locution toute pareille.

            « Que la grâce soit avec vous tous ! Amen » (v. 25).
            L’épître s’achève par le souhait que la grâce - la libre faveur de Dieu avec tous ses bienheureux effets dans le temps et dans l’éternité (12 : 28) - soit avec tous les saints auxquels elle était adressée.



D’après E. Guers