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REVENEZ A MOI (4)


Histoire de Jérémie le prophète et des derniers rois de Juda

LA FAMILLE MODELE
            DANIEL
            JEREMIE RETOURNE A L'ECOLE DE DIEU
            LE VASE BRISE
            LE COUP BRUTAL

 

LA FAMILLE MODELE

La quatrième année du règne de Jéhojakim, le pot commença à déborder : le grand conquérant s'était mis en marche. Après un long siège, Ninive s'était rendue au père de Nébucadnetsar.
            A la bataille de Carkemish (Jér. 46), le Pharaon Neco perdit la Palestine, de sorte qu'il s'en alla et ne sortit plus de nouveau de son pays (2 Rois 24 : 7). Bon gré mal gré, Jéhojakim devait changer de maître ; il devint un sujet de Nébucadnetsar. Celui-ci, victorieux, marcha du Nord sur la capitale de Juda.
            Un jour que l'ennemi se répandait dans le pays comme les flots d'une inondation, une troupe singulière arriva en toute hâte à Jérusalem pour y trouver un refuge (Jér. 35).
            Pendant près de trois cents ans, cette tribu errante n'avait jamais demeuré dans une ville. En effet, les Récabites habitaient sous des tentes, en marge de la vie ordinaire. Mais devant l'invasion d'un ennemi redoutable, ils s'étaient retirés dans la cité de David.
            Au temps de Jéhu, vivait un homme pieux du nom de Jonadab (2 Rois 10 : 15). Il vit la méchanceté qui régnait dans les villes. Des ivrognes, des idolâtres s'y trouvaient. Leurs enfants avaient constamment sous leurs yeux de mauvais exemples. Il préféra, pour le bien de sa famille, vivre séparé de la société et adopter un genre de vie extrêmement simple.
            Il recommanda aux siens de ne pas bâtir de maison, de ne pas ensemencer de champs, de ne pas planter de vigne, de ne pas boire de vin (Jér. 35 : 6-7).
            La famille de Jonadab, fils de Récab, obéit à son chef, dont les enfants, de génération en génération, suivirent la trace. Mais, comme nous l'avons vu plus haut, un jour l'ennemi les força à chercher refuge à l'intérieur des murs de Jérusalem.
            Quelle excitation s'empara des habitants de la ville quand arrivèrent les Récabites ! Les enfants durent tourner autour de ces gens étranges, ouvrir de grands yeux et rapporter à la maison plus d'un fait bizarre. Le plus curieux était que ces originaux ne buvaient pas de vin ! Imaginez la réaction des parents ! Ils pensaient probablement : S'ils viennent chez nous, c'est pour vivre comme nous.
            Mais, tout dépaysés qu'ils furent dans leur nouveau milieu, les Récabites ne firent pas comme les habitants de Jérusalem. Les coutumes de cette ville ne les attiraient nullement.
            Un beau jour, Jérémie lui-même se rendit vers eux, sur l'ordre de Dieu, et les invita à un festin. Le repas devait avoir lieu dans une des chambres de la maison de l'Eternel, chambre située au-dessus de la porte. Tous les Récabites acceptèrent avec joie d'y participer. Ils partirent en groupe avec Jérémie à leur tête ; la foule se pressait pour les voir. Ils arrivèrent à la porte du temple ; ils gravirent les escaliers conduisant à la chambre où le festin était préparé.
            Et quel festin ! N'importe quel habitant de Jérusalem en aurait été ravi. La table était chargée de gobelets pleins de vin. Buvez, dit leur hôte, quand tous furent rassemblés. Allaient-ils succomber à une si grande tentation ?
            Les Récabites promenèrent leurs regards sur la table. Après s'être examinés l'un l'autre, ils se tournèrent vers le prophète en déclarant tous avec fermeté : Non, nous ne boirons point de vin. Nous n'enfreindrons pas les ordres de notre père ; nous lui avons toujours obéi et nous continuerons à le faire.
            La foule n'eut pas longtemps à attendre pour que sa curiosité soit satisfaite. Jérémie apparut, le visage paisible, mais triomphant : Ces Récabites, dit-il, ont été fortement tentés de désobéir au commandement de leur père. Je les ai fait asseoir à une table chargée de vin, et c'est moi, le serviteur de Dieu, qui les ai invités à boire. Eh bien ! Ils sont demeurés fidèles à leur promesse. Quelle attitude différente de la vôtre ! L'Eternel vous a envoyé message sur message, pour vous faire connaître Son amour et les bénédictions qu'Il avait en réserve pour vous si vous écoutiez sa voix, et vous lui désobéissez constamment. Ne recevez-vous point instruction à présent ? 
            La foule n'était pas venue assister à une prédication. Elle commença à se disperser, toujours prête à répéter : « Nous n'y serons pas attentifs » (Jér. 6 : 17). Chacun se hâta de retourner chez lui, estimant que ces Récabites, après tout, étaient des gens fort peu intéressants.

 

DANIEL

Bientôt le conquérant tant redouté fit son entrée à Jérusalem. Jéhojakim n'essaya même pas de résister. Nebucadnetsar se contenta de visiter la ville pour voir ce qui valait la peine d'être emporté à Babylone. Son choix tomba d'abord sur les magnifiques ustensiles du temple (Dan. 1 : 2).
            Josias avait été si heureux de rétablir le culte dans la maison de l'Eternel, de remettre à leur place les tables, les vases, les ustensiles fabriqués par Salomon selon les instructions de Dieu Lui-même. Nous pouvons nous représenter la douleur de Jérémie en voyant les Chaldéens emporter une partie de ces objets pour orner les temples païens de Babylone.
            Ensuite Nebucadnetsar résolut d'emmener captifs des jeunes gens de la noblesse, remarquables par leur beauté et leur intelligence. Daniel les dépassait tous par ses qualités physiques et intellectuelles.
            Jéhojakim ne fut guère affligé de ce que les ustensiles avaient été ôtés de la maison de Dieu. Son seul regret était de faire une si grande perte de métaux précieux. Mais laisser partir pour toujours de jeunes princes était un désastre bien plus considérable. Comment se résigner à se séparer de Daniel que les Chaldéens allaient charger de chaînes ?
            Quand vint l'heure du jugement, Jéhojakim s'écria-t-il comme Caïn : « Mon châtiment est trop grand pour que j'en porte le poids ? » Quelle douleur, dans la Maison Rouge, quand Daniel franchit, prisonnier, le seuil du palais !
            On peut s'imaginer la scène de la séparation : les larmes, les adieux à Jérémie à qui Dieu avait révélé que la captivité de Babylone durerait soixante-dix ans (Dan. 9 : 25-27). Daniel devait vivre jusqu'à ce que l'Eternel ramène à Jérusalem une partie de Son peuple, mais le prophète lui-même ne verrait pas cet heureux retour.
            Daniel partit pour commencer sa nouvelle existence dans le palais du roi tant redouté. Il n'était qu'un jeune garçon, mais dans son cœur, il avait un but arrêté. Avec la même énergie que celle des Récabites, il refuserait d'agir comme les Babyloniens, il demeurerait en tout temps fidèle à son Dieu et chercherait toujours auprès de Lui du secours dans la détresse.
            Et c'est ainsi qu'à Babylone, trois fois par jour, il ouvrait tout grand sa fenêtre et s'agenouillait pour prier, le visage tourné vers Jérusalem (Dan. 6 : 10). Sans doute, Jérémie priait-il aussi pour Daniel plusieurs fois par jour, le recommandant avec ses compagnons aux soins du Tout-Puissant.
            En lisant le récit de la vie des déportés à Babylone, on peut se rendre compte de toutes les grâces que Dieu leur accorda en réponse à ces prières. Lisons avec soin à ce propos : Daniel 1, 2, 3, 6 et 9.
            Nébucadnetsar, ayant rétabli l'ordre à Jérusalem, retourna dans son pays. Par divers songes, il apprit que le Dieu de ses captifs était le Roi des rois.
            Daniel n'était qu'un jeune garçon et, de plus, un prisonnier, mais Dieu se servit de lui, comme Il s'était servi de Josias et de Jérémie, pour rendre témoignage à la vérité.
            Aucun garçon de nos jours ne devrait avoir honte de tenir ferme pour son Maître, en considérant l'honneur que Dieu fait rejaillir sur celui qui l'honore.
            Quant à Jéhojakim, il lui était impossible de se soumettre humblement aux Chaldéens et de payer un lourd tribut à un monarque si éloigné. Rebelle au Roi des rois, il se retourna et se révolta aussi contre son vainqueur, au bout de trois ans (2 Rois 24 : 1). Peut-être s'imaginait-il que le conquérant ne reviendrait pas de si loin pour châtier son infidélité. Mais il dut déchanter.
            Nebucadnetsar ne parut pas en personne au début de la révolte, mais l'Eternel envoya quelques-unes des nations voisines d'Israël, sujettes de Babylone, qui montèrent et combattirent contre Juda, jusqu'à ce que Nebucadnetsar juge le moment opportun de se mettre en campagne. Il vint bien résolu, cette fois-ci, à en finir avec Jéhojakim.

 

JEREMIE RETOURNE A L'ECOLE DE DIEU

Le châtiment s'approchait chaque jour et le peuple s'obstinait à répéter : Il nous est impossible de ne pas commettre l'iniquité, nous sommes ainsi faits. Dieu avertit alors son serviteur qu'il allait leur donner une nouvelle leçon en se servant de l'exemple du potier.
            « Descends dans la maison du potier, et là je te ferai entendre mes paroles » (Jér. 18 : 2). Jérémie s'y rendit selon l'ordre de l'Eternel. Son obéissance était toujours immédiate. Le potier était au travail. Le prophète l'observa en silence. L'artisan moulait l'argile sur son tour qui ronflait, et les vases sortaient de sa main habile.
            Mais bientôt, Jérémie remarqua que le potier, en train de façonner un magnifique vase, l'enlevait du tour sans que son travail soit terminé. Un tel récipient était sans valeur. Néanmoins, l'artisan le reprit soigneusement. L'argile durcie par endroits empêchait que le vase fût achevé.
            Le potier va le jeter, pensait le prophète. Mais non ! Il continuait à le palper et réussit à en sortir les morceaux résistants. Puis il l'écrasa entre ses doigts, en fit une masse compacte et recommença son œuvre. Cette fois-ci, le tour marcha sans arrêt, et bientôt Jérémie eut sous les yeux un vase complètement refait, splendide, un autre vase, tout prêt à l'emploi. Il était sans défaut, car le potier était habile et l'argile tendre.
            Le Maître de Jérémie prit alors la parole : Israël n'est-il pas comme ce vase inachevé ? Mes desseins à son égard étaient merveilleux. Mais ils ne purent s'accomplir, car mon peuple est dur de cœur. Cependant « comme est l'argile dans la main du potier, ainsi êtes-vous dans ma main, ô maison d'Israël » » (v. 6).
            Le prophète comprit la leçon que ce vase lui donnait. Il retourna à Jérusalem proclamer la toute-puissance de Dieu pour transformer des hommes jusqu'alors bons à rien.
            La ceinture ne pouvait se laver toute seule ; de même le vase ne pouvait se refaire de lui-même. N'en est-il pas ainsi pour nous ? Nous sommes aussi incapables de nous améliorer par nos propres forces que nous l'aurions été de créer notre corps.
            Le divin Potier nous dit aujourd'hui, car Il veut nous faire asseoir sur les bancs de Son école, à côté de Jérémie : Ne puis-je pas vous façonner comme un potier terrestre son argile ? 
            Chacun doit donner sa réponse. David déjà, bien avant notre prophète, avait formulé une prière qui pourrait servir de conclusion aux paraboles de la ceinture souillée et du vase inachevé : « Lave-moi et je serai plus blanc que la neige... crée-moi un cœur pur, ô Dieu » (Ps. 51 : 7, 10).
            Telle est la réponse que Dieu attend de nous, jour après jour. En effet, l'amour de Dieu est toujours prêt à nous combler de bénédictions. Jésus a dit à ses disciples : « Ce n'est pas la volonté de votre Père qui est dans les cieux qu'un seul de ces petits périsse (Matt. 18 : 14).

 

LE VASE BRISE

Le peuple ne tint aucun compte de l'exemple du potier. Chacun était pleinement satisfait de lui-même et désirait que rien en lui ne soit changé.  N'écoutez pas, disaient-ils l'un à l'autre,  étouffons sa voix.
            Aussi Jérémie essayait-il en vain de dominer le tumulte grandissant. Il n'aurait pas voulu crier ; il désirait ardemment user de paroles douces et toucher les cœurs en leur présentant l'amour merveilleux de Dieu dont la patience lui paraissait aussi extraordinaire que l'indifférence du peuple. Tout à coup, alors qu'il rentrait chez lui, plongé dans ses réflexions, Dieu s'adressa à lui. Jérémie s'arrêta court, écouta, puis se rendit aussitôt chez le potier. Il ne devait plus l'observer dans son travail, mais acheter un vase, une simple cruche (Jér. 19 : 1).
            Tous les anciens du peuple et les sacrificateurs furent convoqués. Ils vinrent sans se faire prier, quand ils surent que leur prophète portait une cruche. Ils furent conduits dans la vallée de Hinnom (v.  2), endroit fort peu agréable par les souvenirs qui s'y rattachaient. Le prophète ne regardait ni à droite, ni à gauche. Tout à coup, il fit halte au pied d'un gros rocher sur lequel il monta. Il avait sous les yeux des visages où se reflétait une curiosité impatiente, visages d'hommes marqués par le péché, bons à rien. Représentez-vous cette foule que le serviteur de l'Eternel parcourait du regard.
            Le prophète éleva sa cruche au-dessus de sa tête et la vida d'un seul coup. L'eau se répandit à ses pieds, fuyant de tous côtés en de nombreux ruisselets. Ecoutez la parole de l'Eternel», cria-t-il, comme le récipient a laissé échapper son contenu, ainsi Juda et Jérusalem seront vidées de leurs habitants quand l'invasion se sera produite.
            Puis il s'écria avec force, élevant bien haut le vase : « Ainsi dit l'Eternel des armées, je briserai ainsi ce peuple et cette ville, comme on brise un vase de potier qui ne peut être raccommodé » (v. 11). A ces mots, il lança la cruche qui vint s'écraser sur le roc. Désormais, il n'annoncerait plus la Parole de Dieu sans que tinte à ses oreilles le son d'un vase qui se casse. Et les anciens en percevraient toujours la résonance dans la voix suppliante du prophète : Ainsi dit l'Eternel, revenez, oh ! revenez à moi, car pourquoi péririez-vous ? 
            Les vieillards se retirèrent en silence. Jérémie resta seul dans la vallée ; il ne quittait pas des yeux les débris de poterie. Son oreille entendait une voix subtile : « Même quand je marcherais par la vallée de l'ombre de la mort, je ne craindrai aucun mal ; car tu es avec moi » (Ps. 23 : 4). Une telle consolation ne suffisait-elle pas ? Lentement le prophète retourna à Jérusalem où, dans sa prédication, il parla de la cruche brisée, dans le parvis de la maison de l'Eternel, afin que jeunes et vieux puissent l'entendre.

 

LE COUP BRUTAL

Pashkhur, le sacrificateur, premier intendant dans la maison de l'Eternel (Jér. 20 : 1), se trouvait parmi les auditeurs de la prédication sur le vase brisé. Condescendre à écouter Jérémie, était, sans doute, chose bien rare pour un si grand personnage.
            Etait-ce la scène du matin encore présente à son esprit qui l'incitait à suivre le prophète avec une attention toujours plus grande ? Le fait est qu'il se rapprochait lentement de l'orateur. Les reproches adressés au peuple et à ses chefs commençaient à l'irriter, car sa conscience était atteinte; la colère montait en lui. Quand Jérémie prédit que Nebucadnetsar déporterait tous les habitants de Juda et de Jérusalem, il ne put se contenir. Se frayant un passage jusqu'au serviteur de l'Eternel, il lui asséna un coup violent. Mais, lui-même, allait être victime d'une bien autre attaque : la Parole de Dieu qu'il avait entendue le transpercerait bientôt. N'est-elle pas « plus pénétrante qu'aucune épée à deux tranchants » ? (Héb. 4 : 12).
            Furieux dans son orgueil blessé, Pashkhur commanda de mettre Jérémie au bloc (Jér. 20 : 2). Ce bloc se trouvait à l'une des portes de la ville, porte que franchissait souvent le prophète pour pénétrer dans Jérusalem. Ce jour-là, chaque passant verrait la honte dont le prisonnier était accablé. A Anathoth, au repas du soir, la joie ne manquerait pas, car le prêcheur était enfin pris.
            Toute la nuit, Jérémie souffrit intensément. Mais les tortures qu'endurait son corps n'étaient rien en regard du combat qui se livrait dans son âme. Il dut se souvenir de cette nuit, où, enfermé dans le bloc, son Moi et Satan luttaient contre l'Esprit. Tout d'abord, l'Ennemi lui dit : Tu es la risée de tout le monde.
            Jérémie essaya de mouvoir ses membres endoloris : Je le sais bien, répondit-il, tout le jour, chacun se moque de moi.
            Ta famille est contre toi, continua Satan qui ne manque pas de s'en prendre à l'homme dans la détresse.
            C'est vrai, gémit le prophète, « tous mes familiers guettent ma chute, disant : Peut-être se laissera-t-il séduire » (Jér. 20 : 10).
            Pourquoi donc continues-tu à prophétiser ? fut la question pressante, posée à voix basse.
            Jérémie cria dans son agonie : Je ne parlerai plus ; l'opprobre m'a brisé le cœur.
            Au moment où s'échappaient de ses lèvres ces paroles d'incrédulité, l'adversaire recula. Un homme plus puissant que Satan, plus puissant que le Moi, se tenait debout dans l'obscurité. Au son de Sa voix douce et subtile, le cœur de Jérémie brûla au-dedans de lui.
            Je n'ai pas voulu parler ainsi, s'écria-t-il en proie au remords. Et toutes les lignes du Livre retrouvé, gravées en son cœur, se présentèrent à son esprit comme un feu brûlant, trop longtemps renfermé.
            Il faut à tout prix que je prophétise jusqu'à ma mort, dit-il. « L'Eternel est avec moi comme un homme puissant. Ne suis-je pas établi comme une ville forte, comme une colonne de fer ? Mes persécuteurs trébucheront ; ils ne prévaudront point contre moi » (v. 11).
            Jérémie, encouragé, oublia le bloc, oublia ses maux ; il entonna un cantique de louanges, comme Paul et Silas devaient le faire dans la prison, bien des siècles plus tard. « Louez l'Eternel », chantait-il dans les ténèbres, « car Il a délivré l'âme du pauvre de la main des méchants » (v. 13).
            Cependant, au moment du triomphe, Satan revint à la charge. La voix du prophète se tut brusquement.
            Vraiment, a-t-il été ta délivrance ? demanda le prince du mensonge.
            En fait, m'a-t-il débarrassé de mes liens ?  reprit le Moi trompeur de Jérémie.
            Une ombre s'était approchée, silhouette plus sombre que la nuit. Satan se glissait toujours plus près du prophète, qui n'eut plus devant les yeux l'Homme tout-puissant.
            Le jour de ta naissance fut un jour néfaste pour toi », reprit l'ennemi. Ton père, il est vrai, fut comblé de joie. Jour fatal, néanmoins ! 
             Je ne le sais que trop, répliqua Jérémie accablé, je voudrais n'être jamais né.
            Combien de fois, cette nuit-là, l'homme de Dieu assailli par Satan, fortifié par son Maître, fut-il entraîné, tour à tour, dans les profondeurs du découragement et sur les hauts sommets des divines consolations. Jérémie n'était-il pas un homme ayant les mêmes penchants que nous ? Brisé dans son corps, brisé dans son âme, il vit enfin le soleil se lever. Satan se retira vaincu. Et Dieu parla à son serviteur de Pashkhur qui, justement, descendait à la porte de Benjamin pour délivrer son prisonnier.
            Le prophète se leva péniblement, mais une flamme brûlait dans son cœur, quand il se trouva face à face avec l'intendant. Regardant fixement son persécuteur, il étendit le bras dans sa direction et prononça ces mots : L’Eternel n'appelle pas ton nom Pashkhur, mais Terreur. Sais-tu pourquoi ? Il va faire de toi une terreur, pour toi et pour tous ceux qui t'aiment (Jér. 20 : 3-4).
            Toute la nuit, cet homme sans courage avait essayé de se tranquilliser. Au matin, il portait un nom qui lui convenait, mais qu'il n'aimait pas ! A la seule mention du roi de Babylone, il tremblait de tous ses membres. Si la crainte ne s'était pas emparée de lui, il n'aurait prêté aucune attention aux paroles que Jérémie voulait encore lui adresser. Mais il fallait qu'il entendît ces prédictions : « Et toi, Pashkhur, et tous ceux qui habitent dans ta maison, vous irez en captivité ; tu iras à Babylone, et là tu mourras, et là tu seras enterré, toi et tous ceux qui t'aiment » (v. 6).
            A ces mots, Pashkhur réussit à s'éloigner de sa victime. Mais, dès ce moment, il ne connut jamais le repos. Moïse a tracé, mille ans auparavant, le portrait d'un tel homme, car le Saint Esprit connaissait Pashkhur avant qu'il fût né : « L'Eternel te donnera un cœur tremblant, et des yeux languissants, et une âme défaillante.  Et ta vie sera en suspens devant toi ; et tu seras dans l'effroi, nuit et jour, et tu ne seras pas sûr de ta vie » (Deut. 28 : 65-66).
            Rappelez-vous qu'une conscience chargée nous rend craintifs. Tous, nous avons besoin d'une « conscience sans reproche devant Dieu et devant les hommes » (Act. 24 : 16), si nous désirons nous coucher et nous endormir en paix (Ps. 4 : 8).
            Plus jamais, Pashkhur ne goûta un sommeil paisible. La nuit, des cauchemars l'effrayaient. Le jour, il se croyait poursuivi par un fantôme.

 

D’après Lettice Bell – « The boiling cauldron »

 

A suivre